Intervention de Alain Dufaut

Réunion du 26 octobre 2016 à 14h30
Éthique du sport et compétitivité des clubs — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Alain DufautAlain Dufaut :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette proposition de loi s’inscrit dans le prolongement des travaux menés par le groupe de travail du Sénat sur l’éthique du sport en 2013. J’ai participé à ce groupe de travail qui a auditionné plus de soixante personnalités. Convaincus de la nécessité d’adapter notre droit face à de nouvelles pratiques et de nouveaux enjeux pour le domaine sportif, nous avions formulé à l’époque un ensemble de propositions, dont certaines figurent dans le présent texte.

Force est de constater que les questions d’intégrité et de transparence sont trop souvent mises à mal dans la pratique du sport de haut niveau et du sport professionnel. Les exemples de dopage, de triche et de pratiques douteuses viennent se répercuter sur l’image générale du sport, alors que celui-ci doit véhiculer des valeurs fortes de courage, d’esprit d’équipe, de respect des règles et surtout de respect des autres.

Dès lors, il appartient à l’État et à la loi de rétablir les règles du jeu. Je me réjouis que le Sénat apporte sa contribution à cet effort et tiens à féliciter tout particulièrement l’auteur et rapporteur de ce texte, notre collègue Dominique Bailly. Nous pouvons également nous réjouir de l’esprit très consensuel qui a animé l’ensemble de nos travaux.

Plusieurs dispositions du texte s’appuient sur les fédérations pour qu’elles veillent au respect de ces règles, que ce soit en élaborant une charte d’éthique, en contrôlant des flux financiers ou en réprimant de nouvelles dérives.

À ce sujet, l’article 5 complète les travaux menés en 2008 par notre collègue Jean-François Humbert sur la situation ambiguë des agents de joueurs. La création par les fédérations concernées d’un organisme spécial et indépendant qui contrôlera l’activité des agents sportifs est incontestablement une mesure nécessaire et bénéfique.

De même, la création d’un organisme qui appréciera et contrôlera les projets d’achat, de cession et de changement d’actionnaires des sociétés sportives va dans le bon sens.

Même si certains amendements abordent le problème, il faudra aller plus loin sur le sujet des contributions financières pour la réalisation d’enceintes sportives ou de stades. Comme le réclame l’Association nationale des élus en charge du sport, l’ANDES, il faut envisager un plafonnement de l’engagement des collectivités territoriales sur le long terme. Il faut réfléchir à une réelle évolution du modèle économique actuel, qui est lié à la propriété et à l’exploitation de grandes infrastructures, que ce soit des stades, des Arenas ou des grandes salles polyvalentes.

Sur le sujet, on gagnerait à s’inspirer des mesures, qui figuraient dans la proposition de loi dont j’étais le rapporteur en 2010, sur les types de financement réservés à la construction et à la rénovation des dix stades qui ont par la suite servi de cadre à l’Euro 2016 de football. Je vous ai d’ailleurs bien entendu, monsieur le secrétaire d'État, lorsque vous nous avez annoncé la fin des PPP sous leur forme actuelle et la possible mise en place de nouvelles formes de partenariats.

Certaines solutions qui ont été retenues à l’époque et qui privilégiaient la mixité des financements publics et privés sont la voie de l’avenir pour les grands équipements sportifs. Simplement, il faut des règles !

Depuis les années 1980, la France est devenue l’un des pays les plus avancés dans la lutte contre le dopage. J’ai été moi-même le rapporteur du Sénat sur le texte qui est devenu la loi du 5 avril 2006 relative à la lutte contre le dopage et à la protection de la santé des sportifs. C’est ce texte présenté par le ministre de l’époque, Jean-François Lamour, qui a donné une vraie indépendance et des pouvoirs accrus à l’AFLD.

Le présent texte étend les pouvoirs d’investigation de l’Agence aux manifestations sportives avec remise de prix en argent. Il serait dommage de supprimer cette disposition, car elle mettrait terme à de nombreuses dérives, notamment celles que l’on observe dans le cadre de l’organisation de certains critériums ou de concours indépendants des fédérations ou des ligues.

Mes chers collègues, d’une manière plus générale, cette proposition de loi maintient notre pays à l’avant-garde sur les enjeux d’éthique.

En effet, elle réprime une nouvelle forme de tricherie, la fraude technologique, dont plusieurs cas ont été dénoncés dans le cyclisme. Les fédérations pourront désormais se saisir de telles affaires et les sanctionner. Ensuite, elle renforce la régulation des paris sportifs. Enfin, elle prévoit un contrôle financier des agents sportifs pour une plus grande transparence des flux financiers.

Outre les questions d’éthique, la proposition de loi s’attache à traiter les maux du sport professionnel français.

Il s’agit d’assurer la compétitivité de notre sport professionnel, considéré comme étant « en grande difficulté financière ». Celui-ci, en effet, ne se réduit pas à quelques clubs de football de haut niveau ; il souffre d’une fragilité financière, due à des recettes insuffisamment diversifiées et aléatoires, et d’une incapacité à assurer son autosubsistance.

Ce texte comprend donc plusieurs mesures visant à encourager et à sécuriser les investissements dans le sport français.

Pour finir, je tiens à souligner l’importance de deux dispositions adoptées en commission, car ces mesures, je le sais, pourraient être remises en cause lors de la navette parlementaire, voire être retirées dès aujourd'hui du texte.

Je veux parler, tout d’abord, de l’instauration d’une distinction entre salaire et redevance pour la rémunération des joueurs.

Le montant élevé des charges sociales pesant sur la rémunération des joueurs professionnels français constitue un désavantage compétitif évident. La valorisation de l’image des sportifs peut alors être un élément clé pour renforcer la compétitivité du sport professionnel français.

Aussi serons-nous attentifs à vos commentaires sur ce dispositif, monsieur le secrétaire d’État, sachant que le régime de la fiducie, envisagé dans un premier temps, s’avère difficile à mettre en œuvre.

Je tiens également à rappeler l’importance de la taxe Buffet. J’ignore le sort qui sera réservé à notre proposition visant à élargir son assiette, mais c’est fondamental pour le sport amateur. On ne peut pas faire abstraction de 17 millions d’euros de recettes supplémentaires en sa faveur, mes chers collègues ! Il serait parfaitement anormal que la diffusion télévisée en France des matchs filmés à l’étranger continue d’échapper à cette taxe.

Certes, l’élargissement de la taxe Buffet avait été censuré par le Conseil constitutionnel dans la loi de finances rectificative pour 2013. Mais je rappelle, monsieur le secrétaire d'État, que votre prédécesseur, Mme Valérie Fourneyron, avait indiqué qu’une solution serait trouvée avant l’Euro 2016. Cela n’a pas été le cas, et nous souhaiterions donc savoir comme ce problème fondamental va pouvoir se régler aujourd'hui.

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