Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie le 17 mai dernier a donc relevé un véritable travail de coproduction entre les deux assemblées, qui plus est dans des délais contraints.
Il fallait en effet que le droit français de la répression des abus de marché soit rénové avant le 1er septembre prochain, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 18 mars 2015 qui a censuré notre système actuel permettant un cumul des poursuites et des sanctions pénales et administratives en matière de délit boursier.
Était en jeu la capacité de continuer à pouvoir, administrativement et pénalement, réprimer et punir ceux qui fautent et faussent par leur comportement et pour leur profit le bon fonctionnement des marchés boursiers, où seuls l’efficacité et l’intérêt économique devraient pourtant guider les placements.
Ce texte de loi permet donc à la fois d’éviter un risque juridique et de procéder à la transposition de la directive européenne du 16 avril 2014 relative aux sanctions pénales applicables aux abus de marché et d’une partie du règlement associé qui devait intervenir avant le 3 juillet 2016.
Il y avait par conséquent double urgence à moderniser notre droit en la matière.
Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, douze amendements adoptés par le Sénat sur l’initiative du rapporteur général ont pu être conservés dans le texte final.
Je voudrais notamment citer la réécriture intégrale de l’article 1er, qui détaille la procédure d’aiguillage des dossiers entre la voie administrative et la voie pénale. Cette nouvelle rédaction ne modifie pas sur le fond le mécanisme de la concertation obligatoire préalable entre le parquet national financier et l’AMF ni le principe de l’arbitrage par le procureur général près la cour d’appel de Paris. En revanche, le Sénat a transféré l’ensemble du dispositif au sein d’un seul et même article du code monétaire et financier en l’assortissant de délais extrêmement précis, tout en prévoyant que le silence gardé par une autorité autorise l’autre à engager des poursuites.
Par ailleurs, le nouvel article 2 bis, qui constitue une avancée majeure et attendue, permet l’ouverture du champ de la composition administrative aux abus de marché et rejoint en ce sens certaines dispositions du projet de loi dit « Sapin II ». L’extension du champ de la composition administrative est cohérente et permettra à l’AMF d’accélérer le traitement des affaires, lorsque celles-ci donnent lieu à une jurisprudence bien établie de la part de la commission des sanctions.
Parmi les dispositions retirées, certaines gardent leur pertinence et devront faire l’objet d’un texte plus large.
Il en est ainsi de l’article 1er bis A visant à sécuriser le droit de communication de l’AMF vis-à-vis des opérateurs de télécommunication qui faisait suite à une décision du Conseil constitutionnel du mois d’août 2015 ayant censuré la même procédure pour l’Autorité de la concurrence.
Enfin, si, pour des raisons de délai déjà évoquées, il fallait traiter très rapidement cette proposition de loi, nous devons envisager ce sujet du système de répression des abus de marché comme faisant partie d’un ensemble de mesures beaucoup plus larges rassemblées dans le projet de loi Sapin II.
À cette occasion sera notamment évoqué le statut des lanceurs d’alerte que nous avions abordé lors de la discussion de la proposition de loi que j’avais déposée avec Albéric de Montgolfier.
La capacité pour notre justice de poursuivre et condamner en France un dirigeant d’entreprise pour des faits de corruption à l’étranger, des dispositifs encadrés de transaction pénale pour les entreprises, l’encadrement de l’activité des lobbyistes et l’accroissement de la transparence pour lutter contre l’évasion fiscale des entreprises sont autant de sujets qui seront examinés dans quelques semaines par le Sénat, et qui marquent, me semble-t-il, l’engagement de ce gouvernement à lutter contre la corruption et pour la transparence des marchés financiers.