Intervention de Daniel Gremillet

Réunion du 6 juillet 2016 à 21h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d'alerte — Article 30 C, amendements 268 3 30

Photo de Daniel GremilletDaniel Gremillet, rapporteur pour avis :

Par l’amendement n° 268, Mme Lienemann propose une nouvelle rédaction de l’alinéa 3 de l’article 30 C n’exigeant plus que des critères et modalités de détermination des prix dans les contrats entre agriculteurs et industriels, dits contrats LMA, fassent référence à des indicateurs d’évolution des coûts de production en agriculture. L’adoption de cet amendement permettrait simplement que des indicateurs de marché connus servent de référence à la négociation des prix, mais il n’y aurait aucune obligation d’utiliser de tels indicateurs, si bien que le dispositif ne serait absolument pas contraignant. Les parties pourraient tout aussi bien utiliser d’autres indicateurs. Finalement, ce dispositif fonctionnerait moins bien pour protéger les agriculteurs que le texte de l’article 30 C.

Je veux rassurer Mme Lienemann : l’article 30 C ne s’applique qu’à la contractualisation agricole entre producteurs et industriels. Les coopératives ne sont pas dans le champ d’application du dispositif et conservent leur statut propre.

L’amendement n° 537 rectifié vise à supprimer plusieurs ajouts de l’article 30 C apparus en cours de discussion : la mention précisant que les indices publics de prix utilisés dans les formules de prix des contrats agricoles peuvent être régionaux, nationaux ou européens ; l’obligation pour les acheteurs de communiquer chaque mois aux organisations de producteurs les évolutions des indicateurs et indices servant de base de calcul au prix payé aux agriculteurs. Ces suppressions affaibliraient la portée de l’article 30 C, mais nous y reviendrons plus tard. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’adoption de l’amendement n° 280 complexifierait la rédaction des « contrats LMA » entre agriculteurs et industriels. Elle obligerait à prendre en compte les indicateurs de coût de production en agriculture dans les formules de prix, à condition que ces indicateurs soient représentatifs des bassins de production. L’intention est louable, mais le risque, en introduisant cette exigence supplémentaire, est qu’il n’existe aucun indicateur utilisable en pratique dans les contrats agricoles. D’ailleurs, la notion de bassin de production peut être elle-même sujette à débat.

Finalement, je pense préférable que nous nous en tenions à l’exigence de faire référence à des coûts de production en laissant les acteurs de la contractualisation choisir ces indicateurs. Il s’agit déjà d’une avancée par rapport aux contrats actuels, qui ne doivent pas faire référence à une telle variable. Là encore, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 281 a pour objet de supprimer la référence au rôle que peuvent jouer les accords interprofessionnels ou l’Observatoire des prix et des marges dans l’établissement d’indicateurs pouvant être utilisés dans la contractualisation agricole. L’exposé des motifs de l’amendement précise qu’en citant les accords interprofessionnels ou l’observatoire on introduirait une dimension restrictive des indices et indicateurs pouvant servir de référence dans les contrats. C’est inexact : les parties peuvent librement choisir les indicateurs, du moment que ceux-ci sont publics et connus de tous. Citer les accords interprofessionnels et l’Observatoire des prix et des marges revient à encourager ces organismes à publier de tels indicateurs et à inciter les parties au « contrat LMA » à les utiliser. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

L’amendement n° 282 ne tend pas, quant à lui, à remettre en cause le fait que les indices publics de prix de vente des produits agricoles devront figurer dans les formules de prix des contrats entre agriculteurs et industriels. Il a simplement pour but de préciser que ces indices pourront notamment être établis par accord interprofessionnel ou par l’Observatoire des prix et des marges. Or l’alinéa 3 de l’article 30 C prévoit déjà qu’il ne s’agit là que d’une simple possibilité, et non pas d’une obligation. La rédaction proposée n’apporte donc rien de nouveau. C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

L’amendement n° 24 rectifié bis a pour objet de supprimer l’obligation, prévue à l’alinéa 3, de communiquer mensuellement aux organisations de producteurs les évolutions des indices de prix et des coûts de production qui ont servi au calcul du prix payé au producteur dans le cadre de la contractualisation agricole. En contrepartie, les auteurs de l’amendement demandent que le contrat-cadre passé entre l’organisation de producteurs, l’OP, et l’acheteur prévoie la communication à l’OP, sur une base mensuelle, des ventes en volume et en valeur réalisées par l’acheteur.

Or la communication à l’OP des bases de calcul du prix est indispensable pour vérifier que la facturation est correctement effectuée. Il convient de ne pas affaiblir l’information des OP, qui sont une garantie pour les agriculteurs. Il serait intéressant que l’acheteur communique sur ses ventes aux producteurs auprès desquels il se fournit. Ces échanges peuvent d’ailleurs être prévus dans le contrat-cadre, comme le permet le b) du 2° de l’article 30 C. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Les amendements identiques n° 15 rectifié bis et 176 rectifié bis ont pour objet de demander une négociation annuelle entre producteurs et acheteurs soumis à l’obligation de contractualisation en vertu de l’article L. 631-24 du code rural. Le principal secteur concerné est celui du lait. L’idée est intéressante, puisqu’il s’agirait de définir des prix payés au producteur avant de passer à la négociation des prix entre l’industriel et la grande distribution.

Néanmoins, le mécanisme proposé présente aussi quelques défauts.

D’abord, les contrats agricoles étant pluriannuels, ils sont négociés selon une fréquence qui n’est pas annuelle.

Ensuite, les mouvements des prix agricoles peuvent être importants sur une année, si bien qu’il faut des temps de rencontre pour discuter des prix à un rythme infra-annuel.

En outre, l’alinéa 12 de l’article 30 C dispose déjà que les contrats-cadres entre industriels et organisations de producteurs doivent prévoir une discussion sur les volumes et les prix entre ces deux acteurs selon des modalités qu’ils peuvent librement décider.

Enfin, l’article 31 bis C prévoit un mécanisme de prise en compte des prix agricoles dans les contrats commerciaux de la loi de modernisation de l’économie ou les appels d’offres de la grande distribution pour la fabrication de produits sous marque de distributeur.

Il n’est donc pas indispensable de créer une nouvelle obligation assez rigide de négociation avant le 30 novembre de chaque année, qui ne serait d’ailleurs assortie d’aucune obligation de conclure effectivement un accord.

Là encore, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion