Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les mesures contenues dans les articles 8, 9 et 10 de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, ou loi TEPA, ont constitué, en leur temps, une sérieuse amorce de la réforme de la fiscalité du patrimoine.
En effet, alors que le lien entre travail, emploi, pouvoir d’achat et imposition du patrimoine demeure relativement ténu, ces trois articles ont procédé à une réforme sensible de l’imposition des successions et donations. Au demeurant, ils constituent une sorte de concentré de ce que l’on appelle de manière abusive depuis 2007 une « réforme ».
Dans un premier temps, on a fait beaucoup de bruit autour d’une idée simple. Il s’agit de s’apitoyer sur les personnes qui, du fait des lois de la nature, se trouvent confrontées au problème de règlement d’une succession. Et, en vertu du principe selon lequel il ne faut pas ajouter du malheur à la douleur de la perte d’un être cher, on met en place une mesure visant à relever les seuils d’exonération de droits, tout en assurant l’exonération intégrale de la part du conjoint survivant. Une telle disposition est a priori évidemment populaire, sauf que le deuxième volet de l’affaire a été soigneusement caché.
En effet, ce que nous constatons dans un deuxième temps est d’une tout autre nature.
D’abord, dans les familles dotées d’un patrimoine important, le principe de l’exonération de la part du conjoint survivant constitue un sacré avantage fiscal qui permet de réduire les droits de l’ensemble de la succession, et ce de manière proportionnelle.
Ensuite, la mesure n’avait évidemment de portée que pour les successions productrices de droits. Or, comme chacun sait, seul un nombre minoritaire de successions étaient concernées par cette disposition de la loi TEPA.
Mais, surtout, dans un troisième temps, la mesure s’est révélée transposable aux donations ; là, c’est le jackpot ! Car les donations entre vifs ont sans surprise connu un grand développement depuis 2007 au motif, d’ailleurs prévisible, que cela permettrait à quelques familles de bonne réputation dotées d’un patrimoine important de procéder à de fructueuses opérations de donation-partage assorties d’une belle optimisation fiscale.
Le démembrement tout relatif d’un patrimoine familial permettait d’éviter d’acquitter le moindre droit sur la donation, mais aussi de réduire les droits à payer au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Les conséquences de la loi TEPA sur le montant des droits de succession perçus sont de 700 millions d’euros. Pour les donations, nous sommes passés d’une recette de 1, 4 milliard d’euros dans la loi du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 à une recette attendue de 800 millions d’euros dans la loi de finances pour 2011 et ce, sans le double effet de la réduction des droits à payer l’ISF que nous évoquions précédemment.
Compte tenu de l’ampleur de cette déperdition de recettes, nous ne pouvons évidemment que proposer de ramener le montant des exonérations à un niveau plus conforme à la réalité des patrimoines et des capacités contributives des éventuels redevables.
C’est d’ailleurs le sens de cet amendement, que nous vous invitons à adopter.