Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 31 janvier 2008 à 15h00
Rétention de sûreté — Article 6, amendement 27

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports :

Monsieur le rapporteur, je mesure, bien sûr, la portée de vos amendements et de votre argumentation : vous souhaitez que tous les médecins puissent exercer la fonction de médecin coordonnateur. Néanmoins, je suis obligée d'exprimer mon désaccord et de vous demander de bien vouloir retirer ces amendements.

En effet, en l'état actuel du droit, les médecins non-psychiatres qui ont suivi une formation spécifique - dont le contenu doit être défini par arrêté ministériel - peuvent être médecins coordonnateurs.

Cette souplesse avait été voulue, à l'origine, pour faciliter la mise en oeuvre du dispositif créé voilà dix ans. Aujourd'hui, elle n'est plus adaptée à la gravité des infractions commises par les personnes relevant d'une injonction de soins ; je crois, à cet égard, que tout le débat parlementaire a bien montré à quelle population nous nous adressions.

Les connaissances requises pour accompagner les personnes condamnées ne se limitent plus à la clinique des auteurs d'infractions sexuelles, car il faut désormais pouvoir suivre indifféremment des catégories de personnes présentant des troubles très hétérogènes qui nécessitent une compétence très large.

Compte tenu de ces difficultés et de l'extension du champ de responsabilité des médecins coordonnateurs, il est indispensable de cibler ces pratiques sur des médecins dont la spécialité est la plus appropriée.

Vous savez, par ailleurs, que le médecin coordonnateur doit transmettre au juge de l'application des peines ou au travailleur social les éléments nécessaires au contrôle de l'injonction de soins. À cette fin, il doit être capable de suivre l'évolution fine du patient condamné, qu'il convoque périodiquement, ainsi que son adhésion aux soins et l'impact de ceux-ci. Dresser un tel bilan requiert des connaissances tout à fait spécifiques.

De surcroît, les médecins coordonnateurs sont impliqués dans le choix du médecin traitant, à l'égard de qui ils jouent également un rôle de conseil : leur magistère doit donc être reconnu par ce dernier, dont ils sont les confrères. Tous ces éléments, ajoutés à la participation aux centres de ressources, plaident en faveur d'une professionnalisation accrue de la fonction de médecin coordonnateur qui s'accorderait mal avec une formation limitée, aussi intéressante soit-elle.

Le projet de loi tend à renforcer les missions des médecins coordonnateurs, qui devront coopérer à la réalisation d'évaluations périodiques du dispositif de l'injonction de soins ainsi qu'à des formations et à des études. Cela justifie de réserver cette fonction aux seuls psychiatres.

Pour autant, je n'entends pas priver du dispositif les médecins ayant acquis au cours des dernières années une expérience précieuse. C'est pourquoi j'ai accepté que l'Assemblée nationale les autorise à y prendre part.

Pour toutes ces raisons, monsieur le rapporteur, je suis défavorable à l'amendement n° 27.

Pour ce qui concerne l'amendement n° 28, le même souci de rigueur, appliqué cette fois-ci à la prise en charge thérapeutique des personnes condamnées, implique d'exiger au minimum un suivi médical de ces personnes ; celui-ci est même indispensable, notamment, en cas de prescription de médicaments. C'est pourquoi le projet de loi entend garantir à tous les patients suivis dans le cadre de l'injonction de soins une prise en charge médicale.

Pour autant, bien entendu, je ne désire pas écarter non plus les psychologues du dispositif. En effet, leur intervention peut s'avérer éminemment souhaitable. Elle doit cependant se concevoir dans le cadre d'un suivi pluridisciplinaire, après établissement d'un diagnostic médical et fixation d'un protocole thérapeutique et de prise en charge établis par un médecin. Comme actuellement, il appartiendra au médecin coordonnateur de recommander la prise en charge par un psychologue en fonction de la personnalité de la personne condamnée.

Compte tenu de ces éléments, monsieur le rapporteur, j'émets un avis défavorable sur ces deux amendements, que je vous demande de bien vouloir retirer.

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