Madame la présidente, madame le ministre d’État, mes chers collègues, toute violence à l’égard d’un mineur est odieuse et condamnable.
L’acte incestueux, quant à lui, est une violence spécifique qui se nourrit du non-dit. Il constitue l’une des formes les plus abjectes des mauvais traitements infligés aux mineurs, car il est commis par ceux qui auraient dû naturellement protéger l’enfant, le former, l’éduquer et veiller à sa propre sécurité.
Les conséquences de l’inceste sont catastrophiques non seulement sur un plan individuel, mais aussi pour la société dans son ensemble.
Ce fléau remet en cause de façon absolue les droits de l’enfant, mais aussi l’institution familiale elle-même, c’est-à-dire le lieu où se transmettent les valeurs fondamentales de notre société. La famille n’est plus alors l’espace de protection et d’éducation qui assure l’épanouissement de l’enfant ; elle devient au contraire un lieu de souffrance et d’isolement.
La spécificité des violences qui sont infligées à la victime, au regard des traumatismes profonds qu’elles engendrent, mérite d’être reconnue en tant que telle.
En France, deux à trois millions de personnes ont été confrontées à une situation incestueuse et 20 % des procès d’assises concernent des infractions de type incestueux. Or, en dépit des immenses souffrances morales et psychologiques que cause l’inceste, notre droit n’apporte que peu de réponses à celles ou ceux qui en sont victimes.
Certes, le code civil prohibe le mariage et le PACS entre membres d’une même lignée familiale. Certes, le code pénal prévoit des peines aggravées lorsqu’une atteinte sexuelle, une agression sexuelle ou un viol est commis par une personne ayant un lien de parenté avec la victime. Mais il n’existe pour autant ni crime ni délit d’inceste à proprement parler. Or cette absence d’incrimination de l’inceste pèse lourdement sur les victimes et nourrit leur sentiment de ne pas être reconnues de manière spécifique.
Ainsi, cette proposition de loi, qui vise à inscrire pour la première fois dans nos textes la notion d’inceste, est une avancée majeure pour les victimes et pour la justice.