Alors que nous avons maintes fois légiféré sur l’éolien au cours des années passées – très récemment encore avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, par laquelle nous sommes parvenus à un compromis –, voilà que l’on nous propose une disposition que je qualifierais volontiers d’« éolicide ». Non que je fasse partie de ceux qui soutiennent que l’on peut faire n’importe quoi, n’importe où, n’importe comment en matière de développement de l’éolien, mais je déplore que, depuis des années, on modifie la législation : on va, on vient, on déverrouille, on verrouille, on tricote, on détricote, on retricote… C’est le syndrome de Pénélope !
Avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, nous avions enfin donné stabilité et visibilité à la législation. Je pensais que tout avait été dit il y a quelques mois à peine. Or on remet ça une nouvelle fois ! Je fais d’ailleurs remarquer que cet article me paraît non seulement disproportionné avec sa règle des dix kilomètres, mais aussi inadéquat. L’inadéquation est évidente dès lors que le dispositif en vigueur semble satisfaire à la protection du patrimoine.
Faut-il rappeler que tout projet éolien fait l’objet d’une étude d’impact ? Le porteur de projet se doit de conduire une étude paysagère qui recense exhaustivement, à peine d’insuffisance, les enjeux de visibilité à l’égard des monuments historiques. L’architecte des Bâtiments de France aura, en l’état du droit positif, à rendre un avis simple au cours des diverses procédures. Bref, l’arsenal législatif et réglementaire permet déjà de refuser d’autoriser un projet éolien dès lors qu’il porterait atteinte à un monument historique.
Dans ces conditions, pourquoi exiger l’avis conforme de l’ABF ? Sauf le respect que j'ai pour cette profession et conscient de l’importance de ses missions, je me demande pourquoi il faut lui donner un pouvoir de décision égal à celui du préfet. Je considère pour ma part qu’il appartient au préfet, et à lui seul, de rester garant de l’équilibre nécessaire entre les différentes politiques publiques et les administrations.
Enfin, alors que le Sénat a soutenu des objectifs de développement des énergies renouvelables à l’horizon de 2020 et de 2030, quelle cohérence y aurait-il à condamner de fait l’une des énergies renouvelables les plus compétitives, les plus efficaces ?
Choisissons donc une position équilibrée, qui est de protéger le patrimoine sans toutefois verrouiller le développement des énergies renouvelables.