Comme chaque année notre assemblée se livre au très utile exercice d'évaluation de la manière dont sont appliquées les lois que nous votons. Le Bureau du Sénat a confié à Claude Bérit-Débat la coordination de l'action des commissions en ce domaine et, comme l'année dernière, un débat sera organisé en séance publique le 7 juin prochain.
Pour mettre en application les lois que la commission des finances a examinées au fond, 103 mesures étaient attendues, contre 106 l'année dernière. 83 ont été prises, soit 81 %, en nette amélioration par rapport aux 57 % constatés l'année dernière. En revanche, seules 39 % ont été prises dans le délai réglementaire de six mois, contre encore trois quarts il y a deux ans.
Par ailleurs, 101 mesures étaient attendues au titre de lois votées au cours de périodes antérieures. 56 ont été prises. La plus ancienne mesure attendue date de la loi sur les jeux de 2010 et porte sur le fonctionnement du comité consultatif des jeux. Près de trois ans après, il reste encore sept mesures à prendre pour mettre en oeuvre la loi de séparation des activités bancaires de juillet 2013, sur les 79 prévues au départ.
Notre contrôle porte aussi sur la remise des rapports que nous demandons au Gouvernement. Cette année, nous avons reçu 12 des 18 rapports demandés. C'est seulement 66 % du total mais c'est tout de même mieux que l'année dernière, puisque nous n'avions reçu que deux rapports sur onze attendus. Depuis 2001, nous avons reçu 97 des 220 rapports demandés.
Il faut par ailleurs tenir compte des rapports récurrents et qui ne sont pas toujours déposés. Il en va ainsi de l'annexe au projet de loi de finances sur le fonctionnement de l'échange de renseignements en matière fiscale, qui n'a été annexée ni au projet de loi de finances pour 2015, ni à celui pour 2016. Éric Doligé, rapporteur des conventions fiscales, ne manque jamais d'interroger le ministre sur ce point. Nous l'avons évoqué la semaine dernière lors de notre audition de la direction générale des finances publiques (DGFiP).
Nous avons aussi évoqué lors de cette audition une annexe au projet de loi de finances qui aurait pu être utile pour éclairer notre débat de ce matin sur la proposition de loi d'Éric Bocquet tendant à assurer la transparence financière et fiscale des entreprises à vocation internationale, puisqu'elle porte sur la mise en oeuvre par l'administration fiscale des divers outils permettant de lutter contre l'évasion fiscale des multinationales.
Notre contrôle ne porte traditionnellement pas sur le suivi des habilitations que nous donnons au Gouvernement pour légiférer par ordonnance. Elles méritent pourtant que nous nous y penchions. La loi portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne (DADUE) de décembre 2014 comportait 15 articles prévoyant des habilitations à légiférer par ordonnance, notamment pour transposer des directives importantes comme celles relatives à l'Union bancaire ou la réglementation des assurances dite « Solvabilité II ».
Sur le fondement de ces habilitations, dix ordonnances ont été publiées. Huit projets de loi de ratification ont été déposés, à ce jour, mais aucun n'a été inscrit à l'ordre du jour. Par conséquent, ces ordonnances sont donc aujourd'hui en vigueur sans avoir été ratifiées par le Parlement.
Nous avons ratifié par un projet de loi dédié l'ordonnance qui adaptait les dispositions du code général des impôts applicables à la métropole de Lyon.
En revanche, la loi de finances rectificative de décembre 2014 a servi de vecteur à la ratification d'une ordonnance rendant applicables à Mayotte certaines dispositions fiscales et douanières, mais dans des conditions qui n'ont pas permis un examen de son contenu aussi approfondi qu'elle l'aurait nécessité en raison de la procédure retenue par le Gouvernement, qui a été celle du dépôt d'un amendement au cours de la navette - cette procédure présente par ailleurs l'inconvénient de dispenser le Gouvernement de présenter une étude d'impact.
Je voudrais à présent formuler trois remarques que m'inspire le contrôle de l'application des lois cette année.
Première remarque : le pouvoir réglementaire peut freiner la mise en oeuvre de réformes souhaitées par le Parlement. Je voudrais ici évoquer la fiscalité de l'économie numérique, sujet que notre commission suit avec beaucoup d'attention. L'article 67 de la loi de finances pour 2015 a réformé la taxe de séjour, et un décret a précisé les informations qui doivent être tenues à la disposition des logeurs, hôteliers, intermédiaires et propriétaires afin de permettre la collecte de la taxe.