Six sapeurs-pompiers sont décédés dans l'exercice de leur mission en 2014 et trois autres déjà cette année. Je voudrais saluer l'engagement des sapeurs-pompiers au service de la communauté et rendre hommage à leur courage et à leur civisme. Je vous y associe bien entendu mes chers collègues.
Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2017 au titre de la sécurité civile sont en augmentation de 5,79 % en autorisations d'engagement et de 6,19 % en crédits de paiement. Les objectifs fixés pour 2017 traduisent la prise en compte, dans le budget, des nouvelles menaces et le renforcement des capacités de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises dans le cadre du pacte de sécurité dont il a été beaucoup question récemment. Il s'agit notamment :
- de l'amélioration de la prise en compte des nouveaux risques par les différents acteurs concernés qui passe par le « contrat territorial de réponse aux risques et aux effets des menaces » (CoTRRiM) qui devrait être généralisé dès 2017 ;
- du renforcement de l'action de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) auprès des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), notamment pour promouvoir les mutualisations ouvertes à ces services.
La mise en oeuvre de trois chantiers majeurs de la sécurité civile se poursuivra en 2017.
J'aborderai d'abord la déclinaison de la planification nationale en cas d'accident nucléaire majeur. Le centre NRBC-E a pour mission d'améliorer les capacités d'intervention face aux menaces et aux risques de nature nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosive. En 2016, il a formé 2 239 stagiaires, notamment dans la perspective du championnat d'Europe de football. Les conclusions d'un groupe de travail interministériel remises au 1er trimestre de l'année 2016, préconisent des évolutions des plans particuliers d'intervention (PPI) des centres nucléaires de production d'électricité.
Concernant ensuite le nouveau système d'alerte et d'information de la population (SAIP) qui s'est déployé en 2016, précisons qu'au 1er août, 1 092 installations ont été réalisées et réceptionnées, en particulier dans onze départements de l'arc méditerranéen, affectés par les graves intempéries de l'automne 2015 et aujourd'hui équipés de 226 sirènes.
En revanche, en raison de reports successifs dus au prestataire, la livraison du logiciel de déclenchement a été retardée de 36 mois. Sa première version, livrée en avril dernier, fait l'objet de tests tant au niveau central que dans des préfectures-pilotes. Il devrait être opérationnel, pour les préfectures, en 2017. En attendant, les sirènes sont déclenchables à distance, à partir des préfectures, au moyen d'un outil provisoire.
À la suite des terribles attentats terroristes de l'année 2015, une première version du volet téléphonie a été mise en ligne en juin 2016 dans le cadre du championnat d'Europe de football. Malheureusement, ce dispositif n'a pas fonctionné lors du tragique événement survenu à Nice le 14 juillet dernier en raison d'un défaut de conception technique aujourd'hui pris en compte. Redéclenché par précaution pour une fausse alerte terroriste dans une église il y a quelques semaines, le système a cette fois fonctionné.
Une version intégrant les risques autres que le terrorisme est en cours de commande. À ce jour, l'application pour les téléphones mobiles, disponible gratuitement sur les plateformes d'achat, a été téléchargée 700 000 fois.
Le dernier chantier majeur concerne le taux des SDIS équipés de terminaux Antarès. Il est de 83,5 % pour 2015 et estimé à 86 % fin 2016. Le ministre de l'intérieur a parlé lors de son audition hier de 95 %, mais il s'agit plutôt de 86 %. Antarès est disponible dans tous les départements métropolitains. Mais sur certaines parties du territoire, la couverture n'est pas satisfaisante, voire inexistante dans certaines zones. Depuis 2013, l'État effectue des travaux d'optimisation du réseau. En convergence, l'infrastructure nationale partagée des transmissions (INPT) est en cours de modernisation. Ce chantier est doté de 150 millions d'euros sur six ans. Il devrait permettre aussi de prolonger la durée de vie du réseau jusque vers 2030 et donc allonger la durée d'amortissement des équipements. Le déploiement d'Antarès se poursuit outre-mer. Des travaux d'optimisation de sa couverture ont été conduits en 2015 et 2016 à la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion. En 2017, seront lancées en Guyane et à Mayotte les études préalables à la couverture d'Antarès.
L'achèvement total du projet est prévu fin 2019, donc nous sommes en retard.
En revanche, la réflexion sur l'équipement de la flotte d'aéronefs par un système de radio compatible avec Antarès n'a pas encore trouvé de solution satisfaisante. Une expérimentation doit intervenir au cours du premier semestre 2017.
Je souligne deux novations pour ce budget 2017.
D'abord la création d'un fonds d'accompagnement des projets structurants de sécurité civile, d'un montant de 20 millions d'euros, dès 2017, pour appuyer les efforts des SDIS qui en ont le plus besoin pour s'équiper. Cette annonce sera vraisemblablement concrétisée par l'adoption d'un amendement au projet de loi de finances.
En réalité, plutôt que d'un effort financier supplémentaire de l'État, ces crédits résultent d'un redéploiement des économies attendues de la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) versée aux sapeurs-pompiers volontaires. Cette réforme, qui s'inscrit dans les travaux d'un groupe de travail créé par l'Assemblée des départements de France (ADF), est inscrite dans une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale et en cours d'examen, pour laquelle vous venez d'ailleurs de me témoigner votre confiance en me nommant rapporteur. Pour 2015, les contributions des SDIS s'élevaient à 70 millions d'euros environ dont près de 32 millions d'euros compensés par l'État. Pour 2017, dans le nouveau dispositif, la contribution de l'État au financement de la PFR est inscrite à hauteur de 3,4 millions d'euros. Sur le solde de sa contribution antérieure, 20 millions alimenteront donc une dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS. Cette enveloppe devrait être reconduite pour les années ultérieures.
Pour le reste, seront également financées la création et la montée en puissance d'une réserve nationale de sécurité civile, à hauteur de 3,6 millions d'euros, et l'accompagnement ponctuel au titre du transfert au gouvernement de Nouvelle-Calédonie de la compétence « sécurité civile », à hauteur de 5 millions d'euros.
Parmi les opérations ouvertes au financement du nouveau fonds, on peut identifier :
- le projet de système de gestion opérationnelle des SDIS unifié au niveau national, dont le coût est évalué à 600 millions d'euros sur 10 ans ;
- plus largement, les projets structurants des SDIS tels que l'expérimentation du projet d'unification des plateformes d'appel d'urgence ou des projets élaborés dans le cadre du contrat territorial comme la constitution d'une capacité nationale de lutte contre les feux de navires en mer.
Il s'agit de projets nationaux, mais qui seront de toute façon déclinés territorialement, pour renforcer la capacité des services d'incendie et de secours à répondre aux multiples risques.
Le nouveau fonds de soutien aux SDIS est donc particulièrement « fléché » vers la mise en place d'un système de gestion opérationnelle unifiée qui vise à uniformiser les logiciels équipant les centres de traitement des appels et les centres opérationnels des SDIS. Aujourd'hui, ceux-ci s'organisent de manière autonome.
L'évolution des risques et des technologies de communication a conduit le ministère de l'intérieur à lancer une étude sur la faisabilité d'un tel projet. Celui-ci doit permettre son interopérabilité avec les systèmes et les applications des autres acteurs publics ou privés de secours et de la sécurité, principalement les SAMU et les forces de police et de gendarmerie. Ce projet sera lancé en 2017 en y associant l'ADF et l'Association des maires de France sur la gouvernance et le déploiement du projet.
Je souscris totalement à l'architecture de ce projet. Je regrette, toutefois, que cette démarche s'arrête au milieu du gué. En effet, l'objectif assigné au système unifié ne sera pas pleinement atteint sans que ce mécanisme soit élargi à l'ensemble des services d'urgence dont, au premier rang, les SAMU. Or, le ministère chargé de la santé a choisi, certes, par un mouvement comparable, de construire l'homogénéisation des systèmes d'information des plateformes de réception des appels au 15 mais selon une réflexion interne, sans tenir compte des missions assumées par les sapeurs-pompiers dans le secours à personne et en ignorant les relations et l'interaction quotidiennes des « blancs » et des « rouges ». Personnellement, je pense qu'il s'agit d'un gaspillage.
En conséquence, aujourd'hui, deux ministères, l'intérieur et la santé, se sont engagés dans la construction parallèle de systèmes unifiés de leurs propres services d'urgence. On doit cependant noter que le ministère de l'intérieur, dans une vision d'ensemble, a prévu, dans ce cadre, l'interopérabilité du futur système unifié avec les dispositifs des autres acteurs publics et privés intervenant en matière de secours et de sécurité.
Je regrette que les deux chantiers en cours n'aient pas été joints dans un cadre interministériel, ainsi que nous l'avions recommandé avec notre collègue Pierre-Yves Collombat dans notre très récent rapport consacré à l'évolution croissante du secours à personne dans l'activité des SDIS.
Il s'agit de la première étape, indispensable, vers un système unifié au niveau national et généralisé à l'ensemble des acteurs du secours.
Dans un deuxième temps, il faudrait consolider les mutualisations entre SAMU et SDIS avant de l'élargir au « 17 », numéro d'appel des services de police et de gendarmerie.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité civile » pour 2017.