Intervention de Céline Parisot

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 8 juin 2016 : 2ème réunion
Modernisation de la justice du xxième siècle — Auditions sur le divorce « conventionnel » par consentement mutuel

Céline Parisot, secrétaire générale de l'Union syndicale des magistrats :

L'Union syndicale des magistrats (USM) n'est pas opposée au principe de l'allègement de la charge excessive qui pèse sur les tribunaux par la déjudiciarisation des contentieux où l'apport du juge est le plus faible. Le texte fait intervenir deux avocats dans le divorce par consentement mutuel, puis un notaire. Cette procédure est impossible si un mineur demande son audition par le juge ou si l'un des conjoints est placé sous protection. Ce sont autant de garanties, les avocats ayant un rôle de conseil, mais le coût s'en trouve multiplié par deux ! Le consentement devra être donné par écrit et un délai de réflexion de quinze jours, indispensable à nos yeux, est prévu avant la signature. Une passerelle vers le judiciaire est conservée tout au cours de la négociation. Le rôle exact du notaire reste flou, et sera sans doute léger. En fait, l'allégement de la charge de travail des magistrats sera faible, ce sont surtout les greffes qui y gagneront. Difficile en effet de déjudiciariser les contentieux qui prennent le plus de temps...

Première difficulté : la protection des intérêts de l'enfant, car la présence d'un enfant mineur n'empêche pas la procédure conventionnelle. Or on voit mal comment des parents qui se déchirent pourraient à chaque fois correctement défendre l'intérêt de leurs enfants. Détenteurs de l'autorité parentale, ils sont leurs premiers protecteurs, mais dans un divorce, chacun défend ses intérêts et peut les confondre avec ceux de l'enfant. Tous les juges des affaires familiales (JAF) ont déjà fait modifier des conventions sur lesquelles les parents s'étaient mis d'accord mais qui étaient nuisibles à leurs enfants, prévoyant par exemple des modalités de garde alternée absurdes.

La possibilité donnée au mineur de demander son audition nous paraît illusoire. S'il est trop petit, c'est impossible : les enfants les plus jeunes sont ainsi les moins bien protégés. S'il reçoit de ses parents l'information relative à ce droit - comment s'en assurer ? - l'imagine-t-on demander son audition par le juge au risque de modifier la procédure choisie par ses parents ? Pour l'USM, l'exception prévue pour les personnes vulnérables doit être étendue à la présence d'enfants mineurs.

Enfin, le nombre de contentieux après divorce risque d'augmenter. Un juge pose des questions sur les conséquences de la convention prévue et peut ordonner un renvoi pour donner un temps de réflexion. Mais il faut savoir faire preuve d'imagination pour décharger les juridictions... L'USM ne s'oppose donc pas par principe à cette déjudiciarisation, à condition qu'elle reste une option, que chacune des parties puisse lever à tout moment.

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