Je commencerai par trois réflexions liminaires.
Premièrement, alors que l’examen de l’article 18 a commencé par des considérations sur les communautés autochtones et le respect dû à nos compatriotes d’outre-mer, nous sommes saisis d’amendements tendant à restreindre le champ de ce que l’on pourrait partager avec eux ! Cela revient à dire qu’on les aime bien, mais à condition de leur donner le moins possible… Ayons conscience qu’il est tout de même un peu hypocrite de proclamer notre amitié à leur égard tout en les empêchant de bénéficier de richesses qu’ils ont permis à notre pays de conserver ! Je ne voudrais pas que certains commettent une telle erreur.
Deuxièmement, le criblage, qui est une activité importante des scientifiques, ne fait pas partie de la nouvelle utilisation. Il n’est donc pas affecté par les décisions que nous prenons. Les entreprises concernées peuvent donc être tranquilles ; elles n’auront aucune déclaration particulière à faire, et pourront continuer leur activité. Le criblage et la recherche font partie de leurs missions.
Troisièmement, comme Mme la secrétaire d’État et plusieurs orateurs l’ont indiqué, il n’y aura pas de rétroactivité. La loi française n’est pas rétroactive, sauf dans de très rares cas. Je vous renvoie à l’article 2 du code civil : « La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. » Le texte dont nous débattons respecte ce principe.
La commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 180 rectifié quinquies, qui a été présenté par notre excellent collègue Daniel Dubois.
Il est nécessaire de prévoir une procédure d’accès et de partage des avantages pour les ressources génétiques et les connaissances traditionnelles associées déjà en collection avant l’entrée en vigueur de la loi et qui feraient l’objet d’une utilisation ultérieure.
La France héberge des collections de grande ampleur. Les ressources contenues dans ces collections représentent l’écrasante majorité des cas d’utilisation de ressources génétiques et connaissances traditionnelles associées.
Ayons conscience que l’adoption d’un tel amendement aurait pour effet de vider de sa portée le dispositif APA.
L’adoption de l’amendement n° 63 rectifié, qui est rédigé différemment, aurait exactement le même résultat : la référence à la nouvelle utilisation serait supprimée et le dispositif APA serait privé de toute portée. J’en sollicite donc le retrait, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.
L’amendement n° 118 vise à restreindre radicalement le champ d’application de la nouvelle utilisation. L’avis de la commission est également défavorable, pour les raisons indiquées précédemment.
Les amendements identiques n° 64 rectifié et 181 rectifié quinquies visent restreindre l’application de la nouvelle utilisation au seul cas des changements de domaine d’activité.
Une nouvelle démarche APA ne serait requise qu’en cas de changement radical de domaine d’activité, par exemple si l’on décide d’utiliser pour la recherche médicale une ressource dont on servait auparavant pour chercher à créer une crème… Cela restreindrait fortement la portée du dispositif.
Encore une fois, le criblage, qui relève de la recherche fondamentale, n’est pas dans le champ des procédures d’autorisation. Les craintes des industries cosmétiques ou du médicament ne sont donc pas fondées.
La commission sollicite donc le retrait des amendements identiques n° 64 rectifié et 181 rectifié quinquies. À défaut, l’avis serait défavorable.
L’amendement n° 309, qui est très proche dans son objet de ces deux amendements, appelle le même commentaire.