Intervention de Jacques Muller

Réunion du 5 mai 2009 à 15h00
Débat sur la politique de l'état en matière de gestion des ressources halieutiques et des pêches

Photo de Jacques MullerJacques Muller :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la pêche, qui a toujours été une activité essentielle pour l’homme, me semble emblématique du rapport de nos sociétés humaines à l’environnement.

La pêche peut aussi bien illustrer le pire des scénarios, comme c’est le cas aujourd’hui, y compris sur le plan social, que s’inscrire dans une vraie dynamique de développement durable, dans ses dimensions écologique et sociale, pour constituer alors une illustration parfaite de la valorisation économique de la biodiversité, à condition toutefois de s’en donner les moyens !

À cet égard, il est une réalité, peut-être difficile à faire entendre en ces temps où la crise frappe les pêcheurs et leurs familles, mais rigoureusement incontournable : pour pêcher toujours, il faut pêcher mieux !

Les États membres ont confié à l’Union européenne la gestion des ressources halieutiques. La politique commune de la pêche est la politique la plus intégrée, mais sa refonte globale est devenue indispensable : elle passe par la définition de plans d’action pluriannuels de restauration des populations des espèces pêchées, fondés exclusivement sur des données scientifiques, et non sur des marchandages.

Cela étant, j’insisterai surtout sur la manière dont notre pays remplit les missions qui lui ont été déléguées, notamment en ce qui concerne la gestion des stocks. À mes yeux, l’action du Gouvernement doit être réorientée selon deux axes prioritaires.

Il convient en premier lieu de mettre en place des contrôles plus rigoureux du respect de la réglementation en matière de capture, de taille des poissons pêchés, d’engins de pêche, de prise en compte des prises rejetées en mer afin de protéger les zones littorales.

En effet, la France s’est trop souvent distinguée par des retards importants dans les déclarations de capture à l’Union européenne, par l’insuffisance des moyens de saisie des fiches de pêche remises par les navires et par un système de contrôle manifestement peu efficace.

Des contrôles plus rigoureux impliquent le développement de brigades mobiles de contrôle à compétence nationale et – pourquoi pas ? – la mobilisation des services des douanes, dont les agents ne seraient pas mécontents de se voir confier des missions et compétences nouvelles, à condition, évidemment, qu’elles soient assorties des moyens correspondants.

L’amélioration des contrôles suppose également le renforcement de cet outil exceptionnel qu’est l’IFREMER, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer. A contrario, le budget de 2009 se distingue par une baisse de la masse salariale et une réduction de 7, 5 % des moyens alloués aux programmes scientifiques.

Il convient en second lieu de retenir une approche diversifiée concernant l’appui aux unités de pêche.

En effet, la politique de soutien aux pêcheurs doit se concentrer sur les petites unités artisanales, tout en privilégiant l’aide aux groupements de pêcheurs. En contrepartie, l’appui aux grosses unités de pêche hauturière, notamment les aides directes, doit être abandonné.

Il s’agit d’une priorité absolue, car, du fait de leurs capacités de capture limitées, les petites unités de la pêche artisanale ont une moindre incidence sur l’environnement marin : la pérennité de cette activité est intrinsèquement et directement liée à la protection du milieu marin proche.

Inversement, les grosses unités appartiennent à des armateurs ou à des groupes financiers qui ne recherchent que la rentabilité immédiate et ne se sentent pas concernés par la gestion des stocks, car ils peuvent se permettre d’aller exploiter, pour ne pas dire piller, les stocks éloignés.

Au final, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, vous l’aurez compris, le soutien à la pêche artisanale est crucial, d’une part, pour contenir le développement inconsidéré de l’aquaculture, qui entraînerait, à terme, un appauvrissement de la diversité biologique et génétique, et, d’autre part, pour nous pousser à accorder, enfin, tout l’intérêt nécessaire à la conservation de stocks viables de poissons marins et à apporter l’aide de la collectivité à ceux qui la méritent. Oui, pour toujours pêcher, il faut pêcher mieux !

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