a rappelé que depuis trente ans, la France est confrontée au problème d'un taux de progression des dépenses de santé supérieur de 1,5 point à celui de l'évolution de la richesse nationale. D'où l'urgence d'une réflexion sur le périmètre de la protection sociale.
Interrogé sur la nécessité de favoriser une meilleure perception du coût de la protection sociale par chaque assuré, il a émis des réserves soulignant la possibilité d'effets pervers résultant d'une démarche individualisée de présentation des coûts. En effet, les dépenses de maladie sont concentrées sur un petit nombre de personnes, alors que plus de la moitié des assurés ne perçoivent que quelques centaines d'euros par an. Si l'on n'y prend garde, ces derniers risquent de parvenir à la conclusion qu'il n'est pas légitime de faire des économies en augmentant, par exemple, le recours aux médicaments génériques, dans la mesure où les sommes perçues de l'assurance maladie seront inférieures au montant de leurs cotisations.
En revanche, il est certainement utile de développer une présentation des dépenses par destination permettant de faire ressortir, par exemple, le coût de l'hôpital ou les coûts de gestion de la branche. Cette transparence a ainsi permis à l'assurance maladie de diminuer ses coûts de gestion de 100 millions d'euros.
a répondu par l'affirmative à la question de savoir s'il existe toujours un espace autonome pour la protection sociale au sein des finances publiques. Il s'est en revanche montré plus réservé sur la possibilité de tracer une frontière claire entre le contributif assurantiel d'un côté et les dépenses relevant d'une pure logique de solidarité de l'autre. Dans le cadre de la protection sociale de base, le fondement de l'assurance maladie est la mutualisation. Par essence, elle gère une logique de solidarité au sein du pays. Le partage assurance-solidarité apparaît plus facile à distinguer, en revanche, au sein de la branche vieillesse.
Pour la branche maladie, on relèvera que paradoxalement la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) est une prestation de solidarité financée par l'Etat, alors qu'elle se situe dans la sphère assurantielle complémentaire.
Dans le passé, le débat sur le partage entre assurance et solidarité, lancé en 1995, n'a pas abouti et s'est finalement concentré sur les recettes, et non sur la nature des dépenses.
Interrogé sur les pistes à explorer dans le sens d'une simplification et d'une plus grande transparence des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, M. Frédéric Van Roekeghem a estimé qu'en dehors d'une modification des règles du corpus organique, il n'existe pas de solution simple. Il a cependant pointé les lacunes du droit, donnant comme exemple l'impossibilité, en l'état actuel des textes, de désigner le payeur qui devra couvrir la créance de 90 millions d'euros détenue par les hôpitaux au titre du financement des soins d'urgence.
Il a insisté une nouvelle fois sur le fait que la mise en cohérence des calendriers d'élaboration des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale serait un élément majeur d'amélioration de la situation.
Par ailleurs, force est de constater que les mesures nouvelles inscrites en projet de loi de financement de la sécurité sociale ne bénéficient pas d'une très grande transparence. Bien souvent, seuls, les débats au Parlement permettent d'obtenir des éclaircissements sur leur portée réelle.
Puis M. Frédéric Van Roekeghem a souligné les limites de l'objectif de la loi quinquennale de 1993 tendant à enserrer l'évolution des dépenses de l'Etat dans une norme de progression, en l'occurrence les prix. Au-delà d'un affichage vertueux, tous les gouvernements, depuis le début des années quatre-vingt-dix, ont été tentés de contourner l'obstacle en pratiquant des débudgétisations et en accroissant la dépense fiscale.
Il a estimé qu'ainsi une grande partie de la difficulté à gérer le lien Etat-sécurité sociale prend sa source dans l'affichage de normes de progression de dépenses que les pouvoirs publics n'arrivent pas ensuite à tenir. En effet, notre pays omet souvent, lors de l'élaboration de projections pluriannuelles, y compris lors de la réforme de l'assurance maladie en 2004, de mettre en évidence le poids financier des mesures sous-jacentes qui seront nécessaires au respect de la norme fixée.
Au fond, l'enjeu pour les pouvoirs publics est d'accroître l'exercice vérité sur la situation du pays afin de parvenir à un consensus et de développer la maturité de nos concitoyens pour leur permettre d'accepter des mesures, le cas échéant, douloureuses.
Sur les instruments de gouvernance mis en place par la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale d'août 2005, M. Frédéric Van Roekeghem a reconnu le caractère utile de l'annexe B pour l'année n+1, dans la mesure où elle donne une direction à suivre. Il s'est cependant interrogé sur sa crédibilité, relevant le caractère incertain de l'évolution tendancielle (+ 2,5 %) prévue pour les dépenses d'assurance maladie au titre de l'exercice en cours. S'il est indispensable de se fixer des objectifs sur la base de projections, il est tout autant nécessaire de concevoir et de mettre en oeuvre les mesures qui permettront de les tenir. Nos mécanismes paraissent, ici, insuffisants. L'annexe B ne renseigne pas sur l'ampleur des mesures à prendre pour être en cohérence avec les objectifs à atteindre.
De ce point de vue, la solution consisterait à demander, par exemple dans le cadre de la commission des comptes de la sécurité sociale, une clarification de la présentation de l'évolution tendancielle de chaque branche et à mieux encadrer les calculs, quitte à ce que les hypothèses soient affichées sous forme de fourchettes. En d'autres termes, les annexes proposées au Parlement devraient, dans un souci de transparence, souligner les conséquences attachées à l'absence de mesures de redressement et expliquer ensuite le contenu des mesures proposées en indiquant le chiffrage sous-jacent.
Interrogé sur les solutions envisageables pour redresser les situations comptables du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et du fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles (Ffipsa) ainsi que pour purger la dette cumulée de l'Etat auprès des organismes de protection sociale, M. Frédéric Van Roekeghem a indiqué que cette dette sera, de manière certaine maintenant, inscrite en créance sur l'Etat dans le cadre de la certification des comptes. Il a salué, de ce point de vue, le travail et l'indépendance de la mission conjointe « inspection générale des finances/inspection des affaires sociales », qui a confirmé la qualité des créances. En principe, le remboursement de la dette ne devrait être qu'une simple opération de trésorerie, sans impact sur les comptes de l'Etat.
La question du retour à l'équilibre du FSV et du Ffipsa relève, pour lui, de la loi, et donc du seul Parlement.
Interrogé sur les instruments qui permettraient d'améliorer la gestion de la dépense sociale, M. Frédéric Van Roekeghem a estimé qu'il est indispensable de continuer dans la voie des programmes de qualité et d'efficience (PQE).
D'une façon générale, la question de la gouvernance de la sécurité sociale comporte trois parties. En premier lieu, le Parlement doit débattre du champ de la protection sociale. A ce titre, par exemple, il n'est pas normal que la question du remboursement ou non d'un examen aussi coûteux que l'ostéodensitométrie échappe au contrôle du législateur. En deuxième lieu, le Parlement ne pourra pas non plus éviter un débat sur le mode de financement de la protection sociale. La commission des finances du Sénat s'est d'ailleurs emparée du sujet en lançant la réflexion sur la TVA sociale. Enfin, en troisième lieu, la France doit rattraper son retard dans la mise en place d'indicateurs d'efficience. De ce point de vue, on doit déplorer le faible nombre de programmes d'efficience prévus dans le domaine de la santé, alors qu'il serait nécessaire, par exemple, de passer « à la paille de fer » la carte hospitalière.
A la lumière des exemples étrangers, il faut souligner, qu'en matière de TVA, la France ne possède pas de marge importante de majoration car son taux normal est déjà supérieur à la moyenne européenne, à la différence de l'Allemagne qui était, elle, en dessous de cette moyenne avant le relèvement opéré au 1er janvier dernier.