En matière de coopération internationale, une convention de sécurité intérieure a été signée à Ankara, le 7 octobre 2011, avec la Turquie ; il serait grand temps de la mettre en action. Cette convention dort dans les tiroirs de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale depuis plus de quatre ans. Pensez-vous qu’un jour ou l’autre nous pourrons étudier cette convention ? En effet, s’il est important de travailler avec la Turquie, cette coopération serait sûrement bien plus efficace dans le cadre d’une convention.
Je souhaite évoquer un autre sujet d’inquiétude : les financements du terrorisme. Je sais, monsieur le ministre, que ce sujet ne relève pas directement de votre ministère. Néanmoins, je voulais simplement vous rappeler que vous aviez rejeté l’an dernier un amendement que j’avais déposé relatif aux cartes prépayées ; vous estimiez alors que ce n’était pas au cœur des dispositifs. Je constate avec intérêt que cela l’est devenu aujourd’hui : j’ai eu le tort d’avoir raison trop tôt.
Je voudrais consacrer le reste de mon intervention au sujet de la prévention du terrorisme. Monsieur le ministre, nous pourrons travailler autant que nous voulons sur la répression, nous savons tous que le problème ne peut être résolu uniquement ainsi. La prévention est une nécessité absolue.
La radicalisation est un sujet nouveau. Il faut donc former les formateurs ; c’est une question essentielle parce que nous n’avons pas droit à l’erreur. C’est pourquoi j’appelle de mes vœux une évaluation de l’ensemble des organismes en charge de cette formation, y compris, et surtout, de ceux qui viennent en aide aux familles. Beaucoup d’échos nous reviennent selon lesquels les familles de jeunes radicalisés sont isolées et mal encadrées.
Certes, si j’ai bien lu le détail des crédits, près de 600 millions euros d’aides doivent être versés aux associations. Toutefois, il n’est pas impossible que cela soit source d’un effet d’aubaine et que, bien évidemment, à terme, le résultat escompté fasse défaut.
Le travail de déradicalisation et de prévention est essentiel, faute de quoi nous continuerons à alimenter les réseaux de Daech, que ce soit sur notre territoire ou à l’étranger. Mme Latifa Ibn Ziaten et M. Mourad Benchellali répètent à longueur de journée qu’ils sont très isolés dans le travail de déradicalisation qu’ils accomplissent. Je pense, monsieur le ministre, qu’il faudrait mettre toutes ces bonnes volontés en réseau, les encadrer et les organiser. Il n’y a absolument pas de temps à perdre.
Cette maison accueille régulièrement, monsieur le ministre, une organisation dénommée « Talents des cités ». Chaque année, nous honorons le talent de jeunes issus des quartiers défavorisés. À cette occasion, notre hémicycle est blanc-noir-beur. Cette démarche est extrêmement intéressante ; à mon sens, il faudrait mobiliser les jeunes ayant reçu des prix « Talents des cités », les inciter à retrouver le chemin de ces territoires déshérités, à y réinvestir et à servir ainsi de bons exemples à des personnes qui, disons-le, sont quelque peu en perdition. Mettre en œuvre ces bonnes volontés, d’une façon qui ne soit pas vraiment institutionnelle, représente sans doute la meilleure chance que nous ayons de ramener des jeunes en voie de radicalisation à de meilleurs sentiments.
Je crois aussi qu’il nous faut utiliser tous les outils à notre disposition. Le Forum mondial contre le terrorisme, qui a été créé le 22 septembre 2011, juste après les attentats du 11 septembre, a ainsi développé un institut international implanté à Abu Dhabi, Hedayah, qui organise des programmes contre la radicalisation. Plutôt que de réinventer les choses, je crois qu’il faut utiliser ce qui existe déjà. Cet institut offre un certain nombre de programmes, tels des programmes de déradicalisation par le sport et des programmes de formation. J’estime qu’il faut s’en inspirer ; la France est d’ailleurs coprésidente de certaines commissions à l’intérieur de cet institut. Je tiens à préciser que, en dépit de son emplacement, il s’agit non pas d’un institut émirati mais bien d’un centre international auquel nous pouvons faire confiance.
Monsieur le ministre, la grande confiance que notre groupe a dans votre travail comme dans vos services fera mentir le proverbe normand que nous avons en partage : elle exclut pour l’instant toute petite méfiance ! §Nous voterons donc les crédits de cette mission.