La réunion

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René Vandierendonck est nommé rapporteur sur la proposition de loi n° 587 (2015-2016), présentée par MM. Bruno Sido, Benoît Huré et Jean-Jacques Lasserre, tendant à clarifier les conditions des délégations de compétences en matière de transports scolaires.

Catherine Troendlé est nommée rapporteur sur la proposition de loi n° 4044 (A.N. XIVème lég.), relative aux sapeurs-pompiers professionnels et aux sapeurs-pompiers volontaires (procédure accélérée).

La commission examine le rapport pour avis de M. Jean-Pierre Sueur sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Pouvoirs publics »).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous devons examiner sept rapports pour avis ce matin. J'invite les rapporteurs pour avis à faire preuve de concision dans leur présentation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J'ai cru comprendre qu'une majorité de nos collègues avaient décidé de mettre en oeuvre une conception radicale de la concision, en prévoyant une question préalable sur l'ensemble du budget. Comme nous l'avons déjà dit au Président du Sénat et aux représentants des groupes de la majorité sénatoriale, je réaffirme notre totale opposition à cette décision qui aurait pour effet de supprimer tout débat tant sur les recettes que sur les dépenses, ce qui est sans précédent dans notre assemblée. Il y a là une sorte d'abandon de poste. Rien n'est plus important pour des parlementaires que d'examiner la loi de finances. On peut être pour, on peut être contre, mais il faut débattre, défendre nos amendements ; décider qu'on n'en parlera pas, c'est porter un coup à l'institution parlementaire et donner des idées à ceux qui critiquent déjà le Sénat. Ne pas parler du budget de la police, de la justice ou de l'agriculture, ce serait une faute grave.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je souhaite que vos propos parviennent jusqu'à la commission des finances à qui il revient de se déterminer sur ce sujet. Comme vous, j'ai eu écho de la position du rapporteur général sur ce projet de loi de finances pour 2017. La sincérité de ce projet de budget suscite une vive préoccupation au Sénat. Ce qui importe à notre commission des lois, c'est que le débat ait lieu entre nous sur les budgets dont nous sommes saisis, afin de transmettre un avis à la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

L'examen du budget est une opération parfaitement formelle. Ce qui rend la méthode inacceptable, c'est que l'on a fait travailler les collaborateurs des cabinets et les fonctionnaires des ministères pour découvrir au final qu'on ne discutera pas ce budget. Ce n'est pas correct.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

La mission « Pouvoirs publics » regroupe les crédits de la Présidence de la République, des assemblées parlementaires, de la Chaîne parlementaire, du Conseil constitutionnel et de la Cour de justice de la République.

Pour ce qui est de la Présidence de la République, l'effort d'économies est important. La dotation est plafonnée à 100 millions pour la troisième fois consécutive, grâce à la poursuite de la réduction des effectifs, soit 9 % d'agents en moins en cinq ans. On est ainsi passés de 882 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au 1er décembre 2011 à 806 ETPT au 31 décembre 2016. Le montant de la masse salariale s'est stabilisé en dépit des effets du glissement-vieillesse-technicité (GVT). Un effort considérable a été fourni sur le nombre des chauffeurs affectés, puisque seules quatre personnes en bénéficient : le Président de la République, le Secrétaire général, le directeur de cabinet et le chef d'État-major. Il faut également souligner que quinze véhicules électriques ou hybrides sont en circulation.

La Cour des comptes avait remarqué un recours important aux heures supplémentaires. Les représentants de l'Élysée que nous avons rencontrés nous ont expliqué qu'un certain nombre de ces heures supplémentaires était incompressible. Cependant, le montant total consacré aux heures supplémentaires est passé de 1,5 million d'euros en 2013 à 1,62 million en 2014 et à 1,41 million en 2015. En 2016, le montant devrait être inférieur de presque 28 % à celui de 2011. Un nombre limité de recrutements dans quelques services et les efforts fournis en matière informatique ont contribué à cette réduction des heures supplémentaires.

Les ressources propres représentent 4,55 millions d'euros, qui proviennent des loyers, mais aussi du remboursement d'une partie des frais des participants aux déplacements officiels, ce qui n'a pas toujours été le cas.

La sécurité est un champ sur lequel il serait inconséquent de réaliser des économies, qu'il s'agisse de la sécurité matérielle du palais de l'Élysée ou de la sécurité de l'Internet. La sécurité des systèmes numériques de la Présidence de la République est une absolue nécessité. Au début de l'année 2017, on devrait achever l'installation des données relevant de l'Élysée et de la Défense nationale dans un centre de data publiques hautement sécurisé.

Quant aux assemblées parlementaires, elles ont également poursuivi leur effort budgétaire. Les dotations sont reconduites à l'identique, ce qui rend nécessaire un prélèvement sur les disponibilités, à l'Assemblée nationale comme au Sénat. M. Le Fur, rapporteur spécial de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a pour obsession de faire figurer, chaque année, un couplet sur le jardin du Luxembourg dans son rapport. Il considère que l'entretien du jardin représente une dépense élevée qui devrait être prise en charge par la mairie de Paris plutôt que par le Sénat. Il estime que les Bretons payent à tort pour l'entretien de ce jardin. Je rappelle que 8 à 10 millions de personnes fréquentent ce jardin, chaque année, ce qui suffit à démontrer sa vocation nationale et internationale. On ne peut pas en dire autant du jardin de l'Assemblée nationale, dont l'accès est réservé à son seul président. Le Sénat n'a pas de complexe à avoir sur ce sujet.

J'ai en tout cas mentionné la philippique de M. Le Fur dans mon rapport.

Les crédits sont en légère hausse pour LCP Assemblée nationale. Ils sont légèrement réduits pour Public Sénat.

M. Fabius, le nouveau président du Conseil constitutionnel, nous a expliqué la nécessité d'augmenter les crédits de cette institution. C'est la seule augmentation qui figure dans le budget de cette mission. Les dotations ont baissé pendant sept années consécutives. Le précédent président du Conseil constitutionnel, dont je salue la bonne gestion, avait commencé par augmenter les crédits pour les diminuer dans les années suivantes. La hausse du budget se justifie par le fait que nous aurons trois élections nationales en 2017. Pour l'élection présidentielle, la loi que nous avons votée récemment impose des tâches supplémentaires au Conseil constitutionnel, notamment pour l'enregistrement et la publication des parrainages.

Contrairement à ce que l'on pouvait attendre, le nombre des questions prioritaires de constitutionnalité ne diminue pas, comme c'est d'ailleurs le cas pour d'autres cours constitutionnelles. Il est apparu nécessaire de poursuivre la rationalisation du travail, notamment en matière informatique.

M. Fabius souhaite poursuivre la simplification de l'écriture du droit. Il nous a ainsi fait remarquer la suppression déjà effective des « Considérant... » dans les décisions du Conseil constitutionnel. Il envisage aussi des actions en direction des jeunes et des écoles pour améliorer leur connaissance du droit et de la Constitution. Enfin, il prévoit de développer les relations avec les cours constitutionnelles, que ce soit avec l'Allemagne, les pays du sud de l'Europe mais aussi dans le cadre de la francophonie.

La Cour de justice de la République est une juridiction à l'activité permanente. Elle est composée d'une commission des requêtes et d'une instance chargée de l'instruction. En 2015, on a enregistré 42 requêtes mettant en cause 88 ministres en fonction ou sortis d'exercice. Beaucoup d'entre elles ont été écartées. La commission chargée de l'instruction travaille actuellement sur l'affaire Karachi où sont impliqués MM. Balladur et Léotard. Enfin, le procès concernant Mme Christine Lagarde s'ouvrira le 12 décembre, ce qui obligera certains d'entre nous à délaisser temporairement leurs fonctions au Sénat pour siéger au sein de la formation de jugement.

Dans la mesure où il n'y a pas de changement significatif par rapport aux années précédentes, je propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Saugey

Je suis intervenu auprès de la mairie de Paris au sujet du jardin du Luxembourg. C'est un jardin qui nous coûte cher. Pour entretenir 27 hectares et la plus belle serre d'orchidées de France, le Sénat emploie 70 jardiniers. J'aurais souhaité que la mairie de Paris participe. Manifestement, ce n'est pas possible.

La Cour de justice de la République siègera du 12 au 20 décembre. Elle comptera parmi ses membres six sénateurs titulaires et six sénateurs suppléants qui devront tous être présents pendant les huit jours du procès.

À ceux qui disent que le Sénat coûte cher, je rappelle qu'il représente une dépense de cinq euros par Français et par an, contre sept euros pour l'Assemblée nationale. Au total, le Parlement coûte 12 euros par an à chaque contribuable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Donc, s'il faut supprimer l'une des deux chambres, l'intérêt économique voudrait que l'on supprime plutôt l'Assemblée nationale...

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Selon M. Dosière, l'Élysée coûte 3,5 euros par foyer et par an, soit l'équivalent de quatre baguettes de pain.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

L'Élysée et Matignon font le même travail. On pourrait supprimer l'un des deux...

La Commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».

La commission examine le rapport pour avis de M. Michel Delebarre sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Conseil et contrôle de l'État », programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives » et « Cour des comptes et autres juridictions financières »).

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Delebarre

Le programme 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives » et le programme 164 « Cour des comptes et autres juridictions financières », qui relèvent tous deux de la mission « Conseil et contrôle de l'État », présentent certaines similitudes. Les juridictions administratives et financières bénéficient de conditions budgétaires relativement favorables leur permettant d'exercer leurs missions dans des conditions satisfaisantes. Cependant, l'extension continue des champs de compétences respectifs de ces deux ordres de juridictions, au fil des réformes législatives, menace le fragile équilibre atteint, d'autant que la recherche de gains de productivité, à travers des réformes de procédures ou d'organisation, semble avoir atteint ses limites.

Les juridictions administratives voient leur budget progresser de 2,6 % en crédits de paiement. Comme les années précédentes, cette augmentation est affectée prioritairement au renforcement des moyens humains de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui devrait bénéficier de la plupart des 60 nouveaux emplois créés. Sans remettre en cause la nécessité de renforcer les effectifs de la CNDA, les créations destinées aux juridictions administratives sont jugées nettement insuffisantes par les représentants des syndicats de magistrats administratifs que j'ai reçus, eu égard à l'augmentation de la charge de travail à laquelle ces juridictions font face. De fait, la juridiction administrative est, en quelque sorte, victime de son succès. Au fil des réformes, nous lui confions des missions toujours plus nombreuses et parfois quelque peu éloignées de son coeur de métier, comme l'ont relevé les représentants du Conseil d'État que j'ai reçus. Pour ne citer que quelques exemples, la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurité de l'emploi a prévu que le juge administratif est compétent pour connaître des recours contre les décisions de validation ou d'homologation par l'administration des plans de sauvegarde de l'emploi, avec un délai de jugement fixé à trois mois quel que soit le degré de juridiction ; la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles a prévu la dépénalisation du stationnement payant à compter du 1er octobre 2016 ; la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement a prévu une saisine systématique du Conseil d'État pour connaître des requêtes concernant la mise en oeuvre des techniques de renseignement. Ce type de contrôles a priori est tout à fait nouveau puisque les magistrats administratifs n'interviennent, à l'heure actuelle, qu'a posteriori en contestation de décisions rendues. En outre, la loi du 29 juillet 2015 portant réforme du droit d'asile et la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France ont créé de nouvelles procédures enserrées dans des délais contraints, dont certaines sont entrées en vigueur le 1er novembre dernier ; la loi du 8 août 2016 relative au travail a confié au juge administratif compétence pour connaître des recours contre certaines décisions de l'inspection du travail en matière de protection des travailleurs. Enfin, la proposition de loi portant accélération des procédures et stabilisation du droit de l'urbanisme, de la construction et de l'aménagement, que nous avons adoptée en première lecture le 2 novembre dernier, prévoit qu'« en matière de contentieux de l'urbanisme, le tribunal administratif prononce sa décision dans un délai de six mois à compter de l'enregistrement de la réclamation au greffe ».

Pour faire face à ces nouvelles compétences, sans augmenter considérablement les moyens des juridictions et sans solliciter encore davantage les personnels et les magistrats, deux pistes de réformes ont été dégagées par le Conseil d'État : développer la médiation et utiliser des outils procéduraux, comme le recours au juge unique, pour rationaliser le contentieux. Ces propositions ont trouvé une traduction dans le projet de loi de modernisation de la justice du XXIème siècle, adopté définitivement par l'Assemblée le 12 octobre dernier, et dans le décret dit « Justice administrative de demain » du 2 novembre 2016.

Cependant, l'utilisation de ces outils n'est pas neutre au regard du droit d'accès à un juge et de la qualité de la justice rendue. Ainsi en est-il du recours croissant aux décisions rendues à juge unique. Certes, le recours à ce type de procédures, et notamment aux ordonnances, permet de traiter rapidement les contentieux de masse, répétitifs, comme les contentieux sociaux, et de réserver la collégialité aux affaires dans lesquelles il existe de véritables difficultés. En 2015, environ 58 % des affaires jugées devant les tribunaux administratifs l'ont été par un juge unique, les autres l'ont été en formation collégiale.

Le recours aux procédures à juge unique va encore s'intensifier dans les années à venir compte tenu des réformes récentes, comme la loi du 29 juillet 2015 relative au droit d'asile ou la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, qui ont institué plusieurs procédures à juge unique, enserrées dans des délais contraints, ou l'entrée en vigueur du décret « Justice administrative de demain » du 2 novembre 2016, qui élargit le recours aux ordonnances et permet, en particulier, de rejeter les requêtes d'appel manifestement mal fondées ou les recours en cassation « manifestement dépourvus de fondement ». Cette dernière disposition s'est heurtée à une forte opposition des syndicats de magistrats administratifs qui craignent une utilisation abusive de ces outils. Ils estiment qu'eu égard à l'augmentation du nombre des entrées et à la nécessité de maintenir un taux de couverture positif, le risque est grand de voir le nombre d'affaires réglées par ordonnance augmenter, ce qui pose de véritables questions éthiques.

Ce mouvement pourrait également être perçu comme une stigmatisation d'une partie des requérants, qui ne bénéficient pas de toutes les garanties offertes par la procédure administrative de droit commun. De plus, le développement des outils de traitement rapide des contentieux de masse pourrait avoir une incidence sur les indicateurs de performances, et notamment sur les objectifs fixés en termes de nombre d'affaires réglées par magistrat ou par agent de greffe. Les marges d'amélioration des performances seront désormais extrêmement faibles compte tenu de la difficulté moyenne des dossiers qui resteront à traiter et du temps passé pour l'examen de ces dossiers complexes.

Au titre de la prévention du contentieux, le Conseil d'État entend favoriser le développement des procédures de règlement amiable des litiges, estimant que la réponse juridictionnelle n'est pas toujours la plus adaptée. L'article 5 du projet de loi de modernisation de la justice du XXIème siècle, actuellement déféré au Conseil constitutionnel, unifie les modes de règlement amiable des litiges en matière administrative en une procédure unique de médiation. De plus, ce texte prévoit, pour une durée de quatre ans, une expérimentation de médiation obligatoire avant l'introduction d'un recours contentieux devant les juridictions administratives, dans des conditions fixées par un décret en Conseil d'État, pour les contentieux sociaux (RSA, DALO...) ou pour certains contentieux de la fonction publique. Cette expérimentation pourrait être confiée au Défenseur des droits et à son réseau de délégués.

Bien que favorable, dans son principe, au développement de la médiation, je m'interroge sur la place de cet outil dans le contentieux administratif. L'exigence d'une décision administrative de rejet de la demande, préalable à toute saisine du juge, participe en effet déjà de cette démarche. En outre, pour un certain nombre de contentieux tels que le contentieux de la sécurité sociale, le contentieux de la fonction publique ou le contentieux relatif au revenu de solidarité active (RSA), un recours administratif préalable obligatoire (RAPO) est prévu par les textes. Le cumul potentiel d'un recours administratif préalable obligatoire et d'une mesure de médiation risque d'éloigner le justiciable de son juge. Par ailleurs, les contentieux sociaux et les contentieux de la fonction publique, concernés par l'expérimentation de médiation préalable obligatoire, représentent respectivement 16 % et 12 % des recours enregistrés.

Si l'on comprend l'objectif de cette mesure qui est de décharger les juridictions administratives des contentieux de masse qui les engorgent, on peut néanmoins s'interroger sur l'opportunité de leur transfert au réseau de délégués bénévoles du Défenseur des droits et sur la capacité de ce réseau à assurer une telle mission.

En raison des nombreuses imprécisions s'attachant à cette expérimentation, notre commission, suivie par le Sénat, l'avait supprimée du projet de loi sur la justice du XXIème siècle en nouvelle lecture. Elle a été rétablie en lecture définitive par l'Assemblée nationale. Si cette disposition demeurait dans le texte à l'issue de son examen par le Conseil constitutionnel, notre commission devrait être particulièrement attentive, dans les années à venir, à sa mise en oeuvre.

À moyens constants, les juridictions financières ne pourront accomplir les nouvelles missions qui leur sont confiées. Le budget de ces juridictions est en légère hausse de 0,5 %, avec un plafond d'emplois qui reste stable à 1 840 ETPT. Cependant, la consommation d'emplois est inférieure au plafond de 84 ETPT, en raison du gel temporaire des recrutements en 2015, afin de faciliter la mobilité interne, dans la perspective de la mise en oeuvre de la réforme territoriale. Celle-ci s'est faite en deux étapes : la loi du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles a réduit de 22 à 15 le nombre de chambres régionales des comptes pour la métropole. Ensuite, la loi du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral a réduit le nombre de chambres régionales des comptes métropolitaines de 15 à 13. Ces regroupements ont permis aux juridictions financières d'atteindre une taille critique et de générer des économies grâce à la suppression de loyers, à la cession de sites et à la mutualisation des fonctions support des juridictions. Faute d'un recul suffisant, il est difficile, à ce stade, de chiffrer précisément le montant de ces économies. La carte des chambres régionales et territoriales des comptes correspond désormais à la carte des régions et il sera difficile d'aller au-delà. Les gains de productivité des juridictions financières générés par les regroupements ont ainsi atteint leurs limites.

Lors de son audition, M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, a souligné la nécessité, compte tenu de la multiplication des missions confiées aux juridictions financières, de prévoir, dans les années à venir, les crédits suffisants à la consommation du plafond d'emplois dans son intégralité, sous peine de voir les performances de ces juridictions se dégrader.

Au titre de ces nouvelles compétences, la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) a prévu un dispositif d'expérimentation de certification des comptes de collectivités territoriales, conduite par la Cour des comptes, en liaison avec les chambres régionales des comptes. Cette expérimentation durera jusqu'en 2023. Lorsque les résultats de cette expérimentation seront connus, le législateur interviendra pour déterminer les suites à lui donner. L'évaluation des moyens humains de cette expérimentation varie en fonction du nombre et de la taille des collectivités mais devrait représenter entre 15 et 20 ETPT pour un échantillon de l'ordre d'une vingtaine de collectivités pesant un total de moins de 15 milliards d'euros. Si l'échantillon était constitué de 45 collectivités, le besoin serait de 45 ETPT. La charge de travail induite ne pourra être supportée sans crédits et emplois supplémentaires.

La loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a confié aux juridictions financières une nouvelle compétence de contrôle de la gestion des établissements et services sociaux et médico-sociaux et des établissements de santé privés. Ces organismes n'étaient jusqu'à présent pas contrôlés alors qu'une part importante de leurs ressources est d'origine publique. Les premiers contrôles débuteront en 2017 et porteront sur un échantillon restreint d'établissements. Ces travaux se feront à moyens constants. Dans un second temps, toutefois, comme ces établissements représentent 36 000 organismes et plus de 33 milliards d'euros, ainsi que des enjeux de service public majeurs, la charge de cette mission pour les juridictions financières risque d'être trop importante pour qu'elle puisse s'exercer à moyens constants.

En conclusion, une attention toute particulière sera portée l'an prochain à l'adéquation des crédits prévus aux nouvelles missions confiées aux juridictions administratives et financières. Pour l'heure, je propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes 164 et 165, qui devraient permettre à ces juridictions d'exercer leurs missions dans des conditions satisfaisantes cette année encore.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes « Conseil d'État et autres juridictions administratives » et « Cour des comptes et autres juridictions financières » de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».

La commission examine le rapport pour avis de M. Pierre-Yves Collombat sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Administration générale et territoriale de l'État »).

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Cette mission ne sera probablement pas examinée en séance, comme le reste du budget, d'ailleurs ; je vais pourtant essayer d'être synthétique.

La mission « Administration générale et territoriale de l'État » comprend trois programmes : le plus important est le programme 307 « Administration territoriale » de l'État, qui comprend les crédits réservés aux préfectures et aux sous-préfectures. Ensuite, le programme 232 « Vie politique, cultuelle et associative » aura pour mission essentielle l'organisation des élections en 2017. Enfin, le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » inclut les fonctions support et la gestion des affaires juridiques et contentieuses du ministère de l'intérieur.

Ce dernier programme voit ses crédits augmenter, mais essentiellement par le transfert des crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance.

Concernant le programme « Vie politique, cultuelle et associative », la hausse des crédits est vertigineuse : plus de 200 %, mais c'est en raison des élections présidentielle, législatives et sénatoriales en 2017. Le Gouvernement a proposé pour la troisième fois depuis 2012 la dématérialisation de la propagande électorale. Avec la même constance, l'Assemblée nationale l'a refusée. Ces petites économies pourraient nuire à la démocratie. Les électeurs pourraient estimer que cette dématérialisation est une marque de dédain à leur égard : soit ils ne se déplaceraient pas, soit leur vote serait protestataire. Ne commettons pas cette faute, surtout à l'heure actuelle.

Les crédits du programme « Administration territoriale » sont les plus importants : ils augmentent de 3,4 % en autorisations d'engagement et 3,1 % en crédits de paiements. Cet accroissement masque pourtant la suppression des 500 équivalents temps plein (ETP) qui constituent la première partie des 1 300 suppressions prévues dans le cadre du plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG). Avec ce plan, les missions et l'organisation des préfectures sont en cours de remaniement. La mise en place de plates-formes spécialisées dans l'instruction et la validation des titres en lieu et place des guichets - sauf pour les titres délivrés aux étrangers et les demandes d'asile - devrait permettre à la fois la réduction des effectifs et un redéploiement du personnel sur quatre missions prioritaires des préfectures : gestion des crises, lutte contre la fraude documentaire, expertise juridique et contrôle de légalité, coordination territoriale des politiques publiques.

Je pense que le fichier centralisé TES du Gouvernement est un sous-produit du PPNG, plan lui-même suscité par le plan de réduction des effectifs de l'administration territoriale de l'État : 1 380 ETP réalisés entre 2013 et 2016, 500 prévus pour 2017 et 800 pour 2018, après l'hémorragie du précédent quinquennat. Les effectifs baissent en moindre proportion, mais ils continuent de baisser.

Dans le but louable de compenser cette réduction des effectifs par une redéfnition du rôle des fonctionnaires, a été décidée la création d'une cinquantaine de plates-formes spécialisées dans la délivrance des titres. Un fichier des passeports biométriques existant déjà, il devenait normal de l'utiliser pour créer un fichier unique permettant de simplifier la délivrance des cartes d'identité. La solution au problème des faux papiers et de l'usurpation des identités étant déjà là, il devenait naturel de la choisir. D'autant plus qu'ainsi, les recettes générées par la délivrance des passeports pourraient continuer à financer la gratuité des cartes d'identité. Hier, le ministre de l'intérieur ne s'en est pas caché. Reste à savoir si la généralisation de l'existant est la bonne solution.

Toutes les difficultés pratiques de la réorganisation des directions des sept nouvelles régions selon la logique du multi-sites n'ont pas encore été résolues, même si des progrès ont été réalisés. Le déploiement des moyens numériques, essentiels au bon fonctionnement des directions régionales désormais réparties en plusieurs sites, est inégal selon les régions et dépend largement de l'engagement de l'encadrement. Toutes les solutions techniques nécessaires ne sont pas encore opérationnelles. En attendant, le personnel continue de remplir ses missions, avec des moyens pas toujours adaptés et l'inquiétude liée à une probable centralisation des effectifs au siège, à plus ou moins long terme.

La réorganisation du réseau infra-départemental a abouti à une modification des limites d'une grande partie des arrondissements, mais ne supprime que très peu de sous-préfectures, ce qui ne me chagrine guère. De telles suppressions sont très mal vécues par les élus et la population. Aurait-on enfin réalisé l'importance du maintien de la présence de l'État au niveau infra-départemental et le rôle essentiel du sous-préfet ? Ou est-ce l'effet de l'approche des échéances électorales de 2017 ?

Pour conclure, le constat est toujours le même : l'administration territoriale se réorganise et s'adapte, sur fond de réduction présentée comme inéluctable, au gré des réformes qui lui sont imposées. Son personnel s'engage dans ces changements avec un sentiment mêlant une bonne volonté étonnante et une forme de résignation, tout en nourrissant l'espoir de voir ces réformes prendre fin.

Ainsi, malgré une augmentation modeste des crédits et les tentatives de réorganisation qui ne se limitent pas à la recherche d'économies mais aussi à une revalorisation des fonctions et des emplois, la poursuite de la réduction des effectifs de l'administration territoriale de l'État me conduit à proposer un avis défavorable. Tant que les effectifs diminueront, je ne changerai pas d'avis. Ce n'est pas au moment où le consensus social se délite et où une bonne partie du territoire se sent abandonné qu'il faut poursuivre dans cette direction.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je partage l'avis de notre rapporteur.

Je trouve scandaleuses les tentatives réitérées du Gouvernement de supprimer la propagande officielle par papier. J'ai tenu une conférence de presse il y a deux mois avec des députés et des sénateurs non-inscrits pour protester : cette suppression favoriserait encore un peu plus les grands états-majors qui disposent de moyens logistiques importants, sans compter que les médias ne parlent que d'eux.

Plus généralement, je m'insurge contre le tout numérique : arrêtons de forcer nos concitoyens à n'avoir recours qu'à Internet. Nombreux sont ceux qui peinent à l'utiliser, notamment pour les déclarations d'impôt, de patrimoine etc... Respecter les Français, c'est aussi respecter ceux qui préfèrent le papier.

Il est scandaleux que le Gouvernement ait décidé de passer la durée de validité des cartes d'identité à 15 ans tout en refusant de renouveler celles où il est indiqué 10 ans. En Belgique et en Norvège, les douaniers et les policiers refusent de vous laisser monter dans un avion lorsque vous êtes détenteur d'une telle carte d'identité. Comment leur expliquer que 10 égale 15 ? Sur cette affaire, notre Gouvernement est, pour le moins, surprenant.

Dans mon département, on a obligé des intercommunalités à fusionner alors qu'elles n'avaient aucun point commun entre elles et qu'elles appartenaient à des arrondissements différents. Le préfet de la Moselle leur a dit qu'elles continueraient chacune à rester dans leur arrondissement respectif. Est-ce cela la cohérence territoriale ? Il faut que les limites administratives et les limites des intercommunalités soient identiques. Ma remarque vaut également pour les limites des départements. En serions-nous revenus à la période précédant le décret de 1964 sur l'organisation administrative dans les circonscriptions d'action régionale ? Je ne comprends pas la politique menée par ce Gouvernement, tout comme je ne comprenais pas celle menée sous Sarkozy qui forçait la main des communes avec les commissions départementales de la coopération intercommunale (CDCI) et la fusion des intercommunalités. Je ne voterai donc pas pour les crédits de cette mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Notre groupe ne suivra pas l'avis de notre rapporteur tout en reconnaissant la qualité de son travail. Si nos collègues de la majorité du Sénat étaient tentés de suivre notre rapporteur, ils ne devraient pas soutenir les sept candidats à la primaire qui, en matière de fonction publique, vont très au-delà de ce qui est dénoncé dans ce rapport.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Pour ce qui concerne le manque de moyens de l'administration territoriale de l'État, les responsabilités sont partagées, et nous savons tous que l'accompagnement de l'État au niveau local est nécessaire. Avec ce budget, tel ne sera pas le cas.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».

La commission examine le rapport pour avis de Mme Catherine Troendlé sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Sécurités », programme « Sécurité civile »).

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

Six sapeurs-pompiers sont décédés dans l'exercice de leur mission en 2014 et trois autres déjà cette année. Je voudrais saluer l'engagement des sapeurs-pompiers au service de la communauté et rendre hommage à leur courage et à leur civisme. Je vous y associe bien entendu mes chers collègues.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2017 au titre de la sécurité civile sont en augmentation de 5,79 % en autorisations d'engagement et de 6,19 % en crédits de paiement. Les objectifs fixés pour 2017 traduisent la prise en compte, dans le budget, des nouvelles menaces et le renforcement des capacités de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises dans le cadre du pacte de sécurité dont il a été beaucoup question récemment. Il s'agit notamment :

- de l'amélioration de la prise en compte des nouveaux risques par les différents acteurs concernés qui passe par le « contrat territorial de réponse aux risques et aux effets des menaces » (CoTRRiM) qui devrait être généralisé dès 2017 ;

- du renforcement de l'action de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) auprès des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), notamment pour promouvoir les mutualisations ouvertes à ces services.

La mise en oeuvre de trois chantiers majeurs de la sécurité civile se poursuivra en 2017.

J'aborderai d'abord la déclinaison de la planification nationale en cas d'accident nucléaire majeur. Le centre NRBC-E a pour mission d'améliorer les capacités d'intervention face aux menaces et aux risques de nature nucléaire, radiologique, biologique, chimique et explosive. En 2016, il a formé 2 239 stagiaires, notamment dans la perspective du championnat d'Europe de football. Les conclusions d'un groupe de travail interministériel remises au 1er trimestre de l'année 2016, préconisent des évolutions des plans particuliers d'intervention (PPI) des centres nucléaires de production d'électricité.

Concernant ensuite le nouveau système d'alerte et d'information de la population (SAIP) qui s'est déployé en 2016, précisons qu'au 1er août, 1 092 installations ont été réalisées et réceptionnées, en particulier dans onze départements de l'arc méditerranéen, affectés par les graves intempéries de l'automne 2015 et aujourd'hui équipés de 226 sirènes.

En revanche, en raison de reports successifs dus au prestataire, la livraison du logiciel de déclenchement a été retardée de 36 mois. Sa première version, livrée en avril dernier, fait l'objet de tests tant au niveau central que dans des préfectures-pilotes. Il devrait être opérationnel, pour les préfectures, en 2017. En attendant, les sirènes sont déclenchables à distance, à partir des préfectures, au moyen d'un outil provisoire.

À la suite des terribles attentats terroristes de l'année 2015, une première version du volet téléphonie a été mise en ligne en juin 2016 dans le cadre du championnat d'Europe de football. Malheureusement, ce dispositif n'a pas fonctionné lors du tragique événement survenu à Nice le 14 juillet dernier en raison d'un défaut de conception technique aujourd'hui pris en compte. Redéclenché par précaution pour une fausse alerte terroriste dans une église il y a quelques semaines, le système a cette fois fonctionné.

Une version intégrant les risques autres que le terrorisme est en cours de commande. À ce jour, l'application pour les téléphones mobiles, disponible gratuitement sur les plateformes d'achat, a été téléchargée 700 000 fois.

Le dernier chantier majeur concerne le taux des SDIS équipés de terminaux Antarès. Il est de 83,5 % pour 2015 et estimé à 86 % fin 2016. Le ministre de l'intérieur a parlé lors de son audition hier de 95 %, mais il s'agit plutôt de 86 %. Antarès est disponible dans tous les départements métropolitains. Mais sur certaines parties du territoire, la couverture n'est pas satisfaisante, voire inexistante dans certaines zones. Depuis 2013, l'État effectue des travaux d'optimisation du réseau. En convergence, l'infrastructure nationale partagée des transmissions (INPT) est en cours de modernisation. Ce chantier est doté de 150 millions d'euros sur six ans. Il devrait permettre aussi de prolonger la durée de vie du réseau jusque vers 2030 et donc allonger la durée d'amortissement des équipements. Le déploiement d'Antarès se poursuit outre-mer. Des travaux d'optimisation de sa couverture ont été conduits en 2015 et 2016 à la Martinique, la Guadeloupe et La Réunion. En 2017, seront lancées en Guyane et à Mayotte les études préalables à la couverture d'Antarès.

L'achèvement total du projet est prévu fin 2019, donc nous sommes en retard.

En revanche, la réflexion sur l'équipement de la flotte d'aéronefs par un système de radio compatible avec Antarès n'a pas encore trouvé de solution satisfaisante. Une expérimentation doit intervenir au cours du premier semestre 2017.

Je souligne deux novations pour ce budget 2017.

D'abord la création d'un fonds d'accompagnement des projets structurants de sécurité civile, d'un montant de 20 millions d'euros, dès 2017, pour appuyer les efforts des SDIS qui en ont le plus besoin pour s'équiper. Cette annonce sera vraisemblablement concrétisée par l'adoption d'un amendement au projet de loi de finances.

En réalité, plutôt que d'un effort financier supplémentaire de l'État, ces crédits résultent d'un redéploiement des économies attendues de la réforme de la prestation de fidélisation et de reconnaissance (PFR) versée aux sapeurs-pompiers volontaires. Cette réforme, qui s'inscrit dans les travaux d'un groupe de travail créé par l'Assemblée des départements de France (ADF), est inscrite dans une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale et en cours d'examen, pour laquelle vous venez d'ailleurs de me témoigner votre confiance en me nommant rapporteur. Pour 2015, les contributions des SDIS s'élevaient à 70 millions d'euros environ dont près de 32 millions d'euros compensés par l'État. Pour 2017, dans le nouveau dispositif, la contribution de l'État au financement de la PFR est inscrite à hauteur de 3,4 millions d'euros. Sur le solde de sa contribution antérieure, 20 millions alimenteront donc une dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS. Cette enveloppe devrait être reconduite pour les années ultérieures.

Pour le reste, seront également financées la création et la montée en puissance d'une réserve nationale de sécurité civile, à hauteur de 3,6 millions d'euros, et l'accompagnement ponctuel au titre du transfert au gouvernement de Nouvelle-Calédonie de la compétence « sécurité civile », à hauteur de 5 millions d'euros.

Parmi les opérations ouvertes au financement du nouveau fonds, on peut identifier :

- le projet de système de gestion opérationnelle des SDIS unifié au niveau national, dont le coût est évalué à 600 millions d'euros sur 10 ans ;

- plus largement, les projets structurants des SDIS tels que l'expérimentation du projet d'unification des plateformes d'appel d'urgence ou des projets élaborés dans le cadre du contrat territorial comme la constitution d'une capacité nationale de lutte contre les feux de navires en mer.

Il s'agit de projets nationaux, mais qui seront de toute façon déclinés territorialement, pour renforcer la capacité des services d'incendie et de secours à répondre aux multiples risques.

Le nouveau fonds de soutien aux SDIS est donc particulièrement « fléché » vers la mise en place d'un système de gestion opérationnelle unifiée qui vise à uniformiser les logiciels équipant les centres de traitement des appels et les centres opérationnels des SDIS. Aujourd'hui, ceux-ci s'organisent de manière autonome.

L'évolution des risques et des technologies de communication a conduit le ministère de l'intérieur à lancer une étude sur la faisabilité d'un tel projet. Celui-ci doit permettre son interopérabilité avec les systèmes et les applications des autres acteurs publics ou privés de secours et de la sécurité, principalement les SAMU et les forces de police et de gendarmerie. Ce projet sera lancé en 2017 en y associant l'ADF et l'Association des maires de France sur la gouvernance et le déploiement du projet.

Je souscris totalement à l'architecture de ce projet. Je regrette, toutefois, que cette démarche s'arrête au milieu du gué. En effet, l'objectif assigné au système unifié ne sera pas pleinement atteint sans que ce mécanisme soit élargi à l'ensemble des services d'urgence dont, au premier rang, les SAMU. Or, le ministère chargé de la santé a choisi, certes, par un mouvement comparable, de construire l'homogénéisation des systèmes d'information des plateformes de réception des appels au 15 mais selon une réflexion interne, sans tenir compte des missions assumées par les sapeurs-pompiers dans le secours à personne et en ignorant les relations et l'interaction quotidiennes des « blancs » et des « rouges ». Personnellement, je pense qu'il s'agit d'un gaspillage.

En conséquence, aujourd'hui, deux ministères, l'intérieur et la santé, se sont engagés dans la construction parallèle de systèmes unifiés de leurs propres services d'urgence. On doit cependant noter que le ministère de l'intérieur, dans une vision d'ensemble, a prévu, dans ce cadre, l'interopérabilité du futur système unifié avec les dispositifs des autres acteurs publics et privés intervenant en matière de secours et de sécurité.

Je regrette que les deux chantiers en cours n'aient pas été joints dans un cadre interministériel, ainsi que nous l'avions recommandé avec notre collègue Pierre-Yves Collombat dans notre très récent rapport consacré à l'évolution croissante du secours à personne dans l'activité des SDIS.

Il s'agit de la première étape, indispensable, vers un système unifié au niveau national et généralisé à l'ensemble des acteurs du secours.

Dans un deuxième temps, il faudrait consolider les mutualisations entre SAMU et SDIS avant de l'élargir au « 17 », numéro d'appel des services de police et de gendarmerie.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité civile » pour 2017.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Vial

S'agissant des systèmes d'information et de communication des services de sécurité, je suis étonné qu'on ne fasse que déplorer la mise en place de deux systèmes indépendants. L'historique du développement d'Antares a été évoqué par notre rapporteur. Il y a quelques années déjà, lors de la fin de l'équipement qui était lui-même porteur d'un réseau de radio, la coexistence de deux systèmes avait été longuement étudiée. Le ministère s'en était initialement étonné puis s'était aperçu de l'intérêt qu'il y avait d'anticiper les problèmes que cela pouvait causer. On nous présentait à l'époque Antares comme le service miracle qui allait couvrir le territoire et assurer la sécurité. Aujourd'hui, on constate que le déploiement est loin d'être satisfaisant sur la totalité du territoire et qu'il n'y a toujours pas d'harmonisation entre les deux systèmes. On sait ce qu'il en coûte sur le terrain d'une telle situation. Si l'on n'adopte pas une position contraignante, ces deux systèmes continueront à se développer en parallèle.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Troendle

J'adhère totalement aux propos de Jean-Pierre Vial, même si je pense que le fait que nous ayons alerté, très en amont, le ministère de l'intérieur sur ces difficultés, avec notre collègue Pierre-Yves Collombat, a conforté cette avancée. Le nouveau fonds consacrera une étude à un système permettant l'interopérabilité, notamment avec le SAMU. Je trouve qu'il y a donc une évolution favorable. Il est certain que l'on a perdu beaucoup de temps, puisque l'on avait deux systèmes parallèles. Mais, le projet gouvernemental n'étant pas encore achevé, il a donc été possible de le modifier et de prévoir l'interopérabilité, cela grâce aussi aux travaux du Sénat.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités ».

La commission examine le rapport pour avis de M. Alain Marc sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile »).

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Dans le prolongement de l'exposé de notre collègue Catherine Troendlé sur le programme « Sécurité civile », je vous présenterai les trois autres programmes que compte la mission « Sécurités » : les programmes 176 « Police nationale », 152 « Gendarmerie nationale » et 207 « Sécurité et éducation routières ».

Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017, les crédits consacrés à ces trois programmes s'élèvent à un peu plus de 19 milliards d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement, soit une augmentation de l'ordre de 4 % par rapport aux crédits de l'an dernier.

L'examen de ce budget s'effectue dans un contexte doublement particulier cette année : celui d'une menace terroriste qui demeure à un niveau élevé, comme sont venus le rappeler les derniers attentats, et celui d'un mécontentement profond des policiers, comme le démontre la mobilisation spontanée de ces fonctionnaires qui sont le témoignage d'un véritable malaise.

À la suite des attaques terroristes subies par notre pays en 2015, plusieurs plans de sécurité ont été définis afin de doter nos services de capacités supplémentaires pour lutter contre le terrorisme, tant sur le plan humain que matériel : un plan de lutte antiterroriste annoncé en janvier 2015, un plan de lutte contre l'immigration clandestine mis en oeuvre au cours du premier semestre 2016, et le pacte de sécurité annoncé par le Président de la République lors de son discours devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles le 16 novembre 2015.

S'agissant des créations de postes de policiers et de gendarmes, un effort important a été réalisé dans le cadre de ces trois plans progressivement mis en oeuvre en 2015, 2016 et 2017, avec 4 417 créations nettes dans la police nationale et 2 343 créations nettes dans la gendarmerie nationale. Ces renforts bénéficient d'abord aux services de police et de gendarmerie engagés dans la lutte antiterroriste (DGSI, renseignement territorial, police judiciaire) mais également aux services de maintien de l'ordre (CRS, gendarmes mobiles) ou impliqués dans la lutte contre l'immigration clandestine (police de l'air et des frontières).

Pour la police nationale, le plafond d'emplois du programme (149 079 emplois au total) croît de 2 031 postes équivalents temps plein travaillé (ETPT). Entre 8 000 et 9 000 policiers sont recrutés chaque année, des gardiens de la paix en très grande majorité. À cet égard, il convient de souligner que les écoles de police connaissent des taux de remplissage inédits et que le ministère a été contraint de réduire légèrement les durées de formation initiale pour tenir les rythmes d'affectation dans les services actifs. Les crédits de masse salariale progressent de 337 millions d'euros afin de financer ces créations d'emplois mais également les mesures catégorielles décidées en faveur des fonctionnaires de police avec la signature d'un protocole le 11 avril 2016.

Pour la gendarmerie nationale, le plafond d'emploi (100 192 emplois au total) progresse de 402 ETPT, l'essentiel des créations d'emplois ayant déjà eu lieu l'an dernier. Les crédits de masse salariale augmentent quant à eux de 294 millions d'euros afin de financer les nouveaux emplois mais également les mesures catégorielles du protocole pour la valorisation des carrières, des compétences et des métiers dans la gendarmerie nationale, également signé le 11 avril dernier.

Enfin, l'apport de la réserve à la politique de sécurité publique va continuer à s'affirmer avec la création de la garde nationale, décidée par l'exécutif après l'attentat de Nice et devenue effective avec le décret du 13 octobre 2016. L'objectif est de constituer, à l'horizon 2018, une garde nationale comptant 85 000 personnes et capable d'en déployer 9 500 chaque jour. La gendarmerie constitue la force principale de cette garde nationale avec un objectif de 40 000 réservistes opérationnels et un objectif de 3 000 personnes mobilisées chaque jour. Pour atteindre ces objectifs ambitieux, des crédits supplémentaires devraient être mobilisés par un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances...

Concernant les crédits affectés aux moyens de fonctionnement, question qui est au coeur des revendications actuelles des policiers, un effort assez conséquent a été réalisé avec la mise en oeuvre des différents plans de lutte antiterroriste. Les modes opératoires retenus par les auteurs des attaques de 2015 ont démontré que les forces de l'ordre pouvaient se trouver confrontées à des individus lourdement armés et prêts à mourir les armes à la main. Il s'en est donc suivi un plan de remise à niveau des équipements de protection et des armements des primo-intervenants (brigades anti-criminalité et pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie). On ne peut bien entendu que se féliciter de cette politique même si une réserve peut être émise sur la question de la formation à l'utilisation des armes. Si la formation initiale est de bonne qualité, on ne peut en dire autant de la formation continue, les policiers étant astreints à seulement trois séances annuelles de tirs de trente cartouches chacune. Surtout, dans le cadre du déploiement des nouveaux armements, un fusil mitrailleur (HK G36) a été, et va continuer, à être déployé. C'est une arme lourde, or les effectifs ne sont pas nécessairement formés comme il se devrait au maniement de cette arme, seuls 14 stands de tirs de la police nationale étant équipés à cet effet.

Face au mouvement de protestation des policiers, le ministère de l'intérieur a annoncé la définition d'un plan pour la sécurité publique, qui va être mis en oeuvre dans les semaines à venir. Un certain nombre d'annonces vont dans le bon sens et donneront lieu à des mesures législatives, je pense notamment à la question de la légitime défense des policiers qui, je l'espère, sera alignée sur celle des gendarmes. D'autres mesures réclameront des crédits supplémentaires, il s'agit en particulier de la poursuite du déploiement des équipements de protection et des nouveaux armements parmi les effectifs de la sécurité publique. Enfin, les efforts en faveur du renouvellement du parc automobile de la police et de la gendarmerie, qui est vieillissant, vont être poursuivis. Au total, ces mesures devraient conduire le Gouvernement à abonder, par un amendement, les crédits de la mission pour un montant de 100 millions d'euros.

Enfin, au-delà de ces quelques éléments chiffrés, je souhaiterais vous présenter les grands axes de la politique de lutte antiterroriste mise en oeuvre depuis 2014. Cette politique s'appuie tout d'abord sur le plan de lutte contre la radicalisation et les filières terroristes, défini au printemps 2014, avec la création du dispositif de signalement des personnes radicalisées. Ce dispositif de signalement, dont la responsabilité incombe à l'unité de coordination de la lutte antiterroriste (UCLAT), repose sur le numéro vert, un formulaire internet et sur les services territoriaux de police et de gendarmerie. Depuis le 29 avril 2014, date de mise en service du numéro vert, ce sont plus de 5 600 personnes qui ont été enregistrées pour radicalisation par l'UCLAT. Si l'on ajoute les remontées dans les territoires ou par les services de renseignement, nous sommes à près de 15 000 personnes suivies pour radicalisation.

Le deuxième axe de la politique antiterroriste repose sur la mobilisation intense des mesures de police administrative avec les interdictions de sortie du territoire, les interdictions administratives du territoire, qui concernent quant à elles les ressortissants étrangers qui souhaiteraient accéder au territoire national mais qui présenteraient une menace pour la sécurité publique, et enfin les mesures de l'état d'urgence, qu'il s'agisse des perquisitions administratives, des assignations à résidence ou encore des opérations de contrôle d'identité, d'interdictions de manifester ou de fermetures de lieux de culte.

Après les différents attentats que nous avons connus, une nouvelle doctrine d'emploi des forces d'intervention, chargées de résoudre les crises terroristes, a été définie. Ce schéma national d'intervention a pour ambition de permettre aux forces d'intervention de faire cesser, en tout point du territoire métropolitain et ultramarin, le plus rapidement possible une attaque terroriste, y compris en cas d'actions terroristes simultanées.

À cet effet, un certain nombre de mesures techniques ont été prises, dont la plus importante me semble être la fin du principe de compétence territoriale entre le GIGN, le RAID ou la BRI afin qu'en cas de survenance d'une crise terroriste, le principe moteur de l'intervention soit celui de la proximité. L'unité la plus proche de la crise sera donc désormais engagée immédiatement, ce qui n'interdira pas aux autres forces de contribuer à la gestion de la crise, sous la responsabilité de la première. Par ailleurs, de nouvelles antennes du GIGN et du RAID ont été créées en différents points du territoire pour raccourcir les délais d'intervention.

Pour ceux de nos collègues qui sont en milieu rural, nous avons eu une bonne nouvelle, lors de l'audition par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le 9 novembre dernier, du directeur général de la gendarmerie nationale. Il serait question de mettre fin au mouvement de fermeture des petites unités de gendarmerie situées en zones rurales, pour en faire des « brigades de contact ». Les missions des gendarmes affectés dans ces unités seront redéfinies afin d'accroître les relations directes avec la population et d'améliorer le renseignement en milieu rural. Ce dernier s'était dégradé ces dernières années, les gendarmes se concentrant sur le chef-lieu ou sur la sécurité routière.

En conclusion, le budget de la mission « Sécurités » pour 2017 permet de financer les créations de postes annoncées depuis 2015 et prolonge les efforts pour améliorer les moyens de fonctionnement de la police et de la gendarmerie. Ces moyens ne suffiront pas à apaiser la grogne des policiers qui réclament un véritable « plan Marshall ». Mais nous ne pouvons pas ignorer le contexte budgétaire contraint dans lequel nous nous inscrivons. Ainsi, compte tenu de ces éléments, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile », pour 2017.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurités », hors programme « Sécurité civile ».

La commission examine le rapport pour avis de M. François-Noël Buffet sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Immigration, asile et intégration », crédits « Immigration »).

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je rappelle que cet avis porte sur l'intégralité du programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » et sur 3 des 4 actions du programme 303 « Immigration et asile », la quatrième action, relative à la « Garantie de l'exercice du droit d'asile » faisant l'objet du rapport pour avis de Mme Esther Benbassa.

Pour la deuxième année consécutive, les crédits augmentent, mais la politique d'immigration et d'intégration reste le parent pauvre de la mission. Si, à première vue, les crédits semblent en forte hausse, les dépenses hors asile représentent 31 % de la mission et ceux liés à la politique d'immigration régulière et d'intégration seulement 21 %.

Parmi ces crédits figurent ceux de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), acteur historique de l'intégration, dont les missions ont été profondément modifiées et largement réorientées vers l'accueil des demandeurs d'asile par les lois du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile et du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.

Pour vous résumer d'une phrase mon propos, je m'interroge, malgré l'augmentation des crédits, sur l'efficacité et surtout sur l'évaluation des moyens mis en oeuvre, depuis plusieurs années, dans les politiques poursuivies.

Concernant la lutte contre l'immigration irrégulière, les instruments proposés par le projet annuel de performances sont insuffisants pour en évaluer l'efficacité, en raison du défaut de vision globale des crédits engagés dans cette politique et d'un manque d'indicateurs pertinents. Avec 92 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, les crédits sont en augmentation de 16 % par rapport à la loi de finances pour 2016. Par rapport à l'exécution 2015, l'augmentation n'est toutefois que de 8 % en autorisations d'engagement, alors que les crédits de paiement baissent de 1,5 %.

L'augmentation est principalement due au poste de la prise en charge sanitaire, qui augmente de 14 millions d'euros et correspond en quasi-totalité au financement des camps d'accompagnement et à la prise en charge des migrants de Calais et Dunkerque. Elle montre aussi l'effort accru dans l'éloignement de ressortissants de pays tiers.

On constate une sous-occupation des centres de rétention administrative (CRA). Non qu'il faille les remplir à tout prix. Ces centres ont des coûts fixes importants. Les taux d'occupation sont en moyenne de 52,5 %, avec de fortes disparités : ils sont relativement importants en région parisienne, mais vraiment faibles ailleurs. Leur entretien revient donc très cher.

L'assignation à résidence est en développement. Une expérimentation de centre de retour pour déboutés du droit d'asile a été lancée en avril 2015 à Vitry-sur-Orne en Moselle qui a concerné jusqu'à présent 61 familles, soit 236 personnes. Cela peut fonctionner mais nécessitera une vision à long terme du dispositif. Il m'a été indiqué en auditions que d'autres expérimentations sont envisagées. L'assignation à résidence est privilégiée pour les familles depuis 2012 et elle est devenue la règle depuis la loi du 7 mars 2016 mais les nouveaux instruments juridiques mis à disposition des préfectures pour encourager le recours à l'assignation à résidence ne sont entrés en vigueur qu'au 1er novembre dernier faute de décret d'application pris avant cette date.

Nous n'avons pas de vision claire concernant l'efficacité de l'éloignement. Outre l'insuffisance des indicateurs de performance, je constate que des crédits qui concourent aussi à la lutte contre l'immigration irrégulière relèvent d'autres programmes : programme 176 « Police nationale », programme 152 « Gendarmerie nationale » et programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et de la relation de travail ». Il faut y ajouter les aides au retour ainsi que les dépenses de justice qui sont de véritables frais cachés de la lutte contre l'immigration irrégulière. Je réclame un document transversal de tous les moyens engagés afin de les rationaliser car, actuellement, le dispositif apparaît sous-optimal.

Concernant les crédits consacrés à l'immigration régulière, il faut noter une modification de la structure des ressources de l'OFII. Mais l'augmentation de ses crédits ne signifie pas pour autant qu'il dispose de tous les moyens nécessaires pour remplir ses missions. La formation linguistique, dont les crédits étaient en baisse ces dernières années, bénéficie pour ce budget d'un effort budgétaire certes insuffisant mais qu'il faut saluer. Le sort des bénéficiaires d'une protection internationale, préoccupation du Sénat lors de l'examen de la réforme du droit d'asile, est pris en compte avec la création de 500 places supplémentaires en centre provisoire d'hébergement. C'est toutefois insuffisant. J'émettrai donc des réserves sur ces crédits, ou à défaut un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Vous émettez des réserves car les efforts budgétaires sont insuffisants ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

J'émets un avis négatif non pas pour divergence massive mais par manque de moyens d'évaluation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Louis Masson

Je suis pour ma part partisan d'un rejet massif de ce budget. Je suis favorable à une assimilation des étrangers en situation légale sur notre territoire et au rejet de tout communautarisme. Pour les étrangers en situation irrégulière, il faudrait appliquer la politique de l'Australie. Nous mettons des sommes colossales au profit d'étrangers en situation irrégulière alors que des Français et des étrangers en situation régulière ont des difficultés pour se loger et on les aide beaucoup moins. Je voterai contre ce budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Je m'orienterai vers le même vote mais pour des raisons totalement différentes.

Debut de section - PermalienPhoto de René Vandierendonck

Je remercie notre rapporteur pour sa rigueur et son honnêteté intellectuelle. Il pose le problème récurrent de l'évaluation. La commission des lois pourrait prendre une initiative pour jeter les bases d'une méthode d'évaluation, c'est le rôle du Parlement. J'ai aussi une question pour le rapporteur : faites-vous le point dans votre rapport sur la situation des mineurs isolés étrangers ?

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nous ne l'avons pas évoquée spécifiquement mais je propose de faire un point avant la fin de l'année sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

C'est une bonne idée en effet. Nous rejetons les crédits examinés avec les motifs circonstanciés de notre rapporteur.

La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits « Immigration » de la mission « Immigration, asile et intégration ».

La commission examine le rapport pour avis de Mme Esther Benbassa sur le projet de loi de finances pour 2017 (mission « Immigration, asile et intégration », crédits « Asile »).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Nous examinons maintenant l'avis de Mme Esther Benbassa, sur les crédits consacrés à l'asile au sein de la mission « Immigration, asile et intégration ».

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Après une année pleine d'application de la réforme du droit d'asile, le projet de loi de finances pour 2017 s'inscrit dans le prolongement des précédents budgets avec la poursuite de l'accroissement des moyens et effectifs de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) : les crédits de paiement de l'action n° 2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » passeront de 597,4 millions d'euros en 2016 à 687,4 millions d'euros, soit une augmentation de 15 %, ceux consacrés à la CNDA de 23,72 millions d'euros à 25,92 millions, soit une augmentation de 9,3 %.

L'effort consenti en faveur de la garantie de l'exercice du droit d'asile mérite donc d'être salué. Comme les années passées, il vise avant tout à poursuivre la réduction du délai de traitement de la demande d'asile, mais également à améliorer la prise en charge des demandeurs d'asile.

Même si elle est largement tributaire de l'évolution de la demande d'asile, il est attendu de la réduction des délais de traitement une réduction du coût de l'accueil des demandeurs : le coût d'un mois de délai de traitement est estimé entre 10 et 15 millions d'euros par un rapport des inspections générales de 2013.

Concernant le financement de l'accueil matériel des demandeurs, si les prévisions tendent à devenir plus réalistes sur certains postes budgétaires comme les centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), il est à craindre que le financement de l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile ou de l'allocation pour demandeurs d'asile soit sous-estimé.

En effet, le projet de loi de finances pour 2017 consacre au financement des CADA 280 millions d'euros, montant qui correspond au financement de plus de 40 000 places pour un coût unitaire journalier de 19,50 euros, mais l'hébergement des demandeurs d'asile en CADA est loin d'être la norme et une part non négligeable des demandeurs d'asile est hébergée soit chez l'habitant, soit plus probablement dans le dispositif d'hébergement d'urgence généraliste porté par le programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » de la mission « Ville et logement » - quand les demandeurs d'asile sont effectivement hébergés...

Pour conclure, et malgré les réserves que je viens d'émettre, je vous propose, mes chers collègues, d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits alloués par le projet de loi de finances pour 2017 à la politique de l'asile.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

La réforme engagée sur le fonctionnement de l'OFPRA est une réforme de longue haleine, dont l'effet positif dépend de l'évolution des moyens, notamment humains, octroyés à l'OFPRA mais aussi de l'évolution du flux des demandeurs d'asile sur laquelle nous n'avons évidemment pas prise. Nous constatons le niveau de ce flux, mais il ne résulte pas d'un choix politique. Dans le contexte international que nous connaissons, ce flux n'est pas prêt de s'amoindrir. Je vais dans le sens de notre rapporteure : même si tout n'est pas parfait dans ce dispositif, il connaît une amélioration notable au regard de la situation antérieure à la réforme, y compris sur la durée d'examen des demandes qui est le point essentiel d'une politique du droit d'asile.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Anziani

On oublie souvent un point connexe à la question de l'asile, il s'agit des droits de la communauté rom. Pour les réfugiés et les gens du voyage, il existe un cadre juridique précis. S'agissant des roms, la situation juridique n'est pas satisfaisante. Ils passent de commune en commune sans qu'on soit en mesure de leur proposer une solution satisfaisante. Je trouve qu'il faudrait leur accorder une certaine attention.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Madame Tasca, il est exact que la réforme de l'OFPRA a amélioré la situation : 100 postes ont été créés l'année dernière, puis 40 cette année, pour accélérer le traitement des demandes.

Monsieur Anziani, je vous rejoins sur le fait que nous devrions travailler sur la question des roms, même si ce n'est pas l'objet du présent rapport pour avis, tant dans l'intérêt de ces personnes, qui vivent dans une grande vulnérabilité, que pour favoriser le vivre-ensemble dans les communes concernées.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je souhaite donner une explication de vote. Je distingue bien entendu le rapport de Mme Benbassa sur l'asile de celui que j'ai présenté sur l'immigration. Concernant la politique de l'asile, et les moyens qui sont donnés à l'OFPRA, dont je suis par ailleurs administrateur et au conseil d'administration duquel je représente le Sénat, je suis favorable à la réforme conduite. Le point qui blesse en matière d'asile, c'est le traitement des déboutés du droit d'asile. Or, le traitement des déboutés du droit d'asile ne fait pas partie de la politique du droit d'asile, mais bien de la politique de lutte contre l'immigration irrégulière, que j'inclus dans le volet relatif à l'immigration. Il me semble donc cohérent de suivre l'avis de Mme Benbassa, et de voter en faveur des crédits « asile », tout en ayant voté contre les crédits « immigration ».

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Portelli

Dans ma commune, il existe un foyer ADOMA au sein duquel résident 150 personnes qui ont été déboutées de leur demande de droit d'asile et qui pourtant sont présentes depuis très longtemps et restent sur le territoire français. Dans de telles conditions, je ne peux pas voter en faveur des crédits relatifs à l'asile.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la garantie du droit d'asile par les programmes 303 « Immigration et asile » et 165 « Conseil d'État et autres juridictions administratives » du projet de loi de finances pour 2017.

La réunion est close à 11 h 10