Intervention de Claude Kern

Réunion du 5 avril 2016 à 15h15
Dialogue avec les supporters et lutte contre le hooliganisme — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Claude KernClaude Kern :

… Le Havre-Lens en janvier dernier et Reims-Bastia en février.

Ces faits intolérables, condamnés par les associations de supporters que je qualifierai de « majoritaires », puisque les hooligans se disent également spectateurs et amateurs de sport, doivent trouver une réponse à la hauteur des actes : stricte et sans appel et, naturellement, répressive.

Je m’inscris en faux contre les objections consistant à affirmer que nous élaborons des lois circonstancielles : les derniers événements et la perspective de l’Euro 2016 motivent certes l’adoption rapide de cette proposition de loi, mais celle-ci s’inscrit dans un arsenal législatif mis en place tardivement en comparaison des autres pays européens.

L’histoire du hooliganisme français et de la réponse de la puissance publique est, en effet, faite de non-dits. La question des pratiques des ultras en France a pendant longtemps été étouffée, pour deux raisons majeures.

Première raison, la représentation sociale du hooligan « à l’anglo-saxonne ». Jeune, pauvre ou mal inséré socialement, alcoolisé, se revendiquant d’une idéologie d’extrême droite ou appartenant à des groupuscules nazis, le hooligan dans toute sa violence serait typiquement britannique. Or les ultras eux-mêmes le disent : ils sont d’abord fans de football, ne sont pas toujours délinquants et voient dans le hooliganisme « une culture, un style de vie ».

Seconde raison, les affrontements ont pendant longtemps eu lieu hors des stades en France, dans des zones reculées. Or les études ont montré que le hooliganisme français est identique à celui que connaît la Grande-Bretagne en termes de quantité, de fréquence et de degré de violence.

Pourtant, les autorités françaises se sont emparées assez tardivement du sujet, puisqu’il a fallu attendre les années 2000 pour voir s’esquisser des mesures probantes en matière de lutte contre le hooliganisme.

Depuis 2009, la création d’une division nationale de lutte contre le hooliganisme et l’adoption de dispositions réglementaires et législatives visant à prévenir les troubles à l’ordre public ont permis de réduire les actes de violence et de rouvrir le chemin des stades aux familles et aux amateurs d’un sport dont les valeurs sont assises sur le fair-play, la tolérance et le respect de l’autre, des valeurs que nous partageons tous dans cet hémicycle.

Néanmoins, les violences persistent, et le bilan de la saison 2014-2015 des championnats professionnels des ligues 1 et 2 fait état d’une recrudescence des actes de hooliganisme.

Pour mettre un coup d’arrêt à ces pratiques et éviter l’emballement des affrontements, il est indispensable de prendre de nouvelles mesures. C’est tout l’objet de cette proposition de loi, qui a été utilement étoffée par les députés en séance publique, à tel point que le nombre d’amendements déposés au Sénat est relativement faible au regard d’autres textes.

Possibilité pour les clubs professionnels de football de mettre en place un fichier des hooligans ; allongement de la durée de l’interdiction administrative ; transmission aux organismes sportifs internationaux d’éléments relatifs aux personnes interdites de stade ; limitation des possibilités de vente de cartes annuelles d’abonnement et possibilité d’autoriser la vente de billets nominatifs ; création d’une instance nationale du supportérisme ; peine complémentaire d’interdiction d’accès à toute zone de retransmission publique d’un match : autant de mesures qui contribueront à garantir le déroulement paisible des matchs, en laissant la place au jeu et au spectacle.

Certes, la proposition de loi est encore perfectible, et les amendements qui nous seront soumis sont, pour l’essentiel, empreints de bon sens et justifiés. J’en ai déposé quelques-uns et j’en soutiendrai certains autres.

Cependant, le texte présenté par la commission, pour reprendre l’excellent propos de Mme la rapporteur, « permet un équilibre bienvenu entre les nécessaires compléments devant être apportés aux clubs sportifs et le respect des garanties applicables en matière de traitements automatisés de données ».

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