Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le constat est partagé sur la situation de l’agriculture. Hormis le secteur de la viticulture pris globalement, toutes les filières connaissent d’importantes difficultés. Les prix mondiaux des céréales sont ceux que vous connaissez et les secteurs de l’élevage n’en finissent pas de sortir de la crise.
Les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » pour 2016 ne donnent pas de signe d’espérance. Ce rendez-vous, une fois de plus, n’est pas celui que l’on espérait. Il ne tient aucunement compte des nécessaires politiques d’investissement. Pour la cinquième année consécutive, les crédits de cette mission sont en régression. Les mesures palliatives sont bien connues : soit la sollicitation accrue, avec ses fragilités, du budget européen, soit la participation de la production agricole, via le CASDAR ; j’y reviendrai.
Les agriculteurs demandent surtout de la régulation, des garanties et des simplifications des règles, et ce au moment où le Farm bill va doter l’agriculture américaine de plus de 950 milliards d’euros pour la prochaine décennie.
Disposant de peu de temps, je n’évoquerai que quatre points qui me paraissent importants concernant le budget pour 2016.
Première remarque : la gestion des risques, tant climatiques qu’économiques, aurait dû être l’une de nos principales priorités. Le Fonds national de gestion des risques en agriculture, le FNGRA, n’est toujours pas doté en crédits d’État. Pis, le projet de loi de finances rectificative ponctionne les réserves du fonds, à hauteur de 255 millions d’euros sur les 320 millions d’euros disponibles.
L’assurance va ainsi être de plus en plus appelée à prendre le relais du Fonds national de garantie de calamités agricoles. Cela nécessitera de subventionner la souscription de contrats d’assurance à la bonne hauteur, soit, comme nous l’espérons, 65 %. Or les crédits européens, désormais seuls financeurs du dispositif, seront probablement insuffisants dans le cadre d’un développement pérenne de l’assurance.
Cette année déjà, une rallonge de 16 millions d’euros a été nécessaire au mois d’octobre. Si l’on veut généraliser l’assurance – c’est la clé –, l’enveloppe devra mécaniquement augmenter au-delà des 100 millions d’euros prévus en 2016.
Enfin, il faudra envisager de faire évoluer le dispositif. Une assurance agricole face aux aléas économiques doit être mise en place. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
Deuxième remarque : les crédits du programme consacré à la sécurité sanitaire baissent en 2016. Or les menaces sanitaires sont toujours présentes. Je pense bien entendu à la fièvre catarrhale ovine, la FCO, de retour depuis le mois de septembre. Seule une vaccination systématique sera efficace pour endiguer la maladie. Cependant, la fabrication massive des doses de vaccin prend du temps, et des crédits supplémentaires devront être dégagés. La précédente crise de la FCO, en 2006-2011, avait coûté jusqu’à 50 millions d’euros par an. On peut donc s’interroger sur la capacité à dégager en 2016 des marges de manœuvre budgétaires pour lutter contre la FCO, contre le retour malheureux – on a trop tendance à l’oublier – de la grippe aviaire et contre la présence de nombreux foyers de tuberculose bovine. Surveillons donc avec beaucoup d’attention les moyens du Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnemental.
Troisième remarque : les crédits consacrés à la forêt restent insuffisants pour 2016 ; cela a été dit.
Quatrième et dernière remarque : gardons à l’esprit que les ressources du CASDAR sont en très grande partie adossées à la production agricole et au niveau des cours, ce qui ne garantit aucunement la pérennité des budgets. Nous sommes trop tributaires de la productivité et du niveau des cours mondiaux pour ne pas être alertés sur la fragilité du CASDAR.