Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les tragiques événements qui se sont produits dans l’Isère et en Ille-et-Vilaine, sauf pour vous préciser que malheureusement, depuis lors, vingt autres dossiers d’actes pédocriminels ont été ouverts dans des écoles en France ; 200 enfants seraient concernés, selon l’association Innocence en danger.
En cet instant, compte tenu des événements qui sont survenus à la maison d’arrêt de Corbas, j’ai comme vous, madame la ministre, une pensée vraiment émue pour toutes les familles qui seront privées d’un procès. C’est une souffrance supplémentaire infligée à ces familles, déjà confrontées à l’horreur des actes perpétrés sur leurs enfants, des enfants brisés.
Il est plus qu’urgent d’agir afin de protéger les enfants de prédateurs qui ne devraient pas être au contact de jeunes publics. Que de temps perdu !
Lorsque les ministres de la justice et de l’éducation nationale ont annoncé l’élaboration d’un projet de loi, j’ai immédiatement proposé mon propre texte de loi aux conseillers de la garde des sceaux, visant à rendre effective l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact avec des mineurs lorsqu’une personne a été condamnée pour des agressions sexuelles sur mineur, texte que j’ai déposé le 12 mai 2015.
Or quelle ne fut pas ma surprise, mais aussi mon désarroi, lorsque la démarche gouvernementale s’est réduite à un simple amendement, qui plus est intégré dans un texte sans rapport, le projet de loi DDADUE. Je ne peux pas m’imaginer un seul instant que le Gouvernement ait pris le risque d’un cavalier législatif sans connaissance de cause, une démarche que je qualifierai d’irresponsable au vu de la gravité des problématiques à traiter.
C’est alors que le groupe Les Républicains a pris ses responsabilités en inscrivant à l’ordre du jour ma proposition de loi dans la première semaine parlementaire, en automne dernier. Je remercie mes nombreux collègues qui l’ont cosignée, ainsi que le président du groupe Les Républicains, M. Bruno Retailleau. Je remercie également notre excellent rapporteur, M. François Zocchetto, qui a remanié ce texte avant son adoption à une large majorité à l’issue des débats du Sénat. Or Mme la garde des sceaux n’en a pas voulu, alors qu’elle avait trouvé le texte équilibré. Il a fallu attendre le mois de décembre 2015 pour que le texte du Gouvernement soit soumis à l’Assemblée nationale, puis au Sénat.
Fidèle au travail de fond qui avait été mené par M. François Zocchetto et la commission des lois – à cet instant, je voudrais également remercier le président Philippe Bas –, le texte du Gouvernement a été enrichi par les dispositions de la proposition de loi déjà votée au Sénat avec, comme objectif, de préserver le principe de la présomption d’innocence et d’éviter, bien évidemment, tout risque d’inconstitutionnalité qui reporterait encore le délai d’application d’un texte en réponse à de sordides affaires.
Il y a urgence, disais-je. Alors, oui, il a fallu faire un choix difficile lors de la commission mixte paritaire en ce qui concerne l’automaticité de la peine complémentaire. À titre personnel, j’étais attachée à cette automaticité. C’est d’ailleurs pour cela que j’en avais fait mention dans ma proposition de loi. Néanmoins, au vu de l’importance majeure de ce texte, il était de notre devoir de parlementaires d’aboutir à une conciliation, notamment – même si je le regrette un peu – en reculant sur ce point, afin d’éviter un échec de la commission mixte paritaire.
C’est donc dans le même état d’esprit, madame la ministre, que je soutiendrai l’amendement du Gouvernement, afin de déterminer par décret simple, en lieu et place d’un décret en Conseil d’État, les modalités d’application de l’article 11-2 du code de procédure pénale, ainsi que les modalités d’application de l’article 706-47-4 du code de procédure pénale relatif à la communication d’informations par l’autorité judiciaire aux autorités administratives concernant les personnes en relation avec des mineurs.
Désormais, mes chers collègues, je forme le vœu que ce texte de concertation soit rapidement mis en application, dans l’intérêt des plus vulnérables, les enfants.