Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà dix-huit mois, à la suite d’une discussion parlementaire intense, qui a contribué à enrichir et améliorer le texte que défendait Ségolène Royal, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte était promulguée, ouvrant la voie à la stratégie nationale bas carbone, à la programmation pluriannuelle de l’énergie et à l’accord historique sur le climat obtenu à Paris le 12 décembre 2015.
Dans le cadre de la mise en œuvre de cette loi, le développement des énergies renouvelables est la principale priorité, pour diversifier notre mix énergétique, réduire nos émissions de gaz à effet de serre et favoriser l’essor des filières de la croissance verte et la création des emplois de demain.
C’est pourquoi, sans attendre la publication de la programmation pluriannuelle de l’énergie le 28 octobre dernier, et pour l’application de l’objectif de la loi d’atteindre 32 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2030, le Gouvernement avait déjà publié le volet « énergies renouvelables » de cette programmation pluriannuelle dès le 24 avril dernier. C’était un document très attendu par les filières des énergies renouvelables, pour avoir de la visibilité.
L’ambition est considérable. Par exemple, il s'agit de plus que tripler la puissance photovoltaïque installée, de plus que doubler la puissance éolienne terrestre installée, ou d’augmenter de plus de 50 % la production de chaleur renouvelable.
Grâce à cette ambition résolue, une dynamique est à l’œuvre. Ainsi, depuis 2014, la puissance éolienne et solaire installée a augmenté de 25 %. Les énergies renouvelables électriques produisent désormais, à la pointe de midi, l’équivalent de six réacteurs nucléaires et contribuent à la sécurité de l’alimentation. Les projets de chaleur renouvelable et de récupération qui sont aidés par le Fonds chaleur ont augmenté de près de 30 %. Au total, ce dernier a ainsi permis d’accompagner près de 4 000 opérations d’investissement, pour un montant total de 1, 4 milliard d’euros.
Ces résultats se traduisent en termes de créations d’emplois et de croissance verte. Au 31 décembre 2015, la filière éolienne comptait ainsi près de 15 000 emplois sur le territoire français et 800 sociétés actives dans le secteur. En 2015, la croissance des emplois éoliens a été de 15, 6 % par rapport à 2014, avec près de 2 000 créations d’emplois supplémentaires. Par rapport à 2013, les emplois éoliens ont crû de 33, 3 %, soit 3 620 emplois supplémentaires. La première usine de construction d’éoliennes terrestres en France achève d’ailleurs sa construction : il s’agit de l’usine Poma, en Isère.
Pour prolonger cette dynamique, l’ordonnance relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, que ratifie l’article 1er du projet de loi dont vous êtes saisis, permet une meilleure intégration des énergies renouvelables au marché et au système électrique et prévoit la mise en œuvre de nouvelles procédures de mise en concurrence, plus adaptées au stade de maturité de certaines énergies renouvelables.
En particulier, l’ordonnance supprime la priorité d’appel pour les installations de production d’électricité à partir de charbon, contradictoire avec la priorité qui doit être donnée à la production à partir d’énergies renouvelables.
Elle introduit une priorité d’appel pour les installations produisant de l’électricité à partir d’énergies renouvelables dans les zones non interconnectées, comme c’est déjà le cas en métropole continentale.
Elle ouvre la possibilité de recourir à d’autres procédures de mise en concurrence que l’appel d’offres, telle que la procédure de dialogue concurrentiel, qui tire les leçons des premiers appels d’offres éoliens en mer, et permettra désormais une évolution des projets au fil de la procédure et ainsi réduire les délais.
Elle est en cours dans le cadre de l’appel d’offres éolien en mer que Ségolène Royal a lancé au large de Dunkerque et s’appliquera également pour l’appel d’offres au large d’Oléron.
L’article 1er du projet de loi ratifie également l’ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité. Elle permet de doter la France d’un cadre légal qui facilite le développement de l’autoconsommation.
Le développement de l’autoconsommation est en effet un objectif vertueux, pour les énergies renouvelables, pour les réseaux d’électricité et pour les factures énergétiques. Un appel d’offres a ainsi été lancé à l’été dernier pour le développement de l’autoconsommation dans les secteurs industriels, tertiaires et agricoles. Les soixante-douze premiers lauréats de cet appel d’offres, qui a rencontré un très grand succès, sont désormais connus, ce qui témoigne de l’ambition des territoires, des citoyens et des acteurs économiques à évoluer vers un système énergétique plus décentralisé.
L’ordonnance prévoit également la définition des opérations d’autoconsommation, en reconnaissant notamment l’autoconsommation collective. Elle reconnaît l’obligation pour les gestionnaires de réseau de faciliter les opérations d’autoconsommation, ainsi que l’établissement par la Commission de régulation de l’énergie d’une tarification d’usage du réseau adaptée aux installations en autoconsommation, pour tenir compte des réductions de coûts d’utilisation des réseaux que peuvent apporter ces opérations.
Nous sommes très attachés à ce que les tarifs d’usage des réseaux intègrent dès à présent ce nouvel usage qu’est l’autoconsommation, pour en favoriser le développement. L’ordonnance prévoit enfin la simplification des procédures pour les installations de petite taille faisant de l’autoconsommation partielle.
Pour aller plus loin, afin d’accompagner l’autoconsommation, l’Assemblée nationale et votre commission ont introduit un dispositif d’exonérations de taxes – contribution au service public de l’électricité et taxes locales sur la consommation d’électricité – pour l’électricité autoconsommée à l’article 1er bis A. Nous y sommes très favorables.
Mme la ministre de l’environnement a souhaité cette discussion parlementaire pour la ratification des ordonnances, pour que celles-ci puissent bénéficier de vos enrichissements. Il s’agit là d’une méthode de coconstruction, à laquelle Ségolène Royal et moi-même tenons beaucoup. Je veux vous remercier des améliorations apportées au texte.
Au-delà de la ratification des ordonnances, la mise en application de la loi de transition énergétique, que ce soit à travers la publication des textes réglementaires, conduite tambour battant avec aujourd’hui plus de 95 % des décrets adoptés, ou des appels d’offres, a permis d’identifier des dispositions complémentaires permettant d’accélérer et de simplifier la transition énergétique et la croissance verte en France. C’est le sens des autres articles du projet de loi qui vous est soumis.
L’article 2 prévoit d’interdire le cumul de la valorisation des garanties d’origine de l’électricité renouvelable avec le bénéfice d’un dispositif de soutien : tarif d’achat ou complément de rémunération. L’objectif est de garantir que l’électricité soutenue par des dispositifs nationaux, qui sont financés par tous les consommateurs, revienne bien à l’ensemble des consommateurs, sans que les fournisseurs puissent bénéficier d’une double rémunération indue, et de favoriser le développement de l’électricité renouvelable.
Maintenir ce principe de non-cumul est également nécessaire pour sécuriser juridiquement les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables dont nous avons obtenu la validation par la Commission européenne le 12 décembre dernier.
Ce dispositif a fait l’objet de débats importants à l’Assemblée nationale. Les députés ont prévu que les garanties d’origine issues des installations de production d’énergies renouvelables bénéficiant d’un dispositif de soutien soient mises aux enchères par l’État.
Votre commission a contribué à améliorer le dispositif en prévoyant la possibilité d’un allotissement par filière et par zone géographique. Je suis convaincue que le travail intense d’écoute conduit par les parlementaires a permis d’aboutir à un dispositif équilibré, et je tiens à vous en remercier. Notre objectif est que le décret d’application de ce dispositif soit publié dans les meilleurs délais, après une concertation avec l’ensemble des parties prenantes.
L’article 3 met en place une réduction des coûts de raccordement au réseau électrique pour les producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable, dite « réfaction tarifaire ». En effet, le coût du raccordement se révèle parfois un obstacle pour les projets des producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable. Tel est notamment le cas pour les installations de petite ou moyenne puissance, notamment en milieu rural, dont l’éloignement par rapport au réseau nécessite parfois une extension significative de ces derniers, afin d’évacuer l’électricité produite.
Ce dispositif a pu susciter l’inquiétude de certaines entreprises locales de distribution de petite taille. Certaines ont pu craindre que, en cas de réfaction importante sur le raccordement d’installations d’énergie renouvelable de très grande taille, le dispositif pèse sur leur trésorerie.
Je voudrais ici les rassurer, en précisant que l’objectif de la réfaction est bien de favoriser le développement des énergies renouvelables en milieu rural, là où les coûts de raccordement sont souvent plus élevés qu’en milieu urbain ou périurbain. C’est une mesure d’équité.