Cette équation économique est pourtant simple : l’exploitation sexuelle se développe sur un marché où se rencontrent des fournisseurs, à savoir les réseaux et les proxénètes, ainsi que des producteurs, les personnes prostituées, et des acheteurs, que sont les clients de la prostitution.
Enfin, la ministre de l’enfance que je suis aussi est très préoccupée par l’augmentation de la prostitution des mineurs observée par les associations.
Je voudrais évoquer ici le cas d’Awa, rapporté par l’Amicale du Nid.
Awa est orpheline. Elle a été mariée à quatorze ans à un sexagénaire et violée par le fils de ce dernier. Ayant réussi à s’échapper et à quitter l’Afrique pour se réfugier en France, elle a été prise dans un réseau de traite des êtres humains, et elle est désormais enfermée et forcée, à seize ans, de se prostituer.
Comme elle, entre 6 000 et 8 000 enfants seraient prostitués en France. Les Amis du bus des femmes à Paris relèvent, par exemple, la présence croissante de très jeunes femmes parmi les prostituées de rue nigérianes.
La difficulté à disposer de données chiffrées précises sur la prostitution des mineurs témoigne de l’impossibilité de mesurer avec exactitude le nombre de personnes prostituées dans notre pays. Ainsi, alors que les mineurs ne représentaient, en 2010, que 0, 44 % des personnes mises en cause pour racolage public, d’après les chiffres de l’Office central pour la répression de la traite des êtres humains, les associations œuvrant sur le terrain font état d’une augmentation alarmante du nombre de prostituées mineures.
Nous ne saurions avoir les mêmes débats sur le consentement des personnes prostituées majeures quand il s’agit d’enfants. Or il y a toujours les mêmes clients, et les réseaux de prostitution se moquent des limites d’âge. Mesdames, messieurs les sénateurs, notre devoir est de protéger les enfants, les jeunes filles comme les jeunes garçons, de l’exploitation sexuelle.
Pour conclure, je rappellerai que la France a adopté une position abolitionniste au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, un engagement qui s’est traduit par le vote de la loi du 13 avril 1946 tendant à la fermeture des maisons de tolérance et au renforcement de la lutte contre le proxénétisme, dite « loi Marthe Richard ».
La position abolitionniste de la France fut par la suite confirmée par la ratification, en 1960, de la Convention des Nations unies pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui.
En dépit de ces avancées, la prostitution a toutefois conservé un caractère licite, et est restée tolérée par l’État, sous réserve de ne pas être exercée sur la voie publique et de ne pas troubler l’ordre public…
La marche vers l’abolitionnisme doit désormais prendre la forme de la politique équilibrée que nous vous proposons : prévention de l’entrée dans la prostitution ; accompagnement des personnes qui souhaitent en sortir ; interdiction de l’achat d’actes sexuels.
Il y va de l’honneur de notre pays, dont la position est par ailleurs très attendue par nos partenaires internationaux, de défendre avec force les droits des femmes et leur protection contre toutes les formes de violence.