Mes chers collègues, tels sont les motifs pour lesquels Michel Mercier, entre autres, et moi-même avions présenté la proposition de loi que je viens d’évoquer et que vous avez adoptée à une très large majorité le 2 février dernier.
Cette proposition de loi a été en très grande partie reprise dans son texte par le Gouvernement, qui y a ajouté des dispositions relatives aux pouvoirs des forces de sécurité, quand notre texte portait exclusivement sur les pouvoirs du parquet.
En votant la loi relative au renseignement, nous avons renforcé les pouvoirs dont la police dispose pour prévenir des attentats. Nous devons désormais donner les mêmes moyens au parquet, pour la mise en œuvre des enquêtes visant à rechercher les auteurs des attentats.
Faciliter les enquêtes des procureurs, tel est, de fait, le premier objet du projet de loi.
Celui-ci autorise des perquisitions de nuit et le recours à des techniques de renseignement, comme les IMSI-catchers – la captation à distance de contenus informatiques. Il rend aussi possible la création de nouvelles incriminations, permettant d’élargir les différentes motivations des enquêteurs pour renvoyer devant un tribunal les auteurs de crimes et délits en lien avec le terrorisme – en commission, nous avons adopté des dispositions en ce sens et émis un avis favorable sur des amendements ayant le même objet.
Il s'agit, ainsi, d’assurer la continuité de l’enquête. Il faut faire en sorte que le procureur saisi au titre de la flagrance ait les moyens de poursuivre son enquête suffisamment longtemps sans devoir s’en dessaisir trop vite auprès d’un juge d’instruction, la reprise du dossier du parquet entraînant une discontinuité susceptible d’être préjudiciable à l’enquête.
Il s'agit, enfin, d’accroître les peines infligées aux terroristes et de rendre plus sévères les conditions d’application de celles-ci. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu, dans le texte de la commission des lois, la criminalisation du délit d’association de malfaiteurs en vue de commettre un attentat. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons écarté tout aménagement de peine en faveur d’un terroriste : celui-ci ne pourra bénéficier ni de permissions de sortie ni de mesures de semi-liberté, de placement sous surveillance électronique ou de placement extérieur. Ainsi, les conditions d’exécution des peines seront rendues beaucoup plus sévères qu’actuellement pour les terroristes.
Nous avons décidé d’allonger la période de sûreté – ce point a donné lieu à de nombreux débats dans les jours qui ont précédé l’examen du texte. À l’heure actuelle de vingt-deux ans, la période de sûreté serait portée à trente ans pour les terroristes. Autrement dit, aucune demande de réduction de peine effectuée par un condamné à perpétuité avant trente ans de réclusion ne pourrait être examinée.
Cependant, nous avons souhaité aller au-delà de ce que nous avons nous-mêmes adopté le 2 février dernier et de ce que l’Assemblée nationale a voté. Pour être certains de l’efficacité du dispositif, nous proposons de rendre la procédure encore plus restrictive, en imposant, d’une part, que les parties civiles soient consultées et, d’autre part, que cinq magistrats de la Cour de cassation donnent leur agrément à la décision du tribunal d’application des peines. Ainsi, nous sommes convaincus qu’aucun terroriste dangereux ne pourra jamais être libéré.
Pourrions-nous aller plus loin ? Nous ne le pensons pas. Le mieux est l’ennemi du bien ! Soyons certains que des mesures portant la période de sûreté à quarante ou cinquante ans seraient écartées par le Conseil constitutionnel. Dès lors, en voulant trop bien faire, nous nous retrouverions à la case départ, ce qui rendrait notre travail inutile, alors qu’il est tellement important d’apporter à nos concitoyens la garantie que les criminels terroristes ne sortiront pas de prison.
Je dois dire aussi que nous avons envisagé l’application de la rétention de sûreté à d’autres délinquants ou criminels condamnés pour des faits en lien avec le terrorisme à des peines inférieures à la perpétuité qui, de ce fait, sortiront forcément un jour de prison : de la même façon qu’elle été introduite pour les criminels sexuels, la rétention de sûreté pourrait être appliquée aux délinquants et criminels condamnés pour terrorisme.
Enfin, ce texte vise, sur l’initiative de M. le ministre de l’intérieur, à accroître les pouvoirs de la police dans deux cas essentiels : celui du retour d’un individu de lieux proches des centres d’entraînement des terroristes – l’intéressé pourrait alors être assigné à résidence le temps nécessaire à la réunion d’un certain nombre d’éléments prouvant son implication – et à l’occasion de contrôles d’identité – une rétention de quatre heures serait alors possible. En tout état de cause, c’est ce qu’a souhaité la commission des lois.
Ainsi, ce texte me semble comporter des éléments très pragmatiques et très concrets, qui permettent de répondre à l’attente des policiers, des gendarmes et des juges, pour plus d’efficacité dans la lutte contre le terrorisme.