Intervention de Franck Montaugé

Réunion du 24 janvier 2017 à 14h15
Autoconsommation d'électricité et énergies renouvelables — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Franck MontaugéFranck Montaugé :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’occasion de la discussion de ce projet de loi, je voudrais mettre en perspective le chemin parcouru depuis la publication de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte adoptée en juillet 2015, mais aussi appeler votre attention sur le devenir du principe de la péréquation tarifaire.

Sur le plan national, depuis juillet 2015, la stratégie nationale bas carbone a constitué la base de la contribution française à l’accord de Paris, qui a été un succès pour notre pays. Les programmations pluriannuelles de l’énergie, ou PPE, ont été publiées. La PPE de la métropole a été accompagnée de la stratégie de développement de la mobilité propre, dont on mesure très concrètement, en ce moment même, l’intérêt et l’enjeu de santé publique.

Sur le plan local, les territoires se sont fortement engagés dans la transition énergétique, en se saisissant du dispositif des territoires à énergie positive pour la croissance verte, ou TEPCV, qui leur a été proposé. Je le vis très concrètement dans mon agglomération, dont la partie rurale est importante : c’est un succès et un soutien considérable pour les maires, qu’il s’agisse de rénovation énergétique de bâtiments publics, de modernisation de l’éclairage public, de mobilité propre, de mise en œuvre de plateformes de rénovation énergétique dont profiteront les particuliers pour leur habitat, ou de soutien à la montée en puissance des productions d’énergies renouvelables.

Par sa contribution, le fonds de financement de la transition énergétique, passé de 250 millions d’euros en 2015 à 750 millions d’euros en 2017, joue un rôle décisif dans les choix que font les élus. Il contribuera dans le temps à alléger les budgets de fonctionnement de nos collectivités.

De la même manière, les certificats d’économie d’énergie, les chèques énergie, désormais ouverts au bois, au GPL et au fioul, le crédit d’impôt transition énergétique engagent la France et ses territoires dans la transition énergétique et profiteront aux foyers français les plus modestes.

Je me réjouis de tous ces efforts engagés par le Gouvernement. Ils font franchir à la France une étape fondamentale dans la transition énergétique, en adéquation avec les engagements de la COP21.

L’autoconsommation participe également de ce volontarisme en matière de transition énergétique, et je m’en félicite. Toutefois, en même temps que nous avançons dans ce domaine, nous sommes obligés de réglementer pour faire face à des situations complètement nouvelles. Dans ce contexte, la question du devenir du principe de péréquation tarifaire ne peut être éludée.

Le développement des énergies renouvelables et des systèmes d’autoconsommation, amorce la transition de notre modèle national de gestion de l’énergie électrique. Progressivement, nous allons nous éloigner du modèle centralisé, vertical, conçu dans l’après-guerre, pour nous approcher, plus ou moins vite suivant les progrès techniques – en matière de stockage en particulier –, d’un système décentralisé.

Ce mouvement inéluctable nous oblige à penser sur des bases nouvelles la question de la péréquation tarifaire, qui est, on le sait, une forme de traduction de l’égalité territoriale.

Même si elle est consentie de manière marginale, j’en conviens, l’exonération de contribution au service public de l’électricité, la CSPE, des petits producteurs – c’est-à-dire dont la production est inférieure à un mégawattheure – ne génère-t-elle pas de la distorsion au regard du principe de péréquation ? Plus fondamentalement, si les modes de production autonome se développent à grande échelle, comment éviter la disparité des coûts de l’énergie ? Comment garantir le recours assurantiel au réseau classique ?

Dans une note récente intitulée Énergie centralisée ou décentralisée ?, France Stratégie remarque que la logique du tout-décentralisé « voudrait que les investissements soient majoritairement portés par les collectivités locales en tant que futures gestionnaires et responsables de la sécurité d’approvisionnement sur leur territoire ».

Dans l’hypothèse intermédiaire de coexistence du système centralisé actuel avec des boucles locales, France Stratégie note que « conserver l’égalité de traitement entre tous les consommateurs suppose la mise en place d’une tarification adaptée, qui donne moins de poids au kilowattheure consommé et davantage à la puissance mise à disposition par le réseau ». L’institut précise en outre que, « pour ne susciter au niveau local que des solutions pertinentes économiquement, il est […] impératif que les tarifs reflètent bien les coûts ».

Quand on sait l’enjeu que représente pour notre modèle républicain la péréquation tarifaire de l’électricité et les difficultés que rencontrent aujourd’hui nos collectivités pour le financement du très haut débit, par exemple, on se dit que ce type de sujet mériterait une réflexion technico-économique approfondie.

Loin de moi l’idée de remettre en question le développement des systèmes locaux de production, bien au contraire ; je voterai d’ailleurs le présent projet de loi. Je voulais seulement appeler votre attention, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, sur la nécessité de penser la réorganisation du système électrique, qui émerge sous nos yeux et qui connaît un véritable changement de paradigme.

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