Le budget de l'administration générale et territoriale de l'État pour 2017 est un budget de circonstances, d'abord parce que la programmation budgétaire pour 2017 porte la trace de modifications importantes du périmètre budgétaire, avec le rattachement pour plus de 80 millions d'euros du fonds interministériel de prévention de la délinquance, mais aussi en raison du cycle électoral à venir.
Le projet de budget, qui voit ses dotations croître de plus de 15 % pour un supplément de crédits de 386 millions d'euros, ne s'alourdit plus que de l'ordre de 3,3 % à 4,3 %, selon la conception qu'on choisit du périmètre constant, lorsqu'on neutralise ces éléments ponctuels.
Cette progression reste élevée et conduit à dépasser les plafonds de la loi de programmation des finances publiques. La hausse des charges résulte essentiellement des mesures de revalorisation des rémunérations. C'est l'effet indice de la grille de la fonction publique, avec la revalorisation du point et la mise en oeuvre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR). Par ailleurs, des mesures spéciales sont prévues pour accompagner l'application du « Plan préfectures nouvelle génération », le PPNG.
Le budget de la mission « Administration générale et territoriale de l'État » pour 2017 nous laisse de ce point de vue au milieu du gué. Il enregistre le moins difficile du PPNG et laisse entiers les problèmes les plus délicats. Le PPNG est, en réalité, un plan de restructuration du réseau préfectoral. Il s'agit de délester les préfectures des missions d'accueil au guichet pour renforcer le contrôle de légalité et la mission de conseil aux collectivités territoriales, la coordination stratégique des administrations locales de l'État et les prestations d'ingénierie au service des collectivités.
Le budget programme les suppressions d'emplois de guichet, mais ne finance pas clairement le renforcement des ambitions annoncées.
La rationalisation de la fonction de délivrance des titres sécurisés, au coeur du PPNG, pose question. Les seuls guichets qui demeureront dans le réseau préfectoral seront ceux qui concernent les accueils des étrangers, dans le cadre de la délivrance des titres de séjour ou des demandes d'asile. Cela peut susciter des crispations d'autant que le ministère compte amplifier la dématérialisation du circuit des titres.
Pour la carte nationale d'identité comme pour les permis de conduire ou les certificats d'immatriculation, quelques dizaines de centres d'expertise et de ressources (CERT) traiteront les dossiers adressés par quelque deux mille mairies sélectionnées, comme pour le passeport biométrique, pour procéder au recueil des données.
Dans cette affaire, l'État donne le sentiment de s'éloigner du local. Il faudra mettre à niveau les compensations qu'appellent les suppléments de charges devant peser sur les communes d'accueil des stations de recueil de données.
Enfin, les problèmes de sécurité informatique sont cruciaux et des besoins de renforcement déjà identifiés.
Des financements croisés marquent l'équilibre financier de l'Agence nationale des titres sécurisés, le passeport biométrique finançant d'autres productions. Ce n'est pas satisfaisant. Les dépenses paraissent mieux maîtrisées, mais le monopole de l'Imprimerie nationale doit être pris en considération.
L'autre dimension du PPNG doit être le retour de l'État dans les territoires par un recentrage du réseau préfectoral sur les missions stratégiques. Le budget n'en porte pas la trace, sinon par les emplois créés pour répondre à la crise des migrants et aux demandes d'asile ce qui n'est pas négligeable. Pour le reste, ni le contrôle de légalité, ni le conseil aux collectivités territoriales, ni l'ingénierie territoriale ne sortent renforcés du budget. Les modifications apportées à l'administration décentralisée de l'État appelleront d'autres prolongements. Quant à la restructuration de la présence infradépartementale de l'État, elle demeure marquée par l'ouverture de maisons de l'État et de maisons d'accès du public aux services publics, sans que l'impact sur le réseau des sous-préfectures soit clairement exposé. Il est intéressant de mieux cartographier les sous-préfectures en tenant compte des intercommunalités nouvelles, mais n'oublions pas les territoires ruraux.
Élément majeur de ce budget, les élections prévues en 2017. La programmation tient compte du projet de dématérialiser la propagande électorale pour les élections présidentielles et législatives - objet d'un article rattaché qui a été supprimé par l'Assemblée nationale. La décision relève traditionnellement de l'assemblée concernée. Il est d'autant plus sage de stabiliser les conditions de la propagande électorale que la réception des documents de propagande sous forme papier provoque un effet-signal qui joue pour la participation électorale. Je vous proposerai donc de confirmer le vote de l'Assemblée nationale.
Les circonstances historiques ont laissé au règlement le soin de préciser les règles d'organisation de la propagande électorale pour l'élection présidentielle, curiosité regrettable. Les dotations aux formations politiques sont maintenues, comme l'an dernier. On constate une lente érosion de leur valeur réelle.
Enfin, je souhaite que les frais élevés que supporte le budget au titre de l'administration centrale du ministère fassent l'objet d'audits à la mesure de leur volume, que les actifs immobiliers estimés à plus de 2,5 milliards d'euros soient gérés plus activement de même que les locations du ministère.
Pour finir, les dépenses de contentieux, qui résultent de choix d'action discutables, doivent être plus sincèrement évaluées en loi de finances initiale.
Le rapport que je vous présente ne manque pas de relever quelques points de perplexité mais il faut aussi tenir compte d'autres considérations. Un certain nombre de conditions sont réunies pour améliorer les services rendus aux collectivités territoriales par le réseau préfectoral. À la prochaine législature d'aller plus loin. Nous pouvons aboutir à une solution satisfaisante pour ménager les mairies qui désirent continuer à jouer un rôle de proximité dans la délivrance des titres sécurisés.
Par ailleurs, il faut tenir compte des circonstances. Les services sont fortement sollicités du fait de la crise migratoire et de l'état d'urgence.
Enfin, le Gouvernement a entendu le Parlement en renonçant à des projets quelque peu précipités de réorganisation de la propagande électorale. Il va, c'est à noter, au-delà des conséquences budgétaires du vote de l'Assemblée nationale, qui ne concernait que les élections législatives, en l'étendant à l'élection présidentielle.
Dans ces conditions, je vous recommande l'adoption des crédits de la mission pour 2017.