Intervention de Philippe Bas

Réunion du 5 juillet 2016 à 14h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d'alerte — Article 10

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale :

La décision du Conseil constitutionnel de 1982 trouve des fondements très forts dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ainsi que dans les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.

Quand quelqu’un subit une condamnation, il n’est pas condamné à perpétuité : il est sanctionné, il purge sa peine et il redevient un citoyen normal. C’est la raison pour laquelle le juge constitutionnel n’admet pas de restrictions à l’éligibilité au-delà de quatre motifs : l’âge, c’est-à-dire la minorité ; l’incapacité – une personne atteinte de désordres psychiques graves peut être écartée pendant la durée, parfois définitive, de ses troubles de la possibilité d’être électeur ; la nationalité, mais, dans ce cas, on ne porte pas atteinte aux droits d’un citoyen français ; enfin, le Conseil constitutionnel a ajouté des raisons relatives à la préservation de la liberté et à l’indépendance de l’électeur.

En l’espèce, nous ne sommes pas dans l’un de ces quatre cas. Nous devons être attentifs, en dépit du caractère très séduisant de cet amendement, à ne pas introduire de dérogations à ces grands principes.

Enfin, j’insiste sur un point : pourquoi rendre inéligibles uniquement les personnes faisant l’objet d’une condamnation pour manquement à la probité ? Bien sûr, il est très grave d’avoir manqué à la probité, mais pourquoi ne pas étendre cette exclusion aux personnes ayant fait l’objet d’une condamnation pour attouchements sexuels sur des enfants, ou pour participation à une association de malfaiteurs en vue de commettre un attentat terroriste, ou que sais-je encore ?

De très nombreuses condamnations peuvent nous paraître rendre une personne indigne d’être élue, mais en distinguant, pour l’éligibilité, les condamnés pour manquement à la probité des autres, nous créerions une différenciation entre citoyens ayant purgé leur peine et dont nous pouvons espérer qu’ils aient repris leur place au sein de la société et se comportent désormais en citoyens à part entière. Or cette différenciation ne repose sur rien de solide !

C’est la raison pour laquelle nous devons écarter toute tentation démagogique et rejeter cet amendement.

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