Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais tenter de répondre à vos questions le plus précisément possible.
Il est vrai, madame Lamure, que la configuration du budget a évolué, mais dans un esprit de rationalisation du secteur industriel. Ainsi, la cible de la compensation carbone, que vous avez citée, est d'abord l'industrie. Elle vise en effet à rembourser aux industriels une partie du coût du carbone répercutée dans le prix de leur électricité.
Ce budget est globalement stable, nonobstant notre participation à l'effort demandé à chaque ministère pour tenir l'objectif de réduction des dépenses publiques. Il faut mettre tous ces éléments en perspective.
Vous avez évoqué la diminution des crédits consacrés au FISAC et aux CCI, qui ne relèvent pas directement de mon secrétariat d'État.
La baisse des crédits de paiement du FISAC est faciale : elle résulte essentiellement de l'apurement du stock des dernières années, lequel s'achèvera en 2016. Les autorisations d'engagement seront maintenues par rapport à 2016.
Pour ce qui concerne les CCI, le débat est complexe. Les baisses de taxes qui leur sont affectées correspondent aux capacités d'économies réelles du réseau. La diminution importante du nombre de structures rend possible la baisse de 60 millions d'euros proposée dans le projet de loi de finances pour 2017. L'apprentissage est sanctuarisé, car il bénéficie de fonds dédiés.
S'agissant des éléments d'intervention, je rappelle l'importance du dispositif France Expérimentation. Les entreprises n'ont jamais le sentiment que les efforts de simplification administrative se traduisent concrètement. Il s'agit d'être pragmatique face aux difficultés des entreprises et de trouver des solutions interministérielles pour simplifier leur quotidien. Dans le cadre des premiers appels à candidature, 50 dossiers ont été déposés. Nous les examinons pour répondre concrètement à ces enjeux essentiels. Par ailleurs, la mise en place de la déclaration sociale nominative permettra également de simplifier les formalités des entreprises.
Je vous confirme, monsieur Bourquin, que le suramortissement prendra fin en avril 2017. L'ensemble de l'effort engagé n'est pas sans résultat, loin s'en faut.
À cet égard, madame Lamure, le tableau que vous avez dressé me paraît bien sombre. Je rappelle quelques éléments importants. L'investissement privé a augmenté de 7 % entre 2015 et 2016. Les marges se rétablissent, retrouvant le niveau qui était le leur avant la crise. On observe aussi un rétablissement des trésoreries, lié aux dispositifs mis en place. Enfin, 140 000 emplois ont été créés grâce au CICE.
Le rétablissement des marges et des trésoreries, c'est autant d'emplois qui n'ont pas été supprimés !
La proposition gouvernementale de porter le taux du CICE de 6 % à 7 % participe de cette ambition, même si le parcours est complexe. Le rétablissement de la situation des entreprises ne se fait pas en quelques mois. Il nous faut poursuivre l'effort, mais l'engagement est pris.
J'en viens au projet Industrie du futur. En amont du dernier Conseil « compétitivité » à Bruxelles, nous avons rencontré nos partenaires allemands, qui ont mis en place le dispositif Industrie 4.0. Le Parlement européen a réaffirmé la nécessité d'une politique industrielle à l'échelle communautaire. Je m'en réjouis, car c'est un enjeu déterminant.
Il faut avoir à l'esprit que, dans certains pays européens, l'industrie n'existe plus. Leur objectif n'est pas le développement de politiques industrielles, mais de politiques d'achat de produits manufacturés au plus bas prix.
Avec l'Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni, l'Italie, nous soutenons cet enjeu de politique industrielle européenne. Je suis très satisfait, à cet égard, qu'ait été réaffirmé l'objectif de 20 % du PIB consacré aux enjeux industriels, car il nous permettra de mener ensemble ces politiques.
Il est vrai, monsieur Vaugrenard, que nous sommes confrontés à une concurrence parfois déloyale. Il faut se réjouir que l'Europe, face à l'agressivité du secteur chinois de l'acier, ait défini 37 mesures qui sont autant d'outils donnés à nos industriels pour lutter à armes égales.
Redresser l'industrie nécessite d'analyser lucidement la situation industrielle. Il ne s'agit pas d'en revenir aux bassins industriels que nous avons connus dans le passé, par exemple à l'est de la France. Il faut travailler sur l'enjeu de modernisation, car toutes les industries sont confrontées à des révolutions, qu'elles soient écologiques ou numériques. Cela signifie non pas qu'il faille tout réduire à l'industrie du numérique, mais que toutes les entreprises, y compris celles qui sont ancrées dans les territoires, doivent intégrer le numérique dans leur outil de production.
Les pôles de compétitivité sont importants, car ils mobilisent les acteurs autour d'une même ambition et d'une thématique industrielle forte. Nous devons veiller à ne pas les démobiliser. Porter une appréciation qualitative sur ces pôles, selon qu'ils sont d'échelon régional ou national, c'est ubuesque au regard de la capacité économique et industrielle conférée aux régions par le législateur !
Il faut être cohérent. On ne peut pas, à la fois, dire que les régions sont les animateurs essentiels des politiques économiques et considérer qu'un pôle maintenu à l'échelon régional est sous-coté. Si l'on n'évolue pas sur cette question, on raisonnera toujours en termes de pôles nationaux « vertueux » et de pôles régionaux qui le seraient moins.
Arrêtons donc de parler de pôles nationaux ou régionaux. Il existe des pôles dans le domaine agricole, dans ceux de la défense ou de l'industrie. Pourquoi les crédits d'animation ne pourraient-ils pas être gérés au niveau régional ? En revanche, la Direccte doit participer à la gouvernance des pôles de compétitivité et l'État doit être garant de la stratégie. Il doit aussi conserver sa capacité à intervenir. Cessons donc de considérer le national comme plus important que le régional et soutenons les pôles de compétitivité, quitte à leur faire des remarques s'ils ne sont pas assez dynamiques. En tous cas, nous ne proposons pas de dé-labellisation.
En ce moment, je suis le dossier STX quasi-quotidiennement. Le 4 novembre, quatre offres ont été déposées devant le tribunal de commerce de Séoul. Deux présentent la vocation industrielle dont la France souhaite, pour des raisons stratégiques évidentes, que le repreneur soit doté. J'ai reçu l'ambassadeur de Corée pour lui expliquer notre position et lui rappeler que nous disposons de deux leviers : notre minorité de blocage et le dispositif sur les investissements étrangers. J'ai passé le même message au ministre de l'industrie coréen, que j'ai eu au téléphone la semaine dernière. Cela dit, c'est le tribunal de commerce de Séoul qui procède à la vente, et c'est à lui que la décision revient. Nous saurons le 11 novembre si les dossiers déposés sont recevables et le calendrier, ensuite, sera plus ou moins rapide. Je n'entrerai pas dans la question de la composition du consortium, mais il ne serait pas anormal que DCNS participe à cette réflexion industrielle.
La stabilité globale des moyens concerne les crédits de l'État, monsieur Gremillet, et suppose que le budget des collectivités territoriales n'augmente pas dans le même temps. L'État assume clairement son rôle. Le Gouvernement a mobilisé 40 milliards d'euros pour soutenir les entreprises : qu'on ne dise pas qu'il reste en-deçà ! D'aucuns lui reprochent d'ailleurs d'en faire trop.
Le nombre de priorités pour l'industrie du futur est en effet passé à neuf. Nous souhaitons une gouvernance partagée entre les industriels et l'État ; 500 entreprises sont engagées dans l'industrie du futur, autour de 1 000 projets, soutenus à hauteur de 1,9 milliard d'euros. Lancé en avril 2015, ce dispositif est en développement. J'ai participé au comité de pilotage il y a quelques jours. Le fait que BPI France renforce d'un milliard d'euros son enveloppe de prêts à destination des PME révèle bien notre mobilisation en leur faveur. Elles en ont besoin pour les accompagner dans l'innovation, qui peut représenter un risque important pour elles.
J'ai rencontré le président de l'ARF, et lui ai dit que nous souhaitons réaffirmer la place de chacun : l'État n'entend pas se dessaisir des pôles de compétitivité, mais les régions demeurent leurs interlocuteurs privilégiés.