Intervention de Christophe-André Frassa

Réunion du 27 avril 2016 à 14h30
République numérique — Article 9 ter

Photo de Christophe-André FrassaChristophe-André Frassa, rapporteur :

Tous les amendements présentés posent la question centrale de la maîtrise de leurs données par les administrations et le meilleur moyen pour la garantir.

Dès lors, s’agit-il du logiciel libre ou du format ouvert ?

Pour ma part, très humblement, je ne pense pas que le logiciel libre réponde de manière tout à fait satisfaisante à cet enjeu.

De quoi parle-t-on ?

Comme le rappelait la note de la direction interministérielle des systèmes d’information et de communication – devenue, depuis, la direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication de l’État –, annexée à la circulaire du Premier ministre du 19 septembre 2012, le logiciel libre est un modèle de propriété intellectuelle assis sur les principes suivants : garantir la liberté d’exécuter le programme pour tous les usages ; garantir la liberté d’étudier le fonctionnement du programme et de l’adapter à ses besoins ; garantir la liberté de redistribuer des copies du programme ; permettre d’améliorer le programme et de distribuer ces améliorations au public pour en faire profiter toute la communauté. Et la note précise, j’insiste sur ce point, que cela implique le libre accès au code source du programme informatique.

Le terme « libre » ne doit toutefois pas être mal interprété : il ne signifie pas que l’usage du logiciel est libre de tout droit, seulement qu’il est soumis à un certain type de licences, comportant les droits et obligations décidés par la communauté créatrice du logiciel et auxquels l’utilisateur adhère, dès lors qu’il le télécharge.

Si aucune compensation financière n’est exigée au moment du téléchargement du logiciel, celui-ci n’est pas non plus nécessairement gratuit, son adaptation aux besoins spécifiques d’un utilisateur pouvant, au contraire, nécessiter un investissement important en termes de développement. Sa maintenance en condition opérationnelle a également un coût.

Pour reprendre la fameuse circulaire du Premier ministre, qui appelait non pas à donner une priorité aux logiciels libres, mais à les considérer de manière égale avec les logiciels « propriétaires », il est nécessaire, avant toute chose, de tenir compte des avantages et des inconvénients que les logiciels libres peuvent présenter en fonction des besoins exprimés par les usagers, et de l’offre disponible.

La meilleure solution ne sera donc pas toujours le logiciel libre.

Voilà ce que j’ai voulu signifier lors des débats en commission et quand j’ai défendu l’amendement de suppression de l’article 9 ter. Je n’ai rien voulu dire de plus. Je n’ai jamais dit que j’étais opposé aux logiciels libres.

Une solution pourrait également être de prévoir, dans les clauses d’un marché public, que le code source développé pour le besoin de l’administration lui revient. Pour moi, c’est un point très important. Il nous faut donc effectivement rechercher du côté du code des marchés publics.

Cependant, cela soulève des difficultés juridiques, car l’ordonnance relative aux marchés publics ne détaille pas les critères d’attribution : cela relève du domaine réglementaire. Le niveau législatif précise simplement que les critères doivent être « objectifs, précis et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution ».

Ces sujets devraient être traités dans un débat global sur cette ordonnance relative aux marchés publics, comme l’ont demandé la commission des lois et la mission commune d’information sur la commande publique. Ici, nous pouvons tous regretter que le Gouvernement ne souhaite toujours pas inscrire la ratification de cette ordonnance à l’ordre du jour de la séance publique.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, même si la commission partage les préoccupations de leurs auteurs, elle demande le retrait de ces amendements : soit ils pourraient être qualifiés de « neutrons législatifs » – pour reprendre la formule du président Mazeaud –, soit ils comportent des dispositions relevant du pouvoir réglementaire.

À défaut de retrait, l’avis de la commission sera défavorable.

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