Madame le rapporteur, vous avez dit, en reprenant mes propos lors de la discussion générale, que le diable se cachait souvent dans les détails. C’est le cas ici.
L’article 14 decies, comme l’article 14 bis, émane d’une ambition tout à fait louable, celle de lutter contre la radicalisation. Pour ce faire, le Gouvernement propose, entre autres mesures, de passer d’un régime de déclaration à un régime d’autorisation. Or, là, c’est toucher à une liberté constitutionnelle, monsieur le ministre.
D’ailleurs, le Conseil constitutionnel, dans un arrêté du 16 juillet 1971 concernant la liberté d’association, qui est une liberté constitutionnelle, a confirmé qu’elle ne pouvait être soumise à une autorité administrative, ni même à une autorité judiciaire. Vous l’avez d’ailleurs implicitement reconnu lors de la discussion de l’article 14 bis. Votre proposition me semble donc contraire à la Constitution.
Si le législateur a voulu à plusieurs reprises, en 1881, en 1886 et en 1950, un système déclaratif, c’est bien pour garantir cette liberté fondamentale. D’ailleurs, l’Association des maires de France réclame elle aussi qu’on s’en tienne à un régime déclaratif mieux encadré, ce que propose Mme le rapporteur.
Monsieur le ministre, ne voyez aucune malice dans ma question, mais qu’est-ce qui se cache derrière tout cela ? Sans doute – et c’est votre droit – votre peu d’appétence pour l’enseignement privé. Ce n’est pas nouveau : en 1983, M. Savary avait agi de façon tellement voyante que les gens étaient descendus dans la rue. Aujourd’hui, vous agissez de façon plus cachée, mais non moins efficace…
On doit se poser une seule question : pourquoi tant de parents mettent-ils leurs enfants dans des établissements privés, sous contrat ou hors contrat ? Parce qu’ils n’ont pas la garantie de la réussite de leurs enfants dans l’enseignement public. Voilà le vrai problème : notre système éducatif n’assure plus l’égalité des chances. Je suis d’autant plus à l’aise pour en parler que je suis moi-même un pur produit de l’enseignement public, tout comme mes enfants.
(Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain.) : l’école n’est ni de droite ni de gauche, elle appartient à l’ensemble de la Nation !