Je serai d'une concision exemplaire et constante, car, comme l'écrivait Paul Éluard à propos d'un texte comme celui-là : « Le tout est de tout dire, et je manque de mots, et je manque de temps, et je manque d'audace... » Je n'ai pas le temps, les mots peut-être, l'audace sûrement, mais la voix fait défaut. C'est ainsi.
Je formulerai mes observations amendement par amendement, pour être le plus clair possible.
L'amendement de suppression est lié à la question de la non-rétroactivité de la loi pénale. Monsieur Portelli, j'ai été surpris d'apprendre cette nouveauté extraordinaire : la sécurité se trouverait dorénavant dans notre ordre constitutionnel alors qu'elle est simplement, je le rappelle, un objectif de valeur constitutionnelle. Je vous renvoie à la grande décision rendue en la matière et au rapport Vedel.
La liberté vient en tête de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la devise républicaine. Il ne faut jamais l'oublier, même si ce principe doit se concilier avec les autres objectifs.
Dans la défense de la liberté, la non-rétroactivité de la loi pénale - question bien posée par M. Fauchon -, je l'ai rappelé, est un fondement essentiel.
Il me suffirait de rappeler ce qui est advenu lorsque l'on a méconnu ce principe, en des circonstances heureusement radicalement différentes, mais pour la honte perpétuelle de ceux qui l'ont violé !
Peu importe qu'il s'agisse d'une mesure de sûreté ou d'une peine. L'aspect majeur, et je rejoins M. Fauchon sur ce point, c'est l'importance de l'atteinte à la liberté individuelle. Que l'on utilise le terme de rétention, qui existe déjà, de détention ou d'enfermement, lorsqu'une personne est, pour quelque motif que ce soit, retenue dans un lieu clos gardé par l'administration pénitentiaire, d'où elle ne sort qu'escortée, elle n'a plus de liberté individuelle. L'atteinte à la liberté individuelle est alors majeure et le principe de non-rétroactivité trouve sa place.
Voilà ce que je voulais dire. Vous aurez à en tenir compte. Reste à évoquer les différentes conséquences qu'il faut en tirer. Pour ma part, je suis convaincu que quelques-uns des excellents esprits de la commission des lois - je n'ai pas voulu utiliser le comparatif - partagent ce point de vue. Sinon, pourquoi M. Lecerf aurait-il déposé les amendements qu'il a déposés, et qui ont été votés par la commission ?