On dit à la fois oui à la sélection et au droit de poursuivre des études. Reconnaissez que c’est tout de même original !
En réalité, ce que nous propose le Gouvernement, suite à l’accord syndicat et président de la CPU, c’est l’affirmation d’un principe de sélection, suivi dans la pratique de l’inverse.
Si ce compromis fait consensus, c’est qu’il permet à chaque partie de revendiquer la sauvegarde de sa doctrine. Comme se plaisait à le dire Édouard Herriot : « Appuyons-nous sur les principes, ils finiront par céder » ! §Mais c’était un optimiste, car, ici, l’exécutif s’appuie sur deux principes contradictoires pour construire une voie dont je crains qu’elle ne soit une impasse !
Comme le relevaient à juste titre les professeurs Beau et Galderisi dans Le Monde du 7 octobre dernier : « Admirons ce paradoxe ubuesque : les équipes pédagogiques auront le droit de ne pas accueillir les étudiants de leur propre université dont elles estiment qu’ils ne possèdent pas les prérequis, mais elles devront accepter d’inscrire dans leurs filières des étudiants refusés ailleurs ! Il n’y a plus de sélection pour tous, mais au contraire l’admission pour chacun, voulue et décidée par l’État contre les universités, au terme d’une combinazione absurde et coûteuse. » Ils ajoutaient : « Ce projet de loi aurait pour effet, s’il était adopté, de retirer aux universités le peu d’autonomie didactique dont elles bénéficiaient encore. Que le recteur décide au nom de l’État d’affecter des étudiants dans des masters contre la volonté des équipes pédagogiques signifie que l’autonomie des universités n’existe plus. »
La réalité, c’est que cet accord, une fois de plus, sera préjudiciable aux étudiants issus de classes défavorisées. Certes, ils auront un diplôme de papier, mais il sera difficilement négociable dans le monde du travail. Là encore, comme pour la réforme territoriale, la fracture entre Paris, les grandes métropoles et les universités puissantes, et les autres s’approfondira.
Un bon accord est celui qui permet à toutes les parties de s’élever, d’où les préoccupations et les interrogations qui sont les nôtres.