Intervention de Clotilde Valter

Réunion du 19 juillet 2016 à 14h30
Modalités d'inscription sur les listes électorales — Adoption définitive des conclusions de trois commissions mixtes paritaires

Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, chargée de la formation professionnelle et de l'apprentissage :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous arrivons au terme du processus législatif concernant ces trois textes qui portent une réforme ambitieuse et moderne de l’élaboration et de la mise à jour des listes électorales, et donc de l’accès au suffrage.

À l’origine de ces réformes, je veux souligner, d’une part, l’engagement du Président de la République en faveur d’une facilitation de l’accès au scrutin, via notamment la possibilité donnée à nos concitoyens de s’inscrire jusqu’à un mois avant la date d’un scrutin, et, d’autre part, le rapport des députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann, remis en décembre 2014, qui a constitué une préfiguration des dispositions législatives contenues dans ces trois textes.

Ce rapport évaluait à 3 millions le nombre d’électeurs non inscrits et à 6, 5 millions le nombre d’électeurs mal inscrits. Ces chiffres considérables résument bien la nécessité de moderniser notre système de gestion des listes électorales.

Je sais que les travaux ont été intenses au sein des commissions mixtes paritaires pour aboutir à un accord. Cet accord, que je salue, répond au souhait exprimé par le Sénat au cours de ses débats en prenant en compte les implications de la réforme pour les maires, notamment ceux des petites communes – ils seront plus encore qu’auparavant placés au cœur du processus de mise à jour de ces listes –, tout en bénéficiant pleinement à nos concitoyens, dont les démarches seront facilitées.

Je veux, à ce titre, tout particulièrement remercier les rapporteurs des commissions mixtes paritaires, M. Pierre-Yves Collombat et ses collègues de l’Assemblée nationale, Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann. Ils ont conduit de nombreuses auditions et mené un travail considérable qui a permis, malgré les différences entre les textes votés dans chacune des assemblées, la conclusion d’un accord.

Le ministre de l’intérieur souhaitait également remercier le président de votre commission des lois, Philippe Bas, pour sa contribution à la mise au point de ce texte.

Les trois propositions de loi comportent des mesures de portées diverses.

La plus emblématique d’entre elles est celle qui permet à nos concitoyens de s’inscrire sur une liste électorale jusqu’au sixième vendredi précédant un scrutin, soit trente jours ouvrés auparavant – vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur. Ce rapprochement entre la date limite d’inscription et le jour du scrutin permettra de mieux faire coïncider le cycle de mobilisation électorale et le calendrier des démarches administratives nécessaires pour accéder au scrutin.

Deux autres dispositions me semblent importantes : l’inscription d’office des personnes venant d’acquérir la nationalité française et celle des jeunes atteignant la majorité entre les deux tours d’un scrutin. Il s’agissait de situations de frustration pour nos concitoyens empêchés de voter. L’accès à la nationalité doit s’accompagner d’un plein accès à la citoyenneté. De la même façon, il n’existait aucune raison de priver des jeunes majeurs du droit de participer à une élection.

L’objectif essentiel de ce texte est donc d’assouplir l’accès au scrutin pour favoriser l’expression démocratique, et donc de lutter contre l’abstention.

Cependant, cette réforme exige parallèlement de revoir en profondeur le processus d’élaboration et de mise à jour des listes électorales. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez largement évoqué au cours de vos débats les contraintes de temps inhérentes au processus d’inscription. Or les nouvelles technologies nous donnent la possibilité de mettre en œuvre un certain nombre d’innovations qui permettront de concilier les priorités. Je pense avant tout à la dématérialisation complète des échanges d’informations entre les communes et l’INSEE. Cette dématérialisation rend possibles les inscriptions jusqu’à un mois d’un scrutin, ce que n’auraient pas permis les simples flux de courrier.

La dématérialisation et la création du répertoire électoral unique permettront également de traiter le problème des doubles inscriptions, un des autres dysfonctionnements majeurs mis en évidence par le rapport des députés Élisabeth Pochon et Jean-Luc Warsmann. Le système informatique qui sera construit pour agréger les listes électorales permettra également de recouper les listes communales entre elles et, par conséquent, de simplifier des vérifications aujourd’hui complexes pour les communes.

Le maire sera plus que jamais au centre du dispositif puisqu’il prendra directement la décision d’inscription. Il disposera de cinq jours à compter de la demande d’inscription pour rendre sa décision et de deux jours pour la notifier à l’électeur.

Le texte prévoit, sur l’initiative du Sénat – je tenais à le rappeler, monsieur le rapporteur –, que l’électeur devra saisir la commission de contrôle d’un recours administratif préalable dans un délai de cinq jours avant d’engager un recours contentieux contre une inscription ou un refus d’inscription. La commission disposera de deux jours pour notifier sa décision. En cas d’absence de décision sous trente jours ou de publication de la liste électorale, le recours administratif préalable fait l’objet d’une décision implicite de rejet.

La commission de contrôle instituée dans chaque commune aura donc pour mission de statuer sur les recours administratifs préalables formés contre les décisions du maire. Elle devra également s’assurer de la régularité des listes. Elle disposera pour cela de pouvoirs d’autosaisine et de réformation des décisions du maire.

À compter de la publication de la liste ou de la décision de la commission, l’électeur disposera de sept jours pour saisir le tribunal d’instance, qui se prononcera sous huit jours.

Les propositions de loi traitent d’un autre sujet important, qui a été à la source de nombreuses difficultés lors de précédents scrutins, notamment lors des scrutins présidentiels : la double inscription pour les Français établis hors de France, qui peuvent être inscrits à la fois sur une liste électorale consulaire et sur une liste électorale communale.

Dans un souci de simplification et de clarté, qui ne peut être que bénéfique à la sincérité d’un scrutin, la réforme met fin à une telle possibilité. Chaque électeur devra choisir s’il veut être inscrit sur une liste consulaire ou sur une liste communale. Toutefois, je voudrais rassurer les électeurs inscrits hors de France : ce volet de la réforme ne sera mis en œuvre qu’après les échéances électorales, afin de ne pas modifier le corps électoral à un an des prochaines échéances législatives.

De la même manière, les électeurs inscrits hors de France doivent savoir que le système n’est pas irrévocable. Chaque Français pourra à tout moment choisir de modifier sa situation électorale en fonction de sa situation personnelle, et à condition de faire les démarches d’inscription nécessaires sur la liste électorale dans les trente jours précédant le scrutin.

Nous répondons ainsi à la double injonction du Conseil constitutionnel et facilitons les démarches de nos concitoyens, qui étaient parfois pénalisés par des démarches administratives contre-intuitives.

Mesdames, messieurs les sénateurs, ces propositions de loi servent un objectif démocratique d’importance. Je voulais à ce stade remercier une nouvelle fois M. le rapporteur, Pierre-Yves Collombat. Le travail très important qu’il a effectué en commission, lors des précédentes lectures et au cours de la commission mixte paritaire, a permis d’aboutir positivement.

Durant les débats, il avait fait part de sa préoccupation quant à la mise en œuvre du dispositif. Je tiens à lui indiquer que le travail a déjà débuté, puisque l’INSEE a mis en place une équipe dédiée. Sous la direction du ministère de l’intérieur, les neuf ministères intéressés sont réunis à fréquence mensuelle depuis le mois de février dernier. Le comité de suivi, qui associe également des représentants des communes au travers de l’Association des maires de France, l’AMF, s’est réuni depuis le 10 mai. Plusieurs réunions techniques avec des représentants des communes se sont tenues. Elles ont d’ores et déjà permis d’avancer dans la description et la construction du futur système d’information.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous appelle donc à approuver le texte issu de la commission mixte paritaire. Je vous remercie par avance de votre soutien et de la force que vous donnerez ainsi à cette réforme importante pour le fonctionnement de notre démocratie.

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