Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 22 novembre 2010 à 10h00
Loi de finances pour 2011 — Articles additionnels après l'article 10

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Il s’agit, bien évidemment, d’un amendement de suppression. En cette fin d’année 2010, nous disposons pour 2011 d’éléments d’appréciation que nous n’avions pas jusqu’à présent.

Mes collègues ont cité le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires. Je le citerai à mon tour pour mentionner les quatre objectifs recensés dans ce fameux contrat d’avenir signé avec la profession.

À cet égard, monsieur Houel, j’ai lu avec attention le rapport que vous-même avez commis au nom de la commission de l’économie, mais tout est résumé dans son titre : La TVA à taux réduit dans la restauration : une mesure qui fait ses preuves. Je vais vous prouver le contraire !

Par définition, la profession concernée ici exerce une activité non délocalisable, à la différence de la filière du livre numérique, évoquée tout à l’heure. Or elle avait reçu, avant même la baisse du taux de TVA à 5, 5 %, plus de 3, 3 milliards d’aides sociales et fiscales.

Le premier objectif du contrat d’avenir était l’emploi. Quel que soit le montant considéré, y compris celui que vous avancez dans votre rapport, monsieur Houel, le coût par emploi créé se situe entre 123 000 et 138 000 euros.

Je rappelle tout de même que ce Gouvernement, qui maintient avec acharnement le taux de TVA réduit dans la restauration, va supprimer, en trois ans, d’après la loi de programmation des finances publiques, 140 000 emplois aidés. Nous savons les dégâts qui en résultent dans nos territoires.

Le second objectif consistait à régulariser ou à blanchir, en quelque sorte, un certain nombre d’emplois clandestins. Il se trouve qu’en 2009 le nombre de procès-verbaux dressés par l’inspection du travail pour travail dissimulé était supérieur à celui de 2007. L’argument ainsi invoqué n’est donc pas valable.

Le troisième objectif portait sur la revalorisation salariale. Il y a eu ce que la profession a appelé « la prime TVA », versée aux salariés présents dans l’établissement depuis plus d’un an, limitée à 2 % du salaire de base avec un maximum de 500 euros par an. Les saisonniers, quant à eux, devaient avoir travaillé au moins quatre mois pour y prétendre.

Compte tenu du turn-over constaté dans la profession, très peu de salariés ont pu bénéficier d’une augmentation de salaire. De plus, la mesure est très difficile à chiffrer. Cet argument tombe donc également.

Au vu de ces éléments, le seul résultat de la TVA à taux réduit dans la restauration, c’est la progression du taux de marge brute : il a bondi de 3, 8 % entre 2008 et 2009, après une croissance de seulement 0, 8 % entre 2007 et 2008. Le bénéfice avant impôts a augmenté.

Le quatrième objectif concernait la modernisation des établissements. D’après ce que j’observe, les cafés disparaissent et nombre de ceux qui subsistent changent totalement de nature. Autrement dit, cette mesure ne suffit pas à maintenir à flot un secteur mis en difficultés par des habitudes de consommation profondément modifiées.

Pour paraphraser un slogan publicitaire d’une très grande entreprise américaine de consommation, je dirai que, cette mesure que vous maintenez, Chirac l’avait promise, Sarkozy l’a faite. Qui plus est, vous la maintenez contre vents et marées, alors que nos finances publiques sont sérieusement mises à mal.

Cela pose le problème, soulevé par le rapporteur général tout à l’heure, des dépenses fiscales. Pour certaines d’entre elles, vous les laissez bien au chaud, sans les évaluer de façon sérieuse.

Le groupe socialiste demande donc une évaluation générale des dépenses fiscales, afin d’en finir avec l’arbitraire du Gouvernement, qui classe et déclasse à sa guise. Vous nous la promettez pour juin. Décidemment, cela s’annonce comme le grand ménage de printemps !

Il faut une évaluation globale au regard de deux impératifs : l’efficacité économique et l’utilité sociale. Dans le cas présent, ni l’un ni l’autre ne sont respectés.

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