Intervention de Corinne Bouchoux

Réunion du 26 octobre 2016 à 21h00
Adaptation du deuxième cycle de l'enseignement supérieur français au système licence-master-doctorat — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Corinne BouchouxCorinne Bouchoux :

Le texte initial a été réécrit et revu par notre commission, afin de tenir compte de l’accord du 4 octobre 2016. Ce dernier instaure une possible, mais non obligatoire, sélection à l’entrée du master, et non plus en cours de cycle. Parallèlement, il prévoit un « droit à la poursuite d’études » pour les titulaires d’un diplôme de licence validé qui le souhaitent.

La portée du droit à la poursuite d’études a soulevé d’importants et intéressants débats au sein de notre commission. Pour certains, ce droit aurait gagné à être opposable, car il se limiterait sinon à une illusion ; pour d’autres – plutôt du côté droit de l’hémicycle –, il annihilerait le principe de sélection posé par l’accord. Néanmoins, force est de constater que l’accord initial entre différentes parties a suscité l’adhésion de la plupart des acteurs de l’enseignement supérieur. Je pense aux organisations étudiantes et aux présidents d’université, dont certains sont présents dans nos tribunes, ainsi qu’au ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et à d’autres acteurs dont le rôle a visiblement été apaisant ; ils ont fait en sorte qu’il n’y ait pas de malentendu de communication sur ce texte. En plus, cet accord a été approuvé à une large majorité par le Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, ce qui n’est plus si fréquent.

Cet accord est donc le fruit d’une réelle concertation et propose une solution aux difficultés rencontrées par notre deuxième cycle. Je suis convaincue de la nécessité que cette proposition de loi, ainsi parvenue à une forme d’équilibre, aboutisse. Dans un souci de mettre le plus vite possible fin au flou juridique signalé, je rejoins l’idée selon laquelle le texte devrait s’appliquer dès la prochaine rentrée universitaire. Néanmoins, ne soyons pas naïfs, sa mise en œuvre dans un laps de temps très court nécessitera un très gros travail de pédagogie auprès de tous les acteurs du monde universitaire, mais surtout auprès des lycéens, qui sont toujours prompts à se mobiliser autour de leurs établissements au nom de causes plus ou moins importantes. Autrement dit, nous devrons maintenir le dialogue pour expliquer le sens de cet accord, qui n’est pas un renoncement. Au contraire, il est le résultat d’un consensus ; la démarche est beaucoup plus positive.

Nous sommes convaincus que la sélection à l’entrée du master doit s’accompagner d’un droit à la poursuite d’études ; ce dernier doit être effectif. Tel qu’il est prévu dans l’accord, ce droit semble relativement facile à mettre en œuvre dans les métropoles, mais peut-être moins dans les villes de taille moyenne. Chacun le sait, l’offre universitaire est plus importante dans les premières ; les étudiants issus des métropoles auront donc plus de chances de trouver sur place des possibilités de deuxième ou troisième choix.

La question, cruciale, de la mobilité se pose donc pour un certain nombre de villes en région. Selon nous, elle doit attirer toute notre attention dans la mise en œuvre du texte ; il y va de l’effectivité du droit à la poursuite d’études et de la réussite du processus. Il faudra mener une réflexion sur le coût des transports, des déménagements et du logement ; tous les étudiants ne pourront peut-être pas y faire face. L’effectivité de la réforme pour toutes les étudiantes et tous les étudiants, quelles que soient leurs origines sociales, dépendra donc du déploiement de moyens et de l’accompagnement, notamment pour les boursiers.

À nos yeux, la solution apportée pour l’entrée en M1 masque en réalité une autre question beaucoup plus profonde : celle de l’orientation tout au long de la vie. Mme la présidente de la commission de la culture y a fait référence. Nous pensons qu’il faut en France une orientation beaucoup plus individualisée – cela nécessite des moyens –, beaucoup plus souple, avec un droit à l’erreur.

Vous l’avez compris, nous souhaitons donner une chance à la traduction législative de l’accord du 4 octobre 2016. Nous remercions donc les auteurs de cette proposition de loi, qui est désormais un texte à deux voix : celle de Jean-Léonce Dupont et celle de Dominique Gillot.

Nous espérons que, pour l’avenir, nous formerons à la pédagogie les enseignants-chercheurs. À l’heure de la formation tout au long de la vie, être capable de remédier aux lacunes des étudiants et à leurs difficultés d’adaptation est un défi que nous devrons tous relever. Nous faisons confiance à l’intelligence collective.

Certains voudraient supprimer le Sénat ; je me permets de leur dire que ce n’est peut-être pas une très bonne idée.

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