Intervention de Joël Guerriau

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 2 novembre 2016 à 9h30
Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la france et le congo relatif aux services aériens — Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord relatif aux services de transport aérien entre la france et le congo - projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la france et le panama relatif aux services aériens - examen du rapport et des textes de la commission

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau, rapporteur :

Nous groupons dans un seul rapport l'examen de trois projets de loi autorisant l'approbation de trois accords conclus respectivement avec le Congo, la République démocratique du Congo (RDC) et le Panama en 2013 et relatifs aux services de transports aériens.

Ces accords comportent des dispositions similaires et classiques, issues du droit international de l'aviation civile et du droit européen. Ils ont été négociés, côté français, par la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), en suivant un modèle-type élaboré par les autorités françaises à partir du modèle d'accords bilatéraux sur les services aériens proposé par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

Les trois accords consacrent tout d'abord la possibilité d'exploiter, respectivement avec chacun des pays concernés, les quatre premières « libertés de l'air » telles que définies par l'OACI : liberté de survol - chaque pays est seul juge des aéronefs qu'il autorisera à survoler son territoire -, liberté d'escale non commerciale, possibilité de débarquer du trafic (passagers, fret, courrier) en provenance de l'État dont l'aéronef a la nationalité, sur le territoire de l'autre Partie et possibilité d'embarquer du trafic sur le territoire de l'autre Partie, à destination de l'État dont l'aéronef a la nationalité.

Les accords excluent, en revanche, l'exercice des huitième et neuvième libertés, c'est-à-dire le transport de trafic par une compagnie à l'intérieur d'un État étranger, appelé cabotage.

En application des arrêts de la Cour de justice des communautés européennes de 2002 dits « Ciel ouvert », confirmés par un règlement de 2004, consacrant l'application des principes de libre concurrence et de libre établissement, chaque accord, par une clause dite de désignation, donne aux parties la possibilité de désigner plusieurs transporteurs aériens autorisés à exploiter les routes spécifiées.

La France peut ainsi désigner des compagnies aériennes françaises ainsi que toute compagnie établie en France, sous contrôle effectif d'un État membre de l'Union européenne, et détenue directement ou par participation majoritaire au sein de l'Union européenne.

Deux clauses-types imposées par le droit européen incluent également la liberté pour les compagnies désignées de recourir à un prestataire de leur choix pour les services d'assistance en escale. D'autres clauses, tout aussi classiques, prévoient le principe d'égalité de traitement entre compagnies, la liberté pour une compagnie d'établir des agences commerciales sur le territoire de l'autre Partie et de procéder à des transferts internationaux de recettes, la liberté de fixation par les transporteurs de leurs tarifs et la liberté de conclure des accords commerciaux tels que des accords de partage de code, permettant au transporteur auprès duquel un passager a acheté un billet d'associer son code de désignation à un vol effectué par un autre transporteur.

Les accords prévoient également des exemptions de droits sur différents biens et services, toutes déjà prévues par le code général des impôts. Enfin, ils incluent les dispositions les plus récentes du droit international et du droit européen relatives à la sécurité et à la sûreté des vols.

En vertu de la procédure de notification applicable, la Commission européenne s'est prononcée sur les trois accords examinés, les jugeant tous conformes au droit européen.

Aucun changement d'ampleur n'est à attendre de ces accords à court terme ; leur principal effet est de renforcer la sécurité juridique des transporteurs et de pérenniser ainsi les services aériens existants entre la France et les trois pays concernés. En pratique, ils visent à conforter la situation d'Air France sur ces liaisons et à renforcer durablement nos liens avec les trois pays.

L'accord avec le Congo donne à Air France les garanties nécessaires pour maintenir sa desserte de Brazzaville (quatre fréquences hebdomadaires) et pour augmenter ses services vers Pointe-Noire, passés à un vol quotidien, afin de répondre à une demande soutenue de la clientèle d'affaires.

Relativement modeste - 170 000 passagers par an - le marché France-Congo est détenu à plus de 80 % par Air France. Toutefois, malgré son interdiction dans l'Union européenne en vertu du règlement de 2014 créant une liste noire de compagnies aériennes, la compagnie congolaise ECair assure également une liaison vers Paris. Le droit européen autorise en effet une compagnie interdite à exercer ses droits de trafic en affrétant un appareil avec équipage appartenant à un transporteur autorisé. Pour desservir Paris, c'est la compagnie suisse Privatair qui met les moyens nécessaires à disposition d'ECair.

L'accord comporte également une disposition qui aurait permis la désignation de la compagnie régionale d'Afrique centrale Air Cemac, projet toutefois abandonné en 2015 par les États de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale.

Air France détient le monopole du marché aérien de la RDC, qui représente 60 000 passagers, avec cinq fréquences hebdomadaires vers Kinshasa. L'enveloppe fixée de services aériens est évolutive, ce qui donne à Air France la possibilité d'envisager une progression de sa desserte.

En revanche, la RDC n'a concédé le service vers Lubumbashi que sous forme de partage de codes. Dans ce cadre, Air France pose son code sur un vol opéré depuis Nairobi par Kenya Airways.

À ce stade, la RDC n'a désigné aucune compagnie pour exploiter des services aériens vers la France ; toutes ses compagnies figurent au demeurant sur la liste noire.

Enfin, contrairement aux deux premiers qui modernisent le cadre existant, l'accord avec le Panama met en place un cadre juridique nouveau. Négocié à la demande du Panama, qui aspire à devenir un hub en Amérique centrale, il répond également au souhait de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française de disposer de routes alternatives pour leur desserte. Il leur appartiendra, en vertu des lois organiques qui les régissent, de fixer conjointement avec le Panama les modalités de cette desserte, pour le moment non concrétisée.

L'enveloppe de sept fréquences hebdomadaires par pavillon, permise par l'accord, autorise Air France à développer sa liaison aérienne directe entre Paris et Panama City, inaugurée le 25 novembre 2013. Les autorités panaméennes n'ont pas désigné de compagnie au titre de l'accord, leur compagnie nationale COPA ayant un rayon d'action régional.

La dégradation des relations entre la France et le Panama provoquée par l'affaire des Panama papers appelle une vigilance particulière des autorités françaises quant à l'application de l'accord. La loi de rétorsion adoptée par le Parlement panaméen ne concerne pas les transports aériens, mais les entreprises françaises dont Air France fait partie pourraient subir des sanctions fiscales. L'accord avec le Panama est le seul des trois à avoir été ratifié par l'autre Partie ; il pourrait donc entrer très rapidement en vigueur.

Ces trois accords sont de nature à pérenniser nos liaisons aériennes et par là nos échanges économiques avec les trois pays concernés, qui représentent de forts potentiels de croissance. Ils ont recueilli l'approbation d'Air France, principal transporteur aérien concerné à court terme, et n'appellent pas de modifications de la législation.

Je vous propose par conséquent d'adopter ces trois projets de loi, et de permettre leur examen en séance publique le 10 novembre prochain selon la procédure simplifiée.

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