Intervention de Catherine Troendle

Réunion du 5 avril 2016 à 15h15
Dialogue avec les supporters et lutte contre le hooliganisme — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Catherine TroendleCatherine Troendle, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la question de la violence dans le sport a fait l’objet de nombreux travaux législatifs afin de renforcer la répression de comportements violents au sein des stades.

Je souhaite tout d’abord insister sur la différence existant entre les supporters et les hooligans. Ces derniers ne sont que des casseurs qui recherchent l’affrontement violent avec les autres, en particulier avec les forces de l’ordre. Toutefois, le supporter très engagé et très passionné, usuellement désigné sous le nom d’« ultra », a un rapport ambigu à la violence, et je pèse mes mots. Cela a été souligné dans le Livre vert du supportérisme.

Le présent texte concerne tous les sports, mais j’observe que les violences parmi les supporters touchent principalement le football et qu’il existe une spécificité à Paris.

En premier lieu, le cadre juridique actuel pour réprimer la violence dans les stades est déjà très complet.

En second lieu, je souhaiterais insister sur deux difficultés résiduelles auxquelles le texte a pour objet de répondre : la difficulté des clubs à faire face à certains comportements dangereux et la nécessité d’intégrer les supporters qui refusent la violence.

Le cadre juridique est articulé autour de sanctions pénales et de mesures administratives. Sans détailler toutes ces mesures, j’observe qu’il existe des dispositions spécifiques au sein du code du sport, notamment des infractions d’introduction ou de lancer d’engins pyrotechniques, des infractions réprimant les provocations à la haine ou à la violence, ou encore l’exhibition de signes ou de symboles racistes notamment. Ces peines peuvent être complétées de mesures d’interdiction judiciaire de stade, prononcées à titre de peine complémentaire des autres infractions précitées pour cinq ans au plus.

Ce dispositif pénal est complété par un dispositif préventif relevant de la police administrative.

Le préfet peut prononcer une interdiction administrative de stade à l’encontre d’une personne constituant une menace pour l’ordre public. Le ministre de l’intérieur peut également interdire un déplacement de supporters en cas de risque de trouble grave à l’ordre public. Enfin, une procédure spéciale permet de suspendre ou de dissoudre par décret une association sportive dont les membres ont commis des actes d’une particulière gravité.

Ces dispositions ont effectivement permis de faire diminuer les violences depuis la saison 2009-2010, fondatrice dans la lutte contre les violences au sein des stades, à la suite de la mort d’une personne en 2010. Actuellement, il existe 328 mesures d’interdiction de stade en cours sur tout le territoire, contre 342 pour la saison dernière, dont 160 interdictions administratives et 168 interdictions judiciaires.

Les interdictions de déplacements sont beaucoup plus nombreuses que les années précédentes, même s’il y a bien sûr un effet induit de l’état d’urgence. Toutefois, en février, une circulaire du ministre a rappelé aux préfets la nécessité de ne pas les utiliser de manière trop extensive.

Quelques difficultés persistent, auxquelles le présent texte vise à répondre.

Les clubs sportifs ont une obligation générale d’assurer la sécurité des personnes et des biens au sein des enceintes. Ils reçoivent ainsi communication des listes de personnes faisant l’objet d’une interdiction de stade. Cette information leur permet de ne pas vendre de billets à celles qui font l’objet d’une telle mesure ou de résilier leur abonnement. À l’intérieur du stade, les organisateurs peuvent se prévaloir des conditions générales de vente comme du règlement intérieur pour les opposer aux personnes ne respectant pas les règles imposées et les expulser le cas échéant.

Toutefois, aussi bien lors de mon déplacement au Parc des Princes que lors des auditions, plusieurs personnes entendues ont fait part des difficultés des clubs à répondre à leurs obligations en matière de sécurité dans la mesure où un certain nombre de comportements ne font pas l’objet d’une réponse répressive, alors même qu’ils peuvent présenter des risques pour la sécurité ou pour le bon déroulement du match : insultes, bagarres, etc. Dès lors, les clubs n’ont aucune trace de ces incidents et ne peuvent refuser ultérieurement de vendre des billets aux auteurs de ces incivilités. C’est ce qui a expliqué la création par le PSG d’un fichier non déclaré des personnes ayant un comportement « non conforme aux valeurs du club ». Ce critère, extensif et subjectif, était inadapté et a été justement abandonné à la suite des contrôles diligentés par la CNIL.

Je pense moi aussi qu’il est sage d’associer les supporters. J’ai rencontré l’association nationale des supporters et diverses associations de supporters. Ils s’inscrivent dans une démarche de responsabilité, et je pense qu’il ne faut pas qu’ils ratent cette opportunité de devenir de réels partenaires des pouvoirs publics et des clubs. Mieux les intégrer, comme le prévoit la proposition de loi, permettrait en effet de les responsabiliser.

Cette proposition de loi a fait l’objet d’un important travail de la part de nos collègues députés et du Gouvernement. Ce travail a permis de trouver un équilibre que je pense adéquat. La commission s’est donc inscrite dans cette logique.

En premier lieu, l’article 1er offre la possibilité aux clubs de répondre à leur obligation de sécurité en leur permettant de mettre en œuvre un traitement automatisé pour fonder un refus de vente ou des résiliations d’abonnement pour des manquements aux dispositions relatives à la sécurité et au bon déroulement des matchs figurant dans le règlement intérieur ou les conditions générales de vente. C’est une réelle avancée.

Sur mon initiative, la commission a précisé la rédaction de cet article pour faire disparaître toute ambiguïté dans la définition du traitement automatisé et pour en simplifier, bien évidemment, la formulation.

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