Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 22 novembre 2010 à 10h00
Loi de finances pour 2011 — Article 7

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la chasse aux niches fiscales recouvre, de temps à autre, des aspects assez particuliers. En effet, jusqu’à ce présent article 7 du projet de budget 2011, la taxe spéciale sur les contrats d’assurance ne portait aucunement sur les contrats d’assurance maladie « solidaires et responsables », autrement dit les contrats tendant à permettre aux assurés sociaux de bénéficier d’une couverture maladie complémentaire.

Cet article 7 va donc taxer les mutuelles et provoquer une hausse correspondante du montant des cotisations acquittées par les assurés sociaux pour pouvoir bénéficier d’une couverture complémentaire.

En guise de justification de la mesure prévue par l’article – suppression de l’exonération et fixation d’un taux de prélèvement de 3, 5 % –, on met en avant le montant de la dépense fiscale associée à la mesure, une dépense fiscale qui atteindrait 2, 2 milliards d’euros mais qu’il convient de diviser par le nombre de bénéficiaires, soit environ 28 millions d’assurés sociaux et plus de 57 millions de personnes prises en charge, ce qui situe la dépense fiscale entre 40 et 80 euros selon que l’on prend l’un ou l’autre des deux chiffres concernés.

Chacun peut ainsi mesurer ici l’importance de la niche fiscale que nous pouvons qualifier de « honteusement dérogatoire » !

Le Gouvernement aura donc réussi à mettre en question une niche qui bénéficie de manière universelle à la quasi-totalité de la population de notre pays ! Dans ces cas-là, c’est non plus une niche, mais une disposition naturelle et normale d’application du droit !

À ce stade du débat, il faut en effet se demander ce qu’est la dépense fiscale et ce qui peut définir, en droit fiscal, une niche. Si l’on prend la définition retenue, à des degrés divers, par la plupart des pays européens, et ainsi que le rappelle le rapport 2010 du Conseil des prélèvements obligatoires, il faut entendre, par dépense fiscale, « les dispositions législatives ou réglementaires dont la mise en œuvre entraîne pour l’État une perte de recettes et donc, pour les contribuables, un allégement de leur charge fiscale par rapport à ce qui serait résulté de l’application de la norme, c’est-à-dire des principes généraux du droit fiscal français ».

Le problème est que, lorsque la norme est l’absence de fiscalité, puisque la situation d’exonération concerne plus de 80 % de nos compatriotes, nous ne sommes plus dans un système dérogatoire.

Mes chers collègues, pour vous donner un autre exemple, cela reviendrait à considérer que doit être remise en question l’exonération des intérêts perçus et capitalisés par les particuliers au titre du Livret A, alors même que celle-ci est consubstantielle au produit financier concerné !

Dans le cas qui nous intéresse, le coup de rabot sur les niches va toucher directement tous les assurés sociaux de notre pays et se traduire par une hausse du montant de la cotisation mutualiste de 20 à 50 euros par an et par ayant droit.

Mes chers collègues, il y a dans notre droit fiscal des niches autrement plus discutables que celle-ci et dont la suppression ou la réduction produirait sans difficulté le 1, 1 milliard d’euros attendu de la disposition de l’article 7 du projet de loi de finances.

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