Intervention de Danièle Karniewicz

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 28 mars 2007 : 3ème réunion
Evolutions du périmètre de la protection sociale — Audition de Mme Danièle Karniewicz présidente du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés

Danièle Karniewicz :

Abordant la question de l'approche globale des comptes publics, Mme Danièle Karniewicz a considéré que l'approche différenciée des comptes de l'Etat et des comptes sociaux n'est pas source de confusion. En ce qui concerne plus précisément la sécurité sociale, le suivi assuré par les services des caisses nationales, par l'Etat et par le Parlement permet de garantir la bonne gestion des comptes. L'approche globale des déficits, demandée au niveau de l'Union européenne, peut donc être assurée dans le cadre du système actuel.

Elle s'est déclarée opposée à la fusion des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale car la sécurité sociale, notamment sa branche vieillesse, reste financée par des cotisations sociales. Ainsi 80 % des fonds de la Cnav proviennent des cotisations et les pensions versées constituent une forme de revenu différé.

De plus, la sécurité sociale assure la couverture de risques pour lesquels les assurés cotisants peuvent s'ouvrir des droits individuels, alors que les dépenses financées par l'Etat constituent des engagements collectifs, qui peuvent varier au gré des gouvernements.

a également rejeté la possibilité d'appliquer aux dépenses de la sécurité sociale les principes d'enveloppes limitatives fermées applicables au budget de l'Etat. Selon elle, la fusion des lois de finances et des lois de financement porterait un coup fatal au paritarisme dans la gestion de la sécurité sociale.

S'agissant du rôle des partenaires sociaux, Mme Danièle Karniewicz a confirmé qu'ils gardent toute leur légitimité pour gérer la sécurité sociale, à la double condition d'une réforme du système de la représentativité syndicale et d'une obligation - notamment pour le patronat - de participer à la démocratie sociale.

Abordant la notion de « droits acquis par le travail », il lui a paru important de préserver le double caractère contributif et redistributif de la sécurité sociale française, notamment dans le domaine de la retraite. La nature contributive des pensions garantit l'adhésion de tous, quel que soit le niveau de revenu, au fonctionnement du régime général, tandis que les mécanismes redistributifs, comme le minimum contributif, la validation des périodes de chômage ou de maladie ou encore les majorations de pensions pour enfants, en assurent l'équité. Elle en a conclu que les droits au régime général, contrairement à ceux des régimes complémentaires, ne peuvent pas être assis exclusivement sur les droits acquis par le travail.

S'agissant du financement de la protection sociale, Mme Danièle Karniewicz est favorable à un élargissement de son assiette, afin de faire peser cette charge sur d'autres ressources que les seuls salaires et d'assurer un meilleur dynamisme général des recettes de la sécurité sociale. Un tel élargissement devrait toutefois se faire de façon différenciée selon les branches : un financement par l'impôt se justifie pour la branche famille et pour une partie importante des dépenses d'assurance maladie, alors qu'il importe de préserver une prépondérance des cotisations sociales dans le financement des retraites. L'élargissement de l'assiette de financement devrait vraisemblablement s'opérer par le biais de la création d'une forme de TVA sociale.

Il ne faut pas confondre système contributif et système assurantiel : le propre de la sécurité sociale française, qui est sans aucun doute un système contributif, est de reposer sur une logique assurantielle mâtinée de solidarité. Vouloir à tout prix poser une distinction stricte entre droits contributifs financés par le système assurantiel et solidarité financée par l'impôt risque de conduire à une forme de sélection des risques entre « bons cotisants » confiés au secteur privé et « mauvais cotisants » relevant de la sphère publique. D'ailleurs, en matière de retraite, le recours à l'épargne individuelle comme solution au problème du vieillissement démographique est un leurre : cette solution est sans aucun doute favorable au financement des entreprises mais pas au pouvoir d'achat des futurs retraités. Elle a donc réaffirmé son attachement au système de la retraite par répartition.

Elle a également plaidé pour une plus grande transparence des comptes sociaux, notamment en ce qui concerne les régimes spéciaux de retraite. L'absence d'information des Français sur le niveau de financement des régimes spéciaux par le régime général n'est pas une chose normale. Au moment où l'on demande aux salariés du secteur privé des efforts supplémentaires pour équilibrer leur régime de retraite, ils doivent savoir que ces efforts visent en réalité en grande partie - à travers la compensation démographique ou les mécanismes d'adossement - à rééquilibrer d'autres régimes dont les cotisants ne sont, eux, pas sollicités dans les mêmes proportions.

Abordant enfin la question de la gouvernance, Mme Danièle Karniewicz a estimé que le système des rendez-vous quadriennaux mis en place depuis la réforme des retraites de 2003 permet une gestion prévisionnelle efficace de la branche vieillesse. Elle a donc repoussé la création d'un comité d'alerte inspiré de celui mis en place pour l'assurance maladie, estimant qu'une telle instance n'est pas adaptée au cas de la branche vieillesse.

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