Intervention de François Grosdidier

Réunion du 24 janvier 2017 à 21h30
Sécurité publique — Articles additionnels après l'article 10

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier, rapporteur :

Je comprends les motivations qui sous-tendent cet amendement, car je suis moi-même maire d’une ville qui compte un certain nombre de personnes fichées S. Je connais même dans ma commune un assigné à résidence.

Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un débat récurrent que nous avons eu à plusieurs reprises. À chaque fois, nous avons repoussé cette idée de partage systématique des fiches S, objet de tous les fantasmes…

Les fiches S sont des documents très sommaires et synthétiques et ne contiennent aucun détail. Elles renvoient à des codes délivrant un mode d’emploi. Elles donnent juste aux forces de l’ordre une conduite à tenir, codifiée S02, S03, S04, etc. Bref, elles recensent quinze types de conduites différentes à tenir, plusieurs d’entre elles, d’ailleurs, insistant sur la nécessité de faire preuve d’une absolue discrétion pour ne pas alerter la personne fichée S.

Il ne me paraît donc pas pertinent de vouloir transmettre systématiquement les fiches S aux 36 000 maires de France, lesquels n’ont d’ailleurs pas tous la même pratique de l’information partagée dans le domaine de la sécurité. Dans certaines villes, les maires sont en relation constante avec le procureur de la République, le préfet ou le renseignement territorial. J’ai, pour ma part, des rapports très réguliers avec eux sans que cela ne transpire jamais auprès de mes collaborateurs, qui ne savent strictement que ce qu’ils doivent savoir quand il s’agit de la police municipale. Il peut arriver que nous allions plus loin dans le cadre parfaitement institutionnalisé et bien borné d’un groupe de traitement local de la délinquance où nous discutons, sous la présidence du procureur, d’informations nominatives sur des prédélinquants, des délinquants ou des post-délinquants. Dans ce cas, le secret est partagé et demeure absolu.

Il n’y a que dans ce cadre-là que l’on peut imaginer l’échange de ce genre d’informations, qui ne peuvent certainement pas faire l’objet d’un partage systématique. Imaginez un instant qu’une fiche S traîne dans le bureau du secrétaire du maire où passe parfois l’ensemble des membres du conseil municipal !

L’idée des auteurs de cet amendement peut paraître séduisante. Il convient effectivement, je le dis devant les membres du Gouvernement, qui travaillent d’ailleurs avec l’Association des maires de France, de renforcer encore davantage la collaboration entre les maires, qui connaissent leur population et sont responsables de la sécurité dans leurs communes, et les autorités de l’État. Néanmoins, je ne suis pas favorable à une transmission systématique de ce type d’informations peu utiles au maire. Une telle pratique pourrait même compromettre et rendre inopérant le travail des services de sécurité, voire être source d’insécurité pour eux. C’est du moins le sentiment de ces services, que j’ai pu consulter.

Voilà pourquoi la commission est défavorable à cet amendement, même si elle se prononce très favorablement pour un travail encore plus approfondi des maires avec les autorités de l’État. Je sais que c’est un objectif partagé par les membres du Gouvernement et par l’AMF.

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