Intervention de Cyril Pellevat

Réunion du 5 avril 2016 à 15h15
Dialogue avec les supporters et lutte contre le hooliganisme — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

Les supporters constituent l’âme du football professionnel. Sans eux, le football professionnel ne serait pas très différent d’un sport amateur ou d’un divertissement quelconque. Alors que la plupart des joueurs et des entraîneurs changent de clubs au cours de leur carrière, les supporters honorent leur engagement contre vents et marées et restent fidèles à leur équipe.

Je suis satisfait de voir arriver au Sénat cette proposition de loi renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme, texte comportant à la fois des dispositions répressives et d’autres plus novatrices, car axées sur le dialogue.

Nous sommes à deux mois de l’UEFA Euro 2016. Notre pays ayant la chance d’accueillir un tel événement, on attend de lui qu’il soit irréprochable en matière de sécurité.

Ainsi, dans son volet répressif, la proposition de loi décline un panel de mesures demandées par les clubs, désabusés face à certains comportements, heureusement minoritaires, de supporters.

La durée maximale de l’interdiction administrative de stade, déjà portée à six mois en 2010, puis à douze mois en 2011, atteindrait désormais vingt-quatre mois. En cas de récidive, elle passerait de vingt-quatre mois à trente-six mois.

Cette interdiction serait étendue aux fan zones, comme c’est déjà le cas pour les interdictions judiciaires de stade.

Par ailleurs, la proposition de loi tend à permettre aux organisateurs de refuser ou d’annuler la vente d’un titre d’accès au stade, pour raisons de sécurité.

Enfin, et c’est là une disposition nouvelle importante, les clubs seront autorisés à automatiser le traitement des données de supporters. Ce fichier automatisé des supporters sera néanmoins limité aux personnes contrevenant « aux dispositions des conditions générales de vente ou de règlement intérieur relatives à la sécurité et au bon déroulement de ces manifestations ». Le simple supporter ne posant aucun problème ne se retrouvera donc pas fiché ; en revanche, les hooligans le seront. La précision est de taille. À cet égard, je profite de l’occasion qui m’est donnée pour remercier Mme le rapporteur et M. le rapporteur pour avis de la qualité de leurs travaux.

Aujourd’hui, notre système est répressif, proche de celui de la Grande-Bretagne. Nous sommes conscients de l’importance d’aller vers un système axé sur le dialogue avec les supporters et les associations de supporters et permettant de construire une véritable relation de confiance. En effet, la confiance entre les différents acteurs du sport constituera un moyen d’améliorer la sécurité ; cette proposition de loi va dans ce sens.

Elle prévoit notamment de mettre en place, dans chaque club, des référents chargés des relations avec les supporters. Je suis pleinement favorable à un tel dispositif. Ces référents seront désignés après avis des associations respectant les valeurs du sport, en particulier celles qui bénéficient de l’agrément du ministère des sports. Chaque club professionnel aura donc l’obligation de désigner un ou plusieurs représentants officiels des supporters chargés des relations entre le club, ses supporters et les associations de supporters.

À l’échelon européen, l’UEFA partage cette idée, puisqu’elle a elle-même mis en place des responsables de l’encadrement des supporters, ou RES.

La responsabilité de choisir, sélectionner, former un tel responsable reviendra à la direction du club. Principal prérequis : être bien connu des supporters, entièrement accepté et à même de comprendre les groupes cibles. Ce responsable sera employé, dans les grands clubs, de préférence à plein temps. Dans les plus petits clubs, il bénéficiera d’un temps partiel ou interviendra bénévolement. Le dialogue avec les supporters commence avec leurs référents.

Pour avoir été responsable de l’organisation des matchs de l’Europa League – ce n’était malheureusement pas à Marseille –, je sais que le dispositif des RES fonctionne, permettant en particulier d’aider au debriefing précédant le match, qui réunit différents intervenants, à savoir, notamment, le club et les représentants de l’État et de la ville. Il peut permettre d’anticiper les éventuelles difficultés.

Le dialogue est également recherché avec la création auprès du ministère chargé des sports d’une instance nationale du supportérisme qui reconnaît le rôle des associations de supporters. Elle sera composée de l’ensemble des acteurs du sport.

Enfin, il était opportun de créer un statut du supporter, reconnu en tant qu’acteur du sport respectueux de l’éthique sportive et des valeurs éducatives et citoyennes du sport. Il est rappelé que le supporter doit participer au bon déroulement des manifestations sportives.

La création d’un statut de supporter et d’instances de représentation au sein des institutions et des clubs est un symbole important. Les supporters deviennent de véritables interlocuteurs. Il faut qu’ils soient associés aux discussions, que leurs voix soient prises en compte dans la gouvernance du sport, comme c’est le cas en Allemagne ou au Royaume-Uni. À ce titre, la représentativité des instances créées constituera un véritable enjeu.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, je voterai bien sûr ce texte, le dialogue avec les supporters me paraissant primordial. Nous assistons aujourd’hui en France à une baisse des niveaux de fréquentation des stades. L’incompréhension entre les acteurs grandit. Nous sommes en outre dans une période difficile de lutte contre le terrorisme, laquelle nécessite que des mesures sécuritaires soient prises. Dans ce contexte, la concertation me semble la meilleure des alliés.

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