Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 6 mai 2010 à 21h30
Loi de finances rectificative pour 2010 — Adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président de la commission des finances :

Si nous voulons aller jusqu’au bout de la transparence, si nous voulons assurer notre crédibilité, sans arrière-pensée, hors de tout artifice, alors il faudra qu’à l’avenir les programmes de stabilité soient actés par le Parlement, comme cela se fait chez nombre de nos partenaires, et qu’il y ait une parfaite cohérence entre les lois de finances et le programme de stabilité budgétaire. Les efforts que nous devrons collectivement fournir méritent ce débat public.

Face aux défis considérables que nous avons à relever, nos compatriotes ont besoin d’un langage de vérité. Ils ont assez de maturité pour l’entendre. Nous le leur devons. Encore faut-il faire preuve de pédagogie pour leur expliquer les enjeux et justifier les choix qui seront faits ! Ce qui est anxiogène pour les Français, c’est un certain discours convenu, qui ne donne pas le sentiment que l’on fait la vérité sur notre situation.

Au fond, la crise grecque doit être profitable pour l’Europe. Elle nous offre une belle panoplie d’instruments pédagogiques. Je vous demande, madame la ministre, monsieur le ministre, d’en faire bon usage, et de permettre ainsi à l’Union européenne de franchir une étape qualitative décisive.

Vous me permettrez à ce sujet, et pour conclure, d’exprimer un reproche et un vœu.

Un reproche, tout d’abord : est-ce vraiment faire preuve de pédagogie et de volonté de transparence que de soutenir que le coût du prêt à la Grèce sera sans effet sur la trésorerie de l’État ? Certes, nous ne devrions pas être contraints de recourir à des emprunts supplémentaires, cette année, pour couvrir le besoin de financement induit par la somme que nous verserons à la Grèce. Mais enfin, ces 3, 9 milliards d’euros que nous allons tout de même devoir débourser n’iront pas au remboursement de notre dette ! C’est autant d’allégement du recours à l’emprunt dont nous ne pourrons pas bénéficier !

Alors, je fais un vœu : que nous disions enfin aux Français où nous en sommes exactement ! Ce pays connaît des déséquilibres colossaux qui menacent gravement sa compétitivité, dans un processus que je n’hésite pas à qualifier de mortifère. Notre matière taxable, au premier chef notre industrie, s’enfuit vers des destinations plus hospitalières.

Il ne suffit pas de contrôler la progression des dépenses publiques : il faut les réduire ! Lesquelles ? Dans quelles proportions ? C’est maintenant que nous devons le dire, le décider et le faire !

Le Premier ministre a déclaré aujourd’hui que les dépenses de 2011 devront, en valeur, rester stables par rapport à celles de 2010. C’est une excellente orientation, mais je doute que cela suffise. Les normes en matière de déficit public, que nous allons sans doute adopter, resteront vaines en l’absence de volonté politique.

Madame la ministre, monsieur le ministre, il n’est pas une semaine sans que vos collègues présentent, devant le Sénat ou l’Assemblée nationale, des projets de loi qui créent de nouvelles normes, aboutissant toutes à des suppléments de dépense publique. Cette attitude est devenue insupportable.

J’ose espérer que le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche ne comportera pas de nouvelles normes précisant la composition des menus des cantines publiques et la proportion de produits supposés biologiques qu’ils doivent comporter. Si les produits alimentaires sont sains, laissons les gestionnaires de cantines composer eux-mêmes les menus !

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