Intervention de Roland Courteau

Réunion du 24 janvier 2017 à 14h15
Autoconsommation d'électricité et énergies renouvelables — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est assez rare que les projets de ratification d’ordonnances soient inscrits à l’ordre du jour et examinés. Nous ne pouvons que nous féliciter que ce soit le cas aujourd'hui.

Cette ratification par le Parlement permettra de sécuriser le dispositif juridique mis en place par les ordonnances, lesquelles ont pour objet de dynamiser plus encore la transition énergétique. Nous sommes donc au cœur de la transition énergétique, cette transition qui constitue l’un des chantiers législatifs majeurs de ces dernières années face au dérèglement climatique et qui a fait de la France un pays en pointe sur le plan européen et mondial dans ce domaine. Cela a contribué au succès de la COP21 lors du sommet de Paris.

Si ce projet de loi permet de ratifier notamment les deux ordonnances, il contient aussi de nombreuses dispositions relatives aux réseaux d’électricité et de gaz, ainsi qu’aux énergies renouvelables, ce qui conforte la mise en œuvre de la transition énergétique.

Cela étant, la ratification de l’ordonnance de juillet 2016 sur l’autoconsommation répond à de fortes attentes sociétales en ce domaine, car le fait de produire sa propre énergie est perçu par le citoyen de manière positive pour des raisons d’indépendance et de contribution citoyenne. De plus, la baisse du prix des équipements, notamment des panneaux photovoltaïques, facilitera le choix de l’autoconsommation.

Selon le Syndicat des énergies renouvelables, les panneaux photovoltaïques ont enregistré une baisse de 80 % entre 2009 et 2015. Cette diminution des coûts devrait se poursuivre. Cela dit, le choix de l’autoconsommation à partir d’énergies renouvelables pourrait être, par ailleurs, favorisé par la hausse de la facture d’électricité.

Il n’en demeure pas moins que ce choix, qui reste relativement coûteux, doit être encouragé. C’est l’objet de cette première ordonnance, et c’est un signal fort pour faciliter le développement de l’autoconsommation. Il était donc devenu nécessaire à la fois d’encourager le choix de l’autoconsommation et d’anticiper son développement, tout en fixant un cadre pour bien la maîtriser.

En effet, plusieurs risques peuvent être liés à un développement incontrôlé, comme le souligne à juste titre un rapport issu de l’Assemblée nationale. Par exemple, l’émergence de réseaux de distribution « sauvages », dissimulés derrière un point d’alimentation, un transfert de charges des autoconsommateurs vers le reste des utilisateurs ou enfin l’apparition de difficultés non négligeables pour le réseau de transport d’électricité.

La deuxième ordonnance vise à simplifier le droit existant et à permettre une meilleure intégration des énergies renouvelables dans le marché électrique, notamment en supprimant le plafond législatif de 12 mégawatts applicable aux installations sur obligation d’achat.

À cette meilleure intégration au système électrique peut aussi s’ajouter la mise en œuvre, pour les appels d’offres, d’une procédure de dialogue concurrentiel, procédure plus souple, donc plus adaptée à certaines filières. On peut aussi évoquer la suppression de l’appel à priorité par Réseau de transport d’électricité, ou RTE, des centrales à charbon.

En peut enfin se féliciter de la création d’une priorité d’appel pour les énergies renouvelables dans les zones non interconnectées : ce peut être un plus pour le développement des centrales à biomasse et des énergies renouvelables.

Concernant l’interdiction, à l’article 2, du cumul de la valorisation des garanties d’origine avec les dispositifs de soutiens publics, comme l’obligation d’achat ou le complément de rémunération, il nous paraît normal d’éviter que le consommateur ne paye plusieurs fois l’origine renouvelable de l’électricité.

L’autre avantage de cette interdiction était, nous semble-t-il, d’encourager le développement de nouvelles capacités renouvelables, avec pour objectif d’une meilleure intégration au marché. Cependant, par rapport au texte initial, nous craignions que cette interdiction ne se traduise par la disparition de toute traçabilité, dans la mesure où l’on ne pourrait plus faire mention de la garantie d’origine. La nouvelle rédaction va dans le bon sens en interdisant les cumuls, tout en préservant la traçabilité de l’électricité verte.

Ainsi, l’État, et non plus les producteurs, détiendra le bénéfice des garanties d’origine pour l’électricité produite sous mécanisme de soutien. Il pourra ensuite mettre ces garanties d’origine aux enchères auprès des fournisseurs d’énergie, qui pourront dès lors proposer des offres vertes aux consommateurs. Voilà qui valorisera la traçabilité tout en allégeant la facture des consommateurs, puisque les recettes tirées des enchères réduiront les charges de service public de l’électricité.

Au sein de la commission, un amendement est venu modifier l’article 2 pour permettre à l’État une mise aux enchères partielle des garanties d’origine issues de la production renouvelable soutenue par l’obligation d’achat ou par le complément de rémunération.

Certes, cet amendement vise à apporter une certaine flexibilité au dispositif, mais celui-ci ne répond plus à la demande de traçabilité totale souhaitée. Cela risquerait de compromettre l’équilibre global tel qu’il a été intensément recherché. Nous restons donc sceptiques sur l’opportunité d’une telle modification.

L’article 3 permet au tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, le TURPE, de couvrir une partie des coûts de raccordement aux réseaux de distribution des producteurs d’électricité à partir d’énergies renouvelables.

Cette prise en charge partielle, appelée « réfaction tarifaire », va tout à fait dans le bon sens, car les coûts de raccordement constituent souvent un obstacle à l’implantation d’installations en énergies renouvelables, notamment en milieu rural, comme Mme la secrétaire d’État l’a souligné.

Cela dit, le reste à charge qui sera supérieur à 50 % du coût de raccordement devrait normalement inciter les producteurs à localiser, de façon optimale, les installations produisant des énergies renouvelables.

À ceux qui s’inquiéteraient des conséquences sur le TURPE de cet élargissement de la « réfaction tarifaire », rappelons que son effet sera négligeable, puisque la réfaction sera compensée par une hausse du tarif de seulement 0, 65 %, soit environ 80 à 90 millions d’euros pour un TURPE de 13 milliards d’euros.

J’en viens aux énergies renouvelables en mer, lesquelles mobilisent des investissements importants. Il était donc indispensable de prévoir un régime particulier pour les indemnités versées aux producteurs en cas de délais non respectés pour la mise à disposition des ouvrages de raccordement. C’est ce que prévoit la nouvelle rédaction du texte, qui distingue deux hypothèses.

Soit la cause du retard n’est pas imputable au gestionnaire de réseau et, dans ce cas, les indemnités ne sont pas à la charge de celui-ci et seront couvertes par le TURPE dans la limite d’un plafond fixé par décret.

Soit la cause est imputable au gestionnaire de réseau et, dans ce cas, le TURPE ne couvrira qu’une partie des indemnités.

Je salue d’autant plus ces deux dispositions que nous aurons prochainement au large des côtes audoises deux fermes-pilotes d’éoliennes. Elles seront plus précisément installées au large de Gruissan-Port-la-Nouvelle et de Leucate. Je remercie le Gouvernement de ce choix pertinent !

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