Intervention de Daniel Gremillet

Réunion du 3 novembre 2016 à 10h30
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d'alerte — Discussion en nouvelle lecture d'un projet de loi et d'une proposition de loi organique dans les textes de la commission

Photo de Daniel GremilletDaniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dix-huit articles pour lesquels votre commission des affaires économiques s’était vue déléguer la compétence au fond restent encore en discussion. Seule une poignée d’entre eux soulève un désaccord de fond.

Laissez-moi d’abord évoquer le volet agricole et agroalimentaire du projet de loi, qui s’est étoffé en cours de discussion et fait aujourd’hui l’objet d’un assez large consensus. Ce n’est d’ailleurs pas sur ce volet que la commission mixte paritaire a bloqué, puisque nous avions travaillé à trouver des points d’équilibre avec le rapporteur de l’Assemblée nationale, Dominique Potier, mais aussi avec le Gouvernement. Le texte voté en nouvelle lecture par les députés respecte ces points d’équilibre et reconnaît ainsi les apports du Sénat lors de la première lecture.

Sur la question de la préservation du foncier agricole, c’est le mécanisme adopté lors de la discussion au Sénat qui a été retenu en nouvelle lecture, avec obligation pour les acquisitions de terres par des sociétés de constituer des structures dédiées, comme des groupements fonciers agricoles, et possibilité pour les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural de disposer d’un droit de préemption sur les cessions partielles de parts de ces structures, de manière à maîtriser, voire à prévenir, les phénomènes d’achats massifs de terres au détriment des agriculteurs locaux.

Plusieurs dispositions plus techniques, votées au Sénat, ont aussi été reprises dans le texte final : simplification du droit en matière de barème de la valeur vénale des terres agricoles, assouplissement du régime de la concession temporaire de terres à usage agricole.

Sur la question de la contractualisation en agriculture, les députés ont préservé l’extension de l’incessibilité à titre onéreux des contrats de fourniture de lait de vache et de lait de chèvre. Ils ont aussi conservé les dispositions donnant droit aux producteurs de révoquer à tout moment le mandat de facturation donné à leur acheteur dans le cadre de la contractualisation agricole. Ils ont modifié les conditions de prise en compte des coûts de production des agriculteurs dans la contractualisation, dans une rédaction acceptable, bien que moins souple que celle que nous avions initialement proposée. Ils ont préservé la notion de contrat-cadre, même si nous n’avons pas pu rendre lesdits contrats obligatoires, du fait du droit communautaire.

Sur la question du lien entre prix final proposé en grande distribution au consommateur, prix payé au transformateur et prix payé à l’agriculteur, les députés sont revenus à leur texte initial. Les différences entre nos deux assemblées sur ce point sont plus de forme que de fond. Toutefois, attention au mauvais usage de ces nouvelles dispositions : oui à la transparence tout au long de la chaîne, mais il ne faudrait pas que ce texte soit utilisé pour introduire une pression accrue pour les industriels de l’agroalimentaire, situés au milieu de la chaîne !

Les députés ont accepté la proposition du Sénat de placer les conférences de filière sous l’égide de FranceAgriMer, solution plus réaliste que de donner aux commissions des affaires économiques de l’Assemblée nationale et du Sénat le soin de mettre en œuvre ces rencontres. Ces conférences seront publiques, pour éviter tout risque d’entente sur les prix, condamnable au titre du droit de la concurrence.

Au final, le volet agricole du projet de loi Sapin présente des avancées attendues par le monde agricole et peut être voté à l’identique du vote de nouvelle lecture de l’Assemblée nationale.

Sur les autres dispositions restant en discussion, les députés ont adopté, avec des modifications mineures, plusieurs dispositions que nous avions votées : il y a lieu de les conserver. En outre, dans un souci de conciliation, votre commission a jugé pertinent de conserver d’autres mesures votées par les députés, notamment s’agissant des amendes civiles ou administratives dans les relations commerciales.

En revanche, en nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a rétabli certains dispositifs qui avaient suscité notre opposition de principe en première lecture. La commission en a donc décidé la suppression. Tel est le cas du rétablissement d’un périmètre réduit à l’arrondissement pour l’interdiction de vente au déballage et de délais de paiement dérogatoires pour les activités de grand export.

Par ailleurs, les députés ont introduit un droit de résiliation annuel des contrats d’assurance emprunteur dans le cadre des crédits immobiliers, après l’avoir pourtant écarté en première lecture, comme nous-mêmes en séance publique. Sur le plan de la procédure, une telle disposition a été écartée en nouvelle lecture, en application de la règle de l’entonnoir. Sur le fond, aucun élément nouveau ne justifie qu’il soit donné un avis différent de celui qui a été décidé en première lecture : la résiliation annuelle met en jeu trop de questions complexes pour être décidée dans l’urgence, sans disposer d’une étude d’impact et de l’ensemble des données pertinentes.

Je vous rappelle que, en 2014, nous avions demandé au Gouvernement de remettre un rapport sur la question d’ici au mois de mars 2017. Attendons-le ! C’est à l’aune de ces données, disponibles dans les prochains mois, qu’il conviendra de réexaminer cette question, ce qui pourrait être fait dans le cadre d’un texte spécifique, voire dans celui de la ratification de l’ordonnance de recodification du code de la consommation. Dans l’immédiat, la commission a décidé la suppression de cette disposition, et les amendements tendant à le rétablir ont été déclarés irrecevables par la commission des lois.

Enfin, en ce qui concerne le dispositif du « droit de suite » dans le cadre de l’immatriculation au répertoire des métiers, l’Assemblée nationale a repris la position du Sénat, en estimant nécessaire de prévoir une limitation de ce droit en fonction de l’effectif salarié de l’entreprise concernée. Elle a fixé le plafond à cinquante salariés. Votre commission a décidé de conserver ce seuil. Néanmoins, il est important que les entreprises qui peuvent bénéficier du droit de suite soient bien conscientes de la situation. Votre commission a donc prévu qu’il devait revenir à l’entreprise, lorsqu’elle déclare le dépassement du seuil de dix salariés, de solliciter à cette occasion son maintien au répertoire des métiers.

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