Intervention de Hugues Portelli

Réunion du 31 mars 2016 à 10h30
Modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle — Adoption en nouvelle lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission et rejet d'une proposition de loi organique

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli :

Et nous savons parfaitement qu’à l’heure actuelle, le candidat qui se bat pour gagner l’élection présidentielle ne peut pas faire une campagne électorale avec 22, 5 millions d’euros. La somme est encore moins crédible dans l’hypothèse de l’organisation de primaires.

Comment font donc la Commission nationale des comptes de campagne et le Conseil constitutionnel ? Eh bien, ils font une cote mal taillée ! C’est au doigt mouillé qu’ils ont estimé à 300 000 euros le coût de la primaire pour le candidat élu en 2012. Ce n’est pas sérieux ! Même pour le candidat qui en est sorti vainqueur, on ne peut pas calculer le coût d’une campagne de la sorte.

Si nous avions travaillé en temps et en heure, nous aurions dit que la primaire a un coût, un coût que nous aurions chiffré et intégré ou non dans le coût de la campagne présidentielle. Pour faire cela, il faut s’y prendre à l’avance ! Cela ne se fait pas à la veille du scrutin, pas plus qu’on ne pose aujourd’hui les règles qui s’appliqueront en 2022.

Vous le voyez bien, le débat que nous avons aujourd’hui ne répond à aucune de ces problématiques. Ce qu’on nous propose, c’est de bricoler à la marge, de légiférer sur le temps qui sépare la validation des candidatures par le Conseil constitutionnel et le début de la campagne officielle, de définir les horaires des opérations de vote – faut-il ajouter ou soustraire une heure pour l’exercice du droit de vote des électeurs ? Ces aspects ne sont certes pas dépourvus d’intérêt, mais l’essentiel est ailleurs, et le texte n’en parle pas.

Nous avions déposé, Jean-Pierre Sueur et moi-même, il y a déjà pas mal de temps, une proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral. Le Sénat l’a votée, ce dont nous le remercions.

Il est évident que les sondages sont un élément clé de la campagne pour l’élection présidentielle. Il n’en est pas question dans la proposition de loi organique. La raison de ce silence est très simple : à partir du moment où ils sont au pouvoir, ceux qui gouvernent, qu’ils soient de gauche ou de droite, n’ont plus du tout envie qu’on réglemente les sondages. Ils sont en effet trop liés aux instituts de sondage qu’ils font vivre avec les moyens gouvernementaux – parfois même illégalement, s’agissant de certains ! –, pour qu’on ose toucher au magot ainsi distribué. On ne se risque même pas à demander à ces instituts les recettes de cuisine ni les ingrédients utilisés pour obtenir le résultat et fabriquer leurs quotas.

Les sondages d’opinion étant écartés du texte qui nous est soumis, nous en resterons aux règles qui remontent à 1977 et qui ont été vaguement mises à jour il y a une quinzaine d’années.

Mes chers collègues, vous ne manquerez pas de reconnaître en votre for intérieur que tout cela n’est pas sérieux et que nous donnons une image lamentable du travail législatif. Il n’est pas possible de continuer ainsi !

Reprenons-nous, essayons d’être un peu sérieux et honnêtes. Disons au Gouvernement que ce qu’il fait n’est pas bien, mais ce n’est pas mieux que ce qu’avait fait le gouvernement qui l’a précédé !

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