Certes, je voterai la motion tendant à opposer la question préalable, mais aurais-je voté le texte de la commission mixte paritaire si celle-ci avait abouti à un accord ? Non, même si le texte du Sénat était nettement plus acceptable que celui approuvé par le Gouvernement, par exemple en ce qui concerne la publication des listes de parrainages de candidats.
Le travail réalisé par le Sénat sur la campagne électorale était intéressant, mais même l’exercice, compliqué, habile, qui consistait à réduire la période intermédiaire, sans introduire ce « magnifique » principe républicain d’équité dans notre droit, n’était pas satisfaisant. En effet, cela entraînait, au fond, une réduction de la période durant laquelle tous les candidats peuvent bénéficier d’un temps de parole égal.
Finalement, je n’aurais donc pas voté ces textes et je veux, rapidement, vous dire pourquoi.
D’abord, parce que nous avons été particulièrement gâtés, durant ce quinquennat, en matière de modifications du droit électoral : modes de scrutin pour les sénatoriales, les municipales et les cantonales ; circonscriptions pour les cantonales et les régionales ; calendrier ; règles d’inscription sur les listes. Heureusement que, par définition, un quinquennat ne dure que cinq ans !
Ensuite, les textes dont nous débattons n’apportent aucune réponse au problème de fond de nos institutions, à savoir la concentration du pouvoir à l’Élysée. Or, ce problème explique justement le seul point qui intéresse les auteurs de ces textes : la multiplication des candidats au premier tour des élections présidentielles. Pourquoi tant de candidats se présentent-ils, même si leur nombre apparaît maintenant stabilisé ? Parce que l’élection présidentielle est l’élection mère ! C’est là que la dévolution du pouvoir se fait. Toutes les autres élections se trouvent dévaluées, d’où cette affluence de candidats.
Pour traiter le problème de l’augmentation du nombre de candidats, la première réponse a consisté à exercer une légère et discrète pression sur les parrains, pour qu’ils ne se laissent pas aller à donner leur signature à des candidats jugés non sérieux, car n’entrant pas dans le paysage habituel. La seconde réponse, celle qui suscite le plus de problèmes et de réactions, prévoit de remplacer, durant la campagne électorale médiatique, le principe républicain d’égalité devant les électeurs par le principe dit d’équité.
Lorsqu’un secrétariat d’État à l’égalité réelle a été créé, je me suis demandé ce que cet intitulé pouvait bien vouloir dire. Maintenant, j’ai la réponse : l’égalité réelle, c’est l’inégalité équitable !