Les auteurs de cet amendement souhaitent exprimer les plus grandes craintes quant aux objectifs de cet article. Je rappelle d'ailleurs que les personnes interrogées dans le cadre du débat public pour connaître leur opinion sur le projet de loi soulignent l’importance de deux facteurs : le taux de majoration des heures supplémentaires, dont nous avons débattu la semaine dernière, et la crainte de plus grandes facilités données en cas de licenciement économique.
L’article que nous examinons met sur la table le principe d’un remplacement de l’appréciation du juge par des critères d’application quasi automatiques, ce qui nous pose problème. Nous avons également des réserves sur la nature de ces critères, qui nous paraîtraient pouvoir être interprétés assez librement, de façon parfois extensive et favorable aux seuls employeurs. En effet, la baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, qui peut être orchestrée et pas simplement subie, les pertes d’exploitation, qu’on peut, là aussi, présenter de façon avantageuse, et la trésorerie constituent des données insuffisantes. Le regard d’un juge ne nous semble donc pas superflu.
Nous ne sommes pas davantage favorables à l’introduction d’une différenciation entre les entreprises en fonction de leur nombre de salariés, qui pourrait créer un effet de seuil redoutable, lequel risque, à terme, d’être contre-productif.
Nos dernières réserves concernent le périmètre d’appréciation des difficultés économiques. Cela a été dit à l’instant, la commission des affaires sociales du Sénat a rétabli le périmètre d’appréciation des difficultés économiques, limité au secteur d’activité commun aux entreprises implantées sur le territoire national du groupe auquel elles appartiennent. Il ne peut être accepté de faire peser sur le seul salarié la charge d’une telle preuve. Surtout, il nous semble légitime de considérer qu’un groupe florissant à l’international a des obligations à l’égard des salariés de la filiale française en difficulté.
Maintenir cette limitation du périmètre d’application des difficultés économiques au territoire national nous semble pouvoir, à terme, constituer une incitation pour les groupes étrangers à licencier dans leurs filiales françaises.
C’est pour l’ensemble de ces raisons que nous demandons la suppression de cet article.