La commission des finances du Sénat a été, lors de l’examen du projet de loi de régulation bancaire et financière, à l’origine de la régulation du marché des quotas d’émission de gaz à effet de serre. Il s’agit, par cet amendement, de compléter ce dispositif, par la mise en place du régime fiscal approprié pour ces transactions.
Transposée par l’ordonnance du 15 avril 2004, la directive du 13 octobre 2003 fixe le cadre d’un système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre. Le protocole de Kyoto a également prévu des « unités de réduction », qui sont attribuées aux porteurs de projets destinés à réduire les émissions dans les pays en développement ou en transition. À l’instar des quotas d’émission, ces unités sont négociables par leurs titulaires.
En 2009, une fraude à la TVA de type « carrousel » a touché le marché européen des quotas de CO2. Dans ce mécanisme de fraude, les opérateurs incriminés achetaient hors taxes des volumes élevés de quotas auprès de fournisseurs localisés dans un autre État membre, avant de les revendre sur le marché national. Lors de cette revente sur le marché français, le revendeur facturait la TVA sans pour autant la reverser aux services fiscaux. Dépourvue de moyens de recoupement permettant d’assurer le suivi des acquisitions de quotas, l’administration fiscale ne pouvait retrouver la trace de l’opérateur fraudeur. Selon mes informations, mais je pense que vous avez les mêmes, monsieur le ministre, le coût de cette fraude a pu être estimé à 170 millions d’euros environ.
L’administration fiscale française a réagi, par une instruction du 10 juin 2009, en supprimant la TVA sur ce type d’échanges. Dans mon récent rapport sur le projet de loi de régulation bancaire et financière, je m’étais alarmé de cette dérive et des « affaires » ayant affecté le marché des quotas de CO2.
M. le président Arthuis et moi-même avons pensé qu’il fallait aller plus loin. Ainsi, le présent amendement permet de lutter contre la fraude à la TVA sur ce marché et de faire en sorte que la taxe soit de nouveau perçue sur les échanges de quotas de CO2. Mettant en œuvre la faculté prévue par la directive du 16 mars 2010, il tend à appliquer le système de l’autoliquidation de la TVA dans le cas des cessions de quotas et des unités de réduction d’émission de gaz à effet de serre. Concrètement, il reviendra à l’acheteur et non plus au vendeur de ces quotas et de ces unités d’acquitter la TVA.
C’est un principe général que nous souhaitons voir affirmer, monsieur le ministre, et c’est pourquoi nous formulerons une demande identique à propos des achats d’espaces publicitaires, puis, dans un second temps, de services et de biens sur les plateformes Internet.
En permettant que la taxe soit à nouveau perçue sur les échanges de quotas de CO2, l’adoption de cet amendement devrait nous donner les moyens de juguler la fraude grâce à un meilleur recouvrement de la TVA auprès de l’acheteur sur le territoire national.