Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 28 juin 2016 à 15h00
Modalités d'inscription sur les listes électorales — Discussion générale commune

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les trois textes que nous examinons aujourd’hui, s’ils ont une assez faible portée symbolique, seront en revanche, je le crois, d’une grande utilité pratique pour l’ensemble de nos concitoyens dans l’exercice de leur droit de vote.

La création d’un répertoire électoral unique et permanent permettant une demande d’inscription au plus tard trente jours avant la date du scrutin constitue une avancée indéniable, à condition bien entendu que les communes bénéficient des moyens nécessaires.

Au fil des ans, nous avons déjà adopté différents textes législatifs pour faciliter l’inscription sur les listes électorales des jeunes Français atteignant la majorité, ou encore des personnes sans domicile fixe ou incarcérées. Cependant, une part incompressible de citoyens non inscrits résiste. On l’estime à 7 % environ des Français en âge de voter, soit environ 3, 5 millions de personnes.

Plus grande encore est la part des « mal-inscrits », qui représentent 6, 5 millions de personnes. Ce sont ceux de nos concitoyens inscrits sur une liste électorale qui ne correspond pas à leur domiciliation effective. Ce phénomène, difficile à évaluer, affaiblit considérablement le principe de représentativité.

« Dans la démocratie, chaque génération est un peuple nouveau », écrivait Tocqueville : à nous de nous assurer que les jeunes électeurs prennent le chemin des urnes. Il y va de la force du principe du gouvernement représentatif, qui est au fondement même de notre démocratie. Il y va donc également du bon fonctionnement de nos institutions. Quoi que l’on dise, on n’a pas trouvé mieux que la démocratie représentative, tant la démocratie directe, dont l’exemple a été précédemment vanté, peut être source de démagogie et de dérives populistes.

Aujourd’hui, les plus jeunes de nos concitoyens sont les premiers concernés par la mal-inscription, en raison de la mobilité géographique liée à leurs études, puis à leur insertion professionnelle. Nombreux sont ceux qui, une fois installés dans la vie, tardent à régulariser leur situation électorale, qui se stabilise souvent un peu après leur situation matrimoniale, et ne peuvent prendre part aux élections locales qui les concernent, c’est-à-dire à l’endroit où ils résident. Le répertoire numérique unique permettra donc d’adapter utilement notre système électoral à la mobilité géographique en exploitant mieux les technologies actuelles.

L’issue de la phase de transition a été portée à 2019 sur l’initiative de notre excellent rapporteur Pierre-Yves Collombat, qui, dans l’examen de ce texte, a apporté son expérience d’élu local. Profitons-en, tant qu’il en reste au sein de la Haute Assemblée… Ce report devrait laisser aux communes et à l’INSEE un laps de temps raisonnable pour s’adapter à ces nouvelles exigences.

Le remplacement des commissions électorales par des commissions de contrôle ainsi que l’introduction d’un recours préalable obligatoire devant elles, mesures proposées très justement, elles aussi par M. le rapporteur, permettront de désengorger l’office du juge des élections. La sincérité du scrutin s’en trouvera d’autant plus renforcée.

Certains considèrent qu’une plus grande liberté devrait être accordée aux citoyens pour voter dans leur ville d’origine, ce qui est déjà possible s’ils y possèdent un bien ou y acquittent une imposition. Il est vrai que, pour quelques-uns de nos concitoyens, les périodes de scrutin sont aussi l’occasion d’un bref retour au pays natal, de retrouvailles et d’échanges autour de grandes tablées familiales.

Mes chers collègues, faut-il pour autant faire du vote un vecteur d’identités, en une période où les questions identitaires accaparent déjà trop le débat public ? Notre puissant attachement à la République nous conduit à refuser tout autre facteur d’identification et de cohésion que l’idéal républicain. Chaque citoyen doit être incité à prendre une part active à la vie de la cité où il réside, et non pas à celles où il est né ou où il a grandi, même si le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas.

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