L’amendement n° II-202 me laisse un peu perplexe : non que je remette en question son orientation générale, mais je doute de notre capacité, à cette heure avancée, après l’évocation de multiples sujets, à apporter aux chambres de commerce et d’industrie de notre pays, pour les périodes postérieures à l’année 2010, une solution définitive.
Monsieur le rapporteur général, dans l’objet de l’amendement, il est proposé que la cotisation de base de la taxe additionnelle à la CFE prenne en charge les missions de service public – cela paraît de bon sens – et que la contribution complémentaire – celle-ci ayant un caractère en quelque sorte plus volontaire –, qui serait désormais fixée à la majorité qualifiée, prenne en charge ce qui ne ressortit pas au service public.
Dans le même temps, s’agissant de la cotisation de base, vous évoquez une « convention d’objectif et de moyens conclue avec l’État », ce qui peut aller bien au-delà des missions de service public d’une chambre de commerce et d’industrie. On peut en effet imaginer que l’État et la chambre de commerce et d’industrie de telle région ou de tel département, selon la réforme qui sera votée dans quelques semaines, décident que la gestion d’un port, le développement d’une infrastructure de transport ou un établissement d’enseignement supérieur figurent dans le cadre de la convention.
Autrement dit, on pourra trouver dans la convention des éléments qui ne relèvent pas d’une mission de service public.
Si, dans toute la France, les chambres de commerce et d’industrie sont des acteurs de l’enseignement, une activité dans laquelle elles ont su déployer leurs compétences et, de fait, admirablement réussi, elles n’assurent pas, à ce titre, une mission régalienne : c’est une simple prestation de services, quelle qu’en soit par ailleurs la qualité.
J’ajoute que, si le plafond de la cotisation de base est égal au montant de la taxe additionnelle à la taxe professionnelle acquittée en 2009, on va obtenir des sommes largement supérieures aux dépenses occasionnées par les seules missions régaliennes.
En outre, ainsi que notre collègue Michel Charasse en a fait la remarque en commission des finances, en 2009, la taxe additionnelle à la taxe professionnelle a représenté environ 1 milliard d’euros, soit grosso modo 3 % des 29 milliards d’euros du montant global de la taxe professionnelle théorique. Or, si la cotisation de base que nous instituerons ultérieurement reprend ce pourcentage, il faut le rapporter à la partie « cotisation foncière des entreprises », qui revient entièrement au bloc communal et intercommunal, ce dont nous nous réjouissons tous, mais ne représente que 20 % de l’ancienne taxe professionnelle. Ainsi, 3 % rapportés à 20 %, ce n’est pas tout à fait la même chose que 3 % rapportés à 100 % : le rapport est de 1 à 5 !
Je crains que, dans ces conditions, les chambres de commerce et d'industrie n’apparaissent comme un élément pesant lourdement sur la fiscalité locale puisqu’elles bénéficieront d’une taxe additionnelle représentant à elle seule 15 % à 20 % de la cotisation foncière des entreprises.
Je mesure l’amateurisme dont mes arguments, en cet instant, portent la marque. Heureusement, pour le moment, nous ne sommes appelés qu’à nous prononcer sur un amendement visant à indiquer une orientation, prévoyant d’instaurer une cotisation de base destinée à financer des missions régaliennes et une contribution complémentaire décidée à la majorité qualifiée. Nous aurons ensuite à examiner le texte portant réforme des CCI, dont nous pourrons tirer les conséquences dans le projet de loi de finances pour 2011.
Ce soir, madame la ministre, vous aurez ainsi participé à un débat général sanctionné par un texte d’orientation, et non, comme d’habitude, par un texte d’exécution. Il faut en effet admettre cette nuance, monsieur le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Pour ma part, je partage les orientations de cet amendement, même s’il ne débouche pas immédiatement sur un texte opérationnel et qu’il diffère en cela des autres amendements que nous avons adoptés précédemment.
Voyez-vous, mes chers collègues, tout est probatoire et fugitif dans la vie… Ce qu’une loi a fait, une autre peut le défaire. Mais si, grâce à cet amendement, nous pouvions nous inscrire un tant soit peu dans la durée et éclairer la réflexion sur la réforme des CCI, nous n’aurions pas perdu notre journée !