La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme impose que tout usage d’une arme à feu par les forces de sécurité réponde aux conditions de stricte proportionnalité et d’absolue nécessité.
Ces notions ont été reprises par la jurisprudence française, ainsi que par des textes réglementaires. Elles n’ont cependant pas de valeur législative. Leur inscription dans la loi vient donc renforcer le cadre juridique national des armes, en conformité avec la CEDH. En ce sens, le présent projet de loi constitue une avancée importante, que nous saluons.
Cependant, la formulation de l’article 1er laisse craindre une interprétation trop extensive. Ajouté aux modifications opérées par la commission, cela nous conduit à relever des risques de dérives.
En particulier, les notions d’absolue nécessité et de stricte proportionnalité, dont les contours sont pour le moins flous, doivent être précisées, car on peut craindre qu’elles n’introduisent paradoxalement une insécurité juridique pour les forces de l’ordre. Selon les cas de figure, celles-ci hésiteront à tirer en se demandant si elles se trouvent dans un cadre permettant l’usage des armes, ou au contraire le feront à tort en pensant que la loi les y autorise.
C’est pourquoi nous proposons, comme le recommande notamment l’organisation ACAT, Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, que les armes ne soient utilisées qu’en ultime recours, seulement lorsque des mesures moins extrêmes sont insuffisantes, conformément à la formulation des Nations unies et à l’article 2 de la CEDH, lequel n’admet des exceptions au droit à la vie que si le recours à la force est rendu absolument nécessaire.
Par ailleurs, nous proposons que les forces de l’ordre ne recourent intentionnellement à l’usage létal d’une arme que si c’est absolument inévitable pour protéger des vies humaines.
Lorsqu’elles n’ont pas d’autres choix que de faire usage d’une arme à feu, elles s’efforceront, en toutes circonstances, de viser les zones non vitales du corps de la personne qu’elles cherchent à appréhender. Certains pays, tels que l’Espagne, imposent déjà qu’un tir, permis en tout dernier recours, ne soit effectué que dans des parties non vitales du corps du fugitif.