Intervention de Catherine Tasca

Réunion du 23 novembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Article 12

Photo de Catherine TascaCatherine Tasca :

Je veux tout d’abord relever une certaine similitude dans l’approche qui a inspiré l’amendement de Mme Catherine Morin-Desailly concernant la contribution des chaînes privées au financement de l’audiovisuel public et l’amendement de M. le rapporteur général.

Je suis assez étonnée : chaque fois qu’un opérateur public est bien géré, chaque fois qu’il réalise une gestion des moyens qui lui sont donnés profitable au secteur public, on s’empresse de chercher à le priver d’une partie de ses ressources ! C’est le cas de l’amendement de la commission.

La prétendue richesse conjoncturelle du CNC ne saurait, à nos yeux, justifier cette mesure d’amputation de son budget de 130 millions d’euros.

Outre le fait qu’il n’y a aucune logique à entamer l’autonomie de financement du cinéma pour abonder le budget général de l’État, cette mesure contredit les options prises récemment concernant le financement des chantiers de numérisation que mène le CNC.

Parmi ces chantiers, je prendrai un seul exemple : l’équipement des salles constitue une véritable urgence.

Depuis des années, des exploitants et des élus se battent pour le maintien d’un réseau de petites ou moyennes salles de cinéma, des salles qui sont parfois le seul lieu culturel de la commune.

Depuis des années, la géographie de l’implantation des salles de cinéma est profondément modifiée par l’ouverture des multiplexes qui, souvent, ont pris le dessus sur les petites salles et ont conduit, notamment, à la disparition des salles en centre-ville.

Néanmoins, il reste une part non négligeable du territoire – j’ai d’ailleurs été heureuse d’entendre M. le ministre du budget évoquer l’aménagement du territoire – qui n’est pas irriguée par les multiplexes, soit que ceux-ci n’y trouvent pas leur intérêt économique, soit que les élus et les professionnels concernés résistent à la vague de leur implantation et se battent efficacement pour que vivent leurs petites salles.

Tout récemment, le Sénat a reconnu l’absolue nécessité d’accompagner la modernisation de ces salles, celle-ci passant par leur équipement en numérique. Nous avons voté ici même la loi du 30 septembre 2010 relative à l’équipement numérique des établissements de spectacles cinématographiques. L’amendement présenté par M. le rapporteur général et tendant à supprimer 130 millions d’euros de ressources du CNC revient à détruire la mesure prise ici même en septembre, c'est-à-dire il y a moins de deux mois.

L’action du CNC est portée par l’organisation collégiale et efficace des professionnels concernés. Celle-ci assure une gestion rigoureuse, transparente et équitable des crédits du Centre.

La réduction proposée est un mauvais coup porté à un réseau tout à fait essentiel de diffusion des films, un réseau qui, faut-il le rappeler, est un maillon de la longue chaîne de production du cinéma.

À la différence de la plupart de nos voisins, nous avons la chance d’avoir, en France, une véritable industrie du film, qui assure une réelle diversité de la création cinématographique et qui représente aussi une activité économique, donc un secteur d’emploi digne d’attention par les temps qui courent.

Il ne s’agit pas d’une hausse immodérée des dépenses d’intervention du CNC, mais d’un engagement nécessaire. Renoncer à financer l’équipement numérique de ces salles reviendrait à les condamner, ce que nous ne pouvons accepter.

J’espère, monsieur le ministre, que vous combattrez également jusqu’au bout cette funeste proposition. J’espère surtout que nos collègues, sur toutes les travées, ne se rallieront pas à une solution mi-chèvre mi-choux qui reviendrait à accepter l’amputation, mais à un moindre niveau que celle qui est actuellement prévue dans l’amendement. C’est la totalité de ce crédit que nous souhaitons voir préserver.

En conséquence, nous voterons résolument contre l’amendement de M. le rapporteur général.

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