Séance en hémicycle du 24 janvier 2017 à 14h15

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

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La séance, suspendue à douze heures trente, est reprise à quatorze heures quinze, sous la présidence de M. Gérard Larcher.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec de la stupeur et une immense tristesse que nous avons appris, le samedi 10 décembre dernier, la brutale disparition de Jean-Claude Frécon, à l’âge de 72 ans.

Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, se lèvent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Il avait été victime d’un infarctus massif, après avoir assisté au marché aux vins de Chavanay. Conduit à l’hôpital de Givors, il n’a pu être réanimé. Sa générosité et son engagement total pour accomplir les mandats qui lui avaient été confiés auront eu raison de sa santé, que nous savions fragilisée par la charge de travail qu’il s’imposait.

Sa disparition a été un choc pour les sénatrices et les sénateurs, quelles que soient leurs sensibilités politiques, et bien sûr pour son département de la Loire, dont Jean-Claude Frécon fut une figure majeure durant des décennies.

Je lui ai rendu hommage, en votre nom, le 13 décembre dernier, à l’occasion d’une émouvante cérémonie en l’église de Pouilly-lès-Feurs, au milieu de sa famille, de ses proches, de ses collègues et de ceux qui lui étaient chers.

J’étais accompagné du président du groupe socialiste et républicain, M. Didier Guillaume, de la présidente de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, Mme Catherine Morin-Desailly, et de nos collègues sénateurs de la Loire, Mme Cécile Cukierman et MM. Maurice Vincent et Bernard Fournier. Cet hommage devait trouver son prolongement dans notre hémicycle.

Jean-Claude Frécon était un militant infatigable, un élu local et national exemplaire, un Européen convaincu et un défenseur inlassable des territoires ruraux.

Natif de Castellane dans les Alpes-de-Haute-Provence, c’est dans le département de la Loire qu’il a accompli toute sa carrière politique. Il avait gardé de son métier d’instituteur, puis de directeur d’école, la passion d’enseigner et un sens de la pédagogie et de l’écoute dont il a fait des vertus majeures tout au long de son itinéraire public et politique.

Toutefois, il était aussi, depuis toujours, un homme de convictions, qui aimait à dire : « Je suis toujours un militant dans l’âme. Je milite depuis l’âge de onze ans. »

Jean-Claude Frécon fut, durant vingt-quatre années, le maire de sa commune de Pouilly-lès-Feurs, dont il avait été élu conseiller municipal dès 1971, à l’âge de 27 ans, avant d’en devenir le premier magistrat en 1983.

Il était avant tout un élu de proximité, qui a marqué l’histoire de sa commune. Il restera aux yeux des Pouillerots un maire actif, dynamique et apprécié pour sa capacité d’écoute, son dévouement inlassable, sa disponibilité à l’égard de ses concitoyens et un attachement particulier à toutes les dimensions festives et participatives.

Jean-Claude Frécon mesurait et subissait aussi le prix de cet engagement total. Il soulignait en ces termes la difficulté de la mission de maire dans nos territoires ruraux : « Les maires sont en contact direct, 365 jours par an, avec la population, 24 heures sur 24. C’est un travail passionnant, mais le plus stressant de tous. »

Cette proximité absolue, qui est le cœur du mandat de maire, Jean-Claude Frécon avait aussi tenu à la mettre au service de l’Association des maires de France, dont il fut le vice-président de 1989 à 2006. Il fut aussi conseiller général du canton de Feurs de 1979 à 2002, et président de la commission des transports de l’assemblée départementale de 1994 à 1998.

Son engagement total et son sens du travail bien fait en faisaient aussi un défenseur convaincu de la limitation des mandats. Permettez-moi de lui donner à nouveau la parole : « Je n’aime pas faire les choses à moitié et si l’on ne peut pas faire un travail complètement, il faut s’en démettre. »

Tenant à s’appliquer à lui-même ce principe, il renonça à son mandat de conseiller général en 2002, avant d’abandonner en 2006 ses fonctions de maire. Ce fut pour lui une décision douloureuse, qu’il expliquait ainsi : « C’est une déchirure ; le mandat de maire est un mandat passionnant, on est près des gens, on voit des choses concrètes se réaliser. Mais je savais qu’un jour ou l’autre, il faudrait s’arrêter… »

Après avoir été élu sénateur de la Loire le 23 septembre 2001, Jean-Claude Frécon se consacra intensément à son activité de parlementaire.

Chargé de mission, en 1985-1986 au cabinet de Jean Auroux, ministre de l’urbanisme, du logement et des transports, puis candidat aux élections législatives, Jean-Claude Frécon souhaitait fortement représenter son département de la Loire au Parlement, notamment au Sénat de la République.

Sa marche vers le Palais du Luxembourg fut un long chemin. Militant socialiste fidèle, élu local d’exception, spécialiste des finances locales, il fut candidat à plusieurs élections sénatoriales, avant d’être élu sénateur de la Loire en 2001, aux côtés de Josiane Mathon, de Michel Thiollière et de notre collègue Bernard Fournier. Dix années plus tard, il fut reconduit dans ce mandat qui lui était si cher.

Jean-Claude Frécon, qui avait visité chacune des 326 communes de la Loire, avait sans doute été le plus ému de tous lors de son élection. Comme toujours, il se consacra avec passion à son mandat national, qu’il voulait exercer de manière plénière, dans toutes ses dimensions.

Il s’investit pleinement dans la défense des territoires de la Loire et l’exercice de sa fonction de législateur, siégeant successivement à la commission des lois, puis à la commission des finances, dont il fut le vice-président, et enfin, depuis 2014, à la commission de la culture.

Spécialiste reconnu des finances locales, ses rapports budgétaires annuels sur le conseil et le contrôle de l’État ou sur les engagements financiers de l’État faisaient autorité. Il y déplorait fortement que l’État se comporte trop souvent comme un simple actionnaire financier.

Le travailleur infatigable qu’était Jean-Claude Frécon tenait aussi à participer pleinement à la mission de contrôle du Sénat. Il mettait un point d’honneur à élaborer, presque chaque année, un rapport d’information sur les sujets les plus variés : Les Avances aux services de l’État et aux organismes gérant des services publics ; Les Engagements hors bilan de l’État ; La Cour nationale du droit d’asile ; La Réforme du Conseil économique, social et environnemental, ou encore La Sécheresse de 2003.

Il tenait aussi à s’investir pleinement dans un certain nombre de groupes d’études et dans de nombreuses activités internationales, rédigeant, là encore, de nombreux rapports concernant aussi bien le Brésil que les relations économiques et financières à reconstruire entre la France et l’Iran.

Jean-Claude Frécon, dont l’intérêt se portait sur les situations difficiles, présidait le groupe d’amitié avec le Kosovo et le groupe d’études et de contact du Sénat avec la République populaire démocratique de Corée.

Le tour d’horizon des innombrables sujets qui le passionnaient serait toutefois très incomplet si l’on ne soulignait pas la force des convictions européennes de Jean-Claude Frécon.

Membre du Conseil de l’Europe, il participa dès 1994 aux travaux du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Il eut ainsi à observer de nombreuses élections locales dans les 47 pays membres de cette instance, qui défend les droits de l’homme, la démocratie et le respect de l’État de droit.

L’investissement de Jean-Claude Frécon dans cette institution européenne fut consacré, quelque vingt ans plus tard, par son élection à la présidence du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux. Ce fut, le 14 octobre 2014, un moment de grande émotion pour lui. Il s’exprima en ces termes devant le Congrès réuni à Strasbourg : « C’est pour moi un immense honneur que vous venez de m’accorder. C’est, permettez-moi de le dire avec une grande sincérité, la consécration d’une carrière tout entière dédiée aux collectivités territoriales à travers toutes les fonctions que j’ai pu occuper dans mon pays. »

Orateur chaleureux, l’Européen Jean-Claude Frécon était avant tout un humaniste. Il avait décidé de ne pas être candidat en septembre prochain au renouvellement de son mandat de sénateur. Il était venu m’en parler, avant d’adresser aux maires de son département un courrier rédigé en ces termes : « J’aurai passé seize ans dans cette fonction de sénateur et j’y ai connu beaucoup de satisfactions, avec énormément de travail, mais je ne le regrette pas, car j’ai toujours eu le souci de nos communes. J’aurai en septembre prochain 73 ans et il sera temps pour moi de laisser la place à des plus jeunes, avec la satisfaction d’avoir servi notre pays, notre département, nos communes et nos concitoyens. »

Le destin n’aura pas laissé à notre collègue le temps de bénéficier d’un repos aussi mérité. C’est un travailleur infatigable et un homme de bien qui nous a quittés.

En cette heure de partage et de recueillement, je souhaite redire notre sympathie aux membres du groupe socialiste et républicain du Sénat et à ses collègues de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Je souhaite aussi exprimer à son épouse, Ginette, à ses trois enfants Éric, Isabelle et Christelle, à ses petits-enfants, à toute sa famille, à ses proches, ma profonde peine personnelle. En les écoutant à Pouilly-lès-Feurs, j’ai mieux perçu l’intime de Jean-Claude Frécon, les souffrances et les espérances, les douleurs et les rêves, qu’il a emportés dans le secret de son cœur, sur l’une des routes de la Loire.

Jean-Claude Frécon restera présent dans nos mémoires.

La parole est à M. le secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
André Vallini, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame, c’est avec une grande tristesse que le Gouvernement a appris, le 10 décembre dernier, que Jean-Claude Frécon nous avait brutalement quittés.

Enseignant par vocation, instituteur, puis directeur d’école, il s’engage très tôt dans la vie associative locale de Pouilly-lès-Feurs, en créant le comité des fêtes. Il se lance aussi dans l’éducation populaire au sein de la Fédération des œuvres laïques et anime la vie sportive de sa commune, notamment le club de football.

Militant associatif, il est aussi militant syndical à l’UNSA, l’Union nationale des syndicats autonomes, dont il restera toujours membre. C’est donc tout naturellement qu’il fait son entrée dans la vie publique au niveau local, en devenant, à 35 ans, conseiller général du canton de Feurs dans le département de la Loire.

Quatre ans plus tard, il est élu maire de la commune de Pouilly-lès-Feurs, un mandat qu’il remplira pendant vingt-trois ans avec passion, œuvrant jour après jour pour ses concitoyens, dont il sut conserver la confiance par son inlassable dévouement. Apprécié de ses concitoyens dans sa commune, il le fut aussi au conseil général comme à l’Association des maires de France, de 1983 à 2006, dont il devint vice-président.

Élu local viscéralement attaché à son territoire, Jean-Claude Frécon n’en était pas moins un Européen convaincu. C’est ainsi qu’il fut, dès les années 1980, membre de la délégation française à la Chambre des pouvoirs locaux du Conseil de l’Europe. Il en gravit ensuite tous les échelons, jusqu’à en devenir président, avant de devenir président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux en 2014. Cette consécration européenne fut l’aboutissement de trente années d’engagement au service de la démocratie locale.

Jean-Claude Frécon ne se limitait pas à ces responsabilités importantes. Il s’engagea aussi avec passion sur des sujets majeurs : les migrants et les réfugiés, la situation en Ukraine, les relations entre la France et l’Iran ou encore la Corée du Nord.

C’est ainsi que, au fil des années, il s’imposa comme l’une des figures politiques marquantes de son département de la Loire. C’est naturellement qu’il fut élu au Sénat en 2001.

Au sein de la prestigieuse Haute Assemblée, il trouva très vite ses marques et réussit à s’épanouir, jusqu’à démissionner de ses mandats de conseiller général et de maire, afin de mieux se consacrer à ses activités de sénateur et de président de chambre au Conseil de l’Europe.

Tous les sénateurs, qui, comme moi, ont eu la chance de siéger à ses côtés sur ces travées, se souviennent d’un collègue chaleureux, inépuisable travailleur, parlementaire enthousiaste passionné par son travail.

Je l’avais croisé voilà quelques mois à l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry. Il s’envolait pour la Scandinavie, où se tenait une réunion du Conseil de l’Europe. Il m’avait de nouveau impressionné par la sagacité dont il faisait preuve pour analyser le contexte politique, aussi bien régional que national.

Jean-Claude Frécon avait annoncé qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat sénatorial, car il souhaitait passer le flambeau et profiter d’une retraite bien méritée, après avoir consacré près de quarante années au service de sa commune, de son département et de son pays.

Durant toutes ces années, Jean-Claude Frécon a marqué l’histoire de la Loire. Il a brillamment représenté notre pays au Conseil de l’Europe. Il a ardemment défendu nos collectivités locales au Sénat. Et il a toujours défendu avec fierté les couleurs de son idéal socialiste.

Le Gouvernement souhaite donc aujourd'hui, par ma voix, lui rendre un hommage appuyé. À son épouse, à ses trois enfants, à ses amis, à ses collaborateurs, à l’ensemble de ses concitoyens et de ses collègues, notamment du groupe socialiste, j’adresse, au nom du Gouvernement et en mon nom personnel, mes condoléances les plus sincères et les plus attristées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mesdames, messieurs, je vous invite maintenant à partager un moment de recueillement à la mémoire de Jean-Claude Frécon.

Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le secrétaire d’État, observent une minute de silence.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Jean-Claude Frécon, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants ; nous les reprendrons à quatorze heures cinquante.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quatorze heures quarante, est reprise à quatorze heures cinquante, sous la présidence de Mme Jacqueline Gourault.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’informe le Sénat que le groupe socialiste et républicain a fait connaître à la présidence qu’il présente la candidature de Mme Marie-Françoise Perol-Dumont pour représenter la France en qualité de membre suppléant à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Cette candidature a été publiée et sera ratifiée, conformément à l’article 9 du règlement, s’il n’y a pas d’opposition à l’expiration du délai d’une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’informe le Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a fait connaître à la présidence le nom de la candidate qu’il propose pour siéger à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, en remplacement de Jean-Claude Frécon, décédé.

Cette candidature a été publiée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz et aux énergies renouvelables (projet n° 269, texte de la commission n° 286, rapport n° 285).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, voilà dix-huit mois, à la suite d’une discussion parlementaire intense, qui a contribué à enrichir et améliorer le texte que défendait Ségolène Royal, la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte était promulguée, ouvrant la voie à la stratégie nationale bas carbone, à la programmation pluriannuelle de l’énergie et à l’accord historique sur le climat obtenu à Paris le 12 décembre 2015.

Dans le cadre de la mise en œuvre de cette loi, le développement des énergies renouvelables est la principale priorité, pour diversifier notre mix énergétique, réduire nos émissions de gaz à effet de serre et favoriser l’essor des filières de la croissance verte et la création des emplois de demain.

C’est pourquoi, sans attendre la publication de la programmation pluriannuelle de l’énergie le 28 octobre dernier, et pour l’application de l’objectif de la loi d’atteindre 32 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique en 2030, le Gouvernement avait déjà publié le volet « énergies renouvelables » de cette programmation pluriannuelle dès le 24 avril dernier. C’était un document très attendu par les filières des énergies renouvelables, pour avoir de la visibilité.

L’ambition est considérable. Par exemple, il s'agit de plus que tripler la puissance photovoltaïque installée, de plus que doubler la puissance éolienne terrestre installée, ou d’augmenter de plus de 50 % la production de chaleur renouvelable.

Grâce à cette ambition résolue, une dynamique est à l’œuvre. Ainsi, depuis 2014, la puissance éolienne et solaire installée a augmenté de 25 %. Les énergies renouvelables électriques produisent désormais, à la pointe de midi, l’équivalent de six réacteurs nucléaires et contribuent à la sécurité de l’alimentation. Les projets de chaleur renouvelable et de récupération qui sont aidés par le Fonds chaleur ont augmenté de près de 30 %. Au total, ce dernier a ainsi permis d’accompagner près de 4 000 opérations d’investissement, pour un montant total de 1, 4 milliard d’euros.

Ces résultats se traduisent en termes de créations d’emplois et de croissance verte. Au 31 décembre 2015, la filière éolienne comptait ainsi près de 15 000 emplois sur le territoire français et 800 sociétés actives dans le secteur. En 2015, la croissance des emplois éoliens a été de 15, 6 % par rapport à 2014, avec près de 2 000 créations d’emplois supplémentaires. Par rapport à 2013, les emplois éoliens ont crû de 33, 3 %, soit 3 620 emplois supplémentaires. La première usine de construction d’éoliennes terrestres en France achève d’ailleurs sa construction : il s’agit de l’usine Poma, en Isère.

Pour prolonger cette dynamique, l’ordonnance relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, que ratifie l’article 1er du projet de loi dont vous êtes saisis, permet une meilleure intégration des énergies renouvelables au marché et au système électrique et prévoit la mise en œuvre de nouvelles procédures de mise en concurrence, plus adaptées au stade de maturité de certaines énergies renouvelables.

En particulier, l’ordonnance supprime la priorité d’appel pour les installations de production d’électricité à partir de charbon, contradictoire avec la priorité qui doit être donnée à la production à partir d’énergies renouvelables.

Elle introduit une priorité d’appel pour les installations produisant de l’électricité à partir d’énergies renouvelables dans les zones non interconnectées, comme c’est déjà le cas en métropole continentale.

Elle ouvre la possibilité de recourir à d’autres procédures de mise en concurrence que l’appel d’offres, telle que la procédure de dialogue concurrentiel, qui tire les leçons des premiers appels d’offres éoliens en mer, et permettra désormais une évolution des projets au fil de la procédure et ainsi réduire les délais.

Elle est en cours dans le cadre de l’appel d’offres éolien en mer que Ségolène Royal a lancé au large de Dunkerque et s’appliquera également pour l’appel d’offres au large d’Oléron.

L’article 1er du projet de loi ratifie également l’ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité. Elle permet de doter la France d’un cadre légal qui facilite le développement de l’autoconsommation.

Le développement de l’autoconsommation est en effet un objectif vertueux, pour les énergies renouvelables, pour les réseaux d’électricité et pour les factures énergétiques. Un appel d’offres a ainsi été lancé à l’été dernier pour le développement de l’autoconsommation dans les secteurs industriels, tertiaires et agricoles. Les soixante-douze premiers lauréats de cet appel d’offres, qui a rencontré un très grand succès, sont désormais connus, ce qui témoigne de l’ambition des territoires, des citoyens et des acteurs économiques à évoluer vers un système énergétique plus décentralisé.

L’ordonnance prévoit également la définition des opérations d’autoconsommation, en reconnaissant notamment l’autoconsommation collective. Elle reconnaît l’obligation pour les gestionnaires de réseau de faciliter les opérations d’autoconsommation, ainsi que l’établissement par la Commission de régulation de l’énergie d’une tarification d’usage du réseau adaptée aux installations en autoconsommation, pour tenir compte des réductions de coûts d’utilisation des réseaux que peuvent apporter ces opérations.

Nous sommes très attachés à ce que les tarifs d’usage des réseaux intègrent dès à présent ce nouvel usage qu’est l’autoconsommation, pour en favoriser le développement. L’ordonnance prévoit enfin la simplification des procédures pour les installations de petite taille faisant de l’autoconsommation partielle.

Pour aller plus loin, afin d’accompagner l’autoconsommation, l’Assemblée nationale et votre commission ont introduit un dispositif d’exonérations de taxes – contribution au service public de l’électricité et taxes locales sur la consommation d’électricité – pour l’électricité autoconsommée à l’article 1er bis A. Nous y sommes très favorables.

Mme la ministre de l’environnement a souhaité cette discussion parlementaire pour la ratification des ordonnances, pour que celles-ci puissent bénéficier de vos enrichissements. Il s’agit là d’une méthode de coconstruction, à laquelle Ségolène Royal et moi-même tenons beaucoup. Je veux vous remercier des améliorations apportées au texte.

Au-delà de la ratification des ordonnances, la mise en application de la loi de transition énergétique, que ce soit à travers la publication des textes réglementaires, conduite tambour battant avec aujourd’hui plus de 95 % des décrets adoptés, ou des appels d’offres, a permis d’identifier des dispositions complémentaires permettant d’accélérer et de simplifier la transition énergétique et la croissance verte en France. C’est le sens des autres articles du projet de loi qui vous est soumis.

L’article 2 prévoit d’interdire le cumul de la valorisation des garanties d’origine de l’électricité renouvelable avec le bénéfice d’un dispositif de soutien : tarif d’achat ou complément de rémunération. L’objectif est de garantir que l’électricité soutenue par des dispositifs nationaux, qui sont financés par tous les consommateurs, revienne bien à l’ensemble des consommateurs, sans que les fournisseurs puissent bénéficier d’une double rémunération indue, et de favoriser le développement de l’électricité renouvelable.

Maintenir ce principe de non-cumul est également nécessaire pour sécuriser juridiquement les dispositifs de soutien aux énergies renouvelables dont nous avons obtenu la validation par la Commission européenne le 12 décembre dernier.

Ce dispositif a fait l’objet de débats importants à l’Assemblée nationale. Les députés ont prévu que les garanties d’origine issues des installations de production d’énergies renouvelables bénéficiant d’un dispositif de soutien soient mises aux enchères par l’État.

Votre commission a contribué à améliorer le dispositif en prévoyant la possibilité d’un allotissement par filière et par zone géographique. Je suis convaincue que le travail intense d’écoute conduit par les parlementaires a permis d’aboutir à un dispositif équilibré, et je tiens à vous en remercier. Notre objectif est que le décret d’application de ce dispositif soit publié dans les meilleurs délais, après une concertation avec l’ensemble des parties prenantes.

L’article 3 met en place une réduction des coûts de raccordement au réseau électrique pour les producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable, dite « réfaction tarifaire ». En effet, le coût du raccordement se révèle parfois un obstacle pour les projets des producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable. Tel est notamment le cas pour les installations de petite ou moyenne puissance, notamment en milieu rural, dont l’éloignement par rapport au réseau nécessite parfois une extension significative de ces derniers, afin d’évacuer l’électricité produite.

Ce dispositif a pu susciter l’inquiétude de certaines entreprises locales de distribution de petite taille. Certaines ont pu craindre que, en cas de réfaction importante sur le raccordement d’installations d’énergie renouvelable de très grande taille, le dispositif pèse sur leur trésorerie.

Je voudrais ici les rassurer, en précisant que l’objectif de la réfaction est bien de favoriser le développement des énergies renouvelables en milieu rural, là où les coûts de raccordement sont souvent plus élevés qu’en milieu urbain ou périurbain. C’est une mesure d’équité.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Je pense en particulier aux agriculteurs qui s’engagent dans des projets de méthanisation ou de photovoltaïque. Les coûts plus importants de raccordement peuvent actuellement les défavoriser dans les appels d’offres. Ce seront donc les installations de petite taille qui bénéficieront du taux maximal de réfaction de 40 %.

L’article 3 permet également de clarifier les modalités de prise en charge des indemnités en cas de retard de raccordement pour les parcs éoliens en mer. Cette visibilité était indispensable pour mener à bien les procédures administratives des appels d’offres et accélérer la mise en service des parcs éoliens en mer.

L’article 4 propose de confier la coordination des opérations associées à la modification de la nature du gaz acheminé dans des réseaux aux gestionnaires de ces réseaux.

Cette clarification des responsabilités lors des opérations de modification de la nature du gaz acheminé dans des réseaux est tout particulièrement nécessaire pour préparer la prochaine conversion des réseaux de transports de distribution de gaz à bas pouvoir calorifique, situés dans le nord de la France – comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une région à laquelle je suis particulièrement attachée

Sourires.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Pour les consommateurs dont les appareils et équipements peuvent être réglés ou adaptés au changement de la nature du gaz naturel, l’ensemble des coûts associés à ce changement de la nature du gaz sera donc pris en charge par le gestionnaire de réseau de distribution et répercuté dans les tarifs d’utilisation du réseau.

Toutefois, certains appareils très anciens ou ne respectant pas les normes européennes ne peuvent être adaptés ou réglés à la modification de la nature du gaz, et devront donc être remplacés. Cela concerne moins de 5 % des appareils actuellement en fonctionnement.

Une attention particulière doit être apportée pour les ménages en situation de précarité, qui devront supporter le coût du remplacement de ces appareils très anciens. Il sera nécessaire de les accompagner financièrement. Votre rapporteur propose un amendement tendant à demander au Gouvernement un rapport qui devra proposer des solutions pour accompagner ces ménages précaires. J’accueille très favorablement cette demande de rapport, et je souhaite que ses conclusions puissent être mises en œuvre dans un délai compatible avec les opérations de conversion.

En conclusion, je voudrais souligner combien le travail parlementaire a permis d’améliorer le projet du Gouvernement.

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

De nombreuses dispositions ont été adoptées pour clarifier et améliorer la lisibilité du texte législatif.

La discussion d’aujourd’hui permettra, j’en suis sûre, de nouvelles avancées dans ce sens. À l’issue de ces débats, nous souhaitons que le texte puisse rapidement avancer sur le chemin de son entrée en vigueur, afin de tirer tout le parti de ses dispositions pour accélérer encore la mise en œuvre de la transition énergétique et de la croissance verte en France.

M. Bruno Sido applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les parlementaires, surtout lorsqu’ils sont dans l’opposition, n’aiment pas beaucoup le recours aux ordonnances.

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. On peut changer d’avis !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Pourtant, cela me paraît tout à fait justifié lorsque l’urgence d’une réforme ou la technicité de la matière l’exigent, pour autant que le Parlement – c’est précisément le cas aujourd’hui – en soit ensuite saisi pour contrôler et ratifier explicitement le travail du Gouvernement.

J’ajoute que nous, parlementaires, n’avons parfois que ce que nous méritons quand, sur de trop nombreux textes, nous empilons les articles additionnels jusqu’à plus soif. À cet égard, les exemples des lois Travail, Macron ou encore Transition énergétique parlent d’eux-mêmes, avec un nombre d’articles qui aura doublé, triplé ou quadruplé entre le texte initial et la loi adoptée ! Je tenais à le souligner.

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Sur le fond, sous des abords assez techniques, le texte qui nous est soumis n’en comporte pas moins plusieurs enjeux importants pour le fonctionnement de notre système électrique.

Ainsi, la première ordonnance qu’il nous est proposé de ratifier fixe pour la première fois un cadre légal à l’autoconsommation.

Cette pratique, appelée à se développer fortement dans les années à venir, pourrait en effet permettre de réduire les coûts du réseau, sous réserve qu’un certain nombre de règles soient prévues pour assurer une bonne synchronisation de la production et de la consommation, dimensionner les installations en fonction des besoins et garantir que la production soit située à proximité des lieux de consommation. Sur ce dernier point, notre commission vous proposera de compléter le texte, afin de limiter les opérations d’autoconsommation individuelle à un même site, car, en l’état, un client « multisites » pourrait produire dans sa résidence secondaire, par exemple dans le Midi, et consommer dans sa résidence principale, ce qui solliciterait le réseau et donc ne créerait aucune économie.

Pour le reste, notre commission a approuvé les avancées prévues par l’ordonnance, qu’il s’agisse de la garantie d’accès au réseau, de la possibilité de céder les surplus à titre gratuit ou de la fixation d’un tarif d’accès au réseau spécifique pour les plus petites installations. Elle les a même complétées par plusieurs dispositions fiscales ou techniques facilitatrices. Je mentionnerai seulement l’extension du champ de l’autoconsommation collective, qui autorisera les échanges d’énergie entre deux bâtiments tout en préservant le caractère de proximité sur le réseau de l’opération. Vous avez bien voulu le rappeler, madame la secrétaire d’État.

La seconde ordonnance comporte plusieurs mesures techniques pour accompagner le développement des énergies renouvelables et améliorer leur intégration au réseau. Je pense en particulier à la possibilité pour l’État de recourir à d’autres formes de mise en concurrence que le traditionnel appel d’offres, au renforcement de la coordination entre les producteurs et les gestionnaires de réseaux, ou encore à l’extension de la priorité d’appel dans les zones non interconnectées.

L’article 2 du projet de loi, qui a fait l’objet, à juste titre, de nombreux débats, a trait aux garanties d’origine associées à la production d’électricité renouvelable, qui permettent de certifier le caractère « 100 % vert » d’une offre de fourniture. Jusqu’à présent, seules les garanties d’origine de la production non subventionnée étaient valorisées en France, en moyenne entre 0, 1 euro et 0, 3 euro par mégawattheure, et pour un volume total de vingt-cinq térawattheures, soit environ le quart de la production renouvelable.

Dans la version initiale du texte, le Gouvernement proposait d’interdire toute émission des garanties d’origine en cas d’aides publiques à la production, afin en particulier d’éviter que le consommateur ne paie deux fois pour la même électricité renouvelable, une première fois par la fiscalité énergétique, et une seconde fois en souscrivant à une offre verte. Or cette solution n’aurait pas permis de tracer l’électricité verte subventionnée, dont les garanties auraient ainsi été « perdues » pour la collectivité.

Pour résoudre la difficulté, l’Assemblée nationale, en lien avec le Gouvernement, a prévu un mécanisme de mise aux enchères, organisé par et au bénéfice de l’État, qui présente le triple avantage d’éviter toute double rémunération des producteurs, d’assurer la traçabilité de l’électricité verte soutenue et de dégager des recettes qui viendront en déduction des subventions versées aux énergies renouvelables.

La fixation d’un prix de réserve évitera par ailleurs de déstabiliser un marché des garanties déjà largement excédentaire, de même que l’obligation d’inscription des seules installations de plus de 100 kilowatts limitera les coûts de gestion du système et dispensera les plus petites installations, à commencer par celles des particuliers, d’une obligation inutile.

Au total, notre commission a jugé qu’il s’agissait d’un bon compromis et que le mécanisme ainsi mis en place restait relativement simple. Elle n’y a donc apporté que quelques compléments, dont la possibilité d’allotir par type de filière et par zone géographique, pour mieux répondre aux demandes en faveur d’un mix diversifié et d’une énergie produite localement.

L’article 3 traite d’un autre problème important. Il propose de rétablir la réfaction tarifaire, c’est-à-dire le financement par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, le TURPE, d’une partie des coûts de raccordement des installations de production d’électricité renouvelable, et ce pour favoriser la réalisation de projets plus éloignés du réseau. Sont prioritairement visées des installations situées en milieu rural, le cas le plus représentatif étant celui des panneaux solaires installés sur des bâtiments agricoles, qui, par définition, ne peuvent pas être déplacés pour réduire les coûts d’extension et de renforcement du réseau.

Après une analyse approfondie, notre commission a approuvé une disposition dont certains des inconvénients potentiels ont été corrigés par nos collègues députés.

Ainsi, pour éviter une réduction indifférenciée quelle que soit la taille des projets, la modulation du taux de réfaction selon le niveau de puissance ou la filière, désormais explicitement prévue dans le texte, permettra d’adapter la mesure à la diversité des situations, donc d’aider davantage les petits producteurs que les gros, qui n’en ont pas besoin. De même, pour éviter une différence de traitement entre le gaz et l’électricité renouvelables, la mesure a été opportunément étendue aux installations produisant du biogaz, dont l’injection sur le réseau sera ainsi facilitée.

Nous avons enfin examiné une autre difficulté, à laquelle vous avez fait référence, madame la secrétaire d’État : la charge excessive de trésorerie que la réfaction pourrait faire peser, avant remboursement par le TURPE, sur les gestionnaires de réseaux, et en particulier sur les entreprises locales de distribution les plus petites.

Nous aurons l’occasion d’y revenir au cours du débat, mais ces ELD peuvent d’ores et déjà être rassurées. Outre la modulation des taux, dont le Gouvernement pourra sans doute nous préciser le « calibrage » – du moins, je l’espère, madame la secrétaire d’État –, cette charge sera encore minorée par l’abaissement du taux maximal de réfaction, décidé par votre commission, à 40 %, qui réduira sensiblement le coût de la mesure.

J’évoquerai brièvement une disposition introduite au même article par l’Assemblée nationale pour créer un régime indemnitaire spécifique en cas de retard de raccordement des énergies renouvelables en mer, et dont le coût, certes plafonné, sera pris en charge en tout ou partie par le TURPE, le reste relevant du gestionnaire du Réseau de transport, RTE, selon que sa responsabilité sera engagée ou non.

Là encore, notre commission a examiné avec d’autant plus d’attention le dispositif qu’il pourrait engager, en cas de survenance du risque couvert, plusieurs centaines de millions d’euros. Elle l’a cependant jugé nécessaire pour permettre la réalisation des parcs d’éoliennes en mer déjà attribués ou à venir, considérant que la spécificité des aléas visés, en particulier la faillite d’un câblier, justifiait un régime dérogatoire du droit commun et une « socialisation » partielle du risque.

Enfin, l’article 4 du projet de loi aborde un sujet conjoncturel, certes, mais qui aura son importance pour une grande partie des Hauts-de-France.

Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Or, si la question avait déjà été abordée dans la loi de transition énergétique, il est apparu nécessaire de compléter ce cadre législatif, notamment pour permettre aux gestionnaires de réseaux d’intervenir sur les installations intérieures de gaz, afin de les contrôler et, le cas échéant, de les adapter ou de les régler. Il s’agira d’une opération d’ampleur, puisque, sur la période 2016-2029, quelque 650 millions d’euros devraient être engagés et couverts par les tarifs de réseaux, dont 400 millions d’euros pour les seules opérations de contrôle.

Comme vous l’avez souligné, madame la secrétaire d’État, deux sujets restent cependant à traiter. J’espère que le Gouvernement pourra nous répondre au cours du débat.

D’une part, les sites de stockage du gaz, qui sont aussi concernés que les réseaux par un changement de nature du gaz acheminé, ne sont aujourd’hui pas inclus dans le dispositif alors que leurs coûts d’adaptation seront significatifs.

D’autre part, rien n’est prévu à ce stade pour accompagner les consommateurs aux revenus modestes qui seraient contraints de remplacer un ou plusieurs appareils inadaptables. Sur ce dernier point, et faute de pouvoir introduire dès à présent une aide sous peine de nous voir opposer l’article 40 de la Constitution, notre commission, qui a exprimé cette préoccupation sur toutes ses travées, demandera la remise d’un rapport sur le sujet. Il s’agit d’une pratique à laquelle nous ne sommes habituellement guère favorables, mais j’ai cru comprendre que, en l’espèce elle permettrait au Gouvernement d’avancer dans sa réflexion et de proposer un dispositif opérationnel dans une prochaine loi de finances.

Sous réserve des quelques amendements complémentaires que je vous présenterai, la commission des affaires économiques vous proposera donc d’adopter ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est assez rare que les projets de ratification d’ordonnances soient inscrits à l’ordre du jour et examinés. Nous ne pouvons que nous féliciter que ce soit le cas aujourd'hui.

Cette ratification par le Parlement permettra de sécuriser le dispositif juridique mis en place par les ordonnances, lesquelles ont pour objet de dynamiser plus encore la transition énergétique. Nous sommes donc au cœur de la transition énergétique, cette transition qui constitue l’un des chantiers législatifs majeurs de ces dernières années face au dérèglement climatique et qui a fait de la France un pays en pointe sur le plan européen et mondial dans ce domaine. Cela a contribué au succès de la COP21 lors du sommet de Paris.

Si ce projet de loi permet de ratifier notamment les deux ordonnances, il contient aussi de nombreuses dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz, ainsi qu’aux énergies renouvelables, ce qui conforte la mise en œuvre de la transition énergétique.

Cela étant, la ratification de l’ordonnance de juillet 2016 sur l’autoconsommation répond à de fortes attentes sociétales en ce domaine, car le fait de produire sa propre énergie est perçu par le citoyen de manière positive pour des raisons d’indépendance et de contribution citoyenne. De plus, la baisse du prix des équipements, notamment des panneaux photovoltaïques, facilitera le choix de l’autoconsommation.

Selon le Syndicat des énergies renouvelables, les panneaux photovoltaïques ont enregistré une baisse de 80 % entre 2009 et 2015. Cette diminution des coûts devrait se poursuivre. Cela dit, le choix de l’autoconsommation à partir d’énergies renouvelables pourrait être, par ailleurs, favorisé par la hausse de la facture d’électricité.

Il n’en demeure pas moins que ce choix, qui reste relativement coûteux, doit être encouragé. C’est l’objet de cette première ordonnance, et c’est un signal fort pour faciliter le développement de l’autoconsommation. Il était donc devenu nécessaire à la fois d’encourager le choix de l’autoconsommation et d’anticiper son développement, tout en fixant un cadre pour bien la maîtriser.

En effet, plusieurs risques peuvent être liés à un développement incontrôlé, comme le souligne à juste titre un rapport issu de l’Assemblée nationale. Par exemple, l’émergence de réseaux de distribution « sauvages », dissimulés derrière un point d’alimentation, un transfert de charges des autoconsommateurs vers le reste des utilisateurs ou enfin l’apparition de difficultés non négligeables pour le réseau de transport d’électricité.

La deuxième ordonnance vise à simplifier le droit existant et à permettre une meilleure intégration des énergies renouvelables dans le marché électrique, notamment en supprimant le plafond législatif de 12 mégawatts applicable aux installations sur obligation d’achat.

À cette meilleure intégration au système électrique peut aussi s’ajouter la mise en œuvre, pour les appels d’offres, d’une procédure de dialogue concurrentiel, procédure plus souple, donc plus adaptée à certaines filières. On peut aussi évoquer la suppression de l’appel à priorité par Réseau de transport d’électricité, ou RTE, des centrales à charbon.

En peut enfin se féliciter de la création d’une priorité d’appel pour les énergies renouvelables dans les zones non interconnectées : ce peut être un plus pour le développement des centrales à biomasse et des énergies renouvelables.

Concernant l’interdiction, à l’article 2, du cumul de la valorisation des garanties d’origine avec les dispositifs de soutiens publics, comme l’obligation d’achat ou le complément de rémunération, il nous paraît normal d’éviter que le consommateur ne paye plusieurs fois l’origine renouvelable de l’électricité.

L’autre avantage de cette interdiction était, nous semble-t-il, d’encourager le développement de nouvelles capacités renouvelables, avec pour objectif d’une meilleure intégration au marché. Cependant, par rapport au texte initial, nous craignions que cette interdiction ne se traduise par la disparition de toute traçabilité, dans la mesure où l’on ne pourrait plus faire mention de la garantie d’origine. La nouvelle rédaction va dans le bon sens en interdisant les cumuls, tout en préservant la traçabilité de l’électricité verte.

Ainsi, l’État, et non plus les producteurs, détiendra le bénéfice des garanties d’origine pour l’électricité produite sous mécanisme de soutien. Il pourra ensuite mettre ces garanties d’origine aux enchères auprès des fournisseurs d’énergie, qui pourront dès lors proposer des offres vertes aux consommateurs. Voilà qui valorisera la traçabilité tout en allégeant la facture des consommateurs, puisque les recettes tirées des enchères réduiront les charges de service public de l’électricité.

Au sein de la commission, un amendement est venu modifier l’article 2 pour permettre à l’État une mise aux enchères partielle des garanties d’origine issues de la production renouvelable soutenue par l’obligation d’achat ou par le complément de rémunération.

Certes, cet amendement vise à apporter une certaine flexibilité au dispositif, mais celui-ci ne répond plus à la demande de traçabilité totale souhaitée. Cela risquerait de compromettre l’équilibre global tel qu’il a été intensément recherché. Nous restons donc sceptiques sur l’opportunité d’une telle modification.

L’article 3 permet au tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, le TURPE, de couvrir une partie des coûts de raccordement aux réseaux de distribution des producteurs d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

Cette prise en charge partielle, appelée « réfaction tarifaire », va tout à fait dans le bon sens, car les coûts de raccordement constituent souvent un obstacle à l’implantation d’installations en énergies renouvelables, notamment en milieu rural, comme Mme la secrétaire d’État l’a souligné.

Cela dit, le reste à charge qui sera supérieur à 50 % du coût de raccordement devrait normalement inciter les producteurs à localiser, de façon optimale, les installations produisant des énergies renouvelables.

À ceux qui s’inquiéteraient des conséquences sur le TURPE de cet élargissement de la « réfaction tarifaire », rappelons que son effet sera négligeable, puisque la réfaction sera compensée par une hausse du tarif de seulement 0, 65 %, soit environ 80 à 90 millions d’euros pour un TURPE de 13 milliards d’euros.

J’en viens aux énergies renouvelables en mer, lesquelles mobilisent des investissements importants. Il était donc indispensable de prévoir un régime particulier pour les indemnités versées aux producteurs en cas de délais non respectés pour la mise à disposition des ouvrages de raccordement. C’est ce que prévoit la nouvelle rédaction du texte, qui distingue deux hypothèses.

Soit la cause du retard n’est pas imputable au gestionnaire de réseau et, dans ce cas, les indemnités ne sont pas à la charge de celui-ci et seront couvertes par le TURPE dans la limite d’un plafond fixé par décret.

Soit la cause est imputable au gestionnaire de réseau et, dans ce cas, le TURPE ne couvrira qu’une partie des indemnités.

Je salue d’autant plus ces deux dispositions que nous aurons prochainement au large des côtes audoises deux fermes-pilotes d’éoliennes. Elles seront plus précisément installées au large de Gruissan-Port-la-Nouvelle et de Leucate. Je remercie le Gouvernement de ce choix pertinent !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Enfin, concernant l’article 4 et le projet « Tulipe », c’est-à-dire le projet dans les Hauts-de-France de conversion des réseaux de gaz B en gaz H, notre intention était de parvenir à une solution nous permettant d’attribuer des soutiens financiers aux consommateurs en situation de précarité qui seraient dans l’obligation, du fait des modifications de la nature du gaz acheminé, de remplacer des équipements et appareils inadaptables.

Nous avons évoqué cette importante préoccupation en commission. Nous avons donc travaillé à la rédaction d’un amendement visant à instaurer un mécanisme d’aide à caractère social. Néanmoins, la crainte de nous heurter à une irrecevabilité financière nous a conduits à abandonner cette proposition. En conséquence, monsieur le rapporteur, nous nous rallierons à votre amendement.

Par ailleurs, par voie d’amendements, nous allons tenter de compléter le texte, mais je ne m’étendrai pas ici davantage.

En conclusion, réussir la transition énergétique nécessite d’être innovant. Ce texte l’est assurément. Il représente une avancée majeure pour le présent et l’avenir. Dès lors, nous le voterons avec enthousiasme !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bosino

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, notre système électrique est le produit d’un projet collectif incarné pendant des années par l’entreprise publique EDF-GDF et par ses agents. L’énergie doit être un bien public et le rester.

Notre système électrique constituait aussi, au travers de la péréquation tarifaire, l’affirmation du principe d’égalité de traitement, d’un « pacte républicain » entre mondes rural et urbain, d’une part, et entre zones économiques riches et régions plus défavorisées, d’autre part. Il me semble opportun de rappeler cette partie de notre histoire. En effet, la libéralisation des marchés de l’énergie devait garantir la sécurité d’approvisionnement en électricité à un coût socialement acceptable : nous en sommes bien loin !

Comment peut-on parler du droit à l’énergie pour tous quand notre pays compte près de 12 millions de précaires énergétiques et que le Gouvernement fait la promotion de l’effacement de millions de foyers en lieu et place de l’effacement habituel des entreprises ? Ou encore quand les gouvernements successifs renoncent à faire de l’État le garant de la solidarité nationale prenant en charge les activités d’intérêt général nécessaires au développement de la vie collective et le transforment en simple actionnaire parmi d’autres ?

Ce rappel est opportun, car ces ordonnances prévues par la loi de transition énergétique nous sont présentées alors que la Commission européenne est en train d’élaborer le cadre juridique de l’autoconsommation d’énergie renouvelable. Cette évolution des modes de production et de consommation d’énergie, peu conforme à notre vision du problème, se traduit, notamment, par de nouvelles dispositions au sein du « paquet énergie propre » que la Commission vient de présenter.

Ce « paquet d’hiver » présenté le 30 novembre 2016 comporte plusieurs propositions de modifications des textes relatives au marché intérieur de l’électricité, à l’efficacité énergétique ou bien encore aux énergies renouvelables. L’un des éléments les plus structurants de ce paquet « énergie propre » tient à la volonté affichée par la Commission de donner aux citoyens européens un pouvoir de contrôle plus grand sur leur production et sur leur consommation d’énergie.

Pour contribuer à la réalisation de cet objectif, l’autoconsommation bénéficie d’une reconnaissance et d’un cadre juridique. C’est dans ce contexte de démantèlement d’un modèle centralisé ayant démontré son efficacité qu’il faut aborder ce projet de loi ratifiant l’ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

Il en est ainsi des mesures qui ont en commun de modifier diverses dispositions du code de l’énergie concernant les conditions de raccordement des énergies renouvelables aux réseaux publics de distribution d’électricité, les sites fortement consommateurs d’électricité ou de gaz naturel ou la valorisation des garanties d’origine de la production d’électricité renouvelable bénéficiant de l’obligation d’achat.

Ces ordonnances s’inscrivent au cœur de la transition énergétique. Nous regrettons néanmoins que l’on mélange la production d’énergies renouvelables et l’autoproduction ou l’autoconsommation.

En ce qui concerne l’autoconsommation, le projet de loi fixe une définition très large. Apparaît ainsi la possibilité d’une autoconsommation collective, ce qui est nouveau. Des logements collectifs ou des centres commerciaux pourront produire leur propre électricité en fonction de leurs besoins de consommation, par exemple par le biais d’installations photovoltaïques. En soi, c’est une bonne chose. En revanche ce qui est plus problématique, c’est qu’ils pourront la vendre et déroger à l’obligation de conclure un contrat de vente avec un tiers pour le surplus d’électricité non consommée.

La production d’électricité à partir d’énergies renouvelables est l’objet de la seconde ordonnance, qui comporte de nombreuses dispositions, parmi lesquelles la possibilité de recourir à d’autres procédures de mise en concurrence que l’appel d’offres. La procédure d’appel d’offres pourra notamment être remplacée par la procédure de dialogue concurrentiel, inspirée du dialogue compétitif utilisé en matière de commande publique.

Comme l’ont souligné nos collègues de l’Assemblée nationale, si la mise en place de cette nouvelle procédure pour les installations de production d’électricité a été saluée par la Commission de régulation de l’énergie, elle nous éloigne un peu plus de l’objectif d’une maîtrise publique accrue du secteur de l’énergie renouvelable. Devons-nous continuer dans la voie du développement de ces filières très capitalistiques pour le plus grand profit de quelques opérateurs privés ?

Nous approuvons les dispositions de l’article 2, qui vise à interdire la valorisation des garanties d’origine de la production d’électricité renouvelable bénéficiant déjà d’un soutien public.

Nous ne pouvons continuer de faire payer aux consommateurs le surcoût de l’aide aux investisseurs éoliens, répercutée dans la contribution au service public de l’électricité, alors que ces filières ont atteint la maturité économique et que le chiffre d’affaires de l’éolien, en France, s’élève aujourd’hui à plus de 10 milliards d’euros. Mme la secrétaire d’État a d’ailleurs rappelé que la construction de la première usine d’éoliennes terrestres était en cours.

À nos yeux, nous l’avons dit et répété, les marchés et le recours exclusif au secteur privé, avec leurs logiques de profit à court terme, ne peuvent nous permettre de nous hisser à la hauteur des enjeux de la transition énergétique, qui nécessitent des temps longs et d’importants investissements publics.

Enfin, le Conseil d’État saisi pour avis sur ce texte considère que « de façon générale, l’étude d’impact transmise par le Gouvernement est très insuffisante, voire confuse sur les objectifs poursuivis », et ce sur tous les sujets abordés, qu’il s’agisse de la garantie d’origine, de la modulation des tarifs de réseau pour les entreprises fortement consommatrices d’électricité ou de gaz, de l’impact sur les consommateurs ou encore des conséquences pour le réseau du changement de gaz.

Certes, l’autoconsommation avait besoin d’un cadre légal. Toutefois, comme le souligne le rapporteur, celle-ci présente « des risques pour la couverture des coûts du système électrique et le financement de la transition énergétique ». En effet, elle « pourrait conduire à des transferts de charges significatifs entre les autoconsommateurs et les autres utilisateurs ainsi qu’à des baisses de recettes fiscales ».

À cet égard le texte organise l’exonération de la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, pour les autoconsommateurs, même lorsque ceux-ci ne consomment pas entièrement l’énergie produite, ce qui implique un report sur les autres consommateurs.

Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, en particulier la casse de notre système unifié de production et de distribution de l’énergie, nous ne voterons pas ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, d’une économie fondée sur les énergies fossiles, il est aujourd’hui impératif d’accélérer la transformation vers un modèle plus sobre en carbone, par le développement des énergies renouvelables et l’amélioration de l’efficacité énergétique.

Cette nouvelle économie est créatrice d’emplois, à condition d’accompagner ces transformations par l’élaboration d’un cadre juridique et financier clair et stable. En même temps, la politique énergétique, coûteuse pour nos finances publiques, doit être davantage efficace.

Sans prétendre ici dresser le bilan du quinquennat, même si c’est la mode apparemment en ce moment

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Nous le constatons en ce moment avec le dossier de Fessenheim.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Toutefois, deux points majeurs auront marqué la politique de notre pays en matière de lutte contre changement climatique ces dernières années : l’accord de Paris et la loi relative à la transition énergétique.

Deux mois et demi après l’adoption de ce texte, le présent projet de loi permet, par son article 1er, la ratification de l’ordonnance du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation et de l’ordonnance du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

Ces ordonnances sont essentielles dans un contexte de décentralisation énergétique. L’autoconsommation et le développement des énergies renouvelables doivent, dès lors, être intégrés en toute sécurité dans notre système électrique, et leur production doit être optimisée. Je partage les remarques du rapporteur quant aux risques d’un développement massif non maîtrisé de l’autoconsommation. Certes, nous n’en sommes pas encore là, puisque la part de l’autoconsommation en France reste très en deçà du niveau atteint par d’autres pays tels que le Royaume-Uni ou l’Espagne.

Alors qu’il était plus avantageux de revendre l’électricité produite en raison d’un prix d’achat des énergies renouvelables attractif, la donne est en train de changer. En effet, les prévisions sont à la hausse inéluctable de la facture d’électricité, ainsi qu’à des installations et à des offres en autoconsommation de plus en plus accessibles, même si, reconnaissons-le, les charges demeurent élevées.

Cet obstacle financier n’a pas empêché l’augmentation de la part des demandes de raccordement sur le réseau géré par ENEDIS, anciennement ERDF, qui sont ainsi passées de 4 % en 2013 à quelque 37 % en 2016.

Le projet de loi devrait contribuer enfin à ce que cette solution soit de plus en plus répandue par la fixation d’un cadre légal et par l’adaptation de la tarification de l’accès au réseau de distribution aux petites installations d’une puissance inférieure à 100 kilowatts. Celles-ci sollicitent moins le réseau et pourront bénéficier d’un « micro-TURPE », qui sera établi par la Commission de régulation de l’énergie, la CRE.

Nous sommes également favorables à la dérogation à l’obligation de conclure un contrat de vente avec un tiers pour le surplus d’électricité non consommée, ce qui simplifiera le régime de l’autoconsommation.

La seconde ordonnance comporte des mesures importantes en matière d’énergies renouvelables telles que l’extension de la priorité d’appel pour les installations dans les zones non interconnectées, le renforcement de la coordination entre les producteurs et les gestionnaires du réseau ou la possibilité de recourir à d’autres formes de mise en concurrence qui amélioreront le dialogue entre l’État et les porteurs de projets présélectionnés à partir de leurs capacités techniques et financières.

Outre la ratification de ces ordonnances, le projet de loi prévoit à l’article 2 de mettre en place un système de mise aux enchères des garanties d’origine de la production d’électricité renouvelable subventionnée. Organisé par l’État à son bénéfice, il a pour vertu d’assurer la traçabilité de l’électricité « verte » et de prémunir les consommateurs d’un double paiement de l’électricité d’origine renouvelable consommée, ainsi que d’éviter une double rémunération des producteurs, alors que certaines filières ont atteint une maturité économique suffisante.

Nous saluons en particulier le rétablissement, à l’article 3, du financement par le TURPE à hauteur de 40 % d’une partie des coûts de raccordement des installations de production d’énergies renouvelables ou réfaction tarifaire. Cette disposition constitue une bonne nouvelle pour les territoires ruraux où les coûts de raccordement sont prohibitifs, alors qu’ils s’engagent souvent dans une politique énergétique volontariste.

De même, au regard des risques encourus lors du raccordement des installations d’énergies renouvelables en mer, le projet de loi vise à instaurer opportunément un régime d’indemnisation spécifique en cas de retard.

Ainsi, par l’ensemble de ses dispositions très attendues, le présent projet de loi prépare l’avenir grâce à des outils utiles à la décentralisation énergétique et contribue pleinement à la lutte contre le changement climatique. Dans ces conditions, le groupe du RDSE votera ce texte à l’unanimité.

Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, c’est en pleine vague de grand froid et après des débats sur les questions d'approvisionnement en électricité de notre pays que nous examinons ce projet de loi de ratification d'ordonnances relatives à l'autoconsommation et à la production d'électricité à partir d'énergies renouvelables.

Diversifier notre bouquet énergétique en renforçant la part des énergies renouvelables et prendre le virage de la croissance verte, tel était bien l'objectif de la loi de transition énergétique. Ces deux ordonnances dont vous nous proposez la ratification, madame la secrétaire d’État, en sont les déclinaisons concrètes.

J’évoquerai tout d'abord l'autoconsommation, qui fait l'objet de l'ordonnance du 27 juillet 2017. L'autoconsommation d'électricité connaît une croissance dynamique. La demande est bien présente sur le marché français, bien qu'elle soit en retard par rapport à nos voisins européens, chez qui elle représente 8 % de la consommation totale en Allemagne, 13, 2 % en Espagne et 12, 9 % au Royaume-Uni. En France, ce chiffre est seulement de 4, 2 %, mais on observe une forte demande sociale en faveur d'une électricité renouvelable et localisée.

L'autoconsommation se situe aujourd'hui au carrefour entre transitions énergétique et numérique et bénéficie des avancées technologiques qui facilitent la mise en place et le suivi de la production d'électricité.

Considérée de manière globale avec les mesures de rénovation et de sobriété énergétique, l'autoconsommation dessine de belles perspectives prometteuses, notamment en matière d'habitat propre.

Le groupe UDI-UC souscrit pleinement à cette ordonnance, qui vise à favoriser le développement des opérations d'autoconsommation en fixant un cadre légal à l'autoconsommation ; en définissant à la fois l’autoconsommation individuelle et collective ; en garantissant l'accès des opérations d'autoconsommation aux réseaux publics ; en offrant la possibilité de déroger, pour les plus petites installations, à l'obligation, trop contraignante, du contrat de vente pour le surplus d'électricité non consommée, qui sera cédé à titre gratuit au gestionnaire de réseau ; en confiant à la Commission de régulation de l'énergie la charge de fixer un TURPE spécifique pour les installations d'une puissance inférieure à 100 kilowattheures ; enfin, en étendant l'exonération de CSPE aux autoproducteurs qui réinjectent une part de l'énergie qu'ils ne peuvent pas consommer dans le réseau, à condition qu'ils ne dépassent pas un mégawatt de puissance.

L'autoconsommation, c'est aussi permettre plus largement au monde de l'entreprise de s'engager pleinement dans la transition énergétique. À cet égard, je me réjouis que le premier appel d'offres national ait été lancé et que soixante-dix projets de taille intermédiaire, développés par des entreprises industrielles, tertiaires et les bâtiments commerciaux aient ainsi été désignés.

Je dirai ensuite un mot des sources d'énergie renouvelables employées dans ces projets. Le solaire est l'énergie la plus utilisée à ce jour. Assurons-nous, madame la secrétaire d'État, que le développement de tels projets favorise bien la filière française du photovoltaïque.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Bien sûr !

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

La traçabilité est l'autre grand axe de ce projet de loi. L'article 2 vise à introduire un nouveau système de ventes aux enchères des garanties d'origine associées à la production d'électricité renouvelable.

Actuellement, il y a davantage d'offres de garanties d'origine que de demandes. L'idée consiste donc à faire diminuer l'offre pour faire grimper la valeur de la garantie d'origine et, in fine, permettre au producteur d'énergie renouvelable d'obtenir un revenu plus important et plus attractif.

Est interdite la valorisation des garanties d'origine de la production d'électricité renouvelable bénéficiant d'un système de soutien sous forme d'obligation d'achat ou de complément de rémunération. Cette disposition favorisera, espérons-le, l'émergence de nouveaux modèles de financement des énergies renouvelables, fondés davantage sur la valeur de la garantie d'origine.

J'en viens enfin à un levier sur lequel nombre de mes collègues ont insisté et qui est effectivement très attendu dans les territoires ruraux, à savoir l'extension de la réfaction tarifaire aux producteurs d'électricité renouvelable proposée à l'article 3.

Ce dispositif constitue une attente forte des agriculteurs qui souhaitent investir dans la production d'électricité à partir de sources d'énergies renouvelables, mais qui sont freinés dans leur démarche par des coûts de raccordement au réseau qui constituent un obstacle économique important.

Le projet de loi prévoit donc qu’une partie des coûts de raccordement soit prise en charge par le TURPE. Cette disposition permettra de lever les freins qui retiennent encore ces acteurs et les incitera à investir, tout en leur offrant un complément de revenu. Il s’agit donc un levier exceptionnel pour développer les énergies renouvelables.

Vous avez souhaité, monsieur le rapporteur, plafonner le taux de la réfaction à 40 %, afin de réduire le coût et la charge de trésorerie correspondante pour les gestionnaires de réseaux, notamment pour les plus petites entreprises locales de distribution, les ELD. Nous souscrivons à cette mesure.

Vous vous êtes aussi assuré que la fixation d’un TURPE spécifique ne contrevenait pas au principe de péréquation tarifaire, qui vise à garantir que chaque utilisation entraîne le même tarif, sur tout le territoire. C’est un élément essentiel qui garantit l’équité, donc le développement du dispositif.

Attention toutefois aux effets pervers de ce dispositif. Le coût de la mesure serait de 70 millions d’euros par an, à comparer aux 13, 5 milliards d’euros financés, au total, par le TURPE. Dans son étude d’impact, le Gouvernement signale que la couverture par le TURPE d’une partie des coûts de raccordement induira pour les consommateurs un renchérissement du tarif d’utilisation du réseau public de transport d’électricité, donc de la facture d’électricité. Le Parlement devra rester vigilant et suivre l’application de cette mesure avec attention.

Vous l’aurez compris, le groupe UDI-UC partage les objectifs de développement durable contenus dans la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Nous sommes particulièrement attachés au développement des sources d’énergies renouvelables.

Nous voterons donc en faveur du présent projet de loi, un texte que nous qualifierons de « facilitateur », puisqu’il contribuera à inciter les Français à se saisir davantage de ses dispositions d’autoconsommation et à accompagner ainsi la montée en puissance des productions d’énergies renouvelables.

Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC, du groupe Les Républicains et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Poher

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, lorsque l’on examine le texte de ce projet de loi et que l’on a la curiosité de lire tout ce qui s’est dit à son sujet en commission, on est frappé par le caractère très technique – technique matérielle, financière, voire fiscale – des ordonnances qu’il tend à ratifier et de la démarche qu’il implique.

Je veux bien le reconnaître : la technique est nécessaire. Certains de nos collègues se sont d’ailleurs spécialisés dans ce domaine. C’est tant mieux pour notre assemblée et pour les nombreuses personnes qui, comme moi, sont allergiques aux procédures et hermétiques aux acronymes.

Aussi, permettez-moi, mes chers collègues, d’aborder le sujet sous un autre angle : celui des arguments et des conséquences, celui du pourquoi et du comment, un angle, en somme, que je qualifierais de philosophique plus que de technique.

En février 2015, nous avons débattu, dans cet hémicycle, du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Le 16 novembre 2015, nous avons adopté, à l’unanimité, une résolution visant à rappeler, à quelques jours de la COP21, que les collectivités territoriales avaient un rôle essentiel à jouer en la matière. Il y a quinze jours, nous discutions du recul du trait de côte.

Tous ces dossiers sont liés, nous le savons. Tous ces dossiers rejoignent un constat intangible : le constat cause-conséquence. Tous ces dossiers font, au fil du temps, la une de l’actualité sous des titres différents : énergie, gaz à effet de serre, réchauffement climatique et ses conséquences.

Pour chacun de ces thèmes, la conclusion est la même : la recherche de solution doit être collective, la dynamique également. Cette dynamique inventive, créatrice, mobilisatrice n’a d’efficacité que si elle rassemble l’État, y compris dans son fonctionnement déconcentré dont nous parlions récemment, les collectivités territoriales, les entreprises et les citoyens.

Cette approche devient une évidence quand on travaille, en particulier, sur un projet de territoire à énergie positive, dont l’objectif est de diminuer la consommation d’énergie dans un territoire défini, tout en y augmentant la production. Cette démarche a un intérêt majeur : elle oblige à réfléchir sur la vie énergétique d’un territoire, à imaginer un panel de solutions, souvent constitué, en réalité, d’une association de petites solutions, tout en reconnaissant que l’acceptabilité de ces moyens de production est variable selon le type et l’importance des projets, ainsi que selon leur lieu d’implantation. On le voit encore dans l’actualité récente.

Avec ce raisonnement, bien sûr, toutes les formes d’énergies renouvelables sont à examiner, à finaliser et à mettre en valeur, mais, surtout, tous les maîtres d’ouvrage doivent être aidés, accompagnés et valorisés. L’entreprise, l’agriculteur ou le simple citoyen sont – ou plutôt, ils peuvent et doivent être – des maîtres d’ouvrage. À nous de leur faciliter les choses : les plus belles intentions et les meilleures idées du monde ne restent que de jolies utopies – certes, bien souvent utiles ! –, des vœux pieux, si personne ne sert de relais sur le terrain.

La démarche est claire : si nous voulons réussir la transition énergétique, si nous voulons promouvoir un autre schéma de l’énergie, si nous voulons finaliser et illustrer un vrai mix énergétique, nous devons inciter et faciliter, j’insiste sur ce terme, les initiatives citoyennes, en y incluant les collectivités territoriales et les entreprises. Nous devons promouvoir le droit à l’expérimentation et perdre ce réflexe un peu trop centralisateur, quand on parle d’énergie.

Le présent texte améliore les choses pour le citoyen, pour les collectivités territoriales et, j’ai cru le comprendre, pour les habitants des Hauts-de-France. Or je suis un citoyen, j’habite les Hauts-de-France et je me chauffe au gaz.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Comme moi !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Poher

Je ne sais pas si je suis concerné par les dispositions contenues dans ce texte, mais, d’avance, je vous en remercie !

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je ne crois pas que vous entriez dans les catégories visées, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Poher

Le présent texte est donc de bonne facture. Joël Labbé a néanmoins proposé de préciser un peu les choses, en particulier, au sein de l’article 2, pour ce qui a trait au processus de la mise aux enchères et de la démarche d’allotissement. Nous aurons l’occasion de débattre de deux amendements déposés par notre groupe à cet effet.

Ce projet de loi étant extrêmement technique, il nous semblait utile de réaffirmer la philosophie qui le sous-tendait.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, le groupe écologiste votera ce projet de loi, non pas pour le TURPE, la réfaction ou d’autres dispositions techniques, mais bien parce que ces quelques articles représentent une avancée pour les vrais acteurs de la mutation et de la transition : citoyens, collectivités territoriales, entreprises, qui, au fil des lois, peuvent se mettre en ordre de marche. C’est comme cela, et uniquement comme cela, que nous atteindrons notre objectif.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’occasion de la discussion de ce projet de loi, je voudrais mettre en perspective le chemin parcouru depuis la publication de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée en juillet 2015, mais aussi appeler votre attention sur le devenir du principe de la péréquation tarifaire.

Sur le plan national, depuis juillet 2015, la stratégie nationale bas carbone a constitué la base de la contribution française à l’accord de Paris, qui a été un succès pour notre pays. Les programmations pluriannuelles de l’énergie, ou PPE, ont été publiées. La PPE de la métropole a été accompagnée de la stratégie de développement de la mobilité propre, dont on mesure très concrètement, en ce moment même, l’intérêt et l’enjeu de santé publique.

Sur le plan local, les territoires se sont fortement engagés dans la transition énergétique, en se saisissant du dispositif des territoires à énergie positive pour la croissance verte, ou TEPCV, qui leur a été proposé. Je le vis très concrètement dans mon agglomération, dont la partie rurale est importante : c’est un succès et un soutien considérable pour les maires, qu’il s’agisse de rénovation énergétique de bâtiments publics, de modernisation de l’éclairage public, de mobilité propre, de mise en œuvre de plateformes de rénovation énergétique dont profiteront les particuliers pour leur habitat, ou de soutien à la montée en puissance des productions d’énergies renouvelables.

Par sa contribution, le fonds de financement de la transition énergétique, passé de 250 millions d’euros en 2015 à 750 millions d’euros en 2017, joue un rôle décisif dans les choix que font les élus. Il contribuera dans le temps à alléger les budgets de fonctionnement de nos collectivités.

De la même manière, les certificats d’économie d’énergie, les chèques énergie, désormais ouverts au bois, au GPL et au fioul, le crédit d’impôt transition énergétique engagent la France et ses territoires dans la transition énergétique et profiteront aux foyers français les plus modestes.

Je me réjouis de tous ces efforts engagés par le Gouvernement. Ils font franchir à la France une étape fondamentale dans la transition énergétique, en adéquation avec les engagements de la COP21.

L’autoconsommation participe également de ce volontarisme en matière de transition énergétique, et je m’en félicite. Toutefois, en même temps que nous avançons dans ce domaine, nous sommes obligés de réglementer pour faire face à des situations complètement nouvelles. Dans ce contexte, la question du devenir du principe de péréquation tarifaire ne peut être éludée.

Le développement des énergies renouvelables et des systèmes d’autoconsommation, amorce la transition de notre modèle national de gestion de l’énergie électrique. Progressivement, nous allons nous éloigner du modèle centralisé, vertical, conçu dans l’après-guerre, pour nous approcher, plus ou moins vite suivant les progrès techniques – en matière de stockage en particulier –, d’un système décentralisé.

Ce mouvement inéluctable nous oblige à penser sur des bases nouvelles la question de la péréquation tarifaire, qui est, on le sait, une forme de traduction de l’égalité territoriale.

Même si elle est consentie de manière marginale, j’en conviens, l’exonération de contribution au service public de l’électricité, la CSPE, des petits producteurs – c’est-à-dire dont la production est inférieure à un mégawattheure – ne génère-t-elle pas de la distorsion au regard du principe de péréquation ? Plus fondamentalement, si les modes de production autonome se développent à grande échelle, comment éviter la disparité des coûts de l’énergie ? Comment garantir le recours assurantiel au réseau classique ?

Dans une note récente intitulée Énergie centralisée ou décentralisée ?, France Stratégie remarque que la logique du tout-décentralisé « voudrait que les investissements soient majoritairement portés par les collectivités locales en tant que futures gestionnaires et responsables de la sécurité d’approvisionnement sur leur territoire ».

Dans l’hypothèse intermédiaire de coexistence du système centralisé actuel avec des boucles locales, France Stratégie note que « conserver l’égalité de traitement entre tous les consommateurs suppose la mise en place d’une tarification adaptée, qui donne moins de poids au kilowattheure consommé et davantage à la puissance mise à disposition par le réseau ». L’institut précise en outre que, « pour ne susciter au niveau local que des solutions pertinentes économiquement, il est […] impératif que les tarifs reflètent bien les coûts ».

Quand on sait l’enjeu que représente pour notre modèle républicain la péréquation tarifaire de l’électricité et les difficultés que rencontrent aujourd’hui nos collectivités pour le financement du très haut débit, par exemple, on se dit que ce type de sujet mériterait une réflexion technico-économique approfondie.

Loin de moi l’idée de remettre en question le développement des systèmes locaux de production, bien au contraire ; je voterai d’ailleurs le présent projet de loi. Je voulais seulement appeler votre attention, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sur la nécessité de penser la réorganisation du système électrique, qui émerge sous nos yeux et qui connaît un véritable changement de paradigme.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je crois que le Gouvernement ne souhaite pas intervenir à l’issue de cette discussion générale. C’eût été pourtant utile, notamment après les propos de Franck Montaugé, qui a soulevé un véritable problème, et dont je souscris pleinement à l’analyse.

Quel est, madame la secrétaire d’État, l’avenir de la péréquation tarifaire ? J’en rappelle les principes essentiels, sur lesquels la France s’est mise d’accord dès 1946 : l’électricité est payée au même prix, quel que soit le territoire sur lequel elle est utilisée.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Or nous constatons aujourd’hui une dérive, sur laquelle je veux appeler votre attention, madame la secrétaire d’État. Le fait que vous n’ayez pas réagi aux différentes interventions m’interpelle.

Lors de la discussion au Sénat du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, des amendements ont été déposés qui tendaient à permettre aux régions de s’organiser d’une façon autonome pour s’approvisionner en énergie électrique et en gaz.

Lors de nos débats sur le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, un autre amendement visait à ce que les îles bretonnes puissent être déconnectées du réseau quand elles n’en avaient pas besoin, et reconnectées dans le cas inverse. C’eût été, là encore, leur accorder une forme d’autonomie dans leur approvisionnement.

Le Sénat avait mis le holà à ces deux propositions. Néanmoins, le débat perdure. Ce qu’a indiqué Franck Montaugé à l’instant me semble de ce point de vue particulièrement pertinent. Il est impératif d’être très clair quand on parle d’« autoconsommation ».

L’autoconsommation telle qu’elle est présentée dans le texte que nous examinons aujourd’hui est très encadrée. Cependant, il existe des intentions que je veux ici relever. Les candidats à la primaire de la gauche ont exprimé leur point de vue sur ces sujets. C’est bien légitime : c’est la démocratie ! L’un d’entre eux – celui qui a recueilli le plus de voix au premier tour, et qui sera peut-être désigné candidat de la gauche dimanche prochain… – a déclaré dans un débat télévisé qu’il était pour l’autoconsommation et pour l’autonomie des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Je vous le dis avec beaucoup de fermeté, mes chers collègues, quelle que soit la place que vous occupez dans les travées de cet hémicycle : c’est une idée perverse, qui se retournera contre les territoires !

M. Hervé Poher s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Je souhaite que les choses soient très claires : le Sénat est, ce me semble, unanime à considérer qu’il n’est pas question de toucher à la péréquation tarifaire.

Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Si l’on mettait à terre ce principe républicain, les territoires ruraux seraient abandonnés et les territoires richement dotés auraient le privilège de s’organiser autrement.

Je souhaite donc, mes chers collègues, que vous manifestiez votre adhésion à l’affirmation de ce principe !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili

Les réflexions du président de la commission des affaires économiques me poussent à intervenir. Je voudrais aborder avec vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ce débat sur des bonnes bases et dissiper les confusions à ce sujet.

Il n’est évidemment pas question de remettre en cause la péréquation tarifaire.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Je vous en rappelle le principe : pour un même usage, le même tarif est appliqué sur tout le territoire national. Cela n’empêche pas de différencier les tarifs quand les usages ou les services rendus au système électrique sont différents. C’est le sens des dispositions du présent projet de loi, qui visent à encadrer comme il convient ces pratiques.

J’entends l’inquiétude de certains orateurs : nous passons en effet d’un système auparavant très centralisé à un autre plus décentralisé. Les énergies renouvelables le permettent ; et les territoires doivent pouvoir gagner ce faisant une forme d’autonomie.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

C’est un choix politique, monsieur le président de la commission !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Ce choix a été fait par le Gouvernement.

L’égalité entre les citoyens dans l’accès à l’électricité, comme l’égalité tarifaire, sont des points de préoccupation essentiels. Nous y veillons. C’est pourquoi nous avons pris des dispositions en ce sens dans le présent texte.

Le monde change, mesdames, messieurs les sénateurs, …

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

… les productions d’électricité évoluent, la transition énergétique, voulue par le Gouvernement, est en marche : les débats doivent évoluer. Engageons-nous sur cette voie, sans jamais oublier que les citoyens doivent être traités de façon égale sur tout le territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

(Non modifié)

Sont ratifiées :

1° L’ordonnance n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité ;

2° L’ordonnance n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

L’article 1 er est adopté.

L’intitulé de la section 3 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de l’énergie est ainsi rédigé : « La procédure de mise en concurrence ». –

Adopté.

Au début du second alinéa de l’article L. 311-10 du code de l’énergie, sont ajoutés les mots : « Sous réserve des articles L. 2224-32 et L. 2224-33 du code général des collectivités territoriales, ». –

Adopté.

L’article L. 311-10-1 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, après le mot : « prix », sont insérés les mots : «, qui représente plus de la moitié de la note totale, » ;

2° Au sixième alinéa, après le mot : « implanté », sont insérés les mots : «, ou sur des territoires situés à proximité, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 18, présenté par MM. Courteau, Daunis, Montaugé et Cabanel, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

plus de

par les mots :

au moins

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

L’article 10 de l’ordonnance relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, codifié à l’article L. 311-10-1 du code de l’énergie, définit l’ensemble des critères objectifs, autres que le prix, sur lesquels l’autorité administrative se fonde pour désigner le ou les candidats retenus lors de la procédure de mise en concurrence. Il peut s’agir de critères qualitatifs – qualité environnementale de l’offre, efficacité énergétique, caractère innovant du projet –, de critères portant sur la rentabilité du projet, ou encore de critères relatifs à la sécurité d’approvisionnement.

Soucieux de voir les projets sélectionnés au meilleur coût pour la collectivité, M. le rapporteur a déposé en commission un amendement tendant à ce que le prix compte pour plus de la moitié dans les critères de notation des candidats.

Nous sommes bien sûr d’accord avec cette volonté de privilégier les projets les moins onéreux pour la collectivité. Toutefois, pourquoi le prix devrait-il compter pour « plus de la moitié » de la note, au lieu d’« au moins la moitié » ? Il ne me semble pas, par ailleurs, que la réglementation européenne exige une telle pondération.

Il nous paraît donc essentiel que d’autres critères environnementaux qui, comme la performance énergétique, peuvent contribuer à diminuer le coût d’usage pour la collectivité, pèsent de manière importante dans le choix des projets. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons, au travers de cet amendement, que le prix représente « au moins » la moitié de la note des candidats.

Personnellement, j’aurais préféré aller plus loin, mais je me suis rangé à la volonté de mon groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je dois reconnaître une forme de confusion, pour ne pas dire d’incompréhension, à l’écoute de votre intervention, mon cher collègue.

Sincèrement, entre la rédaction introduite par la commission pour la prise en compte du prix dans la notation des dossiers – « plus de la moitié », soit, par exemple, 50, 001 % – et celle de cet amendement – « au moins » la moitié, soit 50 % tout rond et plus –, la différence est nulle !

La confusion naît de vos propos, puisque vous expliquez avoir voulu « aller plus loin ». En commission, j’avais compris que vous vouliez plutôt que ce critère de prix compte pour la moitié « au plus » de la notation. J’avoue être un peu perdu…

Un point mérite cependant d’être relevé, mes chers collègues. Vous êtes tous, ici, élus locaux. Cela pourra changer pour certains en septembre prochain ! Vous savez à quel point le critère du prix dans les appels d’offres peut poser d’importants problèmes. Les règles s’imposant en la matière aux collectivités territoriales diffèrent en fonction des appels d’offres : le critère du prix peut représenter tantôt 50 %, tantôt 35 %, tantôt encore un autre pourcentage de la notation des dossiers.

Pour les appels d’offres dont nous discutons, fixer son niveau à « plus de la moitié » de la notation me paraît bon. Néanmoins, entre la rédaction adoptée la semaine dernière par la commission et celle qui est proposée au travers du présent amendement, je préfère la première.

C’est pourquoi je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Mme Barbara Pompili, secrétaire d’État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Oui, je voulais aller plus loin que la rédaction finalement retenue dans cet amendement, et prévoir un dispositif selon lequel le critère du prix représentait « au plus » la moitié de la notation. Toutefois, je m’en suis tenu à la rédaction voulue par mon groupe.

L’amendement n’est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 24, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

2° Au 4°, après le mot : « territoire », sont insérés les mots : « ou à proximité du territoire ».

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Il s'agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Favorable.

L’amendement est adopté.

L’article 1 er bis AC est adopté.

L’article L. 314-19 du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, après le mot : « bénéficier », sont insérés les mots : « une seule fois » ;

2° Au cinquième alinéa, le mot : « souhaitant » est remplacé par les mots : « pour lesquelles les producteurs souhaitent ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 9, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

M. le rapporteur a souhaité réintroduire une disposition adoptée dans le cadre de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui prévoyait que les installations ayant déjà bénéficié de tarifs d’achat ne pouvaient, lorsqu’elles répondaient ensuite à certaines dérogations, jouir qu’une seule fois d’un complément de rémunération.

Nous pensons, au contraire, qu’il est nécessaire de prévoir que certaines installations puissent bénéficier plusieurs fois d’un contrat de complément de rémunération.

L’article L. 314-19 du code de l’énergie restreint déjà la possibilité de conclure des contrats de complément de rémunération après avoir bénéficié d’un contrat d’achat à trois catégories spécifiques d’installations.

Tout d'abord, les installations qui s’engagent à réaliser un programme d’investissement. La réalisation de nouveaux investissements justifie de pouvoir bénéficier de nouveaux contrats, sans que cela soit limité à un seul contrat.

Ensuite, les installations dont le niveau des coûts d’exploitation d’une installation performante représentative de la filière reste supérieur au niveau de l’ensemble de ses recettes. Pour ces installations, il peut également être préférable de conclure des contrats successifs qui couvrent uniquement les coûts d’exploitation plutôt que d’inciter à la construction d’une nouvelle installation, dont il faudrait couvrir en plus l’amortissement du capital, ce qui conduirait à augmenter les coûts du soutien.

Enfin, les installations souhaitant rompre leur contrat d’achat pour un contrat de complément de rémunération sur la durée restante du contrat d’achat initial. Dans ce cas, il peut être nécessaire à ces installations de bénéficier d’un nouveau contrat, qui permettra de prolonger leur durée d’exploitation, au lieu de l’interdire, ce qui inciterait à remplacer les installations amorties, dont le coût du soutien serait faible, par de nouvelles installations qu’il faudrait à nouveau amortir.

Nous souhaitons donc, par cet amendement, supprimer l’alinéa 2 du présent article, qui empêche que certaines installations puissent bénéficier plusieurs fois d’un contrat de complément de rémunération.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

L’article L. 314-21 du code de l’énergie permet déjà à certaines installations, qui sont dès l’origine sous complément de rémunération, d’en bénéficier plusieurs fois. Il serait illogique que certaines installations en bénéficient et pas d’autres.

En outre, l’argument de Roland Courteau est pertinent : le système actuel pourrait inciter des propriétaires d’installations à tout casser pour construire du neuf, alors qu’il vaut mieux restaurer de l’ancien.

La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Le dispositif de cet amendement permettra de maintenir en fonctionnement certaines installations renouvelables qui, sans cela, ne pourraient continuer d’être exploitées. Cela se révélera moins coûteux pour la collectivité que la construction de nouvelles installations.

Le Gouvernement émet donc un avis tout à fait favorable.

L’amendement est adopté.

L’article 1 er bis AD est adopté.

Le septième alinéa de l’article L. 314-20 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le bénéfice du complément de rémunération peut, à cette fin, être subordonné à la renonciation, par le producteur, à certaines de ces aides financières ou fiscales. » –

Adopté.

I. – L’article 266 quinquies C du code des douanes est ainsi modifié :

1° Le 2° du 3 est ainsi rédigé :

« 2° Les personnes qui, dans le cadre de leur activité économique, produisent de l’électricité et l’utilisent pour les besoins de cette activité. » ;

2° Le 5 est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Produite par des producteurs d’électricité de taille modeste qui la consomment en tout ou partie pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme producteurs d’électricité de taille modeste les personnes qui exploitent des installations de production d’électricité dont la puissance de production installée est inférieure ou égale à 1 000 kilowatts ou, pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, celles dont la puissance crête installée est inférieure ou égale à 1 000 kilowatts. »

II (nouveau). – Le V de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un 5° ainsi rédigé :

« 5° Produite par des producteurs d’électricité de taille modeste qui la consomment en tout ou partie pour les besoins de leur activité. Sont considérées comme producteurs d’électricité de taille modeste les personnes qui exploitent des installations de production d’électricité dont la puissance de production installée est inférieure ou égale à 1 000 kilowatts, ou, pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, celles dont la puissance crête installée est inférieure ou égale à 1 000 kilowatts. »

III (nouveau). – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du II du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

IV (nouveau). – La perte de recettes résultant pour l’État du III du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 25, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. - Le 4° du V de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :

« 4° Produite et utilisée dans les conditions du 4° du 5 de l’article 266 quinquies C du code des douanes. »

II. - Le code des douanes est ainsi modifié :

1° Au a du 3 de l’article 265 bis, au a du 5 de l’article 266 quinquies et au 1° du 5 de l’article 266 quinquies B, les mots : « V de l’article L. 3333-2 du code général des collectivités territoriales » sont remplacés par les mots : « 5 de l’article 266 quinquies C » ;

2° Le 4° du 5 de l’article 266 quinquies C est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Cette disposition s’applique également à la part, consommée sur le site, de l’électricité produite par les producteurs d’électricité pour lesquels la puissance de production installée sur le site est inférieure à 1 000 kilowatts. Pour les installations de production d’électricité utilisant l’énergie solaire photovoltaïque, la puissance installée s’entend de la puissance crête installée. »

III. - Les I et II s’appliquent à compter du premier jour du trimestre civil suivant la promulgation de la présente loi.

IV. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales des I à III est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

V. - La perte de recettes résultant pour l’État du IV est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

L’article 1er bis A, tel qu’il a été introduit par l’Assemblée nationale, puis amendé par votre commission, clarifie le droit applicable en matière d’exonération de CSPE et de taxes locales sur l’électricité au bénéfice des autoconsommateurs.

Deux compléments doivent toutefois être apportés au dispositif : d’une part, il convient d’exonérer uniquement la part autoconsommée de l’électricité produite, et non la totalité de la production ; d’autre part, il est nécessaire de préciser la date d’entrée en vigueur du dispositif, pour en simplifier la mise en œuvre.

Tel est l’objet du présent amendement, qui vise en outre à procéder, dans un souci de clarification, à plusieurs coordinations dans le code des douanes.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Cet amendement tend à assurer la conformité de la mesure au droit européen sur la taxation des produits énergétiques.

Le Gouvernement émet donc un avis tout à fait favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Madame la secrétaire d’État, acceptez-vous de lever le gage sur cet amendement ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Oui, madame la présidente.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

En conséquence, l’article 1er bis A est ainsi rédigé.

(Non modifié)

L’article L. 315-1 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La part de l’électricité produite qui est consommée l’est soit instantanément, soit après une période de stockage. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 19, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article L. 315-1 du code de l’énergie est ainsi rédigé :

« Art. L. 315 -1 – Une opération d’autoconsommation individuelle est le fait pour un producteur, dit autoproducteur, de consommer lui-même et sur un même site tout ou partie de l’électricité produite par son installation. La part de l’électricité produite qui est consommée l’est soit instantanément, soit après une période de stockage. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Nous avons évoqué ce sujet à deux reprises en commission, et une fois encore durant la discussion générale.

Cet amendement vise à préciser qu’une opération d’autoconsommation individuelle doit être circonscrite géographiquement à un « même site ». Cela évitera d’attribuer le statut d’autoconsommateur à des clients « multisites », qui produiraient, par exemple, de l’électricité dans leur résidence secondaire et la consommeraient dans leur résidence principale, sans qu’il y ait aucun gain pour le réseau.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Favorable.

L'amendement est adopté.

Après le mot : « situés », la fin de l’article L. 315-2 du code de l’énergie est ainsi rédigée : « en aval d’un même poste de distribution publique d’électricité. Les chapitres III et V du titre III du présent livre, la mise en œuvre de la tarification spéciale dite “produit de première nécessité” prévue aux articles L. 121-5 et L. 337-3 du présent code et la section 1 du chapitre IV du titre II du livre II du code de la consommation ne sont pas applicables aux utilisateurs participant à une opération d’autoconsommation collective. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 5, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

1° Première phrase

Remplacer les mots :

de distribution publique d’électricité

par les mots :

public de transformation d’électricité de moyenne en basse tension

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

Les chapitres III et

par les mots :

Le chapitre

La parole est à M. Franck Montaugé.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Au sein de la commission, sur l’initiative de M. le rapporteur, un amendement a été adopté en vue de modifier l’article L. 315-2 du code de l’énergie, en introduisant la notion de « poste de distribution publique d’électricité ».

Cette notion englobe également les postes de transformation de haute en moyenne tension, dits « postes sources », qui transforment par exemple une tension de 63 000 volts en tension de 20 000 volts. La rédaction actuelle viserait donc également tous les départs moyenne tension, ou HTA, alors qu’il apparaît que l’intention de la commission était d’étendre le dispositif à tous les départs basse tension, ou BT, à l’aval d’un poste HTA/BT.

Par ailleurs, l’autoconsommation « collective », qui s’exerce entre producteurs et consommateurs « liés entre eux au sein d’une personne morale », ne saurait être qualifiée d’activité « d’achat pour revente » au sens de l’article L. 333-1 du code de l’énergie, puisque c’est bien l’électricité produite par cette personne qui est consommée.

En revanche, si de l’électricité est achetée par cette personne à un tiers, cette activité sort du périmètre de l’autoconsommation collective : dans ce cas, une dispense d’autorisation d’achat pour revente permettrait de contourner facilement le dispositif de l’autoconsommation en le transformant en une simple activité de fourniture qui, compte tenu de l’extension du périmètre de l’autoconsommation collective, pourrait concerner un volume important de consommateurs et d’électricité pour une autoproduction symbolique.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Cet amendement a pour objet d’apporter deux précisions opportunes.

Il vise, premièrement, à limiter le champ d’une opération d’autoconsommation collective à tous les départs basse tension à l’aval d’un poste moyenne/basse tension, conformément à l’intention de la commission, dont vous avez rappelé les termes de l’amendement initial.

Il tend, deuxièmement, à exclure des mesures de simplification prévues par la commission pour faciliter le développement de l’autoconsommation la dispense d’autorisation pour revente, au motif qu’une telle dispense n’est en fait pas nécessaire et qu’elle pourrait au contraire avoir des effets pervers en permettant de contourner le dispositif, ce qui serait contraire à l’objectif de la commission.

L’avis de la commission est donc favorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Il est favorable, pour les mêmes raisons.

L'amendement est adopté.

L'article 1er ter est adopté.

Après le mot : « établit », la fin du second alinéa de l’article L. 315-4 du code de l’énergie est ainsi rédigée : « la consommation d’électricité relevant de ce fournisseur en prenant en compte la répartition mentionnée à l’alinéa précédent ainsi que le comportement de chaque consommateur final concerné, selon des modalités fixées par voie réglementaire. » –

Adopté.

Après le mot : « raccordée », la fin du premier alinéa de l’article L. 315-5 du code de l’énergie est ainsi rédigée : « et rattachées au périmètre d’équilibre de ce dernier. » –

Adopté.

La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 322-10-1 du code de l’énergie est complétée par les mots : « pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie ». –

Adopté.

Le code de l’énergie est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 121-24 est supprimé ;

2° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 314-14 est remplacé par sept alinéas ainsi rédigés :

« L’électricité produite à partir de sources renouvelables ou de cogénération et pour laquelle une garantie d’origine a été émise par le producteur ne peut ouvrir droit au bénéfice de l’obligation d’achat ou du complément de rémunération dans le cadre des contrats mentionnés aux articles L. 121-27, L. 311-12, L. 314-1, L. 314-18 et, le cas échéant, L. 314-26.

« L’émission par le producteur d’une garantie d’origine portant sur l’électricité produite dans le cadre d’un contrat conclu en application des mêmes articles L. 121-27, L. 311-12, L. 314-1, L. 314-18 et, le cas échéant, L. 314-26 entraîne, sous les conditions et selon les modalités fixées par décret en Conseil d’État, la résiliation immédiate du contrat.

« Cette résiliation immédiate s’applique aux contrats conclus à compter de la date de publication de la loi n° … du … ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz et aux énergies renouvelables, ainsi qu’aux contrats en cours à cette même date.

« La résiliation d’un contrat mentionné au troisième alinéa du présent article entraîne également le remboursement :

« 1° Pour un contrat de complément de rémunération conclu en application du 2° de l’article L. 311-12 ou de l’article L. 314-18, des sommes actualisées perçues au titre du complément de rémunération ;

« 2° Pour un contrat d’achat conclu en application du 1° de l’article L. 311-12, de l’article L. 314-1 ou de l’article L. 314-26, des sommes actualisées perçues au titre de l’obligation d’achat, dans la limite des surcoûts qui en résultent, mentionnés au 1° de l’article L. 121-7.

« Toutefois, ce remboursement ne peut porter que sur les sommes versées à compter de la publication de la loi n° … du … précitée. » ;

bis Après le même article L. 314-14, il est inséré un article L. 314-14-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 314 -14 -1. – Les installations d’une puissance installée de plus de 100 kilowatts bénéficiant d’un contrat conclu en application des articles L. 121-27, L. 311-12, L. 314-1, L. 314-18 et, le cas échéant, L. 314-26 sont tenues de s’inscrire sur le registre mentionné à l’article L. 314-14.

« Pour les installations inscrites sur le registre mentionné au même article L. 314-14 et bénéficiant d’un contrat conclu en application des articles L. 121-27, L. 311-12, L. 314-1, L. 314-18 et, le cas échéant, L. 314-26, dès lors que les garanties d’origine issues de la production d’électricité d’origine renouvelable n’ont pas été émises par le producteur dans un délai fixé par décret, elles sont émises d’office, en tout ou partie, par l’organisme mentionné à l’article L. 314-14 au bénéfice de l’État à sa demande.

« Ces garanties d’origine sont mises aux enchères par le ministre chargé de l’énergie. Pour chaque mise aux enchères, il est préalablement fixé un prix minimal de vente de la garantie d’origine. Un allotissement par filière et par zone géographique peut être prévu.

« Les revenus de la mise aux enchères des garanties d’origine, déduction faite des frais de gestion de cette mise aux enchères et des frais d’inscription au registre mentionné au même article L. 314-14, viennent en diminution des charges imputables aux missions de service public mentionnées aux 1° et 4° de l’article L. 121-7.

« Les modalités et conditions d’application du présent article, en particulier les conditions de mise aux enchères, sont précisées par décret, après avis de la Commission de régulation de l’énergie. » ;

3° Au 3° de l’article L. 314-20, les mots : «, la valorisation par les producteurs des garanties d’origine » sont supprimés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Madame la secrétaire d’État, concernant les garanties d’origine, les GO, nous avons été alertés par Enercoop sur un risque portant sur le calendrier prévu par cet article, lequel serait très serré et pourrait, de fait, compromettre les émissions de GO pour 2017.

En effet, selon cette association, l’article 2 prévoit un délai pendant lequel le producteur peut choisir d’émettre la GO. Ce délai passé, l’État pourra émettre ensuite ces GO pour les mises aux enchères. Or les garanties d’origine issues de la production de 2017 doivent être, aux termes du décret n° 2016-944 du 11 juillet 2016, utilisées par les fournisseurs avant le 31 mars 2018 pour justifier de leur mix pour l’année 2016.

Cela veut dire que les producteurs ou acheteurs obligés ne pourront pas émettre les GO en 2017, alors même que le décret ne sera pas publié et que les enchères ne seront pas organisées. Il y a donc un risque que les GO de 2017, en particulier, ne puissent être émises ni par le producteur ni par l’État, ce qui serait nuisible en termes de traçabilité.

Par ailleurs, un nouveau gestionnaire du registre des garanties d’origine devrait être choisi à la mi-janvier 2018, après une mise en concurrence. Toutefois, j’attire votre attention sur le fait que, lors de la dernière désignation, il avait fallu attendre quelques mois pour que le gestionnaire de GO soit pleinement opérationnel.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous rassurer sur les délais de mise en œuvre du dispositif prévu dans cet article, donc sur la publication des décrets, y compris dans le cadre de la désignation prévue d’un nouvel organisme gestionnaire du registre des garanties d’origine ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur, ainsi que l’ensemble de vos collègues. Comme je l’ai souligné dans mon intervention liminaire, le décret sera publié d’ici au mois d’avril prochain, afin que le dispositif soit appliqué le mieux possible et réponde aux préoccupations des fournisseurs et des producteurs d’électricité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 14, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Après les mots :

Les installations

insérer les mots :

qui produisent de l’électricité à partir de sources renouvelables

La parole est à M. Franck Montaugé.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Il s’agit d’un amendement de précision, mais qui est somme toute important. Il est en effet nécessaire, selon nous, de prévoir que l’obligation d’inscription sur le registre ne concerne que les installations produisant de l’électricité à partir d’énergies renouvelables, et non pas les autres installations pouvant également bénéficier d’un dispositif de soutien en application des articles L. 311-12, L. 314-1 et L. 314-18, telles que les installations de cogénération.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Cet amendement tendant à apporter une précision utile, l’avis de la commission est favorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Favorable, madame la présidente.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 11, présenté par MM. Poher, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 13

Remplacer les mots :

à sa demande

par les mots :

à la demande de l’État ou des candidats qui participent aux enchères mentionnées au troisième alinéa

La parole est à M. Hervé Poher.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Poher

Madame la présidente, si vous le permettez, je présenterai conjointement les amendements n° 11 et 12, afin de ne pas prolonger nos débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’appelle donc en discussion l’amendement n° 12, présenté par MM. Poher, Dantec et les membres du groupe écologiste, et ainsi libellé :

Alinéa 14, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Un allotissement par installation, par filière et par zone géographique est prévu sur demande des candidats qui participent aux enchères.

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Hervé Poher

J’interviens au nom de Joël Labbé, par ailleurs vice-président de la commission des affaires économiques.

Ces deux amendements tendent à compléter les modifications adoptées à l’Assemblée nationale et visant à garantir que le modèle économique proposé par Enercoop ne sera pas mis en danger par le présent projet de loi. En effet, le modèle de cette coopérative de production et de consommation d’électricité renouvelable permet aux clients sociétaires d’avoir la garantie de consommer de l’électricité 100 % renouvelable et produite de manière décentralisée, au plus près des consommateurs.

Pour ce qui concerne l’amendement n° 11, les modifications apportées en commission sur l’émission partielle ou totale des garanties d’origine dans le cadre de la mise aux enchères sont les bienvenues, car elles permettront de limiter les coûts de la mise aux enchères aux seules garanties d'origine demandées, sans créer d’offre excédentaire.

Cependant, il convient aussi de garantir que l’offre corresponde bien à la demande. C’est pourquoi il est proposé, au travers de cet amendement, que l’évaluation de la quantité de garanties d’origine mise aux enchères régulièrement se fonde sur la demande en garanties d’origine prévue par l’État et par les candidats participant à la mise aux enchères.

Quant à l’amendement n° 12, il vise à optimiser les allotissements à prévoir dans le cadre des enchères sur les garanties d’origine issues d’installations de production d’électricité de source renouvelable. Ainsi, au-delà de l’allotissement par filière et par zone géographique déjà prévu à l’article 2, effectivement nécessaire pour optimiser les prix, il est proposé d’ouvrir la possibilité d’organiser des allotissements par installation.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je vous rassure, mon cher collègue, le système Enercoop n’est en aucun cas remis en cause par l’article 2.

Je comprends quel est votre objectif au travers de l’amendement n° 11 : mieux calibrer l’offre en fonction de la demande. La commission a d'ailleurs visé le même objectif en prévoyant la possibilité d’émettre les garanties d’origine en totalité ou partie. Cependant, le dispositif que vous proposez va beaucoup plus loin et me semble à la fois impraticable et contre-productif.

Il est impraticable, tout d’abord, sur le plan juridique, car on voit mal comment des candidats à un appel d’offres pourraient en fixer eux-mêmes, à l’avance, les modalités, sans être tenus ensuite juridiquement d’acheter les volumes qu’ils auraient demandé à voir mis en vente.

Il est contre-productif, ensuite, par rapport aux intentions des auteurs de l’amendement, à la fois en termes d’équilibre entre l’offre et la demande et de juste valorisation des garanties : les fournisseurs auraient intérêt à demander une très grande quantité de garanties pour que l’offre soit très supérieure à la demande, et ainsi être certains d’obtenir des garanties au moindre coût. Tel n’est plus du tout votre objectif initial, mon cher collègue !

Je demande donc le retrait des amendements n° 11 et 12 ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

S’agissant de l’amendement n° 11, des consommateurs de plus en plus nombreux souhaitent connaître l’origine de l’électricité qu’ils consomment et utiliser de l’électricité d’origine renouvelable.

Le Gouvernement soutient cette démarche et souhaite faciliter le développement des offres vertes. Le dispositif de mise aux enchères des garanties d’origine issues de la production renouvelable électrique, et bénéficiant d’un dispositif de soutien introduit par l’Assemblée nationale, permettra à tous les fournisseurs, quelle que soit leur taille, de proposer des offres vertes qui soient issues de cette électricité.

Les amendements votés au Sénat en commission sont par ailleurs venus préciser ce dispositif. Leur adoption permettra au Gouvernement de mettre aux enchères des garanties d’origine par filières d’énergies renouvelables et par zones géographiques. Cela aura aussi pour effet de répondre à la demande des fournisseurs qui veulent garantir un approvisionnement en électricité renouvelable et produite localement.

Le décret d’application sera publié rapidement, après concertation avec l’ensemble des parties prenantes, de façon à garantir une entrée en vigueur la plus rapide possible du dispositif.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que tout sera fait afin de mettre en place un dispositif efficace, simple et lisible pour tous les fournisseurs d’offres vertes, même les plus petits.

M. le rapporteur l’a dit, les dispositions de l’amendement n° 11 posent des problèmes techniques et juridiques. En effet, par définition, les participants à une mise aux enchères, laquelle est une procédure concurrentielle, ne sont pas connus à l’avance. Il pourra s’agir de fournisseurs français, européens, ou de tout autre acteur souhaitant acquérir des garanties d’origine pour les revendre. Il n’est pas possible de contraindre à organiser une procédure concurrentielle sur la demande d’un ou plusieurs acteurs que rien n’oblige, par ailleurs, à candidater à la mise aux enchères.

Par ailleurs, cet amendement tend à impliquer qu’un éventuel candidat pourrait également indiquer un volume de garanties d’origine devant être mis aux enchères. Or il est impossible que les candidats participant à une procédure concurrentielle fixent en amont la quantité de garanties d’origine mise aux enchères sans fausser le caractère concurrentiel du dispositif. Ce serait bien évidemment contraire au principe de transparence et d’égalité de traitement des candidats régissant toute procédure concurrentielle.

Je vous invite donc à retirer cet amendement, tout en vous rassurant : le Gouvernement souhaite mettre aux enchères suffisamment de garanties d’origine pour répondre à la demande des fournisseurs.

J’en viens à l’amendement n° 12. Aujourd’hui, environ 11 000 installations produisent de l’électricité à partir de sources renouvelables ayant une puissance supérieure à 100 kilowatts, donc sont potentiellement concernées par le dispositif. Faire un allotissement par installation engendrerait une complexité et des coûts administratifs très élevés.

La rédaction actuelle de l’alinéa 14, qui laisse la possibilité d’un allotissement par filières et par zones géographiques, semble suffisante pour répondre aux demandes des fournisseurs souhaitant garantir un approvisionnement en électricité sur une zone géographique limitée.

Par ailleurs, je le répète, les participants à un appel d’offres ou à une mise aux enchères ne sont, par définition, pas connus à l’avance. Il n’est pas possible d’allotir une procédure concurrentielle en fonction de la demande d’un participant éventuel, sauf à préjuger à l’avance du résultat de cette procédure, ce qui est contraire aux principes de transparence et d’égalité de traitement des candidats qui régissent toute procédure de ce type.

J’ai bien compris qu’il y avait, au travers de ces amendements, une inquiétude exprimée par certains fournisseurs qui, à l’instar d’Enercoop, produisent une électricité 100 % renouvelable et s’engagent dans une démarche coopérative. Ils souhaitent être rassurés quant à leur capacité à acheter des garanties d’origine correspondant à l’énergie qu’ils auront eux-mêmes produite.

En somme, ces fournisseurs souhaitent s’assurer que leur modèle pourra être préservé. Je veux les rassurer, tel sera le cas.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer également l’amendement n° 12.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

S’agissant de l’amendement n° 12, j’écarterais l’argument juridique que j’avais déjà évoqué et que vient de rappeler Mme la secrétaire d’État. Je reprendrai, en revanche, un autre de ses propos : quelque 11 000 installations produisent de l’électricité à partir de sources renouvelables ayant une puissance supérieure à 100 kilowatts.

Au travers de votre amendement, mon cher collègue, vous allez beaucoup plus loin que ce que la commission avait proposé. Nous avions en effet introduit la possibilité d’allotir la mise aux enchères, à la fois par type de filières et par zones géographiques. Vous avez donc satisfaction sur ce point. Or vous demandez également un allotissement par installation. C’est impossible ! Imaginez-vous que l’on va créer 11 000 lots et lancer 11 000 appels d’offres ? Ce ne serait pas raisonnable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Les amendements n° 11 et 12 sont retirés.

Je mets aux voix l’article 2, modifié.

L'article 2 est adopté.

I. – Le titre IV du livre III du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° L’article L. 341-2 est ainsi modifié :

a) À la fin du 3°, les mots : « et suivants » sont remplacés par la référence : « à L. 342-12 » ;

b) Le sixième alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« Peuvent bénéficier de la prise en charge prévue au présent 3° :

« a) Les consommateurs d’électricité dont les installations sont raccordées aux réseaux publics d’électricité, quel que soit le maître d’ouvrage de ces travaux ;

« b) Les gestionnaires des réseaux publics de distribution d’électricité mentionnés à l’article L. 111-52, pour le raccordement de leurs ouvrages au réseau amont ;

« c) Les producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable dont les installations sont raccordées aux réseaux publics de distribution, quel que soit le maître d’ouvrage de ces travaux.

« Le niveau de la prise en charge prévue au présent 3° ne peut excéder 40 % du coût du raccordement lorsque celui-ci est effectué sous la maîtrise d’ouvrage du gestionnaire de réseau concerné et peut être différencié par niveau de puissance et par source d’énergie. Il est arrêté par l’autorité administrative après avis de la Commission de régulation de l’énergie.

« La prise en charge prévue au présent 3° n’est pas applicable lorsque les conditions de raccordement sont fixées dans le cadre de la procédure de mise en concurrence prévue à l’article L. 311-10. » ;

c) Après le même sixième alinéa, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Les indemnités versées aux producteurs d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable en mer en cas de dépassement du délai prévu par la convention de raccordement ou, à défaut, par l’article L. 342-3, lorsque la cause du retard n’est pas imputable au gestionnaire du réseau concerné, mais résulte de la réalisation d’un risque que celui-ci assume aux termes de la convention de raccordement. Lorsque la cause du retard est imputable au gestionnaire de réseau, ce dernier est redevable d’une part de ces indemnités, dans la limite d’un pourcentage et d’un plafond sur l’ensemble des installations par année civile, fixés par arrêté du ministre chargé de l’énergie, après avis de la Commission de régulation de l’énergie.

« Les indemnités visées au présent 4° ne peuvent excéder un montant par installation fixé par décret en Conseil d’État. » ;

1° bis

Supprimé

2° L’article L. 342-12 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La prise en charge prévue au 3° de l’article L. 341-2 porte sur l’un ou sur l’ensemble des éléments constitutifs de cette contribution. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le raccordement d’une installation à partir de sources d’énergie renouvelable ne s’inscrit pas dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables, le producteur est redevable d’une contribution au titre du raccordement défini au premier alinéa de l’article L. 342-1. La prise en charge prévue au 3° de l’article L. 341-2 porte sur l’ensemble des éléments constitutifs de cette contribution. »

II

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Nous abordons l’examen d’un article dans lequel il est question du TURPE, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité. C’est l’occasion pour moi, en ce 24 janvier, d’interroger le Gouvernement.

Je le dis pour mémoire, mes chers collègues, dans la partie hors taxe de la facture d’électricité, la moitié représente le coût de l’acheminement, c’est-à-dire le transport et la distribution, et l’autre moitié le coût du produit fourni par le producteur que l’on qualifie d’« historique », mais qui peut être un producteur alternatif.

Le tarif qui s’applique à l’utilisation des réseaux est fixé par la puissance publique, soit la Commission de régulation de l’énergie, la CRE. C’est elle qui décide !

Le Gouvernement peut, comme la loi le lui permet, contester les chiffres fixés par le CRE. Or nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation insolite. Pour la première fois depuis que le dispositif existe, la CRE a pris la décision d’augmenter le tarif de la distribution intérieure, c’est-à-dire de l’acheminement, de 2, 71 %, et de 3, 94 % pour les consommateurs ayant une puissance n’excédant pas 36 kilovoltampères, ou KVA, donc les ménages et les petits professionnels, et celui du transport de 6, 76 %. Voilà une hausse assez importante !

Pour la première fois depuis que le dispositif existe, le Gouvernement a dit qu’il n’acceptait pas les chiffres proposés par la CRE, non parce qu’il a estimé que cette augmentation était trop importante, comme pourraient le penser certains, mais parce qu’il a considéré qu’elle était insuffisante pour répondre aux besoins de la transition énergétique.

La décision de la CRE aurait dû paraître au Journal officiel aujourd’hui. Tel n’est pas le cas ; nous avons donc confirmation que la décision de la CRE n’a pas été acceptée. La balle est donc dans le camp du Gouvernement. Celui-ci peut demander à la CRE de délibérer une seconde fois.

Pour ma part, je souhaite profiter de ce débat et de l’examen de l’article 3 du présent projet de loi pour interroger le Gouvernement sur ses intentions : quel chiffre souhaite-t-il que la CRE retienne ? Autrement dit, à quelle hauteur – élevée – veut-il augmenter une partie de la facture d’électricité ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili

La ministre de l’environnement et de l’énergie avait indiqué à la CRE, en février dernier, ses orientations de politique énergétique. Elle a estimé que la proposition faite par cette instance ne prenait pas suffisamment en compte ces orientations, notamment en matière d’autoconsommation et d’énergies renouvelables.

Ce faisant, Ségolène Royal a demandé non pas que soient décidées des augmentations tarifaires, mais que la structure du tarif intègre la transition énergétique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 4 rectifié quinquies, présenté par M. Mouiller, Mme Primas, MM. Huré, D. Laurent, Kern et Chasseing, Mme Giudicelli, MM. Pointereau, Longeot, Genest, Pierre, Laufoaulu et Guerriau, Mme Deromedi, MM. Bignon et Morisset, Mme Deroche, M. Trillard, Mme Lamure, MM. del Picchia, G. Bailly, Mandelli, L. Hervé, P. Leroy, Revet, Charon, Rapin, Laménie, Longuet, Détraigne, Raison et Perrin, Mme Doineau, M. Cuypers, Mme Billon et M. Gremillet, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Après le mot :

raccordées

insérer les mots :

en basse tension

La parole est à M. Philippe Mouiller.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Cet amendement vise à recentrer le dispositif de réfaction sur les projets de petite et moyenne puissance, jusqu’à 250 KVA.

Le nouveau texte que nous allons voter doit contribuer efficacement aux objectifs de soutien aux projets de production renouvelable qui en ont besoin. Toutefois, les situations, selon les filières et la puissance des installations de production, sont très disparates. Il faut les distinguer, faute de quoi cette disposition serait très onéreuse pour les consommateurs et peu efficace.

Les sites de petite et moyenne puissance, jusqu’à 250 KVA, consistent généralement en des installations photovoltaïques en toiture de bâtiments résidentiels, tertiaires, industriels ou agricoles. En zone rurale, ils se développent notamment sur les hangars des bâtiments agricoles, ce qui apporte un complément de revenu pérenne aux exploitants. Raccordés au réseau basse tension, ils produisent à proximité des zones de consommation.

Les sites de production de grande puissance, c’est-à-dire le plus souvent, les parcs éoliens terrestres, s’inscrivent dans une logique économique, technique et environnementale très différente. Il s’agit d’investissements de grande ampleur, typiquement de 10 à 20 millions d’euros, portés par de grands opérateurs spécialisés sur ce secteur. Ils sont raccordés directement aux postes sources par une liaison haute tension, pour un coût qui représente, en moyenne, 4 % du coût total du projet.

Les gestionnaires de réseau de distribution, qui sont consultés très en amont de ces projets, observent que leur viabilité dépend d’un grand nombre de facteurs et que le coût de raccordement pèse peu dans leur rentabilité économique.

Une prise en charge partielle du coût de raccordement de ces grands projets serait donc une dépense qui pèserait sur le pouvoir d’achat des ménages, via la facture d’électricité.

En outre, elle exposerait les gestionnaires du réseau de distribution, les GRD, les plus ruraux, qui sont les plus propices à l’installation de nouveaux sites et supportent donc déjà des investissements très lourds, à des charges nouvelles potentiellement très importantes, qui mettraient immédiatement en danger leur équilibre économique. Pour ces GRD, la compensation par augmentation du TURPE ne serait que très partielle, puisque celle-ci serait dimensionnée par la moyenne nationale, de surcroît différée jusqu’à la révision du TURPE.

Comme le disait le président Lenoir, nous connaissons aujourd’hui une compensation sur laquelle pèsent trop d’incertitudes. Voilà pourquoi le projet de loi inquiète tant les GRD ruraux.

Il est donc nécessaire de réserver le bénéfice d’une prise en charge aux projets de basse et moyenne puissance raccordés au réseau basse tension. C’est un enjeu fondamental pour les gestionnaires du réseau, particulièrement ceux des territoires ruraux, qui sont les plus aptes à accueillir les projets éoliens.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Tout d'abord, je veux expliquer pourquoi cette disposition revient en discussion. Après les longues explications que j’avais données sur ce sujet en commission, ses auteurs étaient prêts à le retirer, mais je leur ai demandé de le présenter de nouveau en séance, pour une raison simple : il est important de rassurer les entreprises locales de distribution, les ELD. En effet, la demande est double : elle tend à réserver cette aide non pas aux grosses unités, mais aux unités petites et moyennes, et à ne pas mettre les ELD en difficulté.

L’Assemblée nationale a répondu en partie à la première préoccupation des auteurs de l’amendement, et le Sénat, en commission, à la seconde.

Les députés ont en effet demandé que soit fixé un taux différent pour les grandes, les moyennes et les petites unités. N’oublions pas, mes chers collègues, que la réfaction est surtout destinée à favoriser les énergies renouvelables en milieu rural – c’est la demande principale –, en particulier la pose de panneaux photovoltaïques sur les hangars agricoles. Il n’y a donc aucune raison que les grosses installations soient aidées, car elles n’en ont pas besoin. Je veux vous rassurer : elles ne sont pas concernées.

En demandant que soit fixé un taux maximal de 40 %, la commission des affaires économiques du Sénat a voulu éviter que le dispositif ne soit trop lourd pour les ELD. Celles-ci ne dépenseront pas un centime, puisqu’elles seront remboursées, ensuite, par le TURPE. Il ne s’agira pour elles que d’une avance de trésorerie.

Je ne sais pas ce qu’il en est dans votre secteur de distribution, mon cher collègue, mais il est très possible que faire une avance de trésorerie pose problème aux petites ELD.

Nous avons fait le calcul suivant : en baissant de 50 % à 40 % le plafond maximum de prise en charge, nous faisons passer la dépense maximale pour toute la France de 110 millions d’euros à 70 millions, à répartir sous forme d’avances de trésorerie par toutes les ELD. Cela reste raisonnable !

En revanche, je ne suis pas d’accord, techniquement parlant, avec les auteurs de l’amendement lorsqu’ils proposent d’insérer les mots « en basse tension ». Surtout pas ! Il faut savoir en effet que certaines installations, pourtant modestes, comme des panneaux photovoltaïques installés sur des bâtiments agricoles, ne peuvent être raccordés à un réseau de basse tension, car cela ferait sauter ce dernier. Mes chers collègues, imaginez ce que donneraient des bouts de réseau dans vos communes… Il est important de pouvoir raccorder en basse et en moyenne tension.

Je vous demande donc, chers auteurs de cet amendement – de deux signataires, vous êtes passés à une bonne trentaine ! –, de bien vouloir le retirer, car je crois sincèrement qu’il est satisfait.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Je n’ai rien à ajouter à l’excellente argumentation de M. le rapporteur.

L’avis du Gouvernement est défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Les explications données par M. le rapporteur en commission, aujourd’hui confirmées en séance, étaient essentielles. Je conclus de votre avis, madame la secrétaire d’État, que vous allez dans le même sens.

Nous avons bien noté la notion d’avance de trésorerie et la nécessité d’un équilibrage financier à l’euro près pour les ELD.

Je remercie le rapporteur de ses précisions et retire donc mon amendement, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 4 rectifié quinquies est retiré.

L’amendement n° 6, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le raccordement mentionné au a ou au c est réalisé sous la maîtrise d’ouvrage d’une autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité mentionnée à l’article L. 121-4, conformément à la répartition opérée par le contrat de concession ou par le règlement de service de la régie, une convention avec le gestionnaire du réseau public de distribution règle les modalités d’application pour la prise en charge prévue au présent 3°. Le modèle de cette convention est approuvé par la Commission de régulation de l’énergie.

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Il est légitime que les utilisateurs du réseau bénéficient des mêmes droits, quel que soit le maître d’ouvrage des travaux de raccordement.

Toutefois, les amendements adoptés par la commission aux a) et c) de cet article ne règlent pas la question, puisque, par définition, les autorités organisatrices de la distribution d’électricité, les AODE, ne percevant pas le TURPE qui porte cette réfaction, la partie des coûts de raccordement ne peut être couverte directement par le dispositif de réfaction institué par l’article L. 341-2.

Il convient donc de donner une base législative au dispositif dit « PCT » – part couverte par le tarif –, mis en œuvre conventionnellement entre les AODE et les gestionnaires de réseau. Ce dispositif ayant un impact sur le TURPE, il convient par ailleurs de le faire valider par la CRE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Le sous-amendement n° 23, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Amendement n° 6, alinéa 3

1° Première phrase

Après le mot :

règle

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

notamment les modalités de versement de la prise en charge prévue au présent 3°

2° Seconde phrase :

Rédiger ainsi cette phrase :

Le modèle de cette convention est transmis pour approbation au comité du système de distribution publique d’électricité mentionné à l’article L. 111-56-1.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter ce sous-amendement et pour donner l’avis de la commission sur l'amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

L’amendement n° 6 est utile, car ses dispositions ont le mérite, en particulier, de confirmer que la maîtrise d’ouvrage peut concerner le raccordement des consommateurs comme des producteurs, ainsi que de donner une base législative au dispositif conventionnel dit « PCT ».

Néanmoins, je veux, au travers de mon sous-amendement, apporter deux précisions.

La première concerne le 1° de l’amendement. Elle est relative à l’objet de la convention entre ENEDIS et les AODE.

La seconde porte sur le 2° de l’amendement : il s’agit de soumettre pour approbation le modèle de cette convention non pas à la CRE, qui n’a pas pour mission de réguler l’ensemble des dispositions contractuelles ayant vocation à être traitées dans la convention, mais au Comité du système de la distribution publique d’électricité créé par la loi relative à la transition énergétique précisément pour examiner tous les investissements sur les réseaux de distribution, qu’ils soient réalisés sous maîtrise d’ouvrage d’ENEDIS ou des AODE.

Je suis donc favorable à l’amendement n° 6, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 23 de la commission.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

En ce qui concerne l’amendement n° 6, il est légitime que les utilisateurs du réseau bénéficient des mêmes droits, quel que soit le maître d’ouvrage des travaux de raccordement : le gestionnaire du réseau ou, comme certains contrats de concession le permettent, l’autorité organisatrice de la distribution d’électricité.

Toutefois, les amendements adoptés par la commission aux a) et c) de l’article ne règlent pas la question, puisque, par définition, les AODE ne percevant pas le TURPE, qui porte cette réfaction, la partie des coûts de raccordement ne peut pas être couverte directement par le dispositif de réfaction institué par l’article L. 341-2. Il convient donc de donner une base législative au dispositif dit « PCT » mis en œuvre conventionnellement entre les AODE et les gestionnaires de réseaux.

Le Gouvernement est par conséquent favorable à cet amendement.

S’agissant du sous-amendement n° 23, la convention entre ENEDIS et les AODE, dite « convention PCT », impactant le TURPE, il apparaît normal de la faire approuver par la CRE. Vous souhaitez plutôt, monsieur le rapporteur, une approbation par le comité du système de la distribution publique d’électricité. Sur ce point, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de votre assemblée.

Le sous-amendement est adopté.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 7, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 9, première phrase

Supprimer les mots :

lorsque celui-ci est effectué sous la maîtrise d’ouvrage du gestionnaire de réseau concerné

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Sur l’initiative du rapporteur, la commission des affaires économiques a adopté une disposition selon laquelle le plafonnement de la réfaction tarifaire prévue à l’article 3 concerne uniquement les raccordements réalisés sous la maîtrise d’ouvrage des gestionnaires des réseaux.

Toutefois, cette disposition pourrait laisser penser qu’il existe, en fonction de la qualité du maître d’ouvrage des travaux de raccordement, plusieurs plafonds de prise en charge d’une partie des coûts par le TURPE, ce qui ne serait pas légitime au regard du principe d’égalité applicable aux usagers du service public. En matière de raccordement, ces derniers doivent être placés dans une situation identique.

Par ailleurs, l’objet de l’article L. 341-2, dans lequel s’insère le dispositif de réfaction tarifaire, est de fixer les catégories de coûts couverts par le TURPE. Or il apparaît que les motifs de la disposition adoptée en commission sont sans rapport avec cet objet. En effet, les compléments financiers susceptibles d’être apportés par les AODE ne relèvent pas du TURPE, mais, dans l’exemple cité – le Fonds d’amortissement des charges d’électrification, le FACÉ –, du budget de l’État via le compte d’affectation spéciale à l’électrification rurale.

En matière de réfaction tarifaire proprement dite, le plafond est donc identique, quel que soit le maître d’ouvrage.

Cette insertion est inappropriée. C’est la raison pour laquelle nous proposons de la supprimer au travers de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de conséquence de celui que nous venons d’adopter.

Aussi, l’avis de la commission est tout à fait favorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Même avis favorable.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 10 est présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 20 est présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 12, première phrase

Après le mot :

délai

insérer les mots :

de raccordement

La parole est à Mme Nelly Tocqueville, pour présenter l’amendement n° 10.

Debut de section - PermalienPhoto de Nelly Tocqueville

Il s’agit d’un amendement de précision. Il est en effet nécessaire de préciser la nature du délai visé par la convention de raccordement, qui est bien le délai de mise à disposition des ouvrages de raccordement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 20.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Il s'agit en effet d’un amendement de précision rédactionnelle.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Favorable.

Les amendements sont adoptés.

L’article 3 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 1, présenté par MM. Bouvard et Vial, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de l’énergie est ainsi modifié :

1° L’article L. 522-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, indépendamment des modalités de calcul fixées par voie réglementaire, cette compensation financière ne peut être inférieure par mégawattheure à 25 % du tarif réglementé de vente d’électricité pris comme référence pour l’année 2015. » ;

2° L’article L. 522-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toutefois, indépendamment des modalités de calcul fixées par voie réglementaire, cette compensation financière ne peut être inférieure par mégawattheure à 25 % du tarif réglementé de vente d’électricité pris comme référence pour l’année 2015. »

La parole est à M. Michel Bouvard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Les trois amendements que je présenterai sont relatifs au régime de l’énergie réservée. Je le rappelle à l’attention de mes collègues qui ne seraient pas au fait de ces questions, s’agissant des concessions hydrauliques, les collectivités de montagne, singulièrement les départements, bénéficient de contingents d’énergie qui leur sont attribués au titre du préjudice que représente l’implantation des ouvrages sur le territoire.

Il y a quelques années, l’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie a posé des difficultés pour l’affectation de cette énergie réservée. Depuis lors, nous avons été incapables d’attribuer des contingents d’énergie réservée à des entreprises, car cela pouvait constituer une distorsion de concurrence.

À cette époque, la loi a institué un système intelligent de monétisation des contingents d’énergie réservée qui n’étaient pas utilisés. Comme les collectivités n’en avaient pas l’usage et qu’EDF « turbinait » cette énergie et en tirait recette, il a été prévu de verser une compensation financière aux collectivités.

De la même manière a été prévue une compensation pour les concessions en cours de renouvellement.

Ce système a fonctionné très correctement jusqu’à une période récente. Un arrêté avait déterminé le prix de valorisation de cette énergie, qui était fixé à partir du tarif réglementé et du tarif vert. Depuis lors, des modifications sont intervenues et le tarif de référence a disparu. Un nouvel arrêté a été pris, sans aucune concertation avec les collectivités locales, je le précise, indexant le prix sur le tarif Spot du marché de l’énergie. Cela a entraîné une diminution très importante des ressources que touchaient les collectivités.

Il est proposé, au travers de cet amendement, de fixer un plancher pour la dernière période du tarif réglementé, afin que nous ayons la garantie d’obtenir au moins les mêmes ressources. Il n’y a aucune raison qu’EDF bénéficie d’une prime, au travers d’un dispositif qu’elle a elle-même déterminé, alors même que l’énergie hydraulique se vend, en pointe, très au-dessus du tarif Spot.

S’il y avait besoin d’en apporter une preuve, je peux citer l’exemple du renouvellement d’une concession hydraulique en cours dans mon département. Je me suis rendu compte que le prix retenu pour le modèle économique de la future concession était évidemment sans commune mesure avec le prix du marché de la bourse de l’électricité et du marché Spot.

Il s’agit donc, madame la secrétaire d’État, d’apporter une garantie de ressources aux collectivités locales. Il n’y a aucune raison que ces dernières soient spoliées parce qu’une modification est intervenue dans les textes et qu’un nouvel arrêté a été pris sans concertation.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Monsieur Bouvard, j’ai bien compris la position que vous défendez, et je vais essayer de vous expliquer celle que la commission a adoptée.

Pour tenir compte de la disparition des tarifs réglementés de vente, les TRV, jaune et vert au 31 décembre 2015, le mode de calcul des compensations financières de l’énergie réservée versées par les exploitants d’installations hydrauliques concédées aux départements, qui était précédemment fondé sur ces tarifs, a été révisé par un arrêté de février 2016, qui se fonde désormais sur le prix de marché de l’électricité. Or qui dit marché dit des prix qui montent et qui baissent, et cela pour tout le monde !

Je comprends votre crainte que le niveau et la volatilité de ce prix de marché n’aient un impact négatif sur les finances départementales et ne nuisent à leur prévisibilité. Vous proposez que cette compensation ne puisse être inférieure à ce qu’elle aurait été avec le mode de calcul précédent, c’est-à-dire à la quantité d’énergie réservée due par le concessionnaire, valorisée à 25 % du tarif réglementé applicable en 2015. Ai-je bien compris, mon cher collègue ?

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Toutefois, la solution proposée soulève plusieurs difficultés.

Elle viendrait tout d’abord remettre en cause la cohérence du nouveau système qui a été mis en place. Avant la fin des TRV, tout le système était fondé sur ces tarifs, qu’il s’agisse de la valorisation de l’énergie réservée, des factures des bénéficiaires de cette énergie ou de celle du département, pour les contingents non attribués, et tous les éléments évoluaient donc de la même façon.

Dans le nouveau système, cette cohérence est préservée puisque tout évolue désormais sur la base des prix de marché. Si le prix vient à baisser, le département serait effectivement moins compensé, mais verrait sa facture d’électricité baisser exactement dans les mêmes proportions. En réintroduisant les TRV, on reviendrait donc sur cette cohérence.

Deuxième difficulté, votre proposition serait contraire à la philosophie de l’énergie réservée, qui a vocation à être assise sur un prix de vente. Or l’énergie produite par la concession est bien vendue au prix de marché.

Troisième problème, enfin, votre solution aboutit à revenir sur un cadre réglementaire récent, ajouterait de la complexité et réintroduirait une référence à un objet aujourd’hui disparu, les TRV non résidentiels.

Pour l’ensemble de ces raisons, je souhaite, mon cher collègue, le retrait de votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Monsieur Bouvard, la fin des tarifs réglementés de vente jaune et vert a conduit, comme vous l’avez dit, à prendre une référence de marché pour l’énergie réservée.

Cette référence est parfaitement cohérente tant pour le bénéficiaire que pour les producteurs. Elle reflète une réduction de la facture énergétique des bénéficiaires d’énergie réservée, dont la facture dépend des prix du marché, au travers des offres de marché. Elle reflète également les gains du concessionnaire liés à l’exploitation de la concession, puisque ces recettes dépendent du prix du marché.

Ainsi, même si le montant d’énergie réservée fluctue, il évolue de la même manière que la valeur produite par les concessions et que la facture des bénéficiaires, y compris la facture énergétique des conseils départementaux.

Le Gouvernement est donc défavorable à l’introduction d’un plancher indexé sur les tarifs réglementés de 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je comprends bien les arguments développés par la commission et le Gouvernement, notamment sur la logique de cohérence.

Nous avons néanmoins un désaccord sur le prix de référence. En effet, nous parlons ici d’énergie hydraulique, dont on sait très bien qu’elle se vend, de manière générale, à un prix supérieur à celui du marché de la bourse de l’énergie, parce qu’elle est mobilisable instantanément et qu’elle permet une optimisation de la recette.

Pour être clair, on nous applique un prix de référence – celui de la totalité de l’énergie – qui ne correspond pas à celui auquel cette énergie est vendue. Voilà où se situe le problème !

C’est en quelque sorte la seconde fois que l’on essaye de modifier à la baisse le retour d’énergie réservée pour les collectivités territoriales. En effet, je le rappelle, il y a quelques années, par un décret pris également sans concertation, le volume d’énergie réservée avait été modifié pour prendre comme référence la période d’étiage et non la production sur l’ensemble de l’année. Cette solution léonine aboutissait à supprimer toute énergie réservée pour un certain nombre d’ouvrages, alors même que la loi de 1919 en faisait une obligation.

Je suis d’accord pour retirer mon amendement, mais sous réserve qu’une concertation soit engagée pour trouver un prix de référence qui ne fasse pas appel au passé et à un dispositif supprimé, mais qui corresponde, à tout le moins, au prix moyen de vente de l’énergie hydraulique. En effet, nous savons que ce prix moyen est supérieur au prix de marché qui sert actuellement de référence.

Je retire donc mon amendement, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L’amendement n° 1 est retiré.

L’amendement n° 3, présenté par MM. Bouvard et Vial, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article L. 521-16 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, pour compenser les pertes financières engendrées par le retard pris dans le renouvellement des concessions concernées, l’exploitant de l’ouvrage verse chaque année aux collectivités bénéficiaires de la redevance prévue à l’article L. 523-2, une compensation financière dont le montant est calculé par voie réglementaire. »

La parole est à M. Michel Bouvard.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai conjointement les amendements n° 3 et 2, car ils ont pour origine le même problème.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’appelle donc en discussion l’amendement n° 2, présenté par MM. Bouvard et Vial, et ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 522-2 du code de l’énergie est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Dans le cas prévu au troisième alinéa de l’article L. 521-16, les affectations de l’énergie réservée de l’aménagement hydroélectrique concerné, effectuées par l’État et le département, deviennent caduques à compter du 1er juillet 2017. L’énergie réservée est alors, et dans l’attente de la délivrance de la nouvelle concession, soit réaffectée par les soins du département concerné, soit monétisée à son profit dans les conditions prévues au troisième alinéa du présent article. »

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Ce problème vient évidemment du renouvellement des concessions hydrauliques. Je ne referai pas toute l’histoire, depuis le décret de 2011, sur lequel le Gouvernement est revenu lors de son arrivée au pouvoir, jusqu’au récent décret, en passant par la longue concertation pour aboutir au nouveau dispositif, le rapport de notre excellente collègue député Marie-Noëlle Battistel, les discussions qui n’ont toujours pas abouti avec l’Union européenne et le renouvellement toujours en attente des concessions hydrauliques…

La Cour des comptes a d’ailleurs souligné la perte de recettes induite tant pour l’État que pour les collectivités territoriales, qui se partagent les redevances domaniales.

Mon premier amendement tend à prévoir, dès lors qu’un système n’entre pas en vigueur, une compensation permettant aux collectivités de percevoir une ressource correspondant aux recettes tirées par l’exploitant de ces ouvrages dans l’attente du renouvellement des concessions. Cette compensation serait fixée par décret.

Mon second amendement vise les contingents d’énergie réservée qui continuent d’exister tant que la concession n’a pas été renouvelée. Il tend à prévoir que, à l’inverse, les contingents d’énergie réservée arrivent à leur terme à la fin de la concession. C’est notamment le cas de ceux qui étaient attribués par les préfets avant le vote de la loi de décentralisation transférant la gestion des contingents aux départements, intervenue dans la pratique en 1985.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Monsieur Bouvard, quand vous défendez une cause, vous le faites vraiment sur tous les textes qui vous passent sous la main !

Souriressur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Le premier amendement pose les mêmes problèmes que ceux que j’ai évoqués pour l’amendement n° 1. Je vous signale – vous en êtes sûrement conscient ! – que vous allez mettre en difficulté les titulaires des concessions actuelles, c’est-à-dire pas seulement les deux grands opérateurs – EDF et Engie –, mais aussi tous les autres exploitants.

Il est vrai que nous prenons du retard dans le renouvellement des concessions. C’est la faute du Sénat : par un amendement voté à l’unanimité, nous avons protégé nos installations hydrauliques et, par conséquent, les actuels exploitants.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je vous rappelle, mes chers collègues, que le problème vient de ce que notre système, le système français, n’est pas le même que celui de nos voisins.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Nos voisins – Espagne, Suède et, bien sûr, Suisse – regardent avec gourmandise nos barrages hydrauliques. Ils ont des chances, en effet, d’obtenir certaines de nos concessions hydrauliques si jamais elles font l’objet d’une ouverture de marché, alors que les entreprises françaises n’auront, elles, jamais aucune chance d’exploiter un barrage à l’étranger – aucun barrage, ou presque, n’ayant un statut public dans les pays voisins.

Le Sénat n’a pas été très libéral en la matière. L’amendement a été voté sur toutes les travées, assez logiquement par la gauche de l’hémicycle, mais par nous aussi, mes chers collègues de la majorité sénatoriale. Il ne faut pas le nier, nous avons protégé nos barrages hydrauliques…

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

… et nous avons donc du retard. Néanmoins, je ne suis pas sûr que nous puissions tenir très longtemps notre position vis-à-vis de Bruxelles.

Monsieur Bouvard, votre combat est différent, car vous pensez aux collectivités territoriales et à ce qui leur est versé. Avec votre amendement, vous allez trop vite. Attendons de voir comment aboutissent les négociations.

Avec votre second amendement, vous exagérez ! Vous avez obtenu satisfaction dans la loi Montagne, en négociant avec le Gouvernement, qui a fait un pas vers vous. Vous avez obtenu un retour pour les collectivités locales à partir du 1er janvier 2018, et vous revenez aujourd’hui avec un amendement, pour essayer de gagner six mois supplémentaires, et mettre le dispositif en marche à partir du 15 juillet.

M. Michel Bouvard rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Je suis ravi de voir que vous riez : c’est signe que vous prenez très bien ma position, qui consiste à vous demander très aimablement de bien vouloir retirer vos amendements !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

J’écoute toujours avec une grande attention les propos du rapporteur, qui sont particulièrement instructifs.

En ce qui concerne l’amendement n° 3, le Gouvernement est défavorable à l’introduction de cette nouvelle charge fiscale sur les concessions hydroélectriques exploitées sous le régime dit « des délais glissants ». Les départements bénéficient déjà d’une compensation financière pour l’énergie réservée non attribuée, qui perdure pendant la période de délai glissant et à laquelle s’ajouterait la nouvelle compensation prévue par l’amendement.

Rien ne permet pourtant d’attester de la réalité des pertes financières alléguées. Le montant des futures redevances résultera d’une procédure concurrentielle par nature incertaine, des caractéristiques propres de chaque concession, ainsi que des conditions de marché. On ne peut présupposer qu’il sera supérieur à l’énergie réservée actuelle, dispositif que la nouvelle redevance remplacera.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l'amendement n° 3.

Par ailleurs, l’amendement à la loi Montagne dont le rapporteur vient de nous parler, voté avec l’avis favorable du Gouvernement, permet déjà aux conseils départementaux, à compter du 1er janvier 2018, d’abroger n’importe quelle ancienne décision d’attribution de l’énergie réservée, afin de réattribuer ou de bénéficier d’une compensation financière pour les volumes correspondants.

Les dispositions de l’amendement n° 2 n’apportent donc rien de plus, à part un caractère automatique et général contre-productif pour les bénéficiaires, qui seront dans l’incertitude d’une rétribution ou non de l’énergie réservée à leur profit par le conseil départemental.

Le Gouvernement émet donc également un avis défavorable sur l'amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Je vais retirer l’amendement n° 2, qui a été redéposé, peut-être avec insuffisamment d’attention, dans le paquet des amendements relatifs à ce texte.

Je retirerai aussi l’amendement n° 3, étant bien conscient du caractère imparfait de ma proposition. Je tenais à rappeler que la situation dans laquelle nous sommes n’est pas normale.

Je comprends parfaitement la nécessité de protéger les intérêts nationaux. Toutefois, un régime a été prévu pour le renouvellement des concessions hydrauliques : nous avons voté, voilà maintenant une dizaine d’années, un dispositif prévoyant une répartition de la redevance domaniale entre l’État et les collectivités. Depuis dix ans, aucune concession hydraulique n’est passée à ce régime, parce que tout le système est figé !

Ce faisant, je ne fais aussi que rappeler ce qui figure dans le référé délivré par la Cour des comptes, laquelle chiffre la perte à plusieurs centaines de millions d’euros pour le budget de l’État et pour les budgets des collectivités territoriales.

Je retire donc mes amendements, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Les amendements n° 3 et 2 sont retirés.

L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, B. Fournier, D. Laurent et Requier, Mmes Morhet-Richaud et Cayeux, MM. de Nicolaÿ, G. Bailly et Mandelli, Mme Deromedi, M. L. Hervé, Mme Joissains, MM. Chaize, Nougein, Laménie, P. Leroy, Perrin, Raison, Pointereau, Huré, de Raincourt, Mayet, Revet, Doligé, Kern, César, Maurey, Danesi et Longuet, Mme Lamure, MM. Détraigne, D. Dubois, Longeot, Guené, Pierre, Capo-Canellas, Masclet, Boulard et Émorine, Mme Billon et MM. Gabouty, Bas et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les anciens moulins à eau situés en milieu rural et équipés par leurs propriétaires, des tiers délégués ou des collectivités territoriales, pour produire de l’électricité ne sont plus soumis au classement par arrêté des préfets coordonnateurs.

La parole est à M. Daniel Chasseing.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

L’avenir des moulins à eau en France semble aujourd’hui très compromis par l’actuelle réglementation sur la continuité écologique, issue en partie de la loi sur l’eau, mais aussi des lois Biodiversité et Création.

Les moulins à eau, bien qu’ils soient très anciens et parfaitement intégrés dans le paysage rural, font l’objet de l’hostilité de l’administration française, qui veut les « effacer » – c’est le terme employé –, au nom de la prétendue continuité écologique.

J’ai saisi, par une question écrite, en 2015, le ministère concerné. Il m’a été répondu, en 2016, que les moulins non adaptés aux contraintes écologiques, en fonction de leur classement par les préfets coordonnateurs, devraient être « effacés », c’est-à-dire détruits.

Cette réglementation semble excessive, pour ne pas dire arbitraire, comme l’a fort bien suggéré notre collègue Rémi Pointereau, au travers d’un amendement qu’il avait fait voter, naguère, par le Sénat.

En outre, les travaux récents des chercheurs démontrent que les seuils séculaires des moulins n’ont pas d’impact sur les populations de poissons, dont la disparition est en réalité imputable à la pollution chimique ou médicamenteuse.

Les moulins possédant encore un matériel en état de fonctionnement pourraient donc jouer un rôle non négligeable en matière d’énergie renouvelable si on leur laissait produire de l’électricité, dans la limite, définie par Mme la ministre, de 150 kilowattheures, et ce à un coût très bas et sans risque de pollution, puisque la plupart de ces ouvrages existent depuis le XVIIIe siècle et respectent parfaitement l’environnement. Au reste, c’est ce qu’a observé la commission de la culture du Sénat lorsqu’elle a adopté, sur l’initiative de son rapporteur, Mme Férat, à deux reprises une mesure « visant à faciliter la préservation des moulins à eau protégés pour leur intérêt patrimonial ».

Si cet amendement était adopté, les moulins équipés pour produire de l’électricité, que ce soit pour l’autoconsommation ou pour la vente d’énergie, échapperaient au classement des préfets coordonnateurs.

Selon les spécialistes, que j’ai consultés, l’équipement de 30 000 moulins hydroélectriques, ce qui serait possible, générerait 20 000 emplois de techniciens, de chaudronniers ou de maçons et 15 000 emplois relevant de l’économie sociale et solidaire.

Tel est l’objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

La commission considère avec beaucoup de sympathie cet amendement, …

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

… pour une raison simple : j’ai toujours défendu le petit hydraulique – il s’agit même ici de microhydraulique –, que ce soit dans cet hémicycle ou au sein de celui dans lequel je siégeais auparavant, puisque je présidais la commission de l’énergie à l’Assemblée nationale.

En réalité, madame la secrétaire d’État, c’est plutôt vous que les signataires de cet amendement visent…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

Je m’en doute bien !

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

… ou, du moins, votre famille politique, qui a une position assez contradictoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

En effet, les écologistes devraient être des défenseurs de l’utilisation de l’eau pour produire de l’électricité. Or ils défendent bien davantage les petits poissons qui remontent les rivières. Ce n’est, du reste, pas le seul sujet sur lequel votre parti peut être pris en flagrant délit de contradiction… C’est dommage, parce que les moulins font partie du patrimoine français.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

L’histoire nous montre qu’ils ont permis, voire qu’ils permettent encore de produire de l’énergie, même si c’est en petite quantité. Je ne mets toutefois pas dans le même sac la microélectricité produite par ces moulins et le petit hydraulique, présent, par exemple, en zone de montagne, où la solution est plus simple et l’enjeu économique plus crucial.

Cela étant, j’ai déjà demandé en commission à M. Chasseing de bien vouloir retirer son amendement. Il a gagné un combat tout récemment lors de l’examen de la loi Montagne, mais il reste inquiet.

Il a bien été acté dans ce texte que ce patrimoine doit être protégé et que l’administration doit faire preuve d’écoute quand les propriétaires de moulins souhaitent ne pas dépenser une fortune pour pouvoir garder leur ouvrage, puisque c’est de cela qu’il s’agit. En effet, quand un moulin doit être modernisé ou remis en marche et qu’une demande d’autorisation est déposée, bien souvent, l’administration n’oppose pas un refus, mais impose des exigences tellement coûteuses que cela décourage le propriétaire. Aussi, les mesures obtenues dans la loi Montagne sont, dans la lettre, positives, mais on attend tous leur application aux prochaines demandes d’autorisation.

Reste que je ne peux pas accepter ce qui est demandé au travers de cet amendement, à savoir la suppression de toute autorisation préfectorale. Cela va trop loin. Les parlementaires que nous sommes ne peuvent pas laisser faire n’importe quoi, n’importe comment sur notre territoire.

Pour ma part, je souhaite attendre de voir comment s’appliquera la loi Montagne, qui, je le rappelle, vaut pour l’ensemble du territoire et pas seulement pour les petits cours d’eau de montagne. Voyons si les propriétaires de petits moulins rencontrent les mêmes blocages administratifs et, si tel est le cas, il faudra alors mettre les points sur les « i ». Rassurez-vous, monsieur Chasseing, je défendrai alors fortement votre position.

Pour l’heure, je le répète, je ne peux pas accepter la mesure radicale proposée au travers de cet amendement, qui vise à supprimer purement et simplement toute autorisation administrative.

Pour toutes ces raisons, mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

M. le rapporteur a prononcé des paroles de raison. Je veux moi aussi que l’on aborde cette question de manière raisonnable.

Le Gouvernement n’entend pas opposer la préservation, et même la reconquête, indispensable de notre biodiversité à la production d’énergie renouvelable ou à la défense de notre patrimoine culturel. J’ai été la première à insister pour que les journées du patrimoine intègrent, aux côtés du patrimoine culturel, le patrimoine naturel. Nous ne devons pas les opposer, mais faire en sorte d’atteindre tous ces objectifs.

Il serait absurde de vouloir empêcher, au nom des énergies renouvelables, la continuité écologique des cours d’eau. Il ne s’agit pas, monsieur le rapporteur, de laisser « quelques petits poissons » remonter les rivières. Ces « quelques petits poissons » font partie d’un écosystème global qui permet d’avoir une eau de qualité et de rendre bien des services. On se rend d’ailleurs de plus en plus compte que la nature nous rend des services gratuits que nous aurions tort de négliger ; pour les avoir trop négligés, on paie aujourd’hui une facture, y compris financière, importante.

Aussi, tout simplement, nous devons tenter de concilier, au cas par cas, ces impératifs. À certains endroits, il faudra effacer des obstacles…

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

… et, à d’autres, ce ne sera pas nécessaire.

Laissons aux différents acteurs la possibilité de considérer la situation et de travailler ensemble pour trouver la meilleure solution. Tout dogmatisme sur cette question poserait problème.

Ne nous laissons pas entraîner par ceux qui, pour défendre des intérêts personnels, délaisseraient l’intérêt général. Essayons de rester les gardiens de cet intérêt général et de trouver les meilleures solutions. Je défends donc les moulins, qui constituent un magnifique patrimoine et qui peuvent contribuer à la solution, mais je suis évidemment, en tant que secrétaire d’État chargée de la biodiversité, gardienne de cet impératif de sauvegarde de l’environnement pour nos enfants.

Vous l’avez dit, vous avez obtenu, au travers de la loi Montagne, l’introduction dans le code de l’environnement d’une disposition relative aux moulins. Je la rappelle : « La gestion équilibrée de la ressource en eau ne fait pas obstacle à la préservation du patrimoine hydraulique, en particulier des moulins hydrauliques et de leurs dépendances, ouvrages aménagés pour l’utilisation de la force hydraulique des cours d’eau, des lacs et des mers, protégé soit au titre des monuments historiques, des abords ou des sites patrimoniaux remarquables en application du livre VI du code du patrimoine, soit en application de l’article L. 151-19 du code de l’urbanisme. »

Par ailleurs, effectivement, nous devons mieux connaître les processus de la microhydraulique. Le ministère poursuit ainsi son action pour mieux concilier les enjeux du rétablissement de la continuité écologique et de la préservation des moulins. Le Conseil général de l’environnement et du développement durable rendra prochainement les résultats d’un travail sérieux et scientifique demandé par Ségolène Royal à ce sujet.

Pour toutes ces raisons, je vous demande, monsieur Chasseing, à l’instar du rapporteur, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable, car nous devons vraiment travailler en bonne intelligence sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Claude Boulard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

J’apporte mon soutien à cet amendement, qui constitue un message très fort : n’effaçons pas les barrages et les moulins susceptibles de produire de l’électricité hydraulique. Il constitue également un hommage à une révolution datant de 10 000 ans : durant la période du néolithique, les hommes ont eu l’idée de retenir l’eau pour l’utiliser quand ils en auraient besoin.

J’ajoute que, l’été dernier, lors de la sécheresse, l’État a demandé de fermer les vannes de barrages destinés à être « effacés », parce que l’on avait besoin de retenir l’eau. Il est donc temps que le Sénat affirme, très fortement, sa volonté de défendre les moulins et les barrages.

Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Dubois applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

Je le précise d’emblée pour éviter toute ambiguïté, je suis tout à fait solidaire des propos du rapporteur. Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.

Cela étant, cette discussion est extrêmement intéressante. On a le sentiment que le débat porte sur la création de moulins sur nos rivières.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

En effet, mais je réponds au Gouvernement.

L’amendement commence bien par la mention « Les anciens moulins » ; il s’agit principalement d’ouvrages remontant au XVIIIe siècle. Or, si l’on poussait le raisonnement jusqu’au bout – certains le souhaitent –, il faudrait les supprimer pour établir la continuité écologique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Lenoir

On bouleverserait ainsi, non seulement l’économie locale, au travers de la microhydraulique, mais encore les paysages et les usages.

Nous devons donc être extrêmement attentifs à cette question des anciens moulins, y compris du point de vue patrimonial, puisque ce sont souvent de petits monuments, qui peuvent être visités lors des journées du patrimoine. Il doit y avoir une réflexion à ce sujet pour ne pas conduire à ce que craint Jean-Claude Boulard, à savoir la disparition de ces petits monuments du génie français du XVIIIe siècle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Cet amendement, certes très audacieux, mérite toute notre attention. J’ai eu l’occasion de rappeler, à plusieurs reprises, l’importance de l’hydroélectricité et son fort potentiel de développement.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

On recense, dans notre pays, 60 000 moulins et 100 000 seuils prêts à reprendre de l’activité. D’autres ont simplement besoin d’être équipés d’une petite turbine. Or certaines contraintes administratives freinent des projets d’hydroélectricité, …

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

… alors que les installations envisagées correspondent tout simplement à des remises en activité d’un patrimoine industriel existant, largement intégré dans nos paysages.

La continuité écologique est nécessaire, mais pourquoi détruire l’ensemble des seuils de moulins alors que, depuis 2006, des chercheurs ont démontré que ces seuils séculaires n’ont pas d’impact sur les migrations de poissons ? En faisant disparaître les seuils des moulins, on se prive d’un moyen important de lutte contre le réchauffement climatique via la production d’énergie renouvelable, l’hydroélectricité.

La conservation d’un seuil présente l’avantage de réduire la pollution de l’eau et ne nuira pas à la reconquête de la biodiversité aquatique, puisqu’il s’agit précisément d’espaces où elle est concentrée. Il faut donc adapter la philosophie de la continuité écologique à chaque site, selon les usages économiques, sociaux et, bien évidemment, environnementaux.

Par ailleurs, les moulins représentent des atouts importants pour l’activité touristique dans nos zones rurales ; les vingt-sept moulins à marée qui fonctionnaient jusqu’en 1960 dans le Morbihan en sont des exemples. Ils furent même au nombre de cent en Bretagne et de deux cents au Royaume-Uni. Ils sont assis tant sur la mer que sur la terre, en quelque sorte sur le trait de côte.

Les moulins à marée ne sont plus aujourd’hui que les témoins d’un passé disparu et les précurseurs des usines marémotrices ainsi que, dans une certaine mesure, des hydroliennes. Cette particularité très présente dans l’Ouest, notamment dans le Morbihan, démontre l’utilisation très ancienne de l’énergie d’origine naturelle.

Tout doit être fait pour utiliser mieux et davantage l’énergie, la force de l’eau, même si ce doit être mis en place dans un cadre bien défini et contrôlé par l’État.

Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

Ce débat me rappelle une discussion que nous avions eue à l’occasion d’un autre projet de loi ; c’était Mme Royal qui siégeait alors au banc du Gouvernement.

J’avais déposé un amendement dans le même esprit et, pour me convaincre de le retirer, Mme Royal avait affirmé que son cabinet organiserait une réunion avec tous les acteurs, y compris les parlementaires. J’ignore si cette réunion s’est tenue ; en tout cas, les parlementaires n’y ont pas été associés… Vous nous proposez presque la même chose aujourd’hui, madame la secrétaire d’État. Or je pense qu’il faut prendre une décision.

Je suis tout à fait d’accord avec le fait qu’une autorisation doit être nécessaire pour construire un nouveau moulin, je rejoins M. Lenoir à ce sujet, mais ceux qui existent depuis longtemps n’ont jamais empêché les poissons de remonter les cours d’eau. L’administration demande au propriétaire qui veut garder son moulin de construire une passe à poissons ; mais si les poissons remontaient autrefois, il n’y a pas de raison qu’ils n’y arrivent plus aujourd’hui. Ainsi, on exige du propriétaire des travaux que beaucoup d’amoureux des moulins ne peuvent assumer financièrement.

J’ai cosigné cet amendement, car il faut prendre des dispositions, quitte à les aménager par la suite. C’est tout de même magnifique, les moulins, c’est un patrimoine extraordinaire, vous venez de le dire ! En outre, s’ils ne broient plus du grain, ils permettent maintenant de produire de l’électricité. Certains organismes veulent les supprimer – je ne comprends toujours pas pourquoi –, alors qu’ils font partie de notre patrimoine et qu’ils n’ont jamais empêché les poissons de remonter les cours d’eau.

Je voterai donc cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Je suis comme vous, mes chers collègues, une amoureuse des vieux moulins du XVIIIe siècle et de ce patrimoine. Néanmoins, je vous rappelle que la directive-cadre européenne sur l’eau a fixé la continuité halieutique comme principe. Nous devons donc garantir que les poissons puissent circuler normalement dans nos cours d’eau. Les ressources de poissons de rivière se sont appauvries en raison d’une mauvaise gestion de cette question.

Mme la secrétaire d’État ne dit pas que l’on va supprimer les moulins aveuglément, partout, pour assurer la continuité écologique. Elle indique qu’il doit y avoir, au cas par cas, un examen intelligent de la situation, d’où l’intérêt d’une autorisation administrative. On peut aménager le dispositif – par un changement d’horaire, une passe à poissons –, pour que les mécanismes garantissent une certaine continuité halieutique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

M. Michel Bouvard. Il y a un problème d’aval et d’amont…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Oui, mais l’Hamon va gagner, car on remonte toujours à la source…

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Il s’agit d’une situation où la cécité, d’un côté comme de l’autre, ne peut constituer une stratégie. On ne peut laisser les choses se faire en prétendant que ces ouvrages ont toujours existé et qu’ils ne posent aucun problème, ni contredire le principe acté dans nos textes, au travers d’une directive européenne, de la continuité halieutique.

La stratégie proposée par le Gouvernement – la loi Montagne rappelle bien l’importance de ces moulins – me paraît pragmatique, mon cher Jean-Claude Boulard, vous qui êtes si attaché à cette notion. Cette position me semble équilibrée et juste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

M. Jean-Claude Requier. J’ai cosigné cet amendement, qui me semble plein de bon sens. Je ne parle pas d’amont ou d’aval

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Il y a toujours eu des poissons dans les rivières. Aujourd’hui, ils sont plus menacés par la pollution que par les seuils. Je soutiens donc cet amendement, favorable à la ruralité.

MM. Michel Bouvard et Jackie Pierre applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Jackie Pierre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Je tiens moi aussi à la préservation de ce beau patrimoine.

Les truites n’ont pas attendu que l’on tienne ici des discours pour remonter les cours d’eau !

Je ne vois pas pourquoi on ne laisserait pas la possibilité aux propriétaires de produire de l’électricité. Cela contribuera aussi à sauvegarder ce patrimoine. Sans cela, on se dirige vers sa ruine.

Je voterai donc cet amendement si, comme je l’espère, il n’est pas retiré.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d’État

J’y insiste, le Gouvernement défend le patrimoine des moulins ; Ségolène Royal a d’ailleurs lancé récemment, j’ai omis de le préciser, un appel d’offres pour équiper 150 moulins et produire de l’électricité, le marché devant être attribué en mars prochain. Nous nous inscrivons donc dans une démarche de promotion de ce mode de production d’énergie.

En outre, pour les moulins qui existent depuis des années, des décennies ou des siècles et qui ne nuisent pas à la continuité écologique des cours d’eau – très certainement, l’immense majorité des moulins –, il n’y a pas de problème. En revanche, certains moulins ont été aménagés – on ne prétendra pas que, depuis le XVIIIe siècle rien n’a bougé –, d’où l’intérêt de l’étude au cas par cas. On se fabrique donc là des peurs pour rien et une telle disposition risque de nous mettre en difficulté.

Monsieur Revet, vous évoquiez une réunion, mais nous avons justement demandé une étude du CGEDD pour sortir des fantasmes et pour pouvoir nous appuyer sur des faits, ce qui est préférable pour agir et travailler dans les meilleures conditions.

Encore une fois, ne nous créons pas de faux problèmes. Nous avons tous la même volonté : la préservation de notre patrimoine, qui est exceptionnel, et la sauvegarde de notre environnement. La sagesse et l’intelligence des parlementaires consisteront justement à concilier les deux impératifs.

Cet amendement posera plus de problèmes qu’il n’en réglera, d’où notre avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Je souhaite indiquer, à la suite de M. Le Scouarnec et d’autres, que les études montrent que les seuils séculaires des moulins n’ont pas d’impact sur les populations de poissons, dont la disparition est imputable à autre chose, à la pollution.

D’autre part, les seuils sont des zones humides qui représentent environ 30 000 hectares et qui sont capables de détruire le nitrate et le phosphore. On fait la COP 21, on se pose en champion de l’écologie, mais on ne veut pas conserver des ouvrages vraiment écologiques… Bref, pas de problème écologique, des créations d’emplois, de la production d’énergie, du tourisme, il n’y a que des atouts.

J’ai beaucoup de respect et même d’estime pour M. le rapporteur et pour M. le président de la commission, qui sont des sénateurs brillants et précis, mais les moulins vont disparaître, alors que 30 000 moulins réhabilités produiraient l’équivalent d’une centrale nucléaire

Marques de scepticisme aux bancs du Gouvernement et de la commission.

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 3.

I A (nouveau). – Après l’article L. 421-9 du code de l’énergie, il est inséré un article L. 421-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 421-9-1. – En cas de modification de la nature du gaz acheminé dans les réseaux de distribution et de transport de gaz naturel, pour des motifs tenant à la sécurité d’approvisionnement du territoire, les opérateurs de stockages souterrains de gaz naturel mettent en œuvre les dispositions nécessaires pour contribuer au bon fonctionnement et à l’équilibrage des réseaux, à la continuité du service d’acheminement et de livraison du gaz et à la sécurité des biens et des personnes. La décision et les modalités de mise en œuvre par les opérateurs d’une telle modification font l’objet d’un décret, pris après une évaluation économique et technique de la Commission de régulation de l’énergie permettant de s’assurer de l’adéquation des mesures envisagées au bon fonctionnement du marché du gaz naturel au bénéfice des consommateurs finals. »

I. – Le livre IV du code de l’énergie est ainsi modifié :

1° L’article L. 432-13 est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) La deuxième phrase est supprimée ;

c) Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :

« Les gestionnaires des réseaux de distribution de gaz naturel dirigent et coordonnent les opérations de modification de leurs réseaux respectifs et veillent à la compatibilité des installations des consommateurs finals durant toute la durée des opérations ainsi qu’à l’issue de celles-ci. À cette fin, ils peuvent sélectionner et missionner des entreprises disposant des qualifications nécessaires pour réaliser les opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage de tous les appareils et équipements gaziers des installations intérieures ou autres des consommateurs raccordés aux réseaux de distribution concernés.

« Les modalités d’application du présent article sont définies par décret, après avis de la Commission de régulation de l’énergie. Cet avis comprend une évaluation économique et technique qui permet de garantir l’adéquation des mesures envisagées au bon fonctionnement du marché du gaz naturel et à l’intérêt des consommateurs finals.

« II. – Le I est applicable aux réseaux de distribution de gaz combustibles autres que le gaz naturel en cas de modification de la nature du gaz concerné. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article L. 452-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Figurent également parmi ces coûts les dépenses afférentes aux opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage des appareils et équipements gaziers mentionnées au deuxième alinéa du I de l’article L. 432-13. »

II. – Le chapitre IV du titre V du livre V du code de l’environnement est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Risques propres aux canalisations de gaz ou liés au changement de la nature du gaz acheminé

« Art. L. 554 -10. – L’exploitant d’une canalisation de transport ou de distribution de gaz naturel ou assimilé peut interrompre la livraison du gaz à tout consommateur final qui est raccordé à cette canalisation dès lors que ce consommateur s’oppose à un contrôle réglementaire de ses appareils à gaz ou équipements à gaz prévu à l’article L. 554-8 ou aux opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage mentionnées à l’article L. 432-13 du code de l’énergie, nécessaires en cas de changement de nature du gaz acheminé. Il interrompt la livraison du gaz à un consommateur final lorsqu’il a connaissance du danger grave et immédiat pour la sécurité des personnes et des biens que présentent les appareils et équipements de ce dernier.

« Art. L. 554 -11. – I. – En cas de modification de la nature du fluide acheminé, l’exploitant d’une canalisation de transport ou de distribution met en œuvre les dispositions nécessaires pour assurer à tout moment, dans le cadre de ses missions, la sécurité des biens et des personnes.

« II. – L’exploitant d’une canalisation de transport ou de distribution de gaz concernée par une modification de la nature du gaz acheminé s’assure auprès de tout consommateur final qui est raccordé à la canalisation concernée que les opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage des appareils et équipements rendues nécessaires par cette modification ont été réalisées. Dans le cas d’une canalisation de distribution de gaz, l’exploitant ainsi que, le cas échéant, les entreprises sélectionnées par cet exploitant pour réaliser les opérations de contrôle, d’adaptation et de réglage des appareils et équipements en application de l’article L. 432-13 du code de l’énergie accèdent au domicile ou aux locaux industriels ou commerciaux du consommateur final afin de garantir la sécurité de ses installations intérieures, sous réserve du consentement du consommateur. »

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Madame la secrétaire d’État, je veux vous poser une question, que j’ai déjà évoquée au cours de la discussion générale, concernant l’installation de stockage de Gournay-sur-Aronde, qui doit être adaptée.

Des montants circulent, on parle de 20 millions d’euros, mais le texte ne prévoit rien. J’ai averti vos services que je vous interrogerais sur ce sujet. Le Gouvernement a-t-il prévu quelque chose ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili

En effet, monsieur le rapporteur, vous avez appelé notre attention, à juste titre, sur cette question. Le Gouvernement a donc déposé un amendement pour répondre à votre interrogation, que je défendrai dans un instant.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Il était prévu, dans l’avant-projet de loi soumis au Conseil d’État, un dispositif permettant d’aider financièrement certains ménages précaires contraints, en raison d’un changement de type de gaz, de remplacer un appareil ou un équipement inadapté, comme une chaudière ou une gazinière. Le Gouvernement avait confié la mission d’attribution de ces aides financières au gestionnaire de réseau. Or le Conseil d’État a considéré que le tarif d’utilisation du réseau n’était pas destiné à financer des aides à caractère social.

Ne sous-estimant pas pour autant l’importance de la question soulevée, le Conseil d’État a indiqué deux voies possibles sur lesquelles je ne reviens pas, chacun les ayant en tête.

Si nous n’avons pas déposé d’amendement pour répondre à cette situation préoccupante concernant les ménages à revenu modeste, c’est parce qu’un tel amendement aurait subi le couperet de l’irrecevabilité financière. Notre idée consistait à concevoir un dispositif d’aide financière semblable à celui du chèque énergie, attribué sous condition de ressources pour remplacer les appareils devenus obsolètes en raison du changement de nature du gaz, c’est-à-dire en un chèque permettant aux ménages précaires, sous condition de revenus, de financer leurs nouveaux équipements.

Je rappelle que le chèque énergie actuel peut être utilisé pour l’achat d’équipements « lorsque le remplacement d’un ancien équipement permet un gain substantiel de performance énergétique ». Cela aurait été évidemment le cas avec des chaudières ou d’autres équipements plus performants, plus économes.

Comme le chèque énergie, cette aide sociale à destination des plus précaires aurait pu être financée par le budget de l’État. Nous savons que le Gouvernement cherche une solution pour ces ménages, et nous l’en félicitons. Il ne s’agit que d’une proposition, d’une base de réflexion, mais qui permettrait d’aider des personnes qui auront bientôt à faire face à des dépenses importantes qu’ils n’avaient pas prévues. Nous ne pouvons, en effet, rester indifférents aux difficultés de financement auxquelles ces familles précaires vont être confrontées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° 26, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 2

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – L'article L. 431-6-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Afin d'assurer l'équilibrage des réseaux et la continuité du service d'acheminement tout au long du processus de modification de la nature du gaz acheminé, le gestionnaire de réseau de transport de gaz naturel peut conclure avec les opérateurs des stockages souterrains de gaz naturel raccordés à son réseau des contrats spécifiant la nature du gaz stocké durant la phase de modification. Ces contrats prévoient la compensation par le gestionnaire de réseau de transport des coûts induits pour l'opérateur de stockage par la modification de la nature du gaz. Un décret pris après avis de la Commission de régulation de l'énergie précise les coûts faisant l'objet d'une compensation. »

II. – Alinéa 12

Compléter cet alinéa par les mots :

ainsi que la compensation des opérateurs de stockages souterrains de gaz naturel au titre des contrats mentionnés à l'article L. 431-6-1

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Je sais que cet amendement vous est parvenu tardivement – il a été déposé ce matin –, ce dont je vous prie de bien vouloir m’excuser. Il y a certainement eu un petit problème d’acheminement.

La modification de la qualité du gaz est une opération de grande ampleur, qui va concerner près de 1, 3 million de consommateurs dans la région des Hauts-de-France. Cette opération est rendue nécessaire par la diminution de la production du gisement de Groningue, aux Pays-Bas. Sa réussite nécessite d’impliquer non seulement les gestionnaires de réseau, mais également l’opérateur de stockage du gaz, situé dans la région. La nature du gaz stocké peut, en effet, être un prérequis pour le déroulement de certaines phases de conversion.

Afin de permettre le bon déroulement du plan de conversion, l’amendement vise à donner aux gestionnaires de réseau de transport la possibilité de contractualiser avec l’opérateur de stockage la nature du gaz stocké durant la phase de conversion, en contrepartie de la compensation des coûts induits pour ledit opérateur de stockage.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

La commission n’ayant pas eu la possibilité de l’examiner, je ne pourrai vous donner que mon avis personnel sur cet amendement.

J’estime que l’on ne pouvait pas laisser sur le bord de la route l’opérateur de stockage, infrastructure dont on a besoin. J’ai bien compris que l’accord passé avec celui-ci par les gestionnaires de réseau serait couvert par le TURPE. Il y va tout de même de quelque 20 millions d’euros !

Il fallait trouver une solution pour assurer le devenir de l’opérateur de stockage. À titre personnel, j’indique que celle qui est proposée dans l’amendement me convient ; raison pour laquelle j’émets un avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° 21, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… . – Dans un délai de douze mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport indiquant quelles mesures il entend mettre en œuvre pour accompagner les consommateurs finals aux revenus modestes qui seraient contraints, en raison de la modification de la nature du gaz acheminé dans les réseaux de distribution de gaz naturel auxquels ils sont raccordés, de remplacer un ou des appareils ou équipements gaziers inadaptables.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

M. Ladislas Poniatowski, rapporteur. Je propose, au travers de cet amendement, la remise d’un rapport au Parlement. Me voilà pris en flagrant délit, moi qui ai émis des avis négatifs lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique sur tous les amendements tendant à créer des rapports, alors que tous ne me paraissaient pas complètement injustifiés…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Dans la première version du texte, le Gouvernement proposait une solution. Le Conseil d'État l’a rejetée, créant un vrai problème pour les personnes les plus modestes.

Le réglage de certains équipements ne posera pas de difficulté : il relèvera du gestionnaire de réseau. En revanche, tous les Français ne peuvent pas se permettre de remplacer leur chaudière.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Tout à fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

C’est pour examiner ce problème que je propose qu’un rapport soit remis au Parlement. Ce rapport devra véritablement permettre de trouver une solution pour les familles concernées : les familles les plus modestes de la région des Hauts-de-France.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Vous avez raison, monsieur le rapporteur, la remise d’un rapport n’est pas toujours la meilleure solution. Cependant, en l’espèce, un rapport permettra de mener une réflexion dans des délais appropriés.

De fait, il faudra que, le moment venu, nous puissions proposer des solutions pour aider les ménages les plus démunis à faire face à cette nouvelle donne. C’est pourquoi le Gouvernement est très favorable à cet amendement. Nous pourrons travailler ensemble pour trouver les meilleures solutions pour les personnes qui risqueraient de se retrouver en situation de précarité énergétique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Je tiens simplement à dire que nous soutiendrons cet amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je constate que l’amendement a été adopté à l’unanimité des présents.

Je mets aux voix l'article 4, modifié.

L'article 4 est adopté.

La première phrase des I et II de l’article L. 314-28 du code de l’énergie est complétée par les mots : « ou sur des territoires situés à proximité ». –

Adopté.

(Supprimé)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° 8, présenté par MM. Courteau, Montaugé, Cabanel et Daunis, Mme Bataille, MM. M. Bourquin et Duran, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le deuxième alinéa des articles L. 341-4 et L. 453-7 du code de l’énergie est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un décret précise le contenu des données concernées ainsi que les modalités de leur mise à disposition. »

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Sur l’initiative de son rapporteur, la commission a supprimé l’article 4 ter, au motif que le Gouvernement dispose d’un pouvoir réglementaire autonome, ce qui est tout à fait exact. Toutefois, les dispositions des articles L. 341-4 et L. 453-7 du code de l’énergie nécessitent un texte d’application pour préciser le contenu et les modalités de recueil des informations mises à disposition des usagers, notamment les modalités de recueil de leur consentement.

Dans le cas d’espèce, la difficulté est principalement technique : l’article L. 341-4, qui concerne l’électricité, s’insère dans le chapitre Ier du titre IV du livre III du code de l’énergie. Or l’article L. 341-5 dispose qu’« un décret en Conseil d’État, pris après proposition de la Commission de régulation de l’énergie, précise les modalités d’application du présent chapitre, notamment les modalités de prise en charge financière du dispositif prévu au premier alinéa de l’article L. 341-4 », relatif aux compteurs communicants. L’article L. 453-7, qui concerne, lui, le gaz, ne comporte pas de disposition similaire ; la précision de ses modalités relève donc d’un décret simple.

Outre le fait que les modalités d’information des consommateurs ne relèvent pas de compétences exclusives de la CRE qui justifieraient un décret en Conseil d’État pris après proposition de celle-ci et que le décret prévu à l’article L. 341-5 vise essentiellement la régulation financière du déploiement des compteurs communicants, la suppression de l’article 4 ter aboutirait à une situation juridique paradoxale, puisque, pour des dispositions similaires, ces dernières seraient fixées soit par décret en Conseil d’État pris après proposition de la CRE, soit par décret simple. Pour cette raison, nous proposons le rétablissement de l’article 4 ter.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Même avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

En conséquence, l'article 4 ter est rétabli dans cette rédaction.

Après le deuxième alinéa de l’article L. 452-1 du code de l’énergie, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour les tarifs d’utilisation des réseaux publics de distribution de gaz naturel qui ne sont pas concédés en application de l’article L. 432-6 et qui ont pour société gestionnaire une société mentionnée à l’article L. 111-61, ces coûts comprennent également une partie des coûts de raccordement à ces réseaux des installations de production de biogaz. Le niveau de prise en charge ne peut excéder 50 % du coût du raccordement. Il est arrêté par l’autorité administrative, après avis de la Commission de régulation de l’énergie. »

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° 22, présenté par M. Poniatowski, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2, deuxième phrase

Remplacer le pourcentage :

par le pourcentage :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Cet amendement vise à étendre au gaz ce que nous venons d’adopter pour l’électricité. Il s’agit de réparer un oubli à la fois du Gouvernement et de l’Assemblée nationale.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Avis favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 4 quater est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

L'amendement n° 15 rectifié, présenté par M. Courteau, est ainsi libellé :

Après l’article 4 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre Ier du titre VII du livre Ier du code de l’environnement est ainsi modifiée :

1° L’article L. 171-7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 171 -7. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque des installations ou ouvrages sont exploités, des objets et dispositifs sont utilisés ou des travaux, opérations, activités ou aménagements sont réalisés sans avoir fait l’objet de l’autorisation, de l’enregistrement, de l’agrément, de l’homologation, de la certification ou de la déclaration requis en application des dispositions du présent code, ou sans avoir tenu compte d’une opposition à déclaration, l’autorité administrative compétente met l’intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu’elle détermine, et qui ne peut excéder une durée d’un an.

« Elle peut suspendre le fonctionnement des installations et ouvrages ou la poursuite des travaux, opérations ou activités jusqu’à ce qu’il ait été statué sur la déclaration ou sur la demande d’autorisation, d’enregistrement, d’agrément, d’homologation ou de certification, à moins que des motifs d’intérêt général et en particulier la préservation des intérêts protégés par le présent code ne s’y opposent.

« L’autorité administrative peut, en toute hypothèse, édicter des mesures conservatoires aux frais de la personne mise en demeure.

« S’il n’a pas été déféré à la mise en demeure à l’expiration du délai imparti, ou si la demande d’autorisation, d’enregistrement, d’agrément, d’homologation ou de certification est rejetée, ou s’il est fait opposition à la déclaration, l’autorité administrative ordonne la fermeture ou la suppression des installations et ouvrages, la cessation définitive des travaux, opérations ou activités, et la remise des lieux dans un état ne portant pas préjudice aux intérêts protégés par le présent code.

« Elle peut faire application du II de l’article L. 171-8, notamment aux fins d’obtenir l’exécution de cette décision. » ;

2° Le troisième alinéa du 4° du II de l’article L. 171-8 est ainsi rédigé :

« L’amende ne peut être prononcée plus de trois ans à compter de la constatation des manquements. »

La parole est à M. Roland Courteau.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Le code de l’environnement encadre les activités polluantes ou ayant à tout le moins une incidence sur l’environnement par des régimes administratifs d’autorisation ou de déclaration. C’est à ce titre notamment que la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement soumet certaines installations industrielles à une autorisation préalable visant à encadrer les atteintes à l’environnement, tels les seuils de rejet, les niveaux d’émission, etc. Parmi ces installations figurent les installations de production électrique.

Les articles L. 171-7 et L. 171-8 du code de l’environnement précisent les pouvoirs de l’autorité administrative lorsqu’une installation ou une activité est réalisée sans l’autorisation ou la déclaration obligatoire ou sans respecter les prescriptions de ladite autorisation. Dans ce cadre, il est notamment possible que l’autorité administrative prenne des mesures conservatoires permettant la poursuite temporaire de l’activité d’une installation dépourvue de l’autorisation requise par le code de l’environnement, ces mesures conservatoires s’accompagnant d’une mise en demeure de régularisation de la situation administrative.

Il a cependant paru nécessaire de laisser à l’autorité administrative la possibilité de permettre ces poursuites temporaires d’activité, afin d’éviter des fermetures brutales d’installations, qui, au-delà des conséquences socio-économiques désastreuses que l’on devine pour le personnel, pourraient avoir des conséquences environnementales plus désastreuses encore pour l’environnement. Tel est notamment le cas de l’arrêt brutal d’une installation de traitement des déchets ou d’épuration des eaux.

Aussi, le dispositif envisagé pourrait comporter trois modifications principales visant à concilier la protection de l’environnement et le développement de l’activité économique.

Premièrement, la durée maximale de la mise en demeure serait limitée à un an – la disposition actuelle laisse la possibilité de procédures de régularisation longues et non encadrées.

Deuxièmement, la suspension serait désormais le principe en cas de fonctionnement sans l’autorisation requise, tout en maintenant la possibilité d’édicter des mesures conservatoires permettant, sous conditions, une poursuite de l’activité.

Troisièmement, il serait procédé à la suspension ou à la cessation définitive automatique de l’installation s’il n’a pas été déféré à la mise en demeure à l’issue du délai fixé.

Par ailleurs, l’allongement de la période permettant le prononcé d’une amende administrative après la constatation d’un manquement aux prescriptions d’une autorisation, proposé à l’article L. 171-8, participe également d’un encadrement plus important des activités potentiellement polluantes.

Enfin, ces modifications permettent d’assurer la pleine conformité du droit national au droit de l’Union européenne en matière d’évaluation environnementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

La disposition proposée est bienvenue, puisqu’elle permettra de lever un risque de contentieux au niveau européen. La commission a donc émis un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, secrétaire d'État

Avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 quater.

(Suppression maintenue)

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Mes chers collègues, permettez-moi simplement une petite réflexion sur l’autoconsommation.

D’un côté, l’autoconsommation représente une opportunité pour les consommateurs : elle permet, logiquement, de réduire les coûts.

De l’autre, elle constitue un risque pour les systèmes électriques. En effet, l’exonération de CSPE et, jusqu’à un certain plafond, de la taxe locale sur l’électricité induit des pertes de recettes fiscales pour les syndicats et les communes. En outre, l’autoconsommation impacte les réseaux : il faut ajuster les courbes de production et de consommation. En effet, les personnes connectées feront appel aux réseaux dans les moments de pointe, par exemple lors des grands froids d’hiver, puisqu’elles n’auront pas assez d’électricité produite localement. C’est une contrainte qu’il faudra gérer. C’est un peu comme les personnes qui ont une source, mais qui sont reliées au réseau d’eau potable : elles n’utilisent celui-ci que durant l’été, en période de sécheresse.

Il faut tout de même dire que l’autoconsommation vise un public de bobos.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

En effet, l’installation des équipements nécessite d’avoir quelques moyens.

Malgré tout, je pense que le projet de loi est bon. Les membres du RDSE le voteront donc à l’unanimité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bosino

Le débat que nous avons eu cet après-midi est important. Un travail très intéressant a été réalisé sur ce texte. D’ailleurs, nous avons voté certains amendements.

Cependant, la philosophie générale du texte, la discussion générale, l’examen des amendements ou encore les propos que vient de tenir M. Requier nous confortent dans l’opinion que, petit à petit, nous sommes en train de démanteler le système de production et de distribution d’électricité qui a été bâti à la Libération.

Pour certains, le fait que les choses aient évolué, le développement des énergies renouvelables justifient la mise en cause de ce système. Je ne comprends pas cette argumentation : parce qu’il y a les énergies renouvelables, parce qu’il est nécessaire de défendre l’environnement, nous avons plus que jamais besoin d’un système national qui organise et régule toute la production d’électricité !

Aujourd'hui, tout le monde déplore qu’il soit très compliqué de faire venir la fibre optique dans telle ou telle région. Si l'on n’avait pas cassé France Télécom, nous n’en serions pas là ! Et La Poste n’est pas en reste : comme je le lisais encore tout récemment, on a annoncé à un monsieur résidant en haut d’un petit village de l’Ardèche qu’on ne pourrait plus monter lui livrer son courrier. C’est la même logique qui est à l’œuvre aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland Courteau

Ce projet de loi va contribuer à la réussite de la transition énergétique. En effet, il permettra la mise en œuvre de solutions pertinentes, innovantes, qui répondent, par ailleurs, à une attente sociétale véritable. Il adresse un signal fort en direction de l’autoconsommation, dont il accompagne le développement, en le maîtrisant, en l’encadrant, en anticipant sa progression, tout en évitant certaines dérives possibles.

Par ailleurs, ce texte devrait booster le développement des énergies renouvelables. Ainsi, la réfaction tarifaire des coûts de raccordement – c’est l’un des éléments essentiels en matière de politique énergétique – va contribuer à lever les freins et les obstacles au développement des énergies renouvelables.

De même, les dispositions en faveur de l’éolien en mer sécuriseront les porteurs de projets en cas de non-respect des délais de raccordement.

Le groupe socialiste votera ce texte, d'autant plus que la plupart de nos amendements ont été adoptés. Nous en remercions le Gouvernement, M. le rapporteur et le Sénat.

M. Jean-Pierre Sueur applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Comme mes collègues du groupe socialiste, je vais soutenir ce projet de loi.

Je veux répondre à ceux qui estiment que favoriser l’autoconsommation fragiliserait le système énergétique français global et l’esprit qui a prévalu à la Libération, visant à permettre à chacun, sur tout le territoire, d’avoir accès à l’énergie.

Les craintes qui s’expriment sont précisément celles qui, depuis plusieurs années, font de la France l’un des mauvais élèves de l’Union européenne en matière d’autoproduction d’énergie. C’est notamment vrai dans certains secteurs ruraux.

Je pense que nous avons tout intérêt à développer l’autoconsommation dans le cadre du mix énergétique. C’est de la production locale ; c’est du 100 % made in France.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

La complexité sera alors de rendre cette autonomie, choisie, et non subie – chacun décide s’il veut ou non être producteur et autoconsommateur –, compatible avec l’intérêt général. Le système qui nous est proposé vise précisément à permettre l’autoconsommation tout en préservant l’intérêt général et le bon fonctionnement de notre système électrique.

La plupart des pays qui sont parvenus à un taux élevé d’autoconsommation sans déstabiliser leurs réseaux ont beaucoup travaillé sur des méthodes de stockage de l’énergie nettement plus autonomisées et individualisées. Il faudra y réfléchir. On sait que l’avenir énergétique, c’est aussi la bonne gestion du stockage énergétique. Il me semble que nous devons continuer à travailler dans ce sens, innover et financer de la recherche sur l’ensemble des mécanismes de stockage énergétique.

Enfin, notre collègue Montaugé a soulevé une question qui touche à nos fondamentaux républicains : comment garantit-on l’autonomie, la capacité d’autoconsommation et d’autoproduction, tout en faisant vivre la péréquation tarifaire ? De fait, il ne faut jamais oublier l’idéal d’égalité républicaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble du projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-1019 du 27 juillet 2016 relative à l’autoconsommation d’électricité et n° 2016-1059 du 3 août 2016 relative à la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et visant à adapter certaines dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz et aux énergies renouvelables.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 91 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je rappelle au Sénat que le groupe socialiste et républicain a présenté une candidature pour représenter la France en qualité de membre suppléant à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, cette candidature est ratifiée, et je proclame Mme Marie-Françoise Perol-Dumont membre suppléant représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

Je rappelle au Sénat que le groupe communiste républicain et citoyen a présenté une candidature pour la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée, et je proclame Mme Évelyne Rivollier membre de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, en remplacement de Jean-Claude Frécon, décédé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacqueline Gourault

J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Mme Françoise Cartron remplace Mme Jacqueline Gourault au fauteuil de la présidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à la sécurité publique (projet n° 263, texte de la commission n° 310, rapport n° 309, avis n° 299).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Roux

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici réunis pour l’examen du projet de loi relatif à la sécurité publique, dont chacun, dans cet hémicycle, mesure l’importance.

En premier lieu, je souhaite revenir sur le contexte et les objectifs qui ont présidé à l’élaboration de ce texte, ainsi que sur les grandes lignes qui en assurent l’équilibre.

À cet égard, je veux remercier d’emblée le rapporteur, François Grosdidier, ainsi que les membres de la commission des lois, tout particulièrement son président, Philippe Bas, mais aussi Jacques Bigot et René Vandierendonck, pour leur engagement et la très grande qualité du travail préalable que nous avons pu faire ensemble. Cela nous a permis de consolider le projet de loi, dans un esprit constructif et profondément républicain.

Important, ce texte l’est avant tout pour les policiers et les gendarmes, qui sont chargés de la protection quotidienne de nos concitoyens, sur la voie publique, dans les commissariats de police et dans les brigades de gendarmerie. Ils accomplissent un travail absolument indispensable sur l’ensemble du territoire national, dans des conditions souvent difficiles, parfois même éprouvantes.

Depuis maintenant plus de deux années, les policiers et les gendarmes de France sont en effet présents sur tous les fronts à la fois, notamment celui de l’antiterrorisme, tout en continuant de lutter avec la même détermination contre la délinquance du quotidien, la criminalité organisée et les différents types de trafics qui empoisonnent la vie de certains quartiers.

Chaque jour, ils sont en toute première ligne pour garantir la paix publique, entretenir le lien de proximité avec les Français, les accueillir dans les commissariats et dans les brigades, écouter leurs angoisses et leurs craintes, réaliser des interventions de toute nature au cours de la même journée. Face à des phénomènes d’insécurité parfois enracinés de longue date dans certains territoires, ils font preuve d’un professionnalisme de chaque instant en dépit des accès de lassitude qu’il est bien légitime d’éprouver lorsque l’on est confronté au caractère endémique de certaines formes de délinquance.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, la sécurité du quotidien est la condition même de l’exercice de nos libertés fondamentales partout en France. Elle constitue également un enjeu décisif de justice, et c’est largement sur les épaules des policiers et des gendarmes de la sécurité publique, au sens large de l’expression, que repose cette exigence.

Ainsi, ces femmes et ces hommes sont directement au contact des drames et des injustices qui traversent notre société, au contact des pires noirceurs que celle-ci est capable d’engendrer. Par là même, ils se trouvent de plus en plus souvent exposés, sont victimes d’agressions de toute sorte, parfois d’une extrême gravité, au seul motif qu’ils portent l’uniforme et incarnent l’autorité publique, ce qui suffit désormais dans quelques endroits à faire d’eux des cibles.

Bien sûr, chacun sait que le métier qu’ils exercent et la vocation qu’ils ont embrassée sont par définition dangereux. Quiconque s’engage dans les forces de sécurité s’expose au risque d’être blessé ou même tué au nom de la protection des Français. Toutefois, il nous faut bien admettre aujourd’hui qu’un nouveau palier a été franchi dans la violence à laquelle policiers et gendarmes sont confrontés.

Je pense bien entendu à l’attaque de Viry-Châtillon, le 8 octobre dernier, commise par des délinquants en bande organisée dans l’intention de tuer quatre policiers en mission. Sous la conduite de l’autorité judiciaire, les services de police judiciaire ont rapidement progressé. Au terme d’investigations minutieuses, leur travail a entraîné ces derniers jours la mise en examen et l’incarcération de plusieurs individus soupçonnés d’avoir participé à cette tentative d’assassinat. Je veux le dire ici très clairement : aucun fait de cette nature ne doit rester impuni !

Je pense également à l’assassinat du commissaire Jean-Baptiste Salvaing et de Jessica Schneider à leur domicile de Magnanville, le 13 juin 2016, par un terroriste qui se réclamait de Daech.

Je pense enfin au major de gendarmerie Christian Rusig, tué en mission en novembre dernier près de Tarascon-sur-Ariège, alors qu’il s’apprêtait à contrôler un véhicule suspect. Refusant d’obtempérer, le conducteur l’avait violemment percuté de façon délibérée dans l’intention évidente de le tuer.

L’année dernière, vingt-six policiers et gendarmes ont perdu la vie en service, tandis que plus de 16 000 d’entre eux ont été blessés. Je précise qu’un très grand nombre d’entre eux ont été victimes d’agressions qui les prenaient explicitement pour cible, certains assaillants n’hésitant pas à utiliser des armes à feu.

C’est bien parce que le Gouvernement doit tenir compte de ce contexte général et de la montée en puissance des enjeux liés à la sécurité que sa politique en la matière a consisté depuis 2012 à renforcer les moyens humains, matériels et juridiques qui sont accordés aux forces de l’ordre et qui leur permettent d’accomplir leurs missions avec efficacité. C’est ce à quoi se sont employés mes prédécesseurs, Manuel Valls, puis Bernard Cazeneuve. C’est également le but que je me suis donné à mon tour depuis le jour où j’ai été nommé à la tête du ministère de l’intérieur.

Je ne reviendrai pas en détail sur la hausse des budgets de fonctionnement de la police et de la gendarmerie nationales entre 2012 et 2017, car vous connaissez aussi bien que moi cette évolution budgétaire.

Le projet de loi relatif à la sécurité publique constitue l’ultime étape parlementaire de ce processus de renforcement de la sécurité des Français, en cohérence totale avec l’ensemble des décisions prises jusqu’à présent.

Bien sûr, nous faisons face à un contexte qu’il ne s’agit pas d’occulter. À l’automne dernier, de nombreux policiers – la plupart d’entre eux étaient gardiens de la paix – ont manifesté leur malaise face au quotidien que je décrivais il y a quelques instants et dans lequel ils affirment ne plus se reconnaître, alors même qu’ils risquent bien souvent leur vie pour accomplir les missions qui sont les leurs. Dans le cadre de la lutte antiterroriste, les policiers et les gendarmes ont été en outre amenés à consentir de nombreux sacrifices. Cela a sans nul doute contribué à amplifier le malaise. Enfin, la tentative d’assassinat de Viry-Châtillon a constitué en quelque sorte l’élément déclencheur du mouvement.

Dans ce contexte, le Gouvernement a souhaité apporter deux réponses principales.

Tout d’abord, des concertations inédites ont été organisées dans les commissariats sur l’initiative des préfets et sous l’égide des directeurs départementaux de la sécurité publique. Depuis maintenant plusieurs mois, une grande concertation a également été conduite dans le même esprit au sein de la gendarmerie pour recueillir les doléances et les propositions des personnels, afin d’améliorer leurs conditions de travail, notamment les conditions d’exercice de leurs missions de sécurité publique. Je recevrai d’ici à la fin de la semaine les conclusions de cette double concertation et serai évidemment à la disposition du Parlement, singulièrement de la Haute Assemblée, dans le courant du mois de février pour détailler les propositions que nous entendons formuler après avoir tiré les principaux enseignements issus de ces concertations.

Ensuite, nous avons mis en œuvre un grand plan de 250 millions d’euros pour la sécurité publique, annoncé dès le 26 octobre dernier. Ce plan a lui-même été décidé dans le cadre d’un dialogue constant avec les organisations syndicales et en tenant compte des premiers résultats provenant des concertations.

Je ne reviens pas dans le détail sur ce plan. Vous le savez, il repose sur deux volets : d’une part, un volet matériel et, d’autre part, un volet législatif, celui-là même qui est soumis à votre examen aujourd’hui. Ce dernier volet correspond en tout point aux engagements que le Gouvernement a pris à l’égard des policiers et gendarmes de France et, donc, à l’égard des Français.

Avec ce texte, nous entendons répondre à deux exigences.

Il s’agit, première exigence, de proposer un texte cohérent sur les enjeux qui s’attachent à la sécurité publique, c’est-à-dire un texte qui réponde à une situation précise et dont l’objectif consiste à ajouter les dernières mesures qui faisaient jusqu’alors défaut à notre dispositif global, tout en procédant à quelques ajustements nécessaires. Ce n’est donc pas, j’y insiste, un texte fourre-tout qui collecterait in extremis toute une série de mesures hétéroclites.

Il s’agit, seconde exigence, d’aboutir à un consensus, car, chacun en conviendra, la protection et la reconnaissance du travail des forces de l’ordre constituent des enjeux d’intérêt général. Je sais que c’est là une préoccupation qui vous tient également à cœur. Je souhaite que ce texte puisse marquer notre volonté commune de répondre à un enjeu d’importance vitale, quelle que soit la manière dont le débat se déroulera dans les prochains mois.

Ce projet de loi est équilibré : il tient compte à la fois des impératifs opérationnels auxquels sont confrontées les forces de l’ordre et des exigences en matière de respect des libertés publiques et de l’État de droit. C’est la raison pour laquelle il a reçu l’approbation du Conseil d’État comme celle des instances représentatives des personnels de la police et de la gendarmerie.

Trois mesures législatives résultent du plan pour la sécurité publique. Avant de les évoquer, je veux rappeler que les réflexions conduites dans le cadre de ce plan se poursuivent, notamment celle qui porte sur le traitement des procédures d’usage des armes ou encore celle qui a trait à l’échange d’informations entre magistrats, policiers et gendarmes dans le souci permanent de maintenir la solidité des liens qui les unissent, tout en préservant le rôle de chacun.

Une première mesure consiste à proposer un cadre commun d’usage des armes pour l’ensemble des forces de sécurité, afin d’unifier les règles applicables et de les adapter aux situations auxquelles les effectifs sont confrontés. Il s’appliquera aux policiers et aux gendarmes, ainsi qu’aux douaniers et aux militaires déployés dans le cadre de réquisitions – je pense bien sûr à l’opération Sentinelle. Je précise évidemment que le cadre général de la légitime défense est maintenu. Les membres des forces de l’ordre l’ont d’ailleurs tout à fait intériorisé. Je veux ici leur rendre hommage pour le courage et le sang-froid dont ils font preuve dans l’accomplissement de leurs missions.

Dès lors, notre objectif est de clarifier, de stabiliser et de moderniser les conditions d’usage des armes dans un contexte où, comme je l’ai dit, les effectifs font face à une violence de plus en plus importante. Nous le faisons dans le but de mieux protéger les forces de l’ordre, et ce dans un cadre juridique scrupuleusement conforme à l’État de droit. À cet égard, le projet de loi, directement inspiré des travaux de grande qualité menés par la commission présidée par Hélène Cazaux-Charles, présente toutes les garanties nécessaires en tenant compte des jurisprudences de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de cassation, notamment celles qui concernent le respect des conditions d’absolue nécessité et de proportionnalité.

Les dispositions figurant dans le présent projet de loi viennent ainsi compléter celles que nous avions déjà prises dans le cadre de la loi du 3 juin 2016, mesures autorisant les policiers, les gendarmes et les militaires déployés à faire usage de leur arme en cas d’« absolue nécessité », dès lors qu’ils sont confrontés à un « périple meurtrier », et ce afin de prévenir tout risque de réplique lors d’une tuerie de masse. Par cohérence, un transfert de ces dispositions dans le code de la sécurité intérieure est prévu dans le texte qui vous est présenté aujourd’hui.

Avec ce texte, dont la qualité a été soulignée par le Conseil d’État, nous avons souhaité parvenir à un point d’équilibre. Les débats en commission, nourris des auditions réalisées, ont suscité des interrogations sur certains points. Je souhaite que nous y répondions ensemble en gardant toujours à l’esprit la nécessité d’un équilibre.

Toujours au sujet de l’article 1er, je veux dès à présent dire quelques mots concernant les polices municipales, même si nous aurons bien sûr l’occasion d’y revenir au cours de la discussion.

Nombre d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, sont ou bien ont été maires. Je comprends donc votre intérêt particulier pour une question qui nous a d’ailleurs conduits à faire évoluer de manière significative les derniers textes examinés dans nos assemblées. Il y a quelques instants, j’évoquais les policiers et les gendarmes tués dans l’exercice de leurs missions. Je n’oublie pas non plus les policiers municipaux qui ont perdu la vie dans des circonstances dramatiques similaires. Nous avons tous à l’esprit le sort de Clarissa Jean-Philippe, membre de la police municipale de Montrouge, et celui d’Aurélie Fouquet, jeune policière municipale de Villiers-sur-Marne.

C’est parce que les policiers municipaux sont eux aussi confrontés au danger en raison de l’uniforme qu’ils portent que le Gouvernement a considérablement développé, au cours de ces cinq dernières années, les moyens matériels et juridiques dont ils disposent.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Roux, ministre

En effet, notre volonté a toujours été d’accompagner les maires dans la modernisation de leur police municipale, le financement de leurs équipements, tout en soutenant la rénovation de leur cadre d’emploi. Sur le plan juridique, trois lois et sept décrets ont ainsi contribué à renforcer les polices municipales. Je veux brièvement rappeler deux textes essentiels.

Le décret du 28 novembre 2016 élargit la gamme des armes de catégorie B auxquelles les agents concernés peuvent recourir et autorise le port de l’arme de poing à la ceinture pour les trajets compris entre le poste de police municipale et le centre d’entraînement au tir, sous réserve que les agents portent leur uniforme et se déplacent en véhicule sérigraphié.

Le décret publié le 23 décembre 2016 permet aux policiers municipaux, à titre expérimental et pour une durée de deux ans, d’utiliser des caméras individuelles pour enregistrer leurs interventions. L’objectif est ainsi de prévenir les incidents et d’apaiser les tensions pouvant survenir à la suite de ces interventions.

Il faut continuer à réfléchir ensemble à ce que nous pouvons apporter aux policiers municipaux, en raison des risques qu’ils prennent dans l’accomplissement de leurs missions. Je me suis moi-même rendu à Nancy, vendredi dernier, pour signer une trentaine de conventions de coordination entre les forces de sécurité intérieure et les polices municipales de Meurthe-et-Moselle, dans le cadre d’une véritable coproduction de sécurité.

Cette reconnaissance du travail des polices municipales, leur professionnalisation et le rôle essentiel qu’elles jouent ne doivent pas non plus conduire à une confusion des missions. Le travail que nous avons réalisé ensemble nous permet là encore de clarifier cette question. Lorsque l’association Villes de France indique que la police municipale doit continuer à agir en complémentarité, et non en substitution des forces de police de l’État, je partage évidemment ce point de vue. Je pense d’ailleurs qu’il est très largement partagé sur ces travées.

Je resterai donc très vigilant à ce que cette reconnaissance ne crée aucune confusion, dès lors que les missions confiées aux uns et aux autres demeurent aujourd’hui fort différentes. À cela s’ajoute au sein des polices municipales une forme d’hétérogénéité des structures, des missions, des équipements et des doctrines, dont nous devons aussi tenir compte. Le Gouvernement sera toutefois ouvert à des dispositions susceptibles de consolider l’action des polices municipales, dès lors que celles-ci, je le répète, ne créent pas davantage de confusion.

La deuxième évolution majeure que nous proposons vise à protéger l’identité des policiers et des gendarmes, dès lors que sa révélation constitue un danger pour eux-mêmes ou pour leur famille. Tel est l’objectif du numéro d’immatriculation administrative auquel les policiers et les gendarmes seront autorisés à recourir en lieu et place de leur état civil pour s’identifier dans les procédures pénales et sous certaines conditions.

C’est un dispositif qui, je le rappelle, existe déjà en matière de lutte antiterroriste. Dans les cas exceptionnels où la connaissance de l’état civil de l’enquêteur serait indispensable à l’exercice des droits de la défense, le juge pourra, bien entendu, ordonner la révélation de ces informations. Des dispositifs similaires existent chez certains de nos voisins européens, et la Cour européenne des droits de l’homme admet que ce type de dispositif puisse être utilisé, sous réserve que les droits de la défense soient respectés, ce à quoi nous avons veillé.

De même, afin d’assurer la protection de l’identité des auteurs de décisions administratives en lien avec le terrorisme, l’administration sera autorisée à ne notifier à la personne concernée qu’une ampliation anonyme de l’acte, tout en aménageant les règles du contradictoire en matière contentieuse.

Enfin, la troisième évolution que nous souhaitons vise à doubler les peines encourues en cas d’outrage à toute personne dépositaire de l’autorité publique, en les alignant sur celles qui sont prévues en cas d’outrage à magistrat.

S’en prendre à un policier national ou municipal, ou à un gendarme, c’est tout simplement s’en prendre à la République. Comme les magistrats, les policiers et les gendarmes jouent un rôle absolument indispensable au bon fonctionnement de notre société et de notre État de droit.

Au cours de vos discussions, vous avez identifié d’autres évolutions législatives susceptibles de contribuer au renforcement de l’autorité des dépositaires de l’autorité publique. Le Gouvernement les examinera évidemment avec beaucoup d’intérêt et d’attention.

Le texte comporte en outre des dispositions ajustant des mesures d’ores et déjà en vigueur. Avec l’article 4, nous entendons ainsi compléter les dispositions de la loi Savary du 22 mars 2016 pour tirer les conséquences des enquêtes administratives touchant des salariés occupant des emplois en lien direct avec la sécurité des personnes au sein d’entreprises de transport. Nous l’évoquerons certainement au cours de nos débats, mais je tiens dès à présent à rappeler que les dispositions que nous souhaitons introduire dans le texte servent à consolider le dispositif déjà existant.

Par ailleurs, nous souhaitons améliorer l’articulation entre les procédures judiciaires et les mesures de contrôle administratif, lesquelles permettent de contrôler les personnes ayant rejoint ou cherché à rejoindre un théâtre d’opérations terroristes à l’étranger dans des conditions susceptibles de les conduire à porter atteinte à la sécurité publique lors de leur retour sur le territoire français.

Enfin, nous prévoyons d’ouvrir de manière strictement encadrée la possibilité d’un armement des agents de sécurité privée exerçant des activités de protection des personnes, lorsque celles-ci sont exposées à des risques exceptionnels d’atteinte à leur vie ou à leur intégrité physique.

Le projet de loi contient également deux articles qui relèvent plus particulièrement du ministère de la justice, ainsi qu’un article concernant le ministère de la défense. Je laisserai bien sûr le soin au garde des sceaux de présenter les articles 8 et 9 en indiquant simplement que, comme pour le reste du texte, le Gouvernement a souhaité intégrer ces articles dans un souci d’efficacité et de complémentarité, afin d’aider les acteurs qui contribuent à la sécurité publique.

S’agissant de l’article 10, enfin, qui relève du ministère de la défense, il concerne le service militaire volontaire et vise à créer un statut spécifique combinant celui de militaire et celui de stagiaire de la formation professionnelle.

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales mesures figurant dans ce projet de loi. Je veux à nouveau souligner leur importance pour les forces de l’ordre. Être policier national ou municipal, être gendarme, ce n’est pas exercer un métier comme les autres. C’est accepter d’être confronté à la violence dans ses manifestations parfois les plus extrêmes. C’est accepter d’exposer son intégrité physique, et parfois même sa vie, au nom de l’intérêt général. C’est précisément parce que les policiers et les gendarmes acceptent d’encourir de tels risques que nous nous devons de leur offrir la garantie d’une protection vigilante et juridiquement incontestable. C’est là tout simplement renforcer la République !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Michel Mercier et Mme Catherine Troendlé applaudissent également.

Debut de section - Permalien
Jean-Jacques Urvoas

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui donne de l’utilité, de la légitimité et du sens au contrat social, c’est avant tout la protection qu’il apporte à ceux qui s’y engagent. La sécurité publique n’est donc pas une question ordinaire ; c’est une question démocratique essentielle. Le projet de loi que le ministre de l’intérieur vient de vous présenter constitue par conséquent pour nous tous une opportunité de proposer de nouvelles réponses aux sujets d’actualité brûlants et d’anticiper ceux que nous connaîtrons demain.

Le ministère de la justice est chargé de deux questions importantes dans le cadre de ce texte.

La première concerne la prise en charge des mineurs dans le cadre de l’assistance éducative, mineurs dont la situation particulièrement complexe impose que les services de l’État viennent soutenir l’action des départements. Je pense, par exemple, aux enfants confrontés à la radicalisation violente, qu’ils reviennent d’une zone de conflit ou pas.

Dans ce contexte qui nous pousse à l’inquiétude, il me semble primordial de ne pas oublier que l’avenir de notre société réside dans ses enfants – je vous prie de bien vouloir m’excuser pour cette tautologie – et que les malheurs de ces derniers sont et seront nos malheurs.

Nous avons une responsabilité collective à leur égard. C’est pourquoi le dispositif de protection de l’enfance doit être le plus opérationnel possible et adapté aux problématiques nouvelles qui s’imposent à nous. À cette fin, nous nous sommes évidemment rapprochés des départements, car ce sont eux qui ont au premier chef la lourde tâche de veiller à la protection de l’enfance. Je tiens d’ailleurs à remercier ici l’Assemblée des départements de France pour sa disponibilité et sa compréhension. Lors de ces échanges, de vives inquiétudes ont été exprimées à l’égard de la prise en charge éducative et médicale de ces enfants.

Dès lors, il était légitime de s’interroger sur la place de l’État. Si la protection de l’enfance relève en effet des conseils départementaux, je garde en tête la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989. Son article 19 dispose en effet que l’État est responsable et doit garantir « des procédures efficaces pour l’établissement de programmes sociaux visant à fournir l’appui nécessaire à l’enfant et à ceux à qui il est confié ».

Aussi, il me semble logique que l’État assume sa responsabilité et prenne toute sa place dans la conception et la diffusion d’outils adaptés à ce nouveau défi dans le cadre d’une politique publique coordonnée au niveau national.

Loin de concurrencer la compétence des conseils départementaux, l’État doit avoir pour objectif de se doter des moyens de leur apporter un soutien, de les accompagner dans la prise en charge de ces situations éminemment complexes et de coordonner les approches.

Depuis de nombreux mois, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse – la PJJ – réfléchit au sein de mon ministère à la difficulté que pourrait représenter pour les services éducatifs la prise en charge, potentiellement en grand nombre, de ces enfants. Elle accumule des connaissances, forme ses personnels et développe une expérience auprès d’adolescents mis en examen pour des faits de nature terroriste.

Je veux saluer cette capacité d’anticipation, qui n’est pas si courante au sein de l’administration. J’y vois le signe du profond engagement de la PJJ sur les questions de l’enfance. En effet, l’objectif est bien de protéger ces enfants et de transmettre les savoir-faire acquis aux services des conseils départementaux chargés de la protection de l’enfance.

Voilà pourquoi j’ai proposé une expérimentation d’une durée de trois ans dans ce texte. Je suis conscient qu’une telle démarche n’est pas courante, mais la matière, complexe, et l’urgence, évidente, paraissent l’imposer.

Demain donc, le procureur de la République et le juge des enfants qui l’estimeraient nécessaire pourraient confier aux services de la PJJ une mesure éducative de milieu ouvert, y compris lorsque l’enfant est confié à l’Aide sociale à l’enfance dans le cadre d’un placement. Un service pluridisciplinaire interviendrait alors auprès de l’enfant et de sa famille, sous la forme d’entretiens, pour qu’ils puissent exprimer leurs difficultés et être aidés à trouver des solutions. Or un tel cumul de mesures n’est aujourd’hui pas autorisé par l’article 375-4 du code civil.

Notre intention est de faciliter le soutien de l’État aux départements face à la complexité de certaines situations, parfois anxiogènes, comme le retour de zones de conflit. Nous voulons développer une politique publique en direction des familles radicalisées violentes qui sont, ou qui ne sont pas d’ailleurs, de retour d’une zone de guerre.

Notre ambition est de mutualiser les compétences acquises dans le champ pénal et dans celui de l’investigation. En effet, les prises en charge dispensées par les conseils départementaux sont variées, mais leur expérience solide en matière d’enfance en est encore à ses prémices s’agissant de radicalisation violente. À ce jour, seuls vingt et un enfants de retour de la zone irako-syrienne sont suivis en assistance éducative sur l’ensemble du territoire national.

Il faut amplifier les premières initiatives qui ont été prises, afin de prendre en compte les traumatismes subis par ces jeunes, notamment le vécu de situations de guerre, qu’il s’agisse de bombardements, de privations, de blessures ou de la participation à des actes violents, ou le vécu de situations de repli. Il faut également tenir compte de l’incarcération des parents de retour en France et le placement des enfants, ce qui impliquera une séparation qui ne peut être que brutale.

Il faudra aussi prendre en considération le risque accru de prosélytisme à l’école, en activité de jour, en placement ou, au contraire, le risque de repli et de conformisme ne donnant aucune prise à l’action éducative.

Enfin, nous devrons tenir compte, dans la mesure du possible, de la nécessité de ne pas séparer les fratries. Il ne s’agit pas d’autoriser l’intervention de la PJJ dans toutes les procédures, mais bien de cibler celles qui font l’objet d’une politique particulière de l’État. C’est la raison pour laquelle je tiens à ce que le procureur de la République, qui met en place et anime ces politiques, demeure la voie d’entrée dans l’expérimentation par le biais de ses réquisitions.

L’État, quant à lui, doit structurer une offre d’accompagnement des collectivités locales en matière d’assistance éducative. Ainsi, au-delà de la généralisation de l’évaluation, les mesures éducatives en milieu ouvert devront être étendues pour permettre à l’État d’agir. Cela se fera par le biais d’une mesure judiciaire d’investigation éducative spécifique, dont l’objectif sera d’évaluer la problématique familiale, le danger encouru et, enfin, de proposer des mesures. À cette fin, l’expérimentation de double mesure s’inscrira dans un dispositif plus global qu’il faudra encore affiner, au fur et à mesure des échanges et des retours d’expérience de l’ensemble des partenaires concernés.

Dans le cadre de ce projet de loi, le ministère de la justice défend une seconde disposition relative à la sécurité pénitentiaire.

La mesure que nous vous proposons constitue une étape décisive dans l’amélioration de la sécurité pénitentiaire. La sécurité des établissements et de leurs personnels implique des actions à l’intérieur des enceintes et dans les domaines pénitentiaires, mais aussi lors des déplacements opérés dans le cadre des extractions médicales, administratives ou judiciaires.

Le 25 octobre dernier, j’annonçais la création d’équipes de sécurité pénitentiaire dans le cadre d’un plan ambitieux de lutte contre la radicalisation violente à l’intérieur des établissements pénitentiaires. La création de ces équipes ne modifiera pas l’unité du corps des personnels de surveillance, dans la mesure où la polyvalence qu’induit la variété des tâches qui incombent à cette unité constitue une véritable richesse.

Un décret publié le 17 janvier dernier crée la sous-direction de la sécurité pénitentiaire et, par là même, les équipes de sécurité pénitentiaire. Cette sous-direction de la sécurité comprendra notamment un bureau de gestion de la détention et des missions extérieures, qui aura la responsabilité de définir, de coordonner et d’évaluer les normes et les procédures relatives à l’activité de ces équipes de sécurité pénitentiaire.

La disposition qui figure dans ce projet de loi permettra de doter ces équipes de pouvoirs de contrôle. Cette transformation s’accompagnera de l’armement des agents réalisant des missions extérieures. Cet armement sera adapté aux conditions dans lesquelles se dérouleront les missions. En outre, un programme de formation spécifique des agents est en préparation.

Votre commission des lois a souhaité compléter ce dispositif en adaptant à ces missions le nouveau cadre d’usage des armes proposé par le Gouvernement pour les autres forces de sécurité intérieure. Je ne suis pas opposé à cette préoccupation légitime. Il nous faudra simplement être certains que tous les cas de figure sont bien pris en compte dans la rédaction du texte qui sera retenue.

En fonction des effectifs et de la charge des missions effectuées, les équipes de sécurité pénitentiaires participeront à la sécurité périmétrique des établissements dans les limites du domaine pénitentiaire. En exprimant ce souhait, j’ai là une divergence avec le rapporteur. En effet, je ne souhaite pas étendre leur champ d’intervention en dehors du domaine pénitentiaire, sur la voie publique ; nous aurons donc un débat sur ce point.

Au-delà de cette divergence, nous nous retrouvons pour offrir de nouvelles prérogatives à ces équipes. Je pense, par exemple, à une déclinaison adaptée du modèle des équipes de sécurité de la SNCF et de la RATP, défini dans la loi du 22 mars 2016.

Évidemment, la création des équipes de sécurité pénitentiaires entraînera une structuration plus opérationnelle des missions extérieures, notamment dans sa dimension de prise en charge des questions de sécurité. Elle constitue le préalable nécessaire à la montée en puissance de ce pan d’activité de l’administration pénitentiaire.

Par ailleurs, un plan pluriannuel de recrutements sera défini, afin d’assurer un déploiement progressif de ces équipes sur l’ensemble du territoire.

Cela témoigne de la détermination du Gouvernement à conduire ce changement utile pour l’administration pénitentiaire, donc pour les personnels, les personnes détenues, mais aussi pour notre pays.

Enfin, j’entends également soumettre à votre assemblée un amendement de précision concernant le renseignement pénitentiaire. En effet, le travail réglementaire accompli depuis la loi du 3 juin 2016 pour permettre au renseignement pénitentiaire d’accéder à des techniques de recueil de renseignements a révélé que nous devions apporter plus de précisions dans les processus prévus par la loi, et que nous pensions renvoyer au pouvoir réglementaire. Pour satisfaire cette nécessité, j’ai souhaité déposer un amendement relatif à l’article 727–1 du code de procédure pénale.

Le nouveau dispositif vise à assurer l’articulation et la répartition des techniques entre le code de procédure pénale et le code de la sécurité intérieure. Très concrètement, trois techniques sont maintenues dans le code de procédure pénale au titre de la prévention des évasions et du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements. Deux d’entre elles s’appliquent d’ailleurs à des dispositifs autorisés en détention : le dispositif de téléphonie publique SAGI et l’accès aux données stockées sur les ordinateurs autorisés en détention.

La troisième technique porte sur les systèmes d’information et les terminaux électroniques de communication détenus de façon illicite – je pense évidemment aux téléphones portables. Il nous faut éradiquer ce fléau, illustré par la découverte quotidienne de téléphones en détention. Il est prévu l’information du procureur de la République et un constant dialogue avec lui, afin d’envisager une judiciarisation.

Par ailleurs, l’administration pénitentiaire doit être en mesure de mettre en œuvre les techniques de renseignement prévues dans différents articles, que je ne citerai pas en détail compte tenu de leur complexité.

Seules sont concernées ici les personnes détenues, pour des finalités de prévention des évasions, de maintien du bon ordre et de la sécurité des établissements. J’insiste sur ce point, car j’ai trop souvent lu que les entourages ou les personnels seraient, eux aussi, concernés. Il s’agit en fait du régime relevant du livre VIII du code de la sécurité intérieure.

Pour permettre la mise en œuvre de ces techniques par l’administration pénitentiaire, je vous propose de créer un titre V bis de ce livre VIII, qui serait intitulé « Du renseignement de sécurité pénitentiaire ». Naturellement, le contrôle de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement, au titre d’une nouvelle finalité « prévention des évasions et sécurité et bon ordre des établissements », est prévu.

Tout cela participera à la structuration et à l’avènement du renseignement pénitentiaire, dont, tout le monde en conviendra, nous avons tant besoin.

Tels sont les deux sujets sur lesquels le ministre de la justice souhaitait avancer des propositions, dans un texte extrêmement bien défendu par le ministre de l’intérieur.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Michel Mercier et Mme Catherine Troendlé applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de François Grosdidier

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission des lois a été saisie du projet de loi relatif à la sécurité publique, déposé sur le bureau du Sénat le jour même de son adoption par le conseil des ministres, le 21 décembre 2016.

Ce texte est l’une des réponses apportées par le Gouvernement à la mobilisation des policiers ayant fait suite à l’agression de Viry-Châtillon le 8 octobre dernier. Les faits ont été rappelés : deux équipes de police avaient été sauvagement agressées par des individus armés de cocktails Molotov, au cours d’une attaque planifiée, ayant grièvement blessé deux policiers.

Cet acte, odieux et lâche, n’était, hélas, pas un fait isolé. Au cours des dernières années, les agressions contre les forces de l’ordre se sont multipliées, avec une violence accrue. La plus traumatisante, qui a été également évoquée, a été le meurtre d’un couple de policiers à leur domicile de Magnanville, le 13 juin 2016.

Parallèlement, jamais les forces de l’ordre n’ont été autant sollicitées et exposées à la menace terroriste.

Les policiers ont exprimé un malaise profond, le sentiment de ne pas être suffisamment soutenus tant sur le plan des conditions matérielles que sur celui des conditions juridiques de leur action.

Notre commission a délégué l’examen au fond de l’article 10, relatif à la création d’un dispositif de volontariat militaire d’insertion, à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Elle a chargé notre excellent collègue Philippe Paul d’établir le rapport.

Le chapitre Ier tend à créer un régime d’utilisation des armes commun aux forces de l’ordre relevant du ministère de l’intérieur. Il ne s’agit pas de satisfaire une revendication conjoncturelle des policiers, sous le coup de l’émotion suscitée par ces ignobles agressions ; il s’agit bien de déterminer un cadre stable, durable, cohérent, au sein duquel les agents des forces de l’ordre pourront agir, se défendre et défendre la vie des citoyens qu’ils ont le devoir de protéger.

Les gendarmes disposent d’un cadre large, déterminé par un décret ancien – il date de 1903 – qui reprend même des règles du XIXe siècle. Ce texte permet de faire feu, après deux sommations, y compris sur des personnes qui ne sont pas nécessairement dangereuses. Il est obsolète et, fort heureusement, n’est plus appliqué depuis longtemps. Ainsi, les gendarmes respectent, en toutes circonstances, les principes d’absolue nécessité et de stricte proportionnalité posés par la convention européenne des droits de l’homme et par la jurisprudence.

Les policiers, eux, sont soumis au seul droit commun de la légitime défense, comme tous les citoyens. Pourtant, ils n’ont pas que le droit de se protéger ; ils ont le devoir de protéger tous les citoyens. Le droit n’est pas adapté à leur mission, même s’ils peuvent se prévaloir, dans certaines situations, de l’état de nécessité et, pour le maintien de l’ordre, de l’autorisation de la loi.

Les gendarmes sont formés à utiliser leur arme avec le plus grand discernement. Les policiers sont davantage formés à ne pas les utiliser. Nous avons vu ce jeune adjoint de sécurité affronter à main nue une foule et essuyer des coups de barre de fer sans sortir son arme. D’autres policiers ont pris le risque de mourir carbonisés dans leur véhicule, plutôt que d’utiliser leur arme, tant ils craignaient de voir leur vie basculer en cas de mise en cause.

De nombreux policiers nous ont confié leur peur d’utiliser leur arme pour se défendre ou pour protéger les citoyens. Cette inhibition paralyse nos forces de l’ordre et les démoralise. Nous devons donc les désinhiber, en nous gardant bien de tout effet de balancier.

Nous avons la grande responsabilité d’écrire le texte le plus équilibré et le plus précis possible, anticipant autant que faire se peut sa lecture par les agents et la jurisprudence.

Messieurs les ministres, il faudra à partir de ce texte dégager une doctrine partagée entre le ministère de l’intérieur et la Chancellerie, l’expliquer aux gendarmes et aux policiers, et la décliner sur tout le territoire, en lien avec les parquets. La formation devra être théorique et pratique, répondant à l’avance aux cas concrets les plus probables, et elle devra se doubler d’un entraînement renforcé.

Ce nouveau régime d’utilisation des armes s’inspire de celui des gendarmes. Il le rénove à la lumière des principes conventionnels et jurisprudentiels précédemment cités : l’absolue nécessité et la stricte proportionnalité. Il s’appliquera aux policiers et gendarmes, y compris aux adjoints de sécurité, aux gendarmes adjoints volontaires et aux réservistes, dès lors qu’ils agiront dans l’exercice de leurs fonctions, revêtus des insignes apparents de leur qualité. Je le rappelle à la lumière des nouvelles règles qui autorisent désormais les agents des forces de l’ordre à porter leur arme en dehors du service.

En dehors des heures de service, un agent peut faire usage de son arme, par exemple en cas d’agression soudaine. Il se retrouve, de facto, basculé dans le cadre de ses fonctions et bénéficie alors du nouveau régime juridique. Ce point doit être clair.

L’article 1er tend à prévoir cinq cas d’usage des armes.

Dans le premier cas, les atteintes à la vie et menaces par des individus armés, il s’inspire des dispositions de droit commun relatives à la légitime défense, en en élargissant le cadre. Il s’applique donc, soit lorsque des atteintes à la vie ou à l’intégrité physique sont portées contre un membre des forces de l’ordre ou contre autrui, soit lorsque des personnes armées menacent sa vie, son intégrité physique ou celles d’un tiers. Même si la jurisprudence reconnaît la légitime défense putative, notre rédaction doit mettre les policiers et gendarmes à l’abri de toute incertitude jurisprudentielle à cet égard.

Dans le deuxième cas, on autorise les membres des forces de l’ordre à faire usage de leur arme, après deux sommations, quand « ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent, les postes ou les personnes qui leur sont confiés ». Cela ne s’applique qu’à des sites ou des personnes hautement sensibles.

Les troisième et quatrième cas, également après sommation, permettent l’arrêt d’un fugitif ou d’un véhicule, mais il ne s’agit pas de n’importe quel fugitif… Il doit être tenu compte de sa dangerosité et du risque que sa fuite fait prendre pour la vie d’autrui. Toutefois, la formulation proposée par le Gouvernement nous pose problème. Il faudrait que l’agent ayant fait feu puisse apporter devant le juge la preuve que le fugitif allait perpétrer une atteinte à la vie ou à l’intégrité physique. Or cette preuve est impossible à apporter.

Devant un véhicule dont les occupants exhiberaient des Kalachnikov et ne s’arrêteraient pas, ou redémarreraient après deux sommations, aujourd’hui, les gendarmes tireraient, mais pas les policiers. Tel que le texte a été initialement rédigé, les gendarmes laisseraient désormais partir le véhicule et les terroristes potentiels, aux dires mêmes du DGGN, le directeur général de la gendarmerie nationale, confirmés par le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation ! Ce n’était pas les intentions du Gouvernement, et ce ne sont pas non plus celles de la commission de lois.

Nous proposons donc une nouvelle rédaction, inscrite dans le droit fil des propositions de Mme Cazaux-Charles et reprenant une rédaction s’inspirant des dispositions que nous avons adoptées pour le périple meurtrier. L’agent pourra utiliser son arme s’il a des raisons réelles et objectives d’estimer que la perpétration par le fugitif d’atteintes à sa vie, à son intégrité physique ou à celles d’autrui est probable.

Le cinquième cas, enfin, traite d’un usage visant à mettre fin à un périple meurtrier.

Quelles forces de l’ordre seraient concernées par ces dispositions ?

Le Gouvernement a judicieusement étendu le régime aux douaniers, régis par un article du code des douanes, et aux militaires déployés dans le cadre de missions de sécurité intérieure.

Nous avons également jugé nécessaire de l’étendre aux agents de surveillance de l’administration pénitentiaire, même s’ils disposent déjà d’un cadre juridique spécifique. Celui-ci doit être complété, tant pour y inscrire les principes de la CEDH que pour tenir compte des nouvelles missions de certains de ces agents : sécurité des établissements, extractions judiciaires ou transfèrements.

Enfin, nous avons souhaité inclure les policiers municipaux dans le dispositif. Leur vie est de plus en plus exposée, tandis que leur formation s’est considérablement accrue et que leur entraînement, lorsqu’ils sont armés, n’a rien à envier à la police nationale.

Les polices municipales forment la troisième force de l’ordre de la République. Nous avons donc décidé de les englober dans le régime posé par le premier alinéa de l’article 1er et nous aurons une discussion sur le cinquième alinéa de cet article – le premier alinéa est un minimum minimorum ! Cette proposition a fait l’objet d’un large consensus en commission des lois, dépassant le clivage entre droite et gauche.

Nous n’avons pas retenu pour ces agents les possibilités de tir après sommation. Cette proposition n’aurait pas recueilli le même consensus.

Il importe surtout que l’usage des armes par les policiers municipaux relève désormais du code de la sécurité intérieure et de sa jurisprudence.

Je serai plus concis sur les autres dispositions.

À l’article 2, qui permet aux policiers, gendarmes et douaniers de s’identifier par un numéro d’immatriculation administrative, nous proposons de supprimer la condition du quantum de peine. La condition du risque doit être déterminante et suffisante.

À l’article 4, relatif aux enquêtes administratives sur des employés en lien avec la sécurité dans les transports, nous voulons encadrer les délais pour ne pas pénaliser les entreprises du fait de la durée des mesures conservatoires.

L’article 6 tend à autoriser le port d’arme pour les agents de sécurité privée chargés de missions de protection de l’intégrité physique des personnes. Il comble, nous le reconnaissons, un vide juridique pour la protection des personnes, mais pas pour les lieux sensibles. Nous proposons de régler cette question.

Nous avons ajouté un article 6 bis pour permettre l’échange d’informations intéressant la lutte antiterroriste entre les autorités judiciaires et les services spécialisés de renseignement, ce qui est aujourd'hui légalement impossible.

Nous avons également ajouté un article 6 ter reprenant la proposition de notre collègue Michel Mercier sur la composition de la cour d’assises spéciale.

L’article 7 vise à aggraver les peines prévues en cas d’outrage commis contre des personnes dépositaires de l’autorité publique. Nous renforçons aussi la sanction de la rébellion et celle du refus d’obtempérer.

L’article 8 a pour objet de doter les équipes de sécurité pénitentiaire des prérogatives nécessaires aux missions de sécurité. Il nous paraît indispensable d’étendre le périmètre de leur action au-delà de la stricte emprise foncière des établissements, à proximité, notamment pour empêcher les « parloirs par-dessus le mur » ou le jet d’objets illicites.

Un large consensus s’est dégagé au sein de notre commission pour approuver ce texte, ainsi amendé, étant précisé que le Sénat n’a jamais manqué un rendez-vous avec le Gouvernement, dès lors qu’il s’est agi de garantir la sécurité des Français dans le respect des libertés fondamentales.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC. – M. Alain Richard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées s’est plus particulièrement saisie des articles 1er et 10.

J’évoquerai tout d’abord brièvement l’article 1er.

En clarifiant les règles d’usage des armes et en les harmonisant, cet article améliore substantiellement la sécurité juridique pour les forces de l’ordre. Celles-ci seront plus confiantes dans leur capacité à répondre aux agressions sans risquer de se trouver mises en cause.

Par ailleurs, nous nous félicitons de la prise en compte des militaires déployés sur le territoire national dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ainsi que de ceux qui protègent les installations militaires.

Les soldats intervenant dans le cadre du plan Vigipirate ou de l’opération Sentinelle forment une cible privilégiée. Ils pourront désormais répliquer dans les mêmes conditions que les gendarmes et les policiers, ce qui constitue une avancée très positive.

Même si ce n’est pas l’objet du débat de ce jour, je signale le souhait de la commission de voir la réflexion poursuivie avec les forces de sécurité intérieure sur la nécessaire complémentarité dans les déploiements respectifs et la remontée potentielle du renseignement de proximité par les militaires.

J’en viens à l’article 10, qui tend à instaurer une nouvelle étape dans l’expérimentation du service militaire volontaire – le SMV –, dénommée volontariat militaire d’insertion, ou VMI. Je rappelle que le SMV constitue une transposition expérimentale du service militaire adapté, le SMA, en métropole. Quatre centres lui sont dédiés, à Montigny-lès-Metz, Brétigny-sur-Orge, La Rochelle et Chalon-sur-Saône.

Selon le rapport d’évaluation transmis par le Gouvernement, le SMV a démontré son efficacité pour permettre à des jeunes « décrocheurs » d’acquérir des diplômes, des formations et de trouver un emploi : le taux de sortie positive avoisine les 70 %.

La formation militaire dispensée par les centres pendant les quatre premiers mois permet une structuration très bénéfique pour les volontaires. Les employeurs et les formateurs qui les accueillent par la suite témoignent de la confiance en soi retrouvée, de l’engagement et du dynamisme de ces jeunes.

Notre commission souligne l’engagement de nos armées en direction des publics les plus en difficulté. Cette expérimentation incarne par excellence le renouveau du lien entre l’armée et la Nation depuis les attentats. La commission s’en félicite, surtout s’agissant des jeunes les plus en difficulté.

Le présent projet de loi vise à améliorer le dispositif en conférant le statut de stagiaire de la formation professionnelle aux volontaires, qui pourront ainsi bénéficier des formations organisées et financées par l’ensemble des acteurs de la formation professionnelle et recevront la rémunération prévue par le code du travail.

Cette nouvelle étape de l’expérimentation durera jusqu’au 31 décembre 2018. Le SMV ayant été également prolongé jusqu’à cette date par la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté, le législateur devra se prononcer à la fin de l’année 2018 sur la pérennisation ou non d’un dispositif qui sera nécessairement unique.

À ce propos, il me semble qu’il serait préférable, in fine, de garder la marque « SMV », plutôt que « VMI », car elle constitue un label déjà reconnu et traduit mieux le lien entre l’armée et la Nation, ainsi que la notion d’engagement, ces deux éléments constituant l’essence du dispositif.

La commission des lois a adopté plusieurs amendements de notre commission tendant à clarifier la nature du contrat souscrit par les jeunes, améliorer l’articulation de l’état militaire avec le statut de stagiaire de la formation professionnelle et préciser la nature du rapport d’évaluation qui sera transmis par le Gouvernement.

Par ailleurs, nous resterons vigilants sur deux points. D’une part, le SMV, ou VMI, doit demeurer un dispositif militaire et ne doit pas connaître la même évolution que l’établissement public d’insertion de la défense, l’EPIDE, qui visait le même objectif, mais s’en est ensuite très vite éloigné. D’autre part, compte tenu du coût du dispositif, il faudra s’assurer de son efficacité sur le long terme et de sa bonne articulation avec les autres dispositifs de la formation professionnelle à destination de publics similaires.

Rendez-vous est donc pris pour le bilan, à la fin de l’année 2018.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Roux

La demande à laquelle je vais procéder aurait pu intervenir ultérieurement, mais, en la formulant dès maintenant, peut-être permettra-t-elle de mieux organiser nos travaux.

En application de l’article 44, alinéa 6, du règlement du Sénat, le Gouvernement, en accord avec la commission des lois, demande la réserve, jusqu’après l’examen de l’article 11, des articles 8 et 9, ainsi que de l’amendement n° 40 tendant à insérer un article additionnel après l’article 9.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve formulée par le Gouvernement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La réserve est ordonnée.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. David Rachline.

Debut de section - PermalienPhoto de David Rachline

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, en préambule, je souhaite à mon tour rendre hommage à tous ces hommes et à toutes ces femmes qui travaillent chaque jour à préserver notre sécurité.

Il est toujours facile de discuter des questions liées à l’usage de la force et de la violence légitime dans de confortables fauteuils, quand ceux qui seront soumis à la loi votée par nos soins devront l’appliquer dans des situations de stress, de violence et, surtout, dans des délais extrêmement courts. Les forces de l’ordre sur le terrain n’ont pas, comme nous, ici, le loisir de la discussion. Bien souvent, les membres des forces de l’ordre doivent prendre en une fraction de seconde, dans un environnement souvent détérioré, des décisions qui peuvent être lourdes de conséquences pour eux-mêmes, pour la population et pour le hors-la-loi contre lequel ils agissent.

Par ailleurs, on sent bien que ce projet de loi est présenté, d’abord, pour calmer la colère légitime des forces de l’ordre à la suite de la tentative d’assassinat de policiers à Viry-Châtillon. N’étant finalement qu’une réaction à un fait divers – ce que, je le dis au passage, monsieur le ministre, vous dénonciez sous le précédent quinquennat –, ce texte préparé dans la précipitation ne semble satisfaire personne, à commencer par les policiers eux-mêmes. Ces derniers y voient une occasion ratée ou, pis, l’inscription dans la loi d’une jurisprudence peu favorable à l’instauration d’un climat de sérénité pour les forces de l’ordre.

Mais vous vous en moquez bien, car, en réalité, ce texte vous permet de faire d’une pierre trois coups : montrer que vous légiférez alors que la mandature s’achève, calmer un peu les policiers qui ont spontanément fait part de leur ras-le-bol et faire croire aux citoyens qu’ils seront mieux protégés. Bref, une nouvelle fois – et, espérons-le, une dernière fois –, vous faites de la com’ au lieu de prendre des mesures efficaces pour protéger les Français !

Contrairement au Gouvernement, et à la majorité sénatoriale qui n’a pas voulu reprendre la disposition dans ce texte, nous jugeons nécessaire d’instaurer une présomption de légitime défense pour les forces de l’ordre. Cela ne constituerait en rien un permis de tuer, comme d’aucuns voudraient le caricaturer. Il s’agirait simplement que les forces de l’ordre ne soient plus seulement des cibles et qu’elles puissent enfin se battre à armes égales, en utilisant, si besoin, la violence légitime que l’État leur octroie contre les délinquants et terroristes en tous genres.

Il est temps, en fait, que la peur change de côté ! Les policiers ne doivent plus avoir peur de se servir de leur arme si la situation le requiert, ni penser qu’il vaut mieux ne rien faire pour ne pas risquer la prison. Une telle disposition devrait s’accompagner de la mise en place d’une juridiction spécialisée, compétente pour tout usage des armes par les forces de l’ordre.

Ce texte doit également nous offrir l’occasion de réfléchir à la formation et à l’entraînement de nos forces de l’ordre : formation juridique pour que l’ensemble des forces intervenant sur le terrain soit bien au fait de la loi en vigueur et entraînement au maniement des armes. Or de nombreux policiers nous font remonter une information selon laquelle l’entraînement au tir est aujourd'hui réduit à la portion congrue !

Enfin, et ce point n’est pas le moins important, la lecture de l’exposé des motifs fait apparaître la CEDH pour pratiquement tous les articles. C’est le justificatif avancé pour un grand nombre des mesures que vous proposez, monsieur le ministre. Il me semble pourtant, d’une part, que la justice est rendue au nom du peuple français, et non au nom d’une instance supranationale sans légitimité, et que, d’autre part, le vote de la loi est du ressort du Parlement, tirant sa légitimité de la souveraineté du peuple. La CEDH ne décide pas de ce qui est légal ou non ! II est donc urgent de se libérer de ce gouvernement des juges, surtout quand ces juges ne sont même pas français !

Debut de section - PermalienPhoto de David Rachline

Nos forces de l’ordre méritent d’être mieux protégées juridiquement pour mieux nous protéger physiquement. Cela passe par une volonté politique et par le retour de notre souveraineté pleine et entière.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le 8 octobre 2016, une quinzaine de personnes incendiaient deux voitures de police, occupées par quatre agents en mission de surveillance à Viry-Châtillon. Deux policiers avaient été alors très grièvement blessés. Cet événement avait sur le moment déclenché un mouvement de protestation sans précédent des forces de l’ordre, éreintées par des mois d’état d’urgence et de plan Vigipirate relevé au niveau « alerte attentat ».

Le projet de loi relatif à la sécurité publique qui nous réunit aujourd’hui constitue la réponse législative du Gouvernement à la mobilisation des policiers et vise, selon ses auteurs, à assurer la protection des forces de l’ordre et la sécurité juridique de leurs interventions.

Je voudrais en préambule, mes chers collègues, rendre hommage à ces femmes et ces hommes qui assument, chaque jour, la lourde tâche de nous protéger. Ils exercent leur mission dans des conditions extrêmement difficiles, dues certainement à la menace terroriste qui pèse sur notre pays, mais également au manque criant de moyens.

En fait, il ne s’agit pas ici du budget consacré au fonctionnement des commissariats, ni du nombre de postes dont la police aurait besoin pour travailler plus sereinement. Il est plutôt question – c’est la mesure phare du texte – de définir les conditions dans lesquelles policiers et gendarmes peuvent faire usage de leur arme.

In fine, la question qui se pose à nous est celle de savoir si l’adoption des dispositions qui nous sont proposées est à même, pour reprendre les mots du Gouvernement, d’assurer la protection des forces de l’ordre. Il convient également de s’assurer que les droits des citoyens et citoyennes de ce pays sont suffisamment garantis.

Le sentiment du groupe écologiste face à ce texte est plus que mitigé.

Le projet de loi contient des avancées certaines : l’instauration d’un cadre commun aux différentes forces de sécurité en matière d’usage des armes et l’inscription dans la loi des principes d’absolue nécessité et de stricte proportionnalité en sont les exemples. Toutefois, les risques de dérive liés à une mauvaise interprétation de ces dispositions sont nombreux et devraient absolument être revus ou supprimés. En effet, si la vocation de ce projet de loi est de protéger les policiers, certains spécialistes considèrent au contraire qu’en l’état le texte serait source d’une plus grande insécurité juridique.

Permettez-moi ainsi de citer Olivier Cahn, chercheur au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales, qui s’inquiète : « Si cette réforme ne s’accompagne pas d’un message clair, on peut craindre que les policiers n’en déduisent qu’ils auront plus de possibilités d’ouvrir le feu. Alors que ce n’est pas le cas, puisqu’ils devront de toute façon respecter la convention européenne des droits de l’homme, qui dit que la nécessité de recourir à la force doit être absolue. »

À son tour, maître Laurent-Franck Lienard, avocat spécialisé dans la défense des policiers, abonde dans le même sens. « Mes clients avaient parfois déjà du mal à saisir la notion de légitime défense, alors ils ne vont pas saisir les contours de l’absolue nécessité. Si on commence à dire aux policiers qu’ils peuvent tirer sur une voiture en fuite, nous aurons plus de coups de feu, plus de blessés et plus de condamnations de policiers. » Selon lui, cette réforme est « extrêmement dangereuse pour les policiers et les citoyens ».

En conséquence, le groupe écologiste, dont je porte la voix aujourd’hui, a déposé, malgré vos injonctions à ne pas le faire, monsieur le ministre de l’intérieur, quelques amendements dont le sort conditionnera notre vote final sur ce texte.

Si, finalement, la majorité du groupe écologiste vote contre ce projet de loi, ce sera, non par défiance envers les forces de l’ordre de notre pays, mais plutôt parce que nous aurons jugé que le texte ne servira à protéger ni les policiers, ni les gendarmes, ni nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Guérini.

Applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Guérini

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, avant d’aborder l’examen du texte inscrit à l’ordre du jour, permettez-moi de rappeler que nous vivons depuis deux ans dans une situation à laquelle la France n’était absolument pas préparée. Personne, tant à gauche qu’à droite, n’aurait pu imaginer le scénario catastrophe que nous avons vécu et que nous nous efforçons de surmonter avec dignité, avec lucidité et avec courage.

Depuis deux ans, des fanatiques, guidés par des barbares qui manipulent leur religion, s’attaquent durement et aveuglement à tous ceux qui ne leur ressemblent pas. En janvier 2015, puis en novembre 2015 et, enfin, en juillet 2016, la France a subi des actes d’une violence inimaginable, inacceptable, des actes qui nous ont plongés en état de sidération.

Nous avons eu des discussions théoriques sur les causes de cette nouvelle guerre et sur les libertés publiques. Nous devons d’ailleurs les prolonger et les approfondir pour cerner avec plus de justesse ce qui les a rendues possibles pour tenter, demain, de les éviter.

Force aussi est de constater que notre pays n’est pas le seul à essuyer les foudres de déséquilibrés en mal de reconnaissance. Les Turcs, les Maliens, les Belges, les Allemands et bien d’autres peuples ont été frappés et luttent désormais quotidiennement contre la barbarie.

En un an, les 4 000 perquisitions, les centaines d’arrestations et d’armes saisies ont permis aux forces de sécurité de déjouer dix-sept attentats.

Militaires en patrouille, présence policière accrue, fouilles systématiques aux abords des lieux publics, contrôles aux frontières sont autant de situations imposant plus de moyens pour les forces de l’ordre.

D’aucuns, évidemment, prisonniers de sirènes électoralistes, diront qu’il faut faire bien plus afin d’agir plus fermement ou bien moins, car nous vivrions désormais dans un état policier. La logique du « toujours plus de sécurité » consiste fréquemment à nous faire oublier qu’elle est retenue par ceux qui ont choisi d’imposer des coupes claires dans les effectifs des forces de sécurité.

Aujourd’hui, ces fortes voix nous promettent, sans ciller, de faire des économies en procédant à des ventes à la découpe chez les agents de la fonction publique. Dans le même temps, quelques bonnes âmes n’hésitent pas à élever la voix, brandissant le glorieux étendard des droits de l’homme, pour nous affirmer que la mobilisation contre le terrorisme et pour la sécurité de tous ferait de la République placée en état d’urgence un État policier. Je crains que ces partisans du toujours moins de sécurité ne laissent naïvement place aux ennemis de notre démocratie, qui, eux, n’hésitent jamais à nous faire la guerre avec toujours plus de barbarie.

Pressés, comme à l’accoutumée, les uns et les autres, victimes du toujours plus de critiques, oublient que la politique engagée depuis cinq ans dans le cadre de la sécurité, loin de correspondre aux caricatures dans lesquelles ils se complaisent, n’a pas seulement apporté des réponses concrètes aux demandes des policiers et des gendarmes. Tout en prenant en compte les exigences des personnels présents sur le terrain, elle n’a jamais sacrifié les attentes de la population, qui, en matière de sécurité publique, demande des actes et non pas des postures.

Chacun de nous connaît le coût de cette présence et les difficultés qu’elle peut entraîner. Nous devons rester vigilants à l’équilibre délicat, toujours à réinventer, entre besoin légitime de sécurité et préservation des libertés individuelles.

Permettez-moi, mes chers collègues, une incursion philosophique, mais certains auteurs considèrent que, depuis Thomas Hobbes, les tensions entre la liberté et la sécurité sont au cœur de la philosophie politique. Ils affirment même que la sécurité est une condition de la jouissance des libertés, mais elle est aussi au principe de leur restriction.

Nous avons adopté quatre lois tendant à renforcer la lutte contre le terrorisme et voté majoritairement, à l’occasion de la discussion de la loi de finances pour 2016, le renforcement de la lutte contre le terrorisme au travers de moyens tant humains que financiers. Peut-être va-t-on m’accuser d’être trop conciliant avec les socialistes, mais il faut savoir reconnaître le travail accompli dans ce domaine par l’ancien ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, et je reste convaincu que son successeur, Bruno Le Roux, suivra la route qu’il a tracée.

Pour autant, la fermeté et la détermination ont un coût. Nos forces de l’ordre sont fatiguées et sollicitent la reconnaissance de la Nation.

Les différentes manifestations qui ont fait suite à l’assassinat d’un couple de policiers à leur domicile à Magnanville en juin 2016 et à l’agression de quatre policiers par des jets de cocktails Molotov à Viry-Châtillon le 8 octobre dernier témoignent d’une situation difficile et traduisent le mal-être profond des forces de l’ordre.

Nous examinons donc une loi de cohérence finalisant et parachevant les mesures nécessaires à la lutte contre le terrorisme.

La refonte globale du cadre me convient et me rassure. En effet, elle unifie dans un même article du code de la sécurité intérieure l’usage des armes pour toutes les forces de sécurité en y intégrant les principes d’absolue nécessité et de stricte proportionnalité tels qu’ils sont mis en exergue par la jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l’homme.

Je crois très sincèrement que ce texte permet de garantir la sécurité de nos policiers et de nos gendarmes. Il est l’expression d’un État sûr de ses valeurs, qui ne cède pas aux tentations de la confusion des rôles et des pouvoirs.

Laissons donc les vaines polémiques et faisons face avec lucidité à la dure réalité. Les majorités pourront changer, les menaces resteront malheureusement. Dans ce contexte, plus que jamais, notre cause, c’est l’État et c’est la République. Servons-les avec passion et conviction, parce que c’est ainsi que nous contribuons à assurer la sécurité de chacun. C’est la raison pour laquelle le groupe du RDSE votera ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, pour le Parlement, singulièrement pour le Sénat, l’examen de ce projet de loi est d’abord une façon de rendre hommage aux vingt-six policiers et gendarmes qui ont perdu la vie dans des opérations de lutte contre le terrorisme. C’est ensuite une façon de dire à tous les policiers, à tous les gendarmes, à tous les douaniers, à tous les militaires de l’opération Sentinelle que nous savons ce que nous leur devons en termes de tranquillité et de sûreté. Ce sont eux, en ces temps difficiles, qui nous permettent de vivre en commun.

Bien entendu, la question de l’usage des armes face à cette menace terroriste sans précédent devait être revue. Pour autant, dans notre République, il ne saurait être question d’envisager un usage plus laxiste, d’abandonner nos principes de droit : il faut à la fois permettre aux forces de l’ordre de se défendre – c’est évident – et respecter les règles que nous nous sommes fixées, qu’elles soient d’ordre constitutionnel ou conventionnel.

Vous avez su faire la synthèse des rapports de M. Guyomar et de Mme Cazaux-Charles, ce que M. le rapporteur a justement souligné. À cet égard, je le remercie d’avoir insisté sur ce point précis : le régime unique d’usage des armes que crée ce texte permettra aux membres des forces de l’ordre de faire feu dès lors qu’ils penseront que leur vie est immédiatement menacée, mais avec responsabilité, en s’assurant chaque fois du caractère proportionné de leur réponse.

Tout le monde l’a rappelé, le régime d’usage des armes dont bénéficient les militaires de la gendarmerie nationale, qui date du XIXe siècle, encadré par la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation et par celle de la Cour européenne des droits de l’homme, est obsolète. Les policiers, quant à eux, sont placés dans la même situation qu’une personne en situation de légitime défense.

Unifier le régime d’usage des armes, c’est aussi participer à l’unification de nos forces de sécurité, qui, si elles doivent conserver leurs spécificités, doivent également bénéficier des mêmes protections légales lorsque la vie de leurs membres est en jeu et lorsque ceux-ci ont à faire face, au cours d’interventions dans des opérations de terrorisme, à des individus pour lesquels la vie n’a pas grande importance.

Cela a été rappelé, la loi du 3 juin 2016, qui a créé la notion de « périple meurtrier », présente l’avantage d’envisager globalement l’usage des armes par les forces de l’ordre. De fait, nous souscrivons pleinement aux propositions du Gouvernement et de la commission, et, monsieur le rapporteur, nous approuvons particulièrement les dispositions que vous avez fait voter s’agissant des polices municipales.

L’article 2 prévoit que tout policier ou gendarme aura la possibilité de s’identifier, dans certains actes de procédure, par un numéro d’immatriculation administrative : cela nous semble une très bonne chose.

J’en viens maintenant à un autre point particulièrement important de ce projet de loi s’agissant des jeunes mineurs attirés par le terrorisme.

Que l’on puisse à la fois prononcer une mesure de placement – c’est-à-dire de protection sociale – dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance et, en même temps, que la protection judiciaire de la jeunesse puisse exercer une mesure d’action éducative en milieu ouvert, c’est un vrai progrès. Je salue tous ceux – Gouvernement, Assemblée des départements de France – qui ont œuvré en ce sens. Auparavant, il fallait choisir l’une ou l’autre de ces mesures ; en définitive, très souvent, on perdait de vue l’enfant. Dorénavant, il pourra être suivi correctement.

En outre, la commission s’est montrée favorable à notre amendement visant à modifier la composition de la cour d’assises spéciale de Paris, objet de l’article 6 ter. Je n’insisterai pas davantage : le président Jean-Michel Hayat l’ayant fait suffisamment, voilà quelques jours, devant M. le garde des sceaux, le Gouvernement soutiendra avec enthousiasme cette disposition pour lui être agréable…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Mercier

C’est un bon texte qui nous est soumis, qui ne se limite pas à répondre à une demande : il permet d’armer notre pays correctement face au terrorisme, à la suite de nombreux autres textes.

Monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, le Sénat, comme toujours lorsqu’il s’agit de la sécurité de notre pays, sait faire abstraction des considérations strictement électorales à l’approche des échéances. Nous aurions pu nous dire : « Attendons quatre mois, nous serons peut-être aux responsabilités et c’est mieux si c’est nous qui légiférons. » Eh bien non ! Notre sens des responsabilités, notre façon d’appréhender la lutte contre le terrorisme nous font considérer qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire. Puisque le Gouvernement nous propose un texte nécessaire, nous le voterons, parce que nos forces de l’ordre en ont besoin, parce que la liberté a besoin de ce texte. Le groupe UDI-UC est heureux de s’associer à ce vote.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, à quelques mois de la fin de la législature, nous sommes appelés une nouvelle fois à nous prononcer – dans l’urgence – sur des mesures aux conséquences lourdes pour des pans de notre droit.

Dicté par la grogne policière de l’automne dernier, à la suite de l’agression violente de quatre fonctionnaires à Viry-Châtillon – qu’on ne peut que condamner –, ce texte portant sur des mesures de sécurité intérieure nous est soumis dans un contexte anxiogène d’inflation de lois antiterroristes depuis plusieurs années et de multiplication de dispositifs d’urgence depuis le 13 novembre 2015.

Le Gouvernement nous propose – c’est le cœur du projet – de refondre l’usage des armes des forces de l’ordre, dans la continuité de la loi « antiterroriste » du 3 juin 2016, qui prévoit déjà que les policiers, les militaires de l’opération Sentinelle, les gendarmes et les douaniers peuvent faire usage de leur arme en cas de « périple meurtrier ».

Ainsi note-t-on une fois encore un glissement des lois d’exception vers notre droit commun de plus en plus dicté par le tout-sécuritaire. Espérons que ces mesures ne trouveront pas une application dans la répression de la délinquance « ordinaire » plutôt que dans la lutte contre le terrorisme.

L’alignement du cadre d’usage des armes des policiers nationaux sur celui des gendarmes, qui permettra de s’affranchir du principe de riposte immédiate présidant normalement à l’ouverture du feu, n’a pourtant pas toujours recueilli l’assentiment du Gouvernement… Et pour cause, l’idée est depuis longtemps un leitmotiv du Front national, repris par certains syndicats de police et par Nicolas Sarkozy en 2012.

Depuis 2012, la même mesure a fait l’objet de cinq initiatives parlementaires : quatre des Républicains et une de M. Masson. Toutes ont été rejetées.

Au-delà du projet de société qu’elle porte en elle, nous pensons pour notre part qu’elle est inutile, inefficace, voire dangereuse pour nos forces de l’ordre elles-mêmes.

En 2013 déjà, la commission des lois du Sénat relativisait l’idée selon laquelle les policiers sont dans une situation d’insécurité juridique : « Seuls quelques cas d’usage des armes ont donné lieu à des mises en cause de policiers », rappelait le Sénat.

D’après la direction générale de la police nationale, « seulement » 120 procédures liées à des cas de légitime défense et d’ouverture du feu ont été transmises à l’IGPN au cours des cinq dernières années. Le nombre de condamnations qui en émane est plus marginal encore.

Par ailleurs, si le nouveau régime est adopté, il sera soumis au respect des principes d’« absolue nécessité » et de « stricte proportionnalité », comme l’exige la convention européenne des droits de l’homme en son article 2, qui consacre le droit à la vie. C’est pourquoi, si l’exécutif pense qu’il est nécessaire de légiférer pour libérer les coups de feu, il oublie que l’Europe a déjà condamné à plusieurs reprises des gendarmes ayant fait usage de leur arme « illégitimement ».

Outre la refonte de l’usage des armes, le texte prévoit notamment des dispositions concernant l’anonymisation des procès-verbaux et la répression des outrages à personnes dépositaires de l’autorité publique. Autant de mesures censées répondre aux revendications des policiers à l’automne dernier, ou plutôt aux revendications de certains de leurs leaders autoproclamés. Car, je vous rappelle, mes chers collègues, que les premiers mots d’ordre des policiers alors mobilisés portaient, d’une part, sur des revendications matérielles – la vétusté des locaux, les véhicules, les protections inadaptées – et, d’autre part, sur des revendications « salariales », telles que les millions d’heures supplémentaires accumulées.

Or, une fois encore, le Gouvernement élude la question des moyens. La mise en place de ces mesures ne masquera pas la « paupérisation » des deux forces de l’ordre, qui ne disposent plus des moyens en fonctionnement et en investissement pour assurer leurs missions. Attachons-nous donc à défendre les conditions de travail concrètes des policiers, qui sont des travailleurs du service public, et notre sécurité publique n’en sera que renforcée !

En outre, si le Gouvernement reprend une préconisation de l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice, il « oublie » que l’INHESJ préconise, en parallèle à cet alignement, la mise en place d’un magistrat référent par cour d’appel en matière d’usage des armes, ou encore le renforcement de la formation des policiers. Qu’en est-il de ces propositions ?

À mon tour, permettez-moi de citer Laurent-Franck Liénard, avocat au barreau de Paris, spécialiste de la défense des membres de forces de l’ordre : « Qu’il s’agisse de la police ou de la gendarmerie, la formation est la honte de notre pays. » C’est inquiétant…

Nous vous invitons, monsieur le ministre de l’intérieur, à vous emparer de cette question extrêmement importante : il est de notre point de vue scandaleux de munir d’armes des policiers, a fortiori municipaux, comme le préconise la droite sénatoriale, sans leur dispenser la formation nécessaire. On sait que nos policiers nationaux ne sont contraints qu’à trois séances de tir par an ! Ainsi, pourquoi ne pas missionner d’urgence l’Inspection générale de la police nationale et l’Inspection générale de la gendarmerie nationale pour conduire un audit sur les formations de la police et de la gendarmerie nationales ?

Si le Gouvernement et la majorité sénatoriale partagent la philosophie générale de ce texte, bien sûr, la commission des lois l’a durci, notamment en élargissant une partie des dispositions relatives à l’usage des armes aux policiers municipaux autorisés à porter une arme, ainsi qu’en réprimant plus sévèrement les comportements de rébellion contre les membres des forces de l’ordre. Dans ce cadre de surenchère sécuritaire incessante, quelle sera la prochaine étape ? Le rétablissement de la maréchaussée ? L’autorisation d’armement pour les civils ?

Cette loi illustre le basculement dangereux de l’État social vers l’État pénal. Dans ce contexte, mes chers collègues, prenons nos responsabilités, cessons de faire la loi dans l’émotion. La peur sert de prétexte à un mode de gouvernement, un programme politique qui s’élabore indépendamment des émotions des citoyens. C’est ce que nous enseignent l’historien Patrick Boucheron et le politologue Robin Corey dans un entretien intitulé L’exercice de la peur : usages politiques d’une émotion.

Finalement, avec ce projet de loi, nous constatons, une fois encore, et avec une gravité certaine, que sont d’ores et déjà construites des fondations solides pour l’édifice du tout-sécuritaire qu’érigera aisément un futur gouvernement de droite dure.

Ainsi, vous l’aurez compris, l’état d’esprit et les trop nombreux antécédents de ce texte, la vision du tout-sécuritaire et la privatisation de notre sécurité publique qu’il porte nous conduisent à nous y opposer fermement.

J’appelle tous nos collègues à faire preuve d’humilité devant le scénario peut-être annoncé d’un gouvernement qui nous conduirait dans une voie loin d’être la meilleure pour nos concitoyens.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la menace maximale, constante et durable qui pèse sur notre pays mobilise nos forces de sécurité de façon éprouvante. Les actes terroristes survenus sur notre territoire depuis plus de deux ans ont tous révélé la nécessité de donner à nos forces de sécurité tous les moyens utiles dans le domaine du renseignement, pour pouvoir prévenir dans le domaine de la lutte opérationnelle, pour pouvoir neutraliser, sans oublier une réponse pénale précise et ferme pour punir et empêcher que l’horreur ne se réitère.

Monsieur le ministre, vous le savez, le Sénat n’a jamais failli, comme l’a rappelé le président du Sénat à l’occasion de ses vœux la semaine dernière. Nous avons pris toute notre part de responsabilité dans le combat contre ce fléau en donnant aux forces de sécurité et à la justice des moyens pour une plus grande efficacité.

Le groupe auquel j’appartiens aurait souhaité aller plus loin et plus vite. Le Gouvernement nous a entendus pour partie, mais bien tardivement. Je pense à la création de deux nouveaux délits terroristes – le délit d’entrave au blocage des sites incitant à la commission d’actes de terrorisme et celui de consultation habituelle de tels sites – ou bien à la création d’un régime procédural spécifique permettant d’empêcher l’accès des personnes condamnées pour terrorisme à la libération conditionnelle, que nous avions proposée dès février 2016 à travers la proposition de loi du président Bas et que le Sénat avait adoptée, sans votre consentement, cependant que vous en actiez en définitive la nécessité en juin dernier.

Hors de toute polémique sur la méthode employée par le Gouvernement, notre conscience républicaine nous implique et nous impose de poursuivre nos efforts collectifs, sans faiblesse, pour plus d’efficacité.

Si nous avons accepté d’apporter des réponses immédiates, à la suite des tragiques événements passés, nous n’avons cessé de vous rappeler la nécessité de renforcer les moyens donnés aux personnes dépositaires de l’autorité publique. En effet, l’autorité de l’État, nécessaire pour protéger les Français, passe par ces personnes dévouées, au service de l’État et, surtout, de tous les Français.

Il est urgent, monsieur le ministre, de rétablir cette autorité. Nous ne pouvons nous contenter de communiqués de presse, comme celui de la semaine dernière, annonçant tout bonnement que, « depuis 2012, nous observons une tendance globale à la baisse des principaux indicateurs statistiques de délinquance », ou qu’il n’y aurait plus de « zone de non-droit ».

Comment expliquer que l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales relève que, pour l’année 2016, la violence sur notre territoire est en hausse de 4 % ? Il faut dire les choses telles qu’elles sont.

Nous devons aux Français un discours de vérité, celle que nous connaissons tous, celle que les représentants de l’autorité publique constatent dans leur activité quotidienne, celle que les Français veulent connaître. Oui, la violence augmente ! Oui, l’autorité publique, singulièrement celle de l’État, est affaiblie, pour ne pas dire contestée, parfois ! Oui, la délinquance gangrène les rapports sociaux, faute de sanctions effectives !

Nous avons donc besoin de l’ensemble des forces vives de ce pays, qui doivent s’engager dans la voie de la coopération, à tous les niveaux de la chaîne, depuis le renseignement, la surveillance, l’interpellation, la neutralisation, jusqu’à la sanction pénale, qui doit être certaine et effective.

Sans remettre en cause la compétence des agents, qui effectuent un travail minutieux et opérant, il est utile de donner la possibilité aux services spécialisés, notamment aux services de renseignement, d’échanger avec l’autorité judiciaire lorsque les procédures concernent les infractions terroristes.

Nous allons mieux armer, dans ce texte, la police nationale et les polices municipales, alors que, depuis cinq ans, la justice pénale a parfois été désarmée. La délinquance ne peut être maîtrisée en l’absence de sanction, de vision globale et de confiance dans le terrain.

Voilà quel a été le cri des policiers à l’automne dernier ! Leur action volontariste n’a souvent pas été suivie d’effets, l’impunité révélant un manque d’autorité de l’État.

La profession policière est par définition à risques, mais ces agents ne se sont pas engagés dans la police pour devenir des cibles, à l’image de ces hommes enfermés dans leur voiture en feu et ne pouvant se défendre. Il faut en effet que la peur change de camp !

Tous les policiers vous le diront : saisir sa crosse de pistolet, c’est le début d’un très long marathon administratif, procédural et parfois judiciaire. Pour certains, c’est même le début des ennuis.

Le texte que la commission des lois nous propose d’adopter est pertinent à plusieurs titres, notamment parce qu’il répond à cette exigence nouvelle d’implication généralisée des forces vives de notre pays.

Ce texte répond à une demande des personnels opérationnels qui, aux termes de la rédaction initiale du texte proposé par le Gouvernement, craignaient de ne pas être suffisamment sécurisés juridiquement pour agir : le cadre proposé est plus lisible et répond aux exigences d’absolue nécessité et de proportionnalité, auxquelles nous sommes tous fermement attachés.

Au regard de la place fondamentale que la police municipale occupe dans la sécurité de nos concitoyens, comme l’avaient, dès 2012, relevé nos collègues François Pillet et René Vandierendonck dans un rapport d’information, la commission des lois a élargi le bénéfice d’une partie des dispositions relatives à l’usage des armes aux policiers municipaux autorisés à porter une arme.

La question de l’armement n’est pas nouvelle pour la sécurité privée, mais les différents secteurs sont soumis à des régimes très divers. Certes, les principes constitutionnels s’opposent à ce que l’exercice d’une activité privée de sécurité empiète sur les prérogatives de puissance publique. Pourtant, le juge constitutionnel n’a jamais invalidé les règles qui assurent le contrôle et la solidité de la profession. C’est pourquoi permettre l’armement des agents privés de protection rapprochée uniquement dans les cas où il est rendu strictement nécessaire pour assurer la protection d’une personne exposée à des risques exceptionnels d’atteinte à sa vie est une mesure d’efficacité. La sécurité privée est en pleine mutation.

N’oublions pas que tous ces secteurs de la sécurité publique sont composés d’hommes et de femmes qui agissent avec professionnalisme au service de leurs concitoyens. Nous devons naturellement les accompagner. Là est sans doute un peu le point faible de ce texte, qui ne prévoit pas d’actions de formation supplémentaires.

Avant de conclure, je dirai un mot du « spectre des revenants ». Un grand quotidien a titré la semaine dernière en employant cette expression. Puis, les magistrats du pôle antiterroriste du parquet de Paris, auxquels je tiens à rendre un hommage particulier, n’ont cessé de la répéter.

Ce spectre n’est pas qu’un mirage lointain. Cela fait des mois que la majorité sénatoriale milite pour que ces hommes et ces femmes qui sont partis combattre les symboles de la liberté soient pris en charge à leur retour en France, afin que leur présence sur notre territoire ne soit pas une menace pour la République. L’UCLAT, l’Unité de coordination de la lutte antiterroriste, évalue à 700 le nombre de Français sur zone irako-syrienne et à 1 000 le nombre de velléitaires candidats au départ, qui risquent d’alimenter un terrorisme endogène.

Si les frontières sont aujourd’hui de plus en plus difficiles à franchir et les départs sur zone moins nombreux, une question reste très préoccupante : celle de ces mineurs que le procureur Molins assimile à de « véritables bombes à retardement ». Le présent texte ne répond que partiellement à cette problématique. Ne faudrait-il pas envisager, en complément de la prise en charge par la protection de l’enfance, une prise en charge psychiatrique de ces enfants qui n’auront bien souvent connu qu’une conception de société glorifiant la haine et des valeurs que nous bannissons ?

Enfin, pour ce qui concerne les vétérans du djihad, la difficulté de l’ensemble de la chaîne de sécurité et pénale réside dans l’évaluation du risque que représentent, désormais, les individus suivis. Il est donc judicieux de prévoir que les mesures de contrôle administratif des personnes revenant des théâtres d’opérations de groupements terroristes ne puissent être levées à l’occasion d’une poursuite judiciaire pour un autre motif que le terrorisme.

Mes chers collègues, grâce au travail précis, pertinent mené par notre collègue François Grosdidier et à son écoute, le Sénat va adopter un texte répondant pour partie à l’épreuve humaine et physique subie quotidiennement par nos forces de sécurité intérieure. Les élus du groupe Les Républicains, auquel j’appartiens, le voteront avec confiance. Toutefois, nous ne cesserons de l’affirmer : la lutte contre le terrorisme, comme la lutte contre la délinquance classique, ne peut s’entendre que dans une politique de sécurité liée à une politique pénale ferme.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

M. Jacques Bigot. Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, apparemment, le présent texte satisfait l’essentiel des membres de cet hémicycle. M. le ministre de l’intérieur se félicitera sans doute que le Gouvernement ait demandé que cette lecture commence au Sénat…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

Mis à très rude épreuve, les policiers ont incontestablement le sentiment de ne pas être entièrement soutenus et compris par la population. On ne rappelle pas assez souvent les difficultés de leur métier, les menaces dont ils font l’objet, qui pèsent sur leur vie et même sur celle des membres de leur famille. Sans doute cette situation explique-t-elle les importants mouvements qui ont eu lieu.

Mes chers collègues, souvenons-nous des débats qui ont précédé la loi du 3 juin 2016. Nous étions persuadés d’avoir atteint un équilibre, notamment grâce à la rédaction élaborée par notre rapporteur, Michel Mercier, pour répondre à la demande des forces de l’ordre au sujet de la notion de péril. En fait, il n’en était rien. Les policiers ont demandé à obtenir davantage de précisions, et ils ont exprimé la volonté que ces dernières figurent dans « leur code », à savoir le code de la sécurité intérieure. Les dispositions que nous avions adoptées relevaient, elles, du code pénal. Pour les appliquer, il fallait donc préalablement s’assurer qu’une infraction avait été commise.

Le présent texte a donc vocation à rassurer les policiers. Cela étant, je ne suis pas sûr que, juridiquement, il les rassurera toujours totalement.

Le projet de loi a également vocation à calmer l’inquiétude des forces de police quant à l’interprétation que les magistrats pourraient donner de leur rôle. On l’a clairement perçu en auditionnant les représentants des policiers : ces derniers ont l’impression que les magistrats ne comprennent pas les difficultés qu’ils éprouvent sur le terrain. À mon sens, ce sentiment n’est pas fondé, en particulier pour ce qui concerne les procureurs, les juges d’instruction et, a fortiori, les magistrats chargés de la lutte contre le terrorisme.

D’ailleurs, la question ici posée n’est pas réductible à celle du terrorisme. À Viry-Châtillon, il ne s’agissait pas de terroristes : bien sûr, des actes épouvantables ont été commis, mais ils l’ont sans doute été par de jeunes délinquants ordinaires. Le projet de loi traite donc de nombreuses formes de criminalité. Il doit préciser dans quelles conditions les policiers et, au-delà, toutes les forces de l’ordre doivent exercer leurs missions, tout en respectant les règles édictées par la Cour européenne des droits de l’homme.

Monsieur le ministre, dans l’étude d’impact, vous rappelez la jurisprudence établie par la Cour de cassation et par la Cour européenne des droits de l’homme. Or cette jurisprudence est beaucoup plus nuancée que certains le font croire.

Les notions d’« absolue nécessité » et de « proportionnalité » sont conformes à la convention européenne des droits de l’homme, ce grand texte que la France – il ne faudrait pas l’oublier – avait appelé de ses vœux. Trop souvent, on attribue à cette convention des interdictions qu’elle n’énonce pas. En particulier, vous avez rappelé que, dans son arrêt Guerdner, rendu le 17 avril 2014, la Cour européenne des droits de l’homme s’est prononcée quant à la conformité des règles établies, en la matière, par la législation française. Dans les faits, il y a donc moins de difficultés que l’on ne pense.

En parlant avec les policiers de la base, on constate que les problèmes viennent parfois des relations avec la hiérarchie. Certains soulignent que, sitôt après avoir fait usage de leur arme, ils sont confrontés aux inspections internes. Dans ce cadre, ils peuvent être placés en garde à vue, ce qui n’est pourtant pas une nécessité : il y a sans doute d’autres moyens d’enquêter.

Les policiers sont bien conscients qu’ils doivent rendre des comptes lorsqu’ils font usage de leur arme. Néanmoins – cela a été rappelé, notamment par le Conseil d’État –, à travers ce projet de loi, il est nécessaire de leur assurer une bonne formation. Cette dernière doit porter, non seulement sur le tir, mais sur les conditions dans lesquelles ils peuvent utiliser leur arme. Dans ces moments de très grand stress, qu’un précédent orateur a rappelés, on n’a pas le temps de lire et d’analyser un texte complexe. Quand on s’initie à la conduite d’un véhicule automobile, on apprend à être réactif face à des événements surprenants. Une formation similaire est nécessaire pour les membres des forces de l’ordre. Le Conseil d’État a eu raison de le rappeler.

Je suis tenté de dire que le projet de loi est un texte de clarification, mais non de changement. Il est d’ailleurs à espérer qu’une trop grande clarification n’ait pas d’effets négatifs. Reste que cette clarification était souhaitée et, à mon sens, le texte est équilibré. D’une part, il répond aux exigences de la convention européenne des droits de l’homme en faisant référence aux critères d’absolue nécessité et de proportionnalité. D’autre part, il vaut pour tous ceux qui sont conduits à utiliser des armes au nom de la République, pour la défense des personnes et des biens. Il s’agit à la fois des gendarmes, des policiers, des militaires et des douaniers.

Reste la question des policiers municipaux.

Monsieur le rapporteur, la proposition que vous avez émise à ce sujet nous satisfait. Elle vise les cas de légitime défense. De plus, elle permet d’indiquer aux policiers municipaux que nous, sénateurs, représentants des collectivités territoriales, sommes conscients qu’ils sont de plus en plus souvent appelés à épauler la police nationale dans des missions de sécurité. Je ne peux pas oublier tout ce que les policiers municipaux de Strasbourg ont fait, pendant tout le marché de Noël, pour sécuriser les lieux, aux côtés des militaires et de la police nationale.

Nous avons déposé un amendement qui a pour objet de corriger une curiosité de la législation : les policiers municipaux à qui l’on demande de sécuriser une manifestation peuvent contrôler le contenu des sacs, mais non procéder à des palpations. Or des agents de sécurité privée peuvent le faire. Voilà l’exemple d’une anomalie à laquelle il faut mettre un terme. Saisissons l’occasion que nous fournit ce texte. Il me semble que, sur ce sujet, la commission a émis ce matin un avis favorable.

Je voudrais appeler l’attention sur la difficulté juridique que soulève l’article 2, lequel a pour objet l’anonymisation.

René Vandierendonck et moi-même avions envisagé de confier au procureur de la République le soin d’accorder l’autorisation. Cette piste n’a pas été retenue par la commission ; je ne la défendrai donc pas de nouveau ce soir.

Cela étant, monsieur le ministre, vous avez raison de chercher, par voie d’amendement, à revenir au texte du Gouvernement. En effet, il faut impérativement sécuriser les procédures d’anonymisation. Certes, il est nécessaire d’assurer la protection des personnes, mais il faut également éviter qu’un dossier n’arrive un jour devant la Cour de cassation, voire devant la Cour européenne des droits de l’homme et qu’elles aboutissent à cette conclusion : la procédure n’était pas conforme.

Sur cette question comme sur les précédentes, soyons extrêmement prudents. Prenons en considération les difficultés qui peuvent survenir, non seulement pour les policiers et leur famille, mais aussi pour les magistrats et toutes les personnes en contact avec la grande délinquance – je songe non seulement au terrorisme, mais aussi à la mafia. L’ensemble de ces acteurs doivent être protégés par le biais d’une anonymisation.

Monsieur le garde des sceaux, sauf erreur de ma part, nous aborderons plus tard le sujet de la sécurisation des abords des établissements pénitentiaires. On préconise d’étendre cette action à la voie publique. Selon moi, on ne peut pas, à ce jour, demander à l’administration pénitentiaire d’assurer une sécurisation au-delà de l’emprise foncière des centres pénitentiaires.

Monsieur le président de la commission, j’ai l’occasion de vous accompagner fréquemment sur le terrain dans le cadre de la mission d’information sur le redressement de la justice. Nous avons vu combien l’administration pénitentiaire a pu être mise en difficulté dès lors que les transferts de détenus ont cessé d’être de la compétence du ministère de l’intérieur. Les personnels du ministère de l’intérieur s’en sont trouvés soulagés, mais aux dépens des agents relevant de la Chancellerie. Soyons très vigilants !

Tant que les personnels pénitentiaires ne seront pas en nombre suffisant, on ne pourra pas envisager que la sécurisation, autour des établissements pénitentiaires donnant sur la voie publique, soit assurée par des personnels relevant du ministère de la justice.

Sur de tels sujets, il faut se montrer modeste et constructif. Il faut être à l’écoute des personnels, ce qui est le rôle des parlementaires. Il faut également garder à l’esprit que, derrière les personnels, il y a la hiérarchie, et que cette dernière fait elle aussi l’objet de fortes attentes. J’ai été très sensible à cet aspect de la question.

Enfin, il faut assurer les moyens nécessaires. M. Buffet l’a rappelé, en évoquant « l’ensemble des forces vives » de la police et de la justice. À ce titre, je n’ai qu’une inquiétude : que ceux qui, aujourd’hui, viennent nous donner des leçons en nous disant « Vous n’avez pas fait assez, vous n’avez pas fait assez vite » ne pensent pas suffisamment à conserver toutes ces forces vives. Je ne perds pas une occasion de rappeler combien de magistrats ont été recrutés ces temps derniers, dans quelles proportions ont été renforcés les moyens de l’administration pénitentiaire et de la police.

Debut de section - Permalien
Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux

Eh oui !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Bigot

M. Jacques Bigot. Ces efforts sont indispensables, et il ne faudrait surtout pas y renoncer. Nous devons veiller à ce que les moyens de la République soient préservés, sinon nos lois seront vaines !

Mme Catherine Di Folco et M. Jean-Pierre Sueur applaudissent.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Roux

Je vous remercie, mesdames, messieurs les sénateurs, de vos propos unanimes visant à rendre hommage aux forces de l’ordre et au travail qu’elles mènent. M. le rapporteur et M. le rapporteur pour avis ont rappelé la situation de tension à laquelle elles sont confrontées depuis plus de deux ans, et que nous connaissons bien, en raison de la menace terroriste. On pourrait également rappeler les conditions dans lesquelles nos forces de l’ordre sont appelées à protéger notre territoire et à contrôler les flux migratoires, lesquels n’ont jamais été aussi forts depuis la Seconde Guerre mondiale. Même si des différences d’appréciation se sont ensuite fait jour au sujet du présent texte, je tenais à souligner vos propos unanimes et les remerciements que vous leur avez adressés.

Tout ce qui permet une évolution de l’usage des armes dans ce texte répond à la fois à des impératifs opérationnels et, bien entendu, au strict respect de l’État de droit dans tout ce qui le compose, non seulement notre droit interne, mais aussi les conventions internationales auxquelles nous sommes soumis.

Je salue l’esprit constructif, qui pourrait même devenir un esprit de consensus, dont bénéficie le présent texte.

Monsieur Guérini, soyez-en assuré, je ne me satisferai jamais assez que les voix du groupe du RDSE soient apportées à la majorité socialiste. En votant en ce sens, ce n’est pas la majorité gouvernementale que vous confortez, mais les policiers et les gendarmes. Nous sommes tous comptables des conditions dans lesquelles ils exercent leurs missions.

MM. Bigot, Buffet et Mercier ont souligné à juste titre que le projet de loi était nécessaire. Il permet, comme les six textes qui ont été adoptés depuis 2012, de prendre en compte un environnement en plein bouleversement, notamment quant à la nécessité d’assurer des moyens et des outils à nos services de renseignement. Il n’y a là aucune volonté d’agir dans l’émotion. Il s’agit de répondre à des problèmes qui se posent à nos forces de sécurité. Ces différents textes devront d’ailleurs certainement continuer à évoluer au cours des prochains mois et des prochaines années. Aussi, je me félicite des marques d’ouverture exprimées par tous ceux qui mènent ce travail constructif.

M. Rachline a quitté cet hémicycle. Peut-être est-il allé demander aux policiers et aux gendarmes si ce projet de loi était « un texte de com’ » ? Quoi qu’il en soit, je lui dis, par l‘intermédiaire du compte rendu, que ses interventions sur ces questions sont justes là pour faire semblant : faire semblant de s’occuper de la sécurité des Français, faire semblant de porter un regard bienveillant sur les forces de l’ordre. Quand on ne vote absolument aucun texte en matière de sécurité, je ne suis pas sûr qu’on puisse qualifier de « com’ » un projet de loi qui découle d’une concertation étroite, sur le terrain, avec les policiers et les gendarmes.

Mme Sophie Primas applaudit.

Debut de section - Permalien
Bruno Le Roux

Concernant la formation, je rappelle qu’une direction centrale de la formation et du recrutement de la police nationale a été créée ; chaque fois que les policiers participent à une séance de tir, des rappels sont formulés quant à l’usage des armes, quant à la manière dont nos textes les régissent. L’article 1er nous permettra sans doute d’échanger sur l’ensemble de ces sujets.

Mesdames, messieurs les sénateurs, à ce stade, je tiens à vous remercier de nouveau de l’esprit dans lequel ce débat s’engage. Je salue le travail préalable mené par la commission. M. le garde des sceaux et moi-même en sommes persuadés : le Gouvernement a fait un bon choix en commençant l’étude de ce texte nécessaire avec la Haute Assemblée !

M. Jacques Bigot applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La discussion générale est close.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente-cinq.